mardi 20 novembre 2012

«Les faiseurs de rois» sont toujours aux commandes !



« Un peuple sans mémoire ne peut pas être un peuple libre » D. Mitterrand

Comme « les faiseurs de rois », nous ne devrions pas être distraits. Le capitalisme constituant la matrice organisationnelle des politiques occidentales de gauche ou de droite est entré dans sa phase sénile.

Cette sénilité semble être portée par un désir permanent de rajeunissement. Le monde devenant de plus en plus polycentré et « les pays émergés » se regroupant de plus en plus, « les capitalistes séniles » espèrent se rajeunir en perpétuant leur pillage de l’Afrique avec l’aide des hommes et femmes liges de ce continent.

Ils jouent beaucoup sur notre ignorance de l’histoire. Mais pour le moment, au Congo de Lumumba, c’est peine perdue ! Nous finirons par renaître et rebondir. Notre histoire a prouvé que nous en avons les capacités. Souvent, mains nues !
« Les faiseurs des rois » ne sont pas distraits. Ils voient. Ils étudient. Ils consultent leurs think tanks sur notre pays. Ils en approfondissent l’histoire des forces résistantes et travaillent sans relâche à briser tous les ressorts de la volonté populaire éprise de liberté et de souveraineté. Cela avec la complicité des nôtres transformés en hommes et femmes liges.

Chez nous, l’histoire se répète et sa répétition désaxe, désoriente, dépayse plusieurs d’entre nous.

Cette histoire officielle qui se répète veut remettre aux calendes grecques sa réécriture congolo-congolaise, loin des discours académiques dominés par l’hégémonie culturelle occidentale.

Oui. « Les faiseurs des rois » ne sont pas distraits ; ils poursuivent l’écriture de l’histoire des vainqueurs !

En 1960, après la victoire de Lumumba aux élections au suffrage universel, il devient l’homme à abattre. Il est assassiné le 17 janvier 1961. Cet assassinat est d’abord nié.

Puis, longtemps après, reconnu et ses commanditaires identifiés. Cet assassinat brise une dynamique interne à notre pays. Il corrompt l’aboutissement de la lutte de tout un peuple au travers de ses dignes enfants pour la liberté et la souveraineté.

Contrairement aux apparences, les ressorts de cette lutte d’autodétermination et d’émancipation de la tutelle des « faiseurs de rois » ne sont pas tous brisés. Les Congolais(es) vont renaître de leurs cendres vers les années 90 autour de la Conférence Nationale Souveraine. (Certains d’entre nous dont les cœurs et les esprits ont été mangés par l’hégémonie culturelle occidentale seront des critiques acerbes de cette rencontre.

Ils remettront sa souveraineté en question en disant que ses délégués n’y étaient pas avec l’aval de notre peuple. Ils feront comme si les minorités organisées et agissantes n’étaient le peuple ! Ils feront comme si De Gaule et la Résistance française en Grande-Bretagne n’étaient pas « la France » !)

Cette renaissance sera marquée par une tragédie. Le 16 février 1992, les chrétiens, les hommes et les femmes de bonne volonté seront tués par l’armée de Mobutu dans les rues de Kinshasa.

Leur péché capital : la foi dans la Conférence Nationale Souveraine et l’appel à la voir poursuivre ses travaux. (Malgré le sang versé par nos compatriotes le 16 février 1992, certains d’entre nous reconduisent les rengaines du genre : « Les Africains et les Congolais n’ont pas l’esprit de sacrifice ! Bizarre !)

Cette lutte portée par une dynamique interne sera étouffée dans un grand bain de sang provoqué par la guerre de l’AFDL (en 1996-1997) instrumentalisée par le Rwanda, l’Ouganda et le Burundi portés à bout de bras par leurs parrains Américains et Britanniques.

Ceux-ci ne juraient que par l’émiettement du Congo de Lumumba. Ils voulaient s’emparer de sa partie « utile », de tout l’est pour la promotion de leur marché de l’Afrique de l’est.

Ils voulaient précipiter sa partition pour qu’il devienne un ensemble de petits Etats faibles et corvéables à souhait. Ils voulaient tout simplement en faire un réservoir de matières premières ouvert au marché néolibéral, sans foi ni loi.

Si ce projet a en partie réussi- notre pays est occupé par les chiens de garde du néolibéralisme ; il est sous la tutelle de l’ONU[1]-, la défense de ses frontières demeure un sujet d’actualité.

Officiellement, les clients du marché néolibéral et de la démocratie du marché soutiennent publiquement que les frontières que notre pays a héritées de la colonisation ne sont pas négociables.

Oui. Ils le disent officiellement.

Officieusement, par le M23/Rwanda-Ouganda-Burundi interposés, ils poursuivent leur guerre de basse intensité. Tel est leur modus operandi : le double discours ; l’officieux plus efficace que l’officiel.

Dieu merci ! Ils n’arrivent pas à briser la volonté populaire de la majorité de nos populations et surtout celles des minorités agissantes et organisées. Et en 2011, « un revenant », « un Tshitshi donné pour malade, déphasée et dépassé par les évènement politiques » renaissait de ses cendres.

Il réussissait à entraîner avec lui quelques partis politiques alliés au sein, des membres de la société civile et de la diaspora congolaise pour l’avènement d’un autre Congo. Il s’engageait dans un processus électoral miné par « le clan Kabila » en mettant debout tout un peuple meurtri par une guerre de prédation permanente.

« Les faiseurs de rois » n’étaient pas distraits. Ils ont vu ce peuple debout chantant « tika ngai na voter ya Tshitshi ». « Les faiseurs de rois » ont eu peur. Ils ont été pris de panique.

Et pour la troisième grande fois, ils ont cherché à briser une dynamique interne de changement de paradigme en plébiscitant un usurpateur comme président de la République à l’issue des élections (pièges à cons) de novembre et décembre 2011.

Ils ont accepté de fouler au pied les valeurs de la démocratie et des droits de l’homme pour lesquelles ils disent se battre au profit des valeurs du marché. Le 26 novembre 2011, ils participaient au massacre de nos compatriotes à l’aéroport de Ndjili et dans certains quartiers populaires de Kinshasa, sans lever le petit doigt pour condamner.

« Ils étaient près à travailler avec Joseph Kabila même s’il tuait un peu, soutiendra un ami Belge dans une confidence.» Arnaud Zajtman trouvera des mots justes pour décrire cette situation. Il écrira : « Les mots manquent pour qualifier la gravité de la situation qui prévaut actuellement au Congo.

La commission électorale congolaise s’apprête à annoncer la victoire du président sortant Joseph Kabila sur la base de résultats frauduleux rejetés par la majorité des Congolais, jetant ainsi les bases du conflit le plus meurtrier qui puisse advenir, celui qui oppose un appareil d’Etat à sa population.

L’Occident, qui depuis dix ans dépense plus d’un million de dollars par jour pour la restauration de la paix et de l’Etat de droit au Congo, via la mission de maintien de la paix des Nations unies, s’apprête à valider ces résultats, signant ainsi l’échec de sa propre politique.[2] »

Pour dire les choses autrement, l’acceptation des résultats frauduleux des élections de 2011 opposait l’Occident à la majorité des Congolais. Ce faisant, l’Occident témoignait dans les faits qu’il n’a jamais été pour la démocratie populaire. (D’ailleurs, en Occident même, c’est le 1% de politiciens, « petites mains » du capital qui gouverne.

Ce 1% adopte des mesures d’austérité contre les 99%. Ses rues sont en train de gronder. Il révèle sa véritable face. Il est porté par une politique économique qui a atteint sa phase sénile (comme le dit si bien Samir Amin).)

Depuis novembre 2011, c’est l’Occident qui, avec ses hommes et femmes liges chez nous, se bat contre la majorité de nos populations. Il rejoue le jeu de 1960-1961.

Et Arnaud Zajtman l’avait bien vu quand il a écrit : « On assiste à une situation semblable au Congo, où les ambassadeurs occidentaux soutiennent Kabila face à un Tshisekedi qu’ils jugent imprévisible. Un jugement qui rappelle celui que l’Occident proférait envers le Premier ministre congolais Patrice Lumumba au moment de l’indépendance du Congo.[3] »

Savoir ce qui précède est important ; voire même indispensable. Tshisekedi président (de fait) aurait conduit à changer les rapports de force entre nous et ce 1% de « petites mains du capital ». Il jouirait de la légitimité populaire.

Voilà ce que ce 1% n’a pas accepté et n’est pas prêt à accepter : le changement des rapports de force par une légitimité populaire. (Celle-ci aurait permis à notre peuple de devenir le véritable souverain primaire.) Ce 1% aime la légitimité (néolibérale) acquise par les armes qu’il vend au 1% de « nègres de service » du Congo et de l’Afrique des Grands Lacs.

Cette « minorité agissante » dans l’ombre a sérieusement peur de la démocratie : elle est lâche. Telle est l’une des raisons pour lesquelles elle opère dans l’ombre en laissant sur le devant de la scène ses
«nègres de service».

Une autre : elle a peur de son opinion publique. (La diaspora fait du bon boulot en organisant de temps en temps des marches et des sit-in au cours desquels elle s’adresse au citoyen occidental lambda.) Ce 1% tient à briser les ressorts de la volonté politique de nos populations et à lui imposer un autre « cheval de Troie » pour faire semblant de participer au changement que nos populations appellent de tous leurs vœux.

Jusqu’à ce jour, nos populations, dans leur immense majorité, se sont révélées fortes. Elles auraient été davantage forte si elles avaient la bonne information et à temps. Pour le moment, elles risquent d’être dribblées par les agents du néolibéralisme prêts aux compromis et aux compromissions pour leur ventre.

Que faut-ils faire ?

D’abord savoir ce qui se passe ; identifier les acteurs pléniers et «les nègres de service» ; se fédérer en réseau efficaces pour la réflexion et des actions patriotiques à court, moyen et long terme.
Surtout, ne pas courir derrière le M23/Rwanda-Ouganda-Burundi et ses infiltrés Congolais. Ensuite, compter sur la poursuite de la dynamique interne dans ce travail en réseau.

Enfin, organiser, petit à petit, une révolution culturelle. Ces propositions n’en excluent pas d’autres qui soient sages et intelligentes.

Mbelu Babanya Kabudi
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[1] J-C. WILLAME, « Les faiseurs de paix » au Congo. Gestion d’une crise internationale, Bruxelles, Ed. du Grip, 2007.

[2] A. ZAJTMAN, Il est minuit moins une à Kinshasa, dans La libre Belgique du 07 décembre 2011.

[3] Ibidem. Le dernier livre de Charles Onana vient corroborer ces thèses d’Arnaud Zajtm dans un livre intitulé Europe, crimes et censure au Congo. Les document qui accusent, Paris, Duboiris, 2012.


© Congoindépendant

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