mardi 21 décembre 2010

RDC : Bruit des bottes à l’Est, le CNDP recrute

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Bosco Ntaganda - Le général Bosco Ntaganda, successeur de Laurent Nkunda à la tête des rebelles congolais, le 11 janvier 2009 à Kabati
Un nouveau rapport de Human Rights Watch (HRW) laisse planer le doute sur la volonté réelle du CNDP à adhérer au processus de paix lancé depuis la signature de l’accord de Goma. Pour HRW, le CNDP recrute, particulièrement des enfants, comme ce fut le cas il y a quelques années en Ituri. Au centre des opérations, le général Bosco Ntaganda, aujourd’hui intégré dans les FARDC, mais visé par un mandat d’arrêt de la CPI pour des crimes de guerre commis entre 2002 et 2003 aux côtés de Thomas Lubanga.

Le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) continue à entretenir le suspense. Il y a quelques jours, sa branche politique annonçait avec pompe son adhésion à l’Alliance pour la majorité présidentielle (AMP). Très vite, l’on s’est interrogé sur l’avenir de sa branche militaire qui garderait toujours, selon des sources concordantes, le contrôle d’une bonne partie de ses anciennes positions de l’Est de la République.

En effet, entre les deux branches du CNDP, des divergences de vue sont de plus en plus perceptibles. La bipolarité n’est pas que géographique, elle est également sur le plan de visions et perspectives. Bref, l’avenir de l’ex-mouvement rebelle ne se décline pas de la même manière. L’aile politique se concentre à Kinshasa tandis que la branche armée prend pied à Goma. Or, c’est dans le chef-lieu de la province du Nord-Kivu que se retrouvent les anciens galonnés du CNDP, aujourd’hui injectés dans les Forces armées de la RDC (FARDC).

Le mystère CNDP demeure donc entier. Tout se passe comme si l’adhésion du CNDP à l’AMP n’aura été que de la poudre aux yeux des sceptiques. D’aucuns y ont vu une digression pour détourner l’opinion de l’agenda que se prépare à mettre en œuvre l’ex-mouvement rebelle, dont l’aile militaire reste encore régentée par le général Bosco Ntaganda. Celui-là même que la Cour pénale internationale (CPI) continue à réclamer, mais que Kinshasa refuse de livrer pour des raisons qui lui sont propres.

Bosco Ntaganda est toujours en liberté dans son bastion de l’Est par la volonté de Kinshasa. Et il garde intacte non seulement sa puissance de feu mais encore, sa capacité de nuisance. Pour la division Afrique de l’Ong internationale Human Rights Watch (HRW), c’est une preuve que le CNPD évolue à contre-courant de ses déclarations. C’est le résultat d’une enquête menée dans la partie Est de la RDC et qui a abouti à des conclusions qui chargent davantage l’ex-mouvement rebelle.

Selon HRW, le recrutement de guérilleros, y compris des enfants, continue dans l’Est de la RDC. Les FDLR venus du Rwanda et les milices locales Maï-Maï sont indexées de même que les unités « intégrées » du CNDP après l’accord de paix en 2009.

« Les groupes armés dans l’Est de la RD Congo viennent chercher des jeunes dans les écoles, les maisons ou les champs et les forcent à combattre. Le gouvernement congolais devrait de toute urgence faire cesser ces enrôlements et traduire les responsables en justice », note, dans ce rapport présenté le lundi 20 décembre, Anneke Van Woudenberg, chercheuse senior auprès de la division Afrique à Human Rights Watch. Selon elle, des officiers de l’armée congolaise menant des actions autonomes ainsi que divers groupes armés dans l’Est de la RDC enrôlent et entraînent de force des centaines de jeunes hommes et de garçons dans le cadre de nouveaux efforts visant à gonfler leurs rangs. Cette vague de recrutement militaire commencée autour du mois de septembre 2010, relève HRW, pourrait augurer d’un éventuel effondrement du processus de paix dans l’est de la RD Congo.

BOSCO NTAGANDA, LA CLE DE L’ENIGME

HRW a réuni de nombreux témoignages qui attestent de l’implication du général Bosco Ntaganda et de certains officiers acquis à sa cause, parmi lesquels le lieutenant-colonel Innocent Zimurinda et le colonel Baudouin Ngaruye, dans la nouvelle vague d’enrôlement forcé dans les provinces du Nord et Sud-Kivu. Anneke Van Woudenberg s’en est indignée: « Il est choquant qu’un individu recherché par la CPI puisse continuer à commettre exactement le même genre de crimes dont il est accusé ». En effet, Bosco Ntaganda est poursuivi pour enrôlement d’enfants dans le district de l’Ituri, charge pour laquelle son ex-compagnon d’armes Thomas Lubanga Diyilo comparaît devant la CPI depuis 2006.

Il devient de plus en plus clair que la raison principale de la réorganisation militaire du CNDP reste sans nul doute le mandat de la CPI qui pèse sur Bosco Ntaganda. Kinshasa a choisi de le protéger. En faisant cela, ce fusible qui garantit non seulement le maintien de la paix à l’Est mais surtout peut contenir tout mouvement insurrectionnel dans le rang du CNDP. Jusque là cela a marché. Mais il semble que les pressions sont telles que les autorités congolaises seraient prêtes à lâcher du lest.
SIGNE DE DIVORCE

Bosco Ntaganda ne serait plus cette monnaie d’échange pour faire la paix à l’Est. Car, malgré l’accord de Goma, la paix reste toujours virtuelle à l’Est. Outre des éléments Maï-Maï et FDRL, plusieurs enquêtes menées dans cette partie de la RDC ont particulièrement chargé des unités FARDC autrefois opérant sous l’étiquette du CNDP.

HRW a déterminé que l’ancien chef du CNDP chargé aujourd’hui de faciliter l’intégration des anciens rebelles dans les forces loyalistes, serait parmi les « instigateurs de ce recrutement contraint ». Selon les enquêteurs, « son rôle d’intermédiaire entre l’armée et l’ex-rébellion lui servirait de couverture pour dissimuler sa véritable attribution : il dirigerait une chaîne de commandement parallèle au sein des Forces armées de RDC et serait le numéro deux des opérations menées depuis 2009 par l’armée contre les rebelles FDLR dans la région du Kivu ».

HRW appelle le gouvernement congolais à « mettre un terme » à ces recrutements et à « arrêter Ntaganda immédiatement, au lieu de se réfugier derrière le prétexte que cet homme serait indispensable au processus de paix ».

Cette évolution de la situation porte de l’eau au moulin de ceux qui pensent que le rapprochement entre l’AMP et la branche politique du CNDP aura été une erreur pour la famille présidentielle et un passif lourd des conséquences pour le chef de l’Etat, Joseph Kabila.

Le Potentiel
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