Mauvaise administration....
"Joseph Kabila" à l’issue de la promulgation de la Constitution le 18 février 2006
Cinq années après l’écoulement du délai constitutionnel - pour l’installation des nouvelles provinces - et à quelques 18 mois de la tenue de l’élection présidentielle, "Joseph Kabila" a décidé (enfin) de promulguer la loi fixant les limites des 26 provinces prévues dans le premier alinéa de l’article 2 de la Constitution.
La période choisie dissimule mal des calculs politiciens. Ces mutations administratives faites dans la précipitation risquent d’exacerber le climat socio-politique déjà délétère.
Sous d’autres cieux, une telle réforme aurait été menée de manière progressive en partant de quelques "province-tests".
Notons que quatre provinces actuelles ne sont pas concernées par le nouveau découpage territorial. Il s’agit du Bas Congo (Kongo central), du Nord Kivu, du Sud Kivu et de Kinshasa.
Selon un juriste proche de la Cour constitutionnelle, la loi promulguée aurait été envoyée en "procédure d’urgence" devant cette haute juridiction. Les gouverneurs en exercice devraient, à brève échéance, démissionner au motif que leurs anciennes provinces "ont cessé d’exister".
Il va sans dire que l’actuel gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi Chapwe serait particulièrement dans le "viseur" du "raïs". Sans omettre, le président de l’Assemblée provinciale Gabriel Kyungu wa Kumwanza. Ambiance.
"La République démocratique du Congo est composée de la ville de Kinshasa et de 25 provinces dotées de la personnalité juridique", énonce l’article 2 de la Constitution promulguée le 18 février 2006 dans son premier alinéa.
Cette nouvelle configuration territoriale devait être d’application "endéans trente-six mois" (article 226-1) qui suivaient l’installation effective des nouvelles institutions politiques.
Après un rapide calcul mental, c’est à partir de 2010 au plus tard que ce processus aurait dû être amorcé. Pourquoi cela n’a-t-il pas été fait? Est-ce par manque d’intérêt pour le "clan kabiliste"?
"Joseph Kabila" a donc attendu cinq bonnes années avant de promulguer, samedi 28 février 2015, la loi, publiée le lundi 2 mars, fixant les limites des provinces dont le nombre passeront bientôt - si tout va bien - de 11 à 26.
Cette opération pourrait se révéler à brève échéance comme une "mission impossible" à quelques mois de la tenue des élections générales.
Une commission - composée des fonctionnaires issus de plusieurs ministères - sera mise sur pied au niveau de chaque province "à démembrer".
A savoir : le Bandundu, l’Equateur, le Kasaï Occidental, le Kasaï Oriental, le Katanga et la Province Orientale. Mission : répartition des ressources humaines, financières et matérielles.
Des entités infantilisées
Le Congo démocratique se dote de 26 provinces alors que les 11 entités existantes n’ont guère brillé par leur viabilité.
Et ce à l’exception de la Province du Katanga qui fait rentrer 4 à 5 milliards de dollars par an, selon le gouverneur Moïse Katumbi Chapwe (voir interview dans La Libre Belgique datée 21-22 février 2015). Sans omettre les 6 millions de dollars encaissés, chaque mois, au titre de péage.
Dans une déclaration faite le 14 janvier sur Radio Okapi, le ministre des Finances du Katanga, Christian Mwando, a dit que cette province n’a reçu que 65 millions de dollars sur les 460 millions promis par le gouvernement central dans le cadre de la rétrocession en 2014.
Selon lui, le "manque à gagner", comptabilisé depuis 2007, s’élèverait à plus de 2 milliards de dollars.
Les provinces congolaises sont "infantilisées" par un gouvernement central où trône une bande d’oligarques incapables et jouisseurs. Cette infantilisation se situe au plan politique et financier.
Au plan politique, les institutions provinciales en l’occurrence l’assemblée provinciale et le gouvernement provincial sont perturbées par les interventions intempestives notamment du ministre national chargé de l’Intérieur.
Conséquence : la démocratie peine, au niveau local, à prendre son envol. Les députés provinciaux et les gouverneurs sont souvent en guerre pour des raisons triviales. Les motions de défiance ne se comptent plus. La situation de la province de l’Equateur est symptomatique de ce "mal être provincial".
Que voit-on au plan financier? Sous prétexte de "dépenses de souveraineté" pour financer la guerre à l’Est, l’Etat central ne s’acquitte guère de son obligation de rétrocéder aux pouvoirs locaux les 40% des ressources financières perçues par leurs soins.
Les provinces irresponsabilisées
La grande majorité des provinces congolaises ont une superficie égale ou supérieure à celle de certains Etats du continent.
Au Congo démocratique, les gouverneurs de province ne sont même pas compétents en matière du maintien de l’ordre. En cause, la police relève de la compétence exclusive du gouvernement central.
Selon des sources, chaque mois, le gouvernement central met à la disposition de l’exécutif provincial une somme de plus ou moins 2 millions de dollars pour le fonctionnement mensuel. Des cacahuètes. Rien pour l’investissement. Toutes les dépenses rentrant dans cette dernière rubrique sont réglées à partir de la capitale.
Les contrats portant sur l’exploitation des potentialités des provinces sont signés à la Présidence de la République.
"On m’attaque aussi sur les contrats miniers, a déclaré Moïse Katumbi dans l’entretien précité. Mais ce n’est pas la province qui les accorde, c’est l’Etat central. La redevance minière, c’est aussi dans l’escarcelle de l’Etat central".
A titre de comparaison, en Belgique, le bourgmestre de chaque commune dirige la police. Il a en charge le maintien de l’ordre public. Ce qui implique la sécurité des personnes et des biens.
Mieux encore, les communes jouissent d’un pouvoir fiscal propre dont elles tirent 33% des recettes suivant le triptyque: mission, moyens, résultats.
Le réveil tardif du "raïs"
L’article 200 de la Constitution a prévu une "conférence des gouverneurs" devant se tenir deux fois par an sous la présidence de "Joseph Kabila".
Depuis la promulgation de la Constitution en vigueur, le numéro un Congolais n’a organisé que quatre de ces rencontres au lieu de seize. Que fait-il durant le reste de son temps? Devrait-on parler de roi fainéant? Question : pourquoi tente-t-il de s’accrocher au pouvoir?
En tentant de faire en 2015 ce qu’il aurait dû accomplir depuis 2010, "Joseph Kabila" engage le redoutable pari de déstabiliser le pays. L’homme a échoué. Il s’est, de ce fait, disqualifié en privilégiant les intérêts de son "clan" au détriment de l’intérêt général.
S’il est vrai que la Constitution promulguée en février 2006 prévoit en son article 2 le démembrement de plusieurs provinces, il n’en demeure pas moins vrai que la démarche actuelle du numéro un Congolais est motivée non pas par le bien commun mais simplement la volonté non-avouée de "régler quelques comptes politiques".
Deux personnalités provinciales seraient particulièrement visées.
Il s’agit de Moïse Katumbi Chapwe et Gabriel Kyungu wa Kumwanza, respectivement gouverneur et président de l’Assemblée provinciale du Katanga.
"Joseph Kabila" n’a pas encore "digéré" la métaphore de "trois penalties" lancée le 23 décembre dernier par "Moïse".
Selon nos informations, le texte promulgué vendredi dernier aurait été envoyé en "procédure d’urgence" à la Cour constitutionnelle afin que celle-ci se prononce sur sa conformité à la Constitution.
"Dans moins d’une semaine, la Cour constitutionnelle va rendre son arrêt, commente un haut magistrat. Dès ce moment, les gouverneurs des entités démembrées devraient démissionner pour la simple raison que leurs anciennes provinces n’existent plus...".
Des "députés frondeurs"
Une trentaine de députés nationaux élus du Katanga ont désapprouvé le rattachement de Kolwezi à la future province du Lualaba. Premier à manifester sa désapprobation dans ce sens, le député national honoraire Vano Kiboko croupit depuis le 29 décembre à la prison de Makala.
Dans un mémorandum remis mardi 13 janvier au bureau de l’Assemblée nationale, les députés frondeurs élus du Katanga réclament la résolution du «contentieux» lié au futur statut juridique de Kolwezi : «Nous, députés nationaux élus de l’actuelle province du Katanga, attirons l’attention particulière de l’opinion tant nationale qu’internationale sur les conséquences à la fois politique, économique, sociale et culturelle que la province du Katanga et, partant, tout le pays, peuvent connaître à la suite de la mise en œuvre de la loi portant limites des provinces sans avoir au préalable résolu le contentieux du district urbano-rural de Kolwezi ».
Ces parlementaires exigent la mise sur pied d’une "commission mixte gouvernement-Assemblée nationale" afin d’aplanir le différend dans un esprit de totale cohésion nationale.
"Joseph Kabila apprendra à ses dépens qu’il ne peut pas prendre tout un pays en otage juste pour régler ses comptes avec Moïse Katumbi et Gabriel Kyungu", commente notre juriste.
Si cette analyse était confirmée, on peut gager que le "divorce" est bel et bien consommé entre "Moïse" et le "raïs". Ce qui confirme également les calculs politiciens qui entourent la loi fixant les limites des provinces promulguée tardivement par "Joseph Kabila"...
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Baudouin Amba Wetshi
© Congoindépendant
"Joseph Kabila" à l’issue de la promulgation de la Constitution le 18 février 2006
Cinq années après l’écoulement du délai constitutionnel - pour l’installation des nouvelles provinces - et à quelques 18 mois de la tenue de l’élection présidentielle, "Joseph Kabila" a décidé (enfin) de promulguer la loi fixant les limites des 26 provinces prévues dans le premier alinéa de l’article 2 de la Constitution.
La période choisie dissimule mal des calculs politiciens. Ces mutations administratives faites dans la précipitation risquent d’exacerber le climat socio-politique déjà délétère.
Sous d’autres cieux, une telle réforme aurait été menée de manière progressive en partant de quelques "province-tests".
Notons que quatre provinces actuelles ne sont pas concernées par le nouveau découpage territorial. Il s’agit du Bas Congo (Kongo central), du Nord Kivu, du Sud Kivu et de Kinshasa.
Selon un juriste proche de la Cour constitutionnelle, la loi promulguée aurait été envoyée en "procédure d’urgence" devant cette haute juridiction. Les gouverneurs en exercice devraient, à brève échéance, démissionner au motif que leurs anciennes provinces "ont cessé d’exister".
Il va sans dire que l’actuel gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi Chapwe serait particulièrement dans le "viseur" du "raïs". Sans omettre, le président de l’Assemblée provinciale Gabriel Kyungu wa Kumwanza. Ambiance.
"La République démocratique du Congo est composée de la ville de Kinshasa et de 25 provinces dotées de la personnalité juridique", énonce l’article 2 de la Constitution promulguée le 18 février 2006 dans son premier alinéa.
Cette nouvelle configuration territoriale devait être d’application "endéans trente-six mois" (article 226-1) qui suivaient l’installation effective des nouvelles institutions politiques.
Après un rapide calcul mental, c’est à partir de 2010 au plus tard que ce processus aurait dû être amorcé. Pourquoi cela n’a-t-il pas été fait? Est-ce par manque d’intérêt pour le "clan kabiliste"?
"Joseph Kabila" a donc attendu cinq bonnes années avant de promulguer, samedi 28 février 2015, la loi, publiée le lundi 2 mars, fixant les limites des provinces dont le nombre passeront bientôt - si tout va bien - de 11 à 26.
Cette opération pourrait se révéler à brève échéance comme une "mission impossible" à quelques mois de la tenue des élections générales.
Une commission - composée des fonctionnaires issus de plusieurs ministères - sera mise sur pied au niveau de chaque province "à démembrer".
A savoir : le Bandundu, l’Equateur, le Kasaï Occidental, le Kasaï Oriental, le Katanga et la Province Orientale. Mission : répartition des ressources humaines, financières et matérielles.
Des entités infantilisées
Le Congo démocratique se dote de 26 provinces alors que les 11 entités existantes n’ont guère brillé par leur viabilité.
Et ce à l’exception de la Province du Katanga qui fait rentrer 4 à 5 milliards de dollars par an, selon le gouverneur Moïse Katumbi Chapwe (voir interview dans La Libre Belgique datée 21-22 février 2015). Sans omettre les 6 millions de dollars encaissés, chaque mois, au titre de péage.
Dans une déclaration faite le 14 janvier sur Radio Okapi, le ministre des Finances du Katanga, Christian Mwando, a dit que cette province n’a reçu que 65 millions de dollars sur les 460 millions promis par le gouvernement central dans le cadre de la rétrocession en 2014.
Selon lui, le "manque à gagner", comptabilisé depuis 2007, s’élèverait à plus de 2 milliards de dollars.
Les provinces congolaises sont "infantilisées" par un gouvernement central où trône une bande d’oligarques incapables et jouisseurs. Cette infantilisation se situe au plan politique et financier.
Au plan politique, les institutions provinciales en l’occurrence l’assemblée provinciale et le gouvernement provincial sont perturbées par les interventions intempestives notamment du ministre national chargé de l’Intérieur.
Conséquence : la démocratie peine, au niveau local, à prendre son envol. Les députés provinciaux et les gouverneurs sont souvent en guerre pour des raisons triviales. Les motions de défiance ne se comptent plus. La situation de la province de l’Equateur est symptomatique de ce "mal être provincial".
Que voit-on au plan financier? Sous prétexte de "dépenses de souveraineté" pour financer la guerre à l’Est, l’Etat central ne s’acquitte guère de son obligation de rétrocéder aux pouvoirs locaux les 40% des ressources financières perçues par leurs soins.
Les provinces irresponsabilisées
La grande majorité des provinces congolaises ont une superficie égale ou supérieure à celle de certains Etats du continent.
Au Congo démocratique, les gouverneurs de province ne sont même pas compétents en matière du maintien de l’ordre. En cause, la police relève de la compétence exclusive du gouvernement central.
Selon des sources, chaque mois, le gouvernement central met à la disposition de l’exécutif provincial une somme de plus ou moins 2 millions de dollars pour le fonctionnement mensuel. Des cacahuètes. Rien pour l’investissement. Toutes les dépenses rentrant dans cette dernière rubrique sont réglées à partir de la capitale.
Les contrats portant sur l’exploitation des potentialités des provinces sont signés à la Présidence de la République.
"On m’attaque aussi sur les contrats miniers, a déclaré Moïse Katumbi dans l’entretien précité. Mais ce n’est pas la province qui les accorde, c’est l’Etat central. La redevance minière, c’est aussi dans l’escarcelle de l’Etat central".
A titre de comparaison, en Belgique, le bourgmestre de chaque commune dirige la police. Il a en charge le maintien de l’ordre public. Ce qui implique la sécurité des personnes et des biens.
Mieux encore, les communes jouissent d’un pouvoir fiscal propre dont elles tirent 33% des recettes suivant le triptyque: mission, moyens, résultats.
Le réveil tardif du "raïs"
L’article 200 de la Constitution a prévu une "conférence des gouverneurs" devant se tenir deux fois par an sous la présidence de "Joseph Kabila".
Depuis la promulgation de la Constitution en vigueur, le numéro un Congolais n’a organisé que quatre de ces rencontres au lieu de seize. Que fait-il durant le reste de son temps? Devrait-on parler de roi fainéant? Question : pourquoi tente-t-il de s’accrocher au pouvoir?
En tentant de faire en 2015 ce qu’il aurait dû accomplir depuis 2010, "Joseph Kabila" engage le redoutable pari de déstabiliser le pays. L’homme a échoué. Il s’est, de ce fait, disqualifié en privilégiant les intérêts de son "clan" au détriment de l’intérêt général.
S’il est vrai que la Constitution promulguée en février 2006 prévoit en son article 2 le démembrement de plusieurs provinces, il n’en demeure pas moins vrai que la démarche actuelle du numéro un Congolais est motivée non pas par le bien commun mais simplement la volonté non-avouée de "régler quelques comptes politiques".
Deux personnalités provinciales seraient particulièrement visées.
Il s’agit de Moïse Katumbi Chapwe et Gabriel Kyungu wa Kumwanza, respectivement gouverneur et président de l’Assemblée provinciale du Katanga.
"Joseph Kabila" n’a pas encore "digéré" la métaphore de "trois penalties" lancée le 23 décembre dernier par "Moïse".
Selon nos informations, le texte promulgué vendredi dernier aurait été envoyé en "procédure d’urgence" à la Cour constitutionnelle afin que celle-ci se prononce sur sa conformité à la Constitution.
"Dans moins d’une semaine, la Cour constitutionnelle va rendre son arrêt, commente un haut magistrat. Dès ce moment, les gouverneurs des entités démembrées devraient démissionner pour la simple raison que leurs anciennes provinces n’existent plus...".
Des "députés frondeurs"
Une trentaine de députés nationaux élus du Katanga ont désapprouvé le rattachement de Kolwezi à la future province du Lualaba. Premier à manifester sa désapprobation dans ce sens, le député national honoraire Vano Kiboko croupit depuis le 29 décembre à la prison de Makala.
Dans un mémorandum remis mardi 13 janvier au bureau de l’Assemblée nationale, les députés frondeurs élus du Katanga réclament la résolution du «contentieux» lié au futur statut juridique de Kolwezi : «Nous, députés nationaux élus de l’actuelle province du Katanga, attirons l’attention particulière de l’opinion tant nationale qu’internationale sur les conséquences à la fois politique, économique, sociale et culturelle que la province du Katanga et, partant, tout le pays, peuvent connaître à la suite de la mise en œuvre de la loi portant limites des provinces sans avoir au préalable résolu le contentieux du district urbano-rural de Kolwezi ».
Ces parlementaires exigent la mise sur pied d’une "commission mixte gouvernement-Assemblée nationale" afin d’aplanir le différend dans un esprit de totale cohésion nationale.
"Joseph Kabila apprendra à ses dépens qu’il ne peut pas prendre tout un pays en otage juste pour régler ses comptes avec Moïse Katumbi et Gabriel Kyungu", commente notre juriste.
Si cette analyse était confirmée, on peut gager que le "divorce" est bel et bien consommé entre "Moïse" et le "raïs". Ce qui confirme également les calculs politiciens qui entourent la loi fixant les limites des provinces promulguée tardivement par "Joseph Kabila"...
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Baudouin Amba Wetshi
© Congoindépendant
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