Par Freddy Monsa Iyaka Duku
Sénateur, élu de la province de l'Equateur, membre de la Commission sénatoriale des Relations extérieures, Henri-Thomas Lokondo Yoka se tient toujours à la brèche. Les vacances parlementaires, loin d'être pour lui des moments de repos, constituent, bien au contraire, des instants propices de profondes réflexions pour le rapprocher davantage de son électorat, afin de l'écouter, mais surtout de veiller aux intérêts de la province de l'Equateur, partant de ceux de la République démocratique du Congo. C'est entre ses deux déplacements politiques que Le Potentiel l'a approché afin de s'entretenir avec lui sur des questions brûlantes de l'heure. Surtout qu'il figure parmi les intervenants des plus actifs du Parlement en général et du Sénat en particulier, avec des observations pertinentes et positives. La dernière en date est celle intervenue au Parlement réuni en congrès pour statuer sur la proposition portant révision de certains articles de la Constitution. Une intervention qui a retenu l'attention de ses collègues et saluée par l'adoption de l'amendement proposé par lui. «La proposition de la révision venue de l Assemblée nationale n'était pas fondamentalement d'ordre juridique mais plutôt politique», a dit le sénateur Lokondo à une question du Potentiel sur cette révision qui porte sur huit articles. Autre point d'actualité est la signature du contrat relatif à l'engagement à financer l'acquisition de sept centrales électriques dans la province de l' Equateur. Le sénateur Lokondo est sans équivoque : «Ce contrat est inconstitutionnel. La province ne peut pas signer un contrat engageant les richesses du pays. C'est-à-dire la nation». - Interview.
La révision constitutionnelle n'en finit pas de faire parler d'elle. Elle demeure une question d'actualité tant il est vrai qu'elle avait emballé toute la classe politique. Mais aussi les partenaires extérieurs. Au moment où l' orage semble passé et que les esprits se calment, Le Potentiel a approché le sénateur Henri-Thomas Lokondo, élu de la province de l' Equateur et membre de la commission sénatoriale des Relations extérieures pour en savoir plus sur la philosophie de cette démarche politique. Son choix se justifie tout simplement par le fait qu'il est l'une des figures proue du Parlement congolais, du Sénat en particulier, et l'un des parlementaires des plus actifs. Cela grâce, à ses interventions soutenues par des propositions pertinentes, parfois incisives, mais positives. En vacances parlementaires pour être plus près de son électorat, il s'est attardé sur le bien-fondé de la révision des huit articles de la constitution, particulièrement les articles 71, 149 et 198.
«Je fais d'abord une mise au point pour dire, comme je l'avais relevé lors de notre débat en plénière au Sénat sur le bien-fondé de la proposition de la révision venue de l'Assemblée nationale, que le débat n'était fondamentalement pas d'ordre juridique mais plutôt politique. C'était plus un débat sur l'opportunité politique de la révision. Car la révision elle-même ne violait pas la Constitution. Pour ce qui concerne l'article 71 relatif à la réduction à un tour de l'élection présidentielle qui, il faut le souligner, est l'article détonateur des passions et sur lequel d'ailleurs se polarise tout le débat, j'avais dit à mes collègues sénateurs qu'à la limite, c'était un faux débat. Si alors on peut considérer ce débat comme un vrai débat, ce serait alors un débat d'école. Or, quand on s'engage dans un débat d'école, on est toujours en route. Ça ne s'arrête jamais. Parce que chacun aura toujours sa propre philosophie.. .J'avais dit à haute et intelligible voix qu'on peut avoir un tour, deux tours ou trois tours, mais si on n'est pas fort sur le terrain, on sera toujours battu. Et là, la majorité a pris aussi un risque politique considérable. J'avais rappelé ce qui s'était passé en France en 1974 quand Valery Giscard d'Estaing avait accédé au pouvoir. La première des choses qu'il avait faites, c'était de changer le système électoral. A l'époque, il y avait eu un tollé du côté de l'opposition socialiste et communiste. Mais aux élections de 1981, François Mitterrand, son challenger, l'avait battu avec son propre système électoral. C'est pourquoi, je dis que pour moi c'est un faux débat. C'est comme le disent tous les grands constitutionnalistes, tout système électoral a des avantages et des inconvénients. Je l'ai appris au cours de droit public à l'université. J'ai été d'ailleurs très conforté par la dernière déclaration de Tshisekedi, quand il a dit qu'il s'agisse d'un tour ou de deux tours, il va battre Kabila. Le débat est donc politiquement clos. Car l'essentiel est que les élections se passent le plus correctement possible.
Pour ce qui concerne l'article 149 de la constitution sur l'indépendance du pouvoir judiciaire, c'est moi qui ai introduit l'amendement qui a été d'abord accepté par la commission et ensuite par la plénière du Congrès. Il s'agissait de quoi? De corriger une hérésie non perçue lors de l'élaboration de la constitution de 2006. Car quand on parle de l'indépendance du pouvoir judiciaire, celle-ci n'est reconnue qu'aux seuls Cours et Tribunaux, c'est-à-dire aux magistrats du siège dans leur mission de dire le droit. C'est élémentaire. Au fait, j'ai voulu simplement mettre en harmonie l'article 149 avec l'article 150 en son alinéa 2 qui dit que les juges ne sont soumis dans l'exercice de leurs fonctions qu'à l'autorité de la loi; et le mettre en harmonie aussi avec l'article 151 qui dit que le pouvoir exécutif ne peut donner des injonctions au juge. Vous voyez que dans tous ces articles qui concernent l'indépendance du pouvoir judiciaire on ne parle que des juges et non des magistrats du parquet qui eux, ne sont pas indépendants du pouvoir exécutif; parce que le ministre de la justice dispose à leur égard d'un pouvoir d'injonction positive comme on le dit en Belgique. C'est d'ailleurs un peu partout à travers le monde.. .S'agissant enfin, de la révision de l'article 198 de la constitution de 2006 qui fait croire à certains théoriciens qu'on a enfreint l'article 220 qui verrouille les matières non révisables, il n'en est rien car cette révision n'a réduit aucune prérogative des provinces. Elle a plutôt accordé au chef de l'Etat, garant de la nation qui veille au fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'Etat, le pouvoir de dissoudre une assemblée provinciale ou de relever de ses fonctions un gouverneur de province; et ce, seulement en cas de crise grave et persistante menaçant le fonctionnement régulier des institutions provinciales. Et cela, sans restreindre les prérogatives des provinces. En outre, si la constitution en son article 148 reconnaît au Président de la République le pouvoir de dissoudre l'Assemblée nationale en cas de crise persistante, pourquoi ne pourrait-il pas le faire pour une Assemblée provinciale? Qui peut le plus, peut le moins, dit-on. Ce sont des débats aussi techniques qui nécessitent des explications».
CONVAINCRE ET NON VAINCRE
Le sénateur Lokondo est conscient que le plus dur est devant nous. Qu'il s'agit aujourd'hui de faire appel à de vrais stratèges politiques pour que cette démarche politique soit bien comprise et bénéficie de l'adhésion populaire. Point n'est donc besoin de manifestations politiques qui se limitent à des marches de soutien à la révision constitutionnelle.
«A la place des marches de soutien à la révision constitutionnelle, il faudrait, plutôt organiser des conférences, des ateliers pour expliquer à l'élite intellectuelle pourquoi le Parlement a révisé ces huit articles... Il faut engager un débat d'explication de fond au lieu d'embrigader les gens comme à l'époque du Parti-Etat en fermant les marchés, les bureaux de l'Etat et les magasins. Cela peut avoir des effets contre-productifs. C'est toute une pédagogie politique qu'il faut mettre en place en ciblant particulièrement les intellectuels plutôt que les mamans des marchés qui difficilement comprennent les enjeux de cette révision. Il faut aller aux universités, aux instituts supérieurs, aux écoles secondaires.. .parler avec le corps intellectuel des provinces, débattre avec la société civile des raisons profondes de cette révision. Dans ce genre de choses, il faut plutôt convaincre que vouloir vaincre».
CONTRAT LEONIN A L'EQUATEUR
Voilà qui est bien dit et hausse le niveau de la réflexion. Il est un fait que le sénateur Lokondo vient d'éclairer la lanterne, et surtout d'interpeller le camp présidentiel pour qu'il ne dorme pas sur ses lauriers. Il importe maintenant de donner une vraie substance à cette démarche politique. Mais comme on le disait plus haut, le sénateur Lokondo saisit les moments des vacances parlementaires pour se rapprocher davantage de son électorat. Mieux de veiller aux intérêts de la province de l'Equateur et de la République. En ces instants précis, l'actualité est aussi dominée par le contrat qui doit lier la société Equatorial Energy $ Water Ltd, encore inexistante, à Trinitas Financing Ltd, d'une part, et la province de l'Equateur, au-delà la République démocratique du Congo d'autre part. Ce contrat donne le droit d'exploitation des minerais, à savoir or, diamant, fer, bois et huile de palme à ces deux sociétés pour une période de 75 ans. Le sénateur Lokondo crie quasiment au scandale et ne mâche pas ses mots.
«Je suis contre ce contrat parce que d'abord, il est inconstitutionnel. La province ne peut pas signer un contrat engageant les richesses du pays, c'est-à-dire la nation. Ce contrat attribue à la société Trinitas Exploration Ltd des concessions pour exploiter des dépôts de minerais d'or, de diamant et de fer, du minéral, du bois et de l'huile de palme même pas dans la province mais dans le pays, pendant une période de 75 ans. Or, selon les articles 201 et 202 de la constitution, les accords internationaux de quelque nature que ce soit qui engagent la RDC, sont de la compétence exclusive du pouvoir central. Ensuite, quand on lit ce contrat, l'entreprise Equatorial Energy qui a signé ce contrat avec les finlandais pour le compte de la province, n'est pas encore créée. Comment une entreprise qui n'est pas encore créée dont on ne connaît même pas les actionnaires peut conclure un contrat qui engage l'Etat congolais? Cela veut dire en fait comme en droit que ce contrat n'existe pas. Car du néant rien ne naît comme on dit en droit. Et même si ce contrat pouvait juridiquement exister, son caractère léonin est patent. Pour 210.000.000 d'euros seulement, la partie congolaise accorde à la société finlandaise Trinitas Exploration Ltd des contre-parties aussi monstrueuses. C'est inexplicable et incroyable. . . Cet engagement est fait sur base de quoi ? De quelle étude juridique, économique, financière ou environnementale? Si cela pouvait exister, ce serait sûrement un Accord amplement déséquilibré jamais connu dans notre pays. Ce qui équivaudrait à la vente au rabais des richesses du pays. Comme on dit en lingala: "Bateki mboka". . .Sans entrer dans le fond d'autres anomalies qui émaillent ce soi-disant contrat, la question finale est celle de savoir qui va garantir ce financement? Il faut éviter d'autres procès internationaux. La RDC a déjà trop de problèmes au niveau des tribunaux arbitraux, internationaux; il ne faut pas éventuellement lui en rajouter. Enfin, pour ce qui concerne particulièrement l'Equateur, avec une exploitation forestière de 75 ans, soyez-en sûr que nos forêts n'existeraient plus. Malheureusement, je ne serais plus là pour parler. C'est pourquoi, j'ai voulu déjà tirer mon épingle du jeu car j'ai toujours été obsédé par le jugement de la postérité. Ce n'est pas un problème personnel comme certaines personnes le présentent, c'est un problème d'Etat. Si l'autorité provinciale a des arguments contraires aux miens, je suis prêt pour faire un débat public de fond au lieu de faire des déclarations faibles et irresponsables du genre, «Lokondo ne veut pas de l'électricité à 1'Equateur..» «Je suis heureusement très content parce que la société civile de l'Equateur vient de m'emboîter le pas en refusant ce contrat qu'elle trouve aussi opaque. Il en est de même de beaucoup de responsables de la SNEL qui sont techniquement plus qualifiés que moi ainsi que d'autres membres du gouvernement qui examinent présentement le dossier. En tout état de cause, je ne démissionnerai pas devant mes responsabilités de sénateur ni devant ma propre conscience» .
C'est sur cette note pleine d'amertume mais doublée d'engagement que nous avons pris congé de notre interlocuteur.
Sénateur, élu de la province de l'Equateur, membre de la Commission sénatoriale des Relations extérieures, Henri-Thomas Lokondo Yoka se tient toujours à la brèche. Les vacances parlementaires, loin d'être pour lui des moments de repos, constituent, bien au contraire, des instants propices de profondes réflexions pour le rapprocher davantage de son électorat, afin de l'écouter, mais surtout de veiller aux intérêts de la province de l'Equateur, partant de ceux de la République démocratique du Congo. C'est entre ses deux déplacements politiques que Le Potentiel l'a approché afin de s'entretenir avec lui sur des questions brûlantes de l'heure. Surtout qu'il figure parmi les intervenants des plus actifs du Parlement en général et du Sénat en particulier, avec des observations pertinentes et positives. La dernière en date est celle intervenue au Parlement réuni en congrès pour statuer sur la proposition portant révision de certains articles de la Constitution. Une intervention qui a retenu l'attention de ses collègues et saluée par l'adoption de l'amendement proposé par lui. «La proposition de la révision venue de l Assemblée nationale n'était pas fondamentalement d'ordre juridique mais plutôt politique», a dit le sénateur Lokondo à une question du Potentiel sur cette révision qui porte sur huit articles. Autre point d'actualité est la signature du contrat relatif à l'engagement à financer l'acquisition de sept centrales électriques dans la province de l' Equateur. Le sénateur Lokondo est sans équivoque : «Ce contrat est inconstitutionnel. La province ne peut pas signer un contrat engageant les richesses du pays. C'est-à-dire la nation». - Interview.
La révision constitutionnelle n'en finit pas de faire parler d'elle. Elle demeure une question d'actualité tant il est vrai qu'elle avait emballé toute la classe politique. Mais aussi les partenaires extérieurs. Au moment où l' orage semble passé et que les esprits se calment, Le Potentiel a approché le sénateur Henri-Thomas Lokondo, élu de la province de l' Equateur et membre de la commission sénatoriale des Relations extérieures pour en savoir plus sur la philosophie de cette démarche politique. Son choix se justifie tout simplement par le fait qu'il est l'une des figures proue du Parlement congolais, du Sénat en particulier, et l'un des parlementaires des plus actifs. Cela grâce, à ses interventions soutenues par des propositions pertinentes, parfois incisives, mais positives. En vacances parlementaires pour être plus près de son électorat, il s'est attardé sur le bien-fondé de la révision des huit articles de la constitution, particulièrement les articles 71, 149 et 198.
«Je fais d'abord une mise au point pour dire, comme je l'avais relevé lors de notre débat en plénière au Sénat sur le bien-fondé de la proposition de la révision venue de l'Assemblée nationale, que le débat n'était fondamentalement pas d'ordre juridique mais plutôt politique. C'était plus un débat sur l'opportunité politique de la révision. Car la révision elle-même ne violait pas la Constitution. Pour ce qui concerne l'article 71 relatif à la réduction à un tour de l'élection présidentielle qui, il faut le souligner, est l'article détonateur des passions et sur lequel d'ailleurs se polarise tout le débat, j'avais dit à mes collègues sénateurs qu'à la limite, c'était un faux débat. Si alors on peut considérer ce débat comme un vrai débat, ce serait alors un débat d'école. Or, quand on s'engage dans un débat d'école, on est toujours en route. Ça ne s'arrête jamais. Parce que chacun aura toujours sa propre philosophie.. .J'avais dit à haute et intelligible voix qu'on peut avoir un tour, deux tours ou trois tours, mais si on n'est pas fort sur le terrain, on sera toujours battu. Et là, la majorité a pris aussi un risque politique considérable. J'avais rappelé ce qui s'était passé en France en 1974 quand Valery Giscard d'Estaing avait accédé au pouvoir. La première des choses qu'il avait faites, c'était de changer le système électoral. A l'époque, il y avait eu un tollé du côté de l'opposition socialiste et communiste. Mais aux élections de 1981, François Mitterrand, son challenger, l'avait battu avec son propre système électoral. C'est pourquoi, je dis que pour moi c'est un faux débat. C'est comme le disent tous les grands constitutionnalistes, tout système électoral a des avantages et des inconvénients. Je l'ai appris au cours de droit public à l'université. J'ai été d'ailleurs très conforté par la dernière déclaration de Tshisekedi, quand il a dit qu'il s'agisse d'un tour ou de deux tours, il va battre Kabila. Le débat est donc politiquement clos. Car l'essentiel est que les élections se passent le plus correctement possible.
Pour ce qui concerne l'article 149 de la constitution sur l'indépendance du pouvoir judiciaire, c'est moi qui ai introduit l'amendement qui a été d'abord accepté par la commission et ensuite par la plénière du Congrès. Il s'agissait de quoi? De corriger une hérésie non perçue lors de l'élaboration de la constitution de 2006. Car quand on parle de l'indépendance du pouvoir judiciaire, celle-ci n'est reconnue qu'aux seuls Cours et Tribunaux, c'est-à-dire aux magistrats du siège dans leur mission de dire le droit. C'est élémentaire. Au fait, j'ai voulu simplement mettre en harmonie l'article 149 avec l'article 150 en son alinéa 2 qui dit que les juges ne sont soumis dans l'exercice de leurs fonctions qu'à l'autorité de la loi; et le mettre en harmonie aussi avec l'article 151 qui dit que le pouvoir exécutif ne peut donner des injonctions au juge. Vous voyez que dans tous ces articles qui concernent l'indépendance du pouvoir judiciaire on ne parle que des juges et non des magistrats du parquet qui eux, ne sont pas indépendants du pouvoir exécutif; parce que le ministre de la justice dispose à leur égard d'un pouvoir d'injonction positive comme on le dit en Belgique. C'est d'ailleurs un peu partout à travers le monde.. .S'agissant enfin, de la révision de l'article 198 de la constitution de 2006 qui fait croire à certains théoriciens qu'on a enfreint l'article 220 qui verrouille les matières non révisables, il n'en est rien car cette révision n'a réduit aucune prérogative des provinces. Elle a plutôt accordé au chef de l'Etat, garant de la nation qui veille au fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'Etat, le pouvoir de dissoudre une assemblée provinciale ou de relever de ses fonctions un gouverneur de province; et ce, seulement en cas de crise grave et persistante menaçant le fonctionnement régulier des institutions provinciales. Et cela, sans restreindre les prérogatives des provinces. En outre, si la constitution en son article 148 reconnaît au Président de la République le pouvoir de dissoudre l'Assemblée nationale en cas de crise persistante, pourquoi ne pourrait-il pas le faire pour une Assemblée provinciale? Qui peut le plus, peut le moins, dit-on. Ce sont des débats aussi techniques qui nécessitent des explications».
CONVAINCRE ET NON VAINCRE
Le sénateur Lokondo est conscient que le plus dur est devant nous. Qu'il s'agit aujourd'hui de faire appel à de vrais stratèges politiques pour que cette démarche politique soit bien comprise et bénéficie de l'adhésion populaire. Point n'est donc besoin de manifestations politiques qui se limitent à des marches de soutien à la révision constitutionnelle.
«A la place des marches de soutien à la révision constitutionnelle, il faudrait, plutôt organiser des conférences, des ateliers pour expliquer à l'élite intellectuelle pourquoi le Parlement a révisé ces huit articles... Il faut engager un débat d'explication de fond au lieu d'embrigader les gens comme à l'époque du Parti-Etat en fermant les marchés, les bureaux de l'Etat et les magasins. Cela peut avoir des effets contre-productifs. C'est toute une pédagogie politique qu'il faut mettre en place en ciblant particulièrement les intellectuels plutôt que les mamans des marchés qui difficilement comprennent les enjeux de cette révision. Il faut aller aux universités, aux instituts supérieurs, aux écoles secondaires.. .parler avec le corps intellectuel des provinces, débattre avec la société civile des raisons profondes de cette révision. Dans ce genre de choses, il faut plutôt convaincre que vouloir vaincre».
CONTRAT LEONIN A L'EQUATEUR
Voilà qui est bien dit et hausse le niveau de la réflexion. Il est un fait que le sénateur Lokondo vient d'éclairer la lanterne, et surtout d'interpeller le camp présidentiel pour qu'il ne dorme pas sur ses lauriers. Il importe maintenant de donner une vraie substance à cette démarche politique. Mais comme on le disait plus haut, le sénateur Lokondo saisit les moments des vacances parlementaires pour se rapprocher davantage de son électorat. Mieux de veiller aux intérêts de la province de l'Equateur et de la République. En ces instants précis, l'actualité est aussi dominée par le contrat qui doit lier la société Equatorial Energy $ Water Ltd, encore inexistante, à Trinitas Financing Ltd, d'une part, et la province de l'Equateur, au-delà la République démocratique du Congo d'autre part. Ce contrat donne le droit d'exploitation des minerais, à savoir or, diamant, fer, bois et huile de palme à ces deux sociétés pour une période de 75 ans. Le sénateur Lokondo crie quasiment au scandale et ne mâche pas ses mots.
«Je suis contre ce contrat parce que d'abord, il est inconstitutionnel. La province ne peut pas signer un contrat engageant les richesses du pays, c'est-à-dire la nation. Ce contrat attribue à la société Trinitas Exploration Ltd des concessions pour exploiter des dépôts de minerais d'or, de diamant et de fer, du minéral, du bois et de l'huile de palme même pas dans la province mais dans le pays, pendant une période de 75 ans. Or, selon les articles 201 et 202 de la constitution, les accords internationaux de quelque nature que ce soit qui engagent la RDC, sont de la compétence exclusive du pouvoir central. Ensuite, quand on lit ce contrat, l'entreprise Equatorial Energy qui a signé ce contrat avec les finlandais pour le compte de la province, n'est pas encore créée. Comment une entreprise qui n'est pas encore créée dont on ne connaît même pas les actionnaires peut conclure un contrat qui engage l'Etat congolais? Cela veut dire en fait comme en droit que ce contrat n'existe pas. Car du néant rien ne naît comme on dit en droit. Et même si ce contrat pouvait juridiquement exister, son caractère léonin est patent. Pour 210.000.000 d'euros seulement, la partie congolaise accorde à la société finlandaise Trinitas Exploration Ltd des contre-parties aussi monstrueuses. C'est inexplicable et incroyable. . . Cet engagement est fait sur base de quoi ? De quelle étude juridique, économique, financière ou environnementale? Si cela pouvait exister, ce serait sûrement un Accord amplement déséquilibré jamais connu dans notre pays. Ce qui équivaudrait à la vente au rabais des richesses du pays. Comme on dit en lingala: "Bateki mboka". . .Sans entrer dans le fond d'autres anomalies qui émaillent ce soi-disant contrat, la question finale est celle de savoir qui va garantir ce financement? Il faut éviter d'autres procès internationaux. La RDC a déjà trop de problèmes au niveau des tribunaux arbitraux, internationaux; il ne faut pas éventuellement lui en rajouter. Enfin, pour ce qui concerne particulièrement l'Equateur, avec une exploitation forestière de 75 ans, soyez-en sûr que nos forêts n'existeraient plus. Malheureusement, je ne serais plus là pour parler. C'est pourquoi, j'ai voulu déjà tirer mon épingle du jeu car j'ai toujours été obsédé par le jugement de la postérité. Ce n'est pas un problème personnel comme certaines personnes le présentent, c'est un problème d'Etat. Si l'autorité provinciale a des arguments contraires aux miens, je suis prêt pour faire un débat public de fond au lieu de faire des déclarations faibles et irresponsables du genre, «Lokondo ne veut pas de l'électricité à 1'Equateur..» «Je suis heureusement très content parce que la société civile de l'Equateur vient de m'emboîter le pas en refusant ce contrat qu'elle trouve aussi opaque. Il en est de même de beaucoup de responsables de la SNEL qui sont techniquement plus qualifiés que moi ainsi que d'autres membres du gouvernement qui examinent présentement le dossier. En tout état de cause, je ne démissionnerai pas devant mes responsabilités de sénateur ni devant ma propre conscience» .
C'est sur cette note pleine d'amertume mais doublée d'engagement que nous avons pris congé de notre interlocuteur.
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