lundi 19 mai 2014

DOSSIER - Hôpital du Cinquantenaire (RDC)

Kinshasa, le 19 Mai 2014



(Téléchargez l'intégralité de ce document en format pdf en cliquant ici)

Historique

C'est soixante ans après la pose de la première pierre que ce complexe hospitalier est inauguré ! L'histoire de cet hôpital-légende, symbole et marqueur des régimes politiques successifs est mouvementée.

En 1954, l’année de la pose de la première pierre. Le Congo est encore sous colonisation belge. A l'indépendance en 1960, les travaux s’enlisent et inexorablement voués à l’abandon.

Le président Mobutu reprend le chantier mais sous une autre option à cause de la densité en nombre de lits de cet hôpital ; 500 lits, c’est l’équivalent de la capacité cumulée de tous les hôpitaux périphériques réunis dans la ville de Kinshasa.

Par souci d’hygiène publique et de financement ; Mobutu décide prioritairement de la réhabilitation des hôpitaux existants et tous les centres de santé dans la ville de Kinshasa y compris l’assainissement des bassins versants en outre le curage des égouts. 

A cet effet , les accords de coopération sont signés : USA + la Belgique (Hôpital Maman Yemo) , Belgique (Hôpital de Ngaliema , Centres Mère-Enfant , Hôpital Roi Baudouin) , Chine (Hôpital de Kintambo) , Danemark +France( Hôpital kinois) ; cette option permet en termes de planification , programmation et implantation des équipements socio-sanitaires dans la ville de Kinshasa , un meilleur accès aux soins de santé de qualité à la population .

C’est ainsi qu’une fois à la fois le volet prévention , accès aux soins de santé et salubrité réglé à Kinshasa , un partenariat « Public-Privé » est mis en place dans le cadre de « grands travaux » d’infrastructures , toutes les côtes confondues (Stade Kamanyola , Palais du Peuple , Centre de cardiologie…..)

En dépit des accords signés avec Accor, Ibis, Fort-francheteau , Compagnie Générale d’Automatisme « CGA » , Weppière , Dumez , Safricas , Electrobel ; sous l’empire de la logique économique , « l’hôpital » ne trouve pas preneur !

C’est la rançon de l’obsession que nous avons à vouloir résoudre tout de suite à la fois tous les problèmes liés à l’immensité de notre pays, en mettant en place de gros équipements, tellement immenses mais hélas souvent à la limite de la rentabilité, donc peu compatibles avec toute logique économique !

L’atteste davantage par ailleurs, l’ampleur donnée aujourd’hui au Boulevard du 30 juin ; qui paradoxalement ne permet pas de diminuer le coût de transport dans la ville de Kinshasa mais au contraire à grever davantage le budget par le coût du nombre à la hausse des accidents !

Faute d’accords de prêts ou des dons, Mobutu décide de la reprise des travaux de « l’hôpital » sur fonds propres en confiant la maîtrise d’œuvre au cabinet Olivier-Clément Cacoub et la réalisation au Service Technique de la Présidence mais change de destination ; « l’hôpital » devient « Hôtel du Parti ».



Plus tard, le gouvernement Kengo estimant que la Présidence n’a pas vocation à se constituer des apports et moins encore à gérer le patrimoine immobiliers du domaine public ou privé de l’Etat ; 862 unités de logement de la Présidence et l’ « l’hôpital » sont transférés au gouvernement .

A la différence des unités de logement qui sont désaffectées et aliénées ; « l’hôpital » malheureusement finit par être mis au nombre de victimes glorieuses de la rigueur ! 

M’zee Kabila à son tour veut créer trois pôles hospitaliers : « l’hôpital » en face du camp Kokolo baptisé « hôpital des anciens combattants » en mémoire des victimes des guerres, hôpital Maman Yemo et une polyclinique ultramoderne au plateau de Batéké.

La volonté politique autour de ces équipements socio-sanitaires est telle que la délégation envoyée la veille au plateau de Bateke est reçue en audience par M’zee Kabila« àl’hôtel du gouvernement »le mardi 16 janvier 2001 à 10 heures avant le départ à Yaoundé au sommet de chefs d’Etats d’Afrique et de France; deux heures plus tard , M’zee est exécuté , scellant ainsi encore une fois le destin de cet hôpital-légende .

Le samedi 02 mai 2009, « le président Kabila » dans le cadre des « cinq chantiers » et de la « révolution de la modernité » relance les travaux pour un délai initial de trois ans prolongé d’une manière inexpliquée d’un délai supplémentaire de deux ans !

Le samedi 22 mars 2014, l’hôpital dit « du cinquantenaire » de Kinshasa est enfin inauguré et présentécomme le plus grand cadeau au peuple congolais depuis l’Indépendance !

Base des travaux et évaluation

Après moult rebondissements étalés sur six décennies et deux ans supplémentaires avant la fin des travaux, les vrais corps d’état en tant que composants principaux d’ouvraison pour cet établissement hospitalier sont constitués essentiellement de second œuvre, parachèvements, équipements techniques et spécifiques ainsi que des VRD, jardins et abords ; représentant 57 % pour l’ensemble de travaux neufs.

Compte tenu des craintes sur la stabilité de cet édifice, les études géotechniques confiées au Bureau d’Etudes Weppiere en 1973, confirment la fiabilité du mode de construction et cela est consolidé ensuite par une enceinte de pieux battus comme fondations aux murs rideaux réalisés par l’Entreprise Dumez en 1978.

En définitive et ce qu’il y a lieu de comprendre dans l’évaluation du coût de cet hôpital, c’est que tout financement mis en place à de différentes époques n’a comme objectif non pas de construire un nouvel établissement hospitalier mais en revanche d‘achever un ouvrage immobilier existant dans les 43 % de son coût d’objectif.


Statistiques et chiffres clés – 500 lits – 40.000 M2 : Implications

Démarrer un hôpital de 500 lits avec un cinquième des personnels médicaux et non médicaux est une sérieuse indication sur la frilosité du gestionnaire Padiyath HealthCare quant au taux de remplissage en phase d’exploitation ; dans ce contexte, l’objectif de 40 000 admissions, 150 000 consultations, 80 000 accueils aux urgences et autres services et 3 000 naissances par AN peut-il être atteint, rien n’est moins sûr !

Déséquilibre

Les statistiques ci-dessus rendent aléatoire le fonctionnement d’un hôpital comptant 536 employés congolais et étrangers qui coûtera 24 millions de dollars pour la première année , 26 millions pour la deuxième année et à partir de la troisième 27 millions .

Sur les dix premières années, le gouvernement apporte environ 19 millions de dollars et le groupe indien 60 000 millions. Au terme de la décennie, l’hôpital est présumé atteindre l’équilibre grâce aux recettes des soins aux VIP ; les plus démunis étant pris en charge par l’Etat dans un pays où seulement un tiers de la population vit avec plus de 1.5 dollars par jour et qu’en plus la loi sur la « Santé universelle » n’est même pas encore en place !

Le fait qu’au terme d’un appel d’offres international pour la gestion de l’hôpital, que trois firmes étrangères (allemande, espagnole, sud-africaine) et une entreprise locales décident de décliner l’offre, constitue à lui seul un fait majeur suffisant pour conforter les craintes quant aux équilibres de gestion de cet investissement colossal de 100 000 dollars.



Un non-marché organisé

Les articulations de la procédure mise en place pour l’achèvement de cet établissement hospitalier sont si complexes et tellement opaques que cela exclut toute notion de marché, troc et même pas de la brocante ; à juste titre par ailleurs, dès lors que l’entreprise chinoise Sinohydro II travaillant par rapport à son objet, il n’y a pas marché, principe applicable de jure ou de facto en matière des marchés publics ou privés. 

En outre, l’Agence Congolaise de Grands Travaux (ACGT) présentée comme ayant qualité de Maître d’Ouvrage Délégué et par conséquent disposant dans ses attributions les « finances » n’est au fait malheureusement qu’une simple « boîte aux lettres » dépourvue de tout pouvoir d’autorité adjudicatrice ! 

Par voie des conséquences, l’on constate du matériel hospitalier discount, des économies occultes, prolongation de délai sans contrepartie, absence des garanties diverses, assurances et réassurances !

Coûts

Sachant que les frais de gestion hors charges ne correspondent parfois qu’à 25 % du coût global de l’ouvrage sur la durée de vie ou qu’une grande partie des coûts de maintenance et d’exploitation dépendent en majeure partie de l’attention portée à la phase de maîtrise d’œuvre et de la réalisation ; au regard des disfonctionnements ci-dessus notés , il apparaît clairement que cet hôpital risque d’être un « mort-né »tant il est englouti à la naissance dans les hautes herbes de l’incurie des dirigeants congolais.

Si l’on considère un hôpital général sur une base moyenne de 40 000 M2 , le coût moyen de construction dans la zone « Euro » est de 2770 dollars / M2 , une base proche celle de l’hôpital du cinquantenaire à 2495 dollars / M2 alors que pour ce dernier l’ouvrage ne comporte que la phase d’achèvement correspondant à 57 % du coût d’objectif ; ainsi donc, le coût réel au M2 applicable à ces travaux doit être de 1422 et non 2495 dollars / M2 , ce qui établit pour l’hôpital du cinquantenaire en fin d’entreprise un investissement de 41 000 000 au lieu de 72 000 000 de dollars américains tel qu’annoncé par le gouvernement le samedi 22 mars 2014 .



Constats

Toute notion de marché a comme base « un transfert de propriété » entre parties, ledit transfert étant un tout quel qu’en soit l’objet, en ce qu’à l’occurrence l’on ne peut parler d’un hôpital sans fluides médicaux ou autres équipements spécifiques et techniques.

Les travaux repris en 2009, qui durent près de trois ans, puis deux ans en phase d’équipements et de recrutement ; ce retard, constitue un énorme défaut d’exécution hélas enjambé allégrement par le gouvernent congolais d’une manière inexpliquée et absolument inédite. 

Le désordre d’une telle nature ne peut être que d’ordre structurel et atteste davantage, de l’absence délibérée de planning et de la mise à l’écart de tous les organes de contrôle à caractère technique ou normatif !

Pour le surplus, dans un tel climat de chaos organique où l’Etat est le principal souscripteur, il coule de source que l’on trouve dans cet hôpital rien que du matériel de premier prix tant il saute aux yeux que le scanner, l’imagerie par résonnance magnétique(IRM), la vidéosurveillance pour ne citer que ceux-là, ne sont pas de la dernière génération !

Le plus révoltant dans ce registre, c’est de constater qu’un vieil hôpital réhabilité coûte aussi cher qu’un hôpital neuf en zone « Euro » soumise aux normes sismiques et énergétiques sous garantie des assureurs et réassureurs. 

Un non-marché ayant comme conséquence le transfert des risques dans un seul camp , comment alors expliquer que les sauveurs aujourd’hui de la RDcongo aient déployé tant d’efforts dans le cadre des contrats chinois pour un seul et unique résultat , le transfert de tous les risques liés à cet hôpital rien que dans le camp congolais tranchant ainsi l’option d’une éternelle dépendance du Congo vis-à-vis de la Chine ; c’est détruire le pays avec ses propres moyens au développement .

Que trois firmes étrangères et une entreprise locale refusent de gérer cet hôpital, c’est justement parce qu’effrayées par l’absence d’attention portée à la phase de maîtrise d’œuvre et réalisation ; cela devrait sonner comme un avertissement, un boulet et en même temps un marqueur pour ce monstre financier.

L’on ne saurait se prévaloir de l’avis de non objet émis sur la seule et unique offre de la société indienne en ce que le dit-avis est entaché en amont d’un défaut d’estimation interne propre à la Direction Générale de Contrôle des Marchés Publics (DGCMP).

En définitive et en tout état de cause, au-delà de nos appartenances politiques et opinions certes divergentes ; une question demeure et subsistera toujours, celle de la justification de 40 000 000 dollars américains !

Conclusion

Encore une fois , c’est la même constante , c’est la même logique , celle de « cinq chantiers » et de la « révolution de lamodernité » consistant à construire aveuglément , beaucoup de travaux à la fois , construire mal , s’en mettre plein les poches , aussi longtemps que possible , quitte à tricher stupidement aux élections , modifier la constitution ; utiliser la force jusqu’aux assassinats pour neutraliser les adversaires , entretenir la corruption , l’ignorance et la « sécurité » par l’insécurité , peu importe le prix humain :

SEUL COMPTE, L’ENRICHISSEMENT SUR LE DOS DU PEUPLE CONGOLAIS !
_________________________
Jacques Womombe Mfumbe
Patriote , résistant
Gombe/Kinshasa

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire