samedi 22 janvier 2011

Parc des Virunga : le pétrole menace la biodiversité

Par  Le Potentiel

Vives inquiétudes après l’attribution depuis juin 2010 à Soco International, une société pétrolière britannique, d’un bloc situé dans le parc national des Virunga au Nord-Kivu. Sur la scène internationale, des remous ne se sont fait attendre. Irina Bukova, directrice générale de l’Unesco, a fait le déplacement de Kinshasa pour rappeler Kinshasa à l’ordre. Entre le pétrole et la protection de la biodiversité, Kinshasa a fait son choix.
Le dossier est pris au sérieux au plus haut niveau de l’échiquier international que la directrice générale de l’Unesco, Irina Bukova, s’est vue dans l’obligation de faire le déplacement de Kinshasa pour s’enquérir de la situation auprès des autorités congolaises. La pomme de discorde est bien évidemment l’attribution depuis juin 2010 à Soco International, une société pétrolière britannique, du bloc 5 du rift albertin Est, situé en plein cœur du parc national des Virunga, au Nord-Kivu. Or, le parc des Virunga est classé depuis des années patrimoine mondial de l’humanité. Donc, relevant de la compétence partagée entre l’Etat congolais et l’Unesco qui en assure la sauvegarde au niveau international.
Que l’Etat congolais attribue unilatéralement un permis de recherche dans le périmètre du parc des Virunga, cela ne pouvait qu’irriter l’Unesco. Ce qui a valu le déplacement pour Kinshasa de sa directrice générale pour faire entendre, de vive voix, aux autorités sa désapprobation.
Tiraillée de tous côtés, Soco International tente tant bien que mal de mener à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, une opération de marketing pour se faire blanchir auprès de la population, en s’efforçant de présenter la meilleure face de son projet. Mais elle rencontre des résistances, notamment de la part de l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN) et des ONG locales.
Du côté de Soco International, l’on semble minimiser l’affaire, faisant foi à l’ordonnance présidentielle qui lui donne l’autorisation de prospecter dans le périmètre du parc. De l’autre côté, l’ICCN a promis de faire valoir ses droits en ne ménageant aucun effort pour faire barrage à Soco.
Le déplacement de Kinshasa
Lors de son dernier séjour à Kinshasa, Irina Bukova n’a pas manqué d’évoquer le sujet lors d’une réunion à la Primature sur l’état des lieux des sites congolais, classés patrimoine mondial de l’humanité, dont en bonne position le parc des Virunga.
Organisation inter et non gouvernementales, donateurs et autorités congolaises à Kinshasa, tous, autour du Premier ministre, Adolphe Muzito, ont débattu du sujet. Un rendez-vous diplomatique pour réfléchir aux mesures à prendre pour restaurer et sauvegarder ces sites en péril et «redéfinir le soutien apporté par la communauté internationale et adopter les grandes lignes d’un plan d’action ».
Virunga, Garamba, Kahuzi-Biega, Salonga, Réserve de la faune à Okapis. Cinq parcs nationaux riches d’une biodiversité unique, qui ne font pourtant pas le poids face à l’exploitation minière artisanale illégale qui pour l’UNESCO, « a un impact sur plusieurs sites, tandis que l’attribution de nouvelles concessions minières et pétrolières pourrait affecter leur statut de sites du patrimoine mondial ». Certaines espèces rares arpentent pourtant cette région des Grands Lacs africains, comme le gorille de Grauer, l’okapi – figurant sur la liste rouge des animaux menacés par l’UICN - ou le rhinocéros blanc du Nord pour n’en citer que quelques-uns de ces animaux en voie de disparition.
Mais, Kinshasa a fait fi de toutes ces spécificités, en accordant à Soco International, sans référence à l’Unesco, un permis de recherche sur un périmètre protégé suivant des accords et conventions internationales dûment ratifiées par la RDC.
José Endundo Bononge, ministre de l’Environnement et Conservation de la nature et Tourisme, a beau se défendre. Mais, l’acte posé par le gouvernement traduit la légèreté dans la gestion de la chose publique. Bien plus, il est la preuve de l’ignorance de certaines dispositions sur lesquelles la RDC se doit de se conformer. Car, bien que situés en RDC, les sites considérés par l’Unesco, agissant par mandat de la communauté internationale, font l’objet d’une gestion partagée entre la communauté internationale et les Etats qui les hébergent.
En accordant de manière unilatérale à Soco International un permis de recherche pétrolière dans le périmètre du parc des Virunga, le gouvernement a fait preuve d’une immaturité déconcertante qui frise le ridicule pour un Etat qui se veut respecté et respectable. Comment en est-on arrivé là ? N’y a-t-il pas eu d’experts au niveau du ministère des Hydrocarbures ou de l’Environnement pour ramener le gouvernement sur le droit chemin ?
Ainsi, comme dans les circonstances antérieures, presque similaires – rappelez-vous des carrés miniers attribués ça et là par le Cadastre minier – l’argent a circulé pour que tout le gouvernement soit frappé d’amnésie en faisant passer un dossier qui ternit au niveau international l’image de la RDC qui mérite, comme l’a si rappelé le sénateur, son qualificatif de « République des inconscients ».
En 2000, signale-t-on, la Fondation des Nations unies (FNU) et l’Unesco ont pourtant lancé un vaste chantier de 4 ans pour « conserver la biodiversité en zones de conflits armés » en RDC. Jusqu’en juin 2010 lorsque Soco a reçu droit par ordonnance présidentielle d’explorer dans le parc des Virunga, le gouvernement était totalement ignorant de cette initiative. Alors qu’à ce propos, un projet-pilote de 2,15 millions d’euros réalisé par l’Unesco, l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICNN), la coopération technique allemande et d’autres ONG.
Colère de la Banque mondiale
Comme l’on pouvait s’y attendre, la Banque mondiale n’a pas tardé à réagir à la décision de Kinshasa d’attribuer à une société pétrolière un bloc dans le périmètre du parc des Virunga
Le 30 novembre 2010, rapporte La Libre Belgique, la Banque mondiale a adressé une lettre au Premier ministre Adolphe Muzito, soulignant que « le démarrage des opérations » pétrolières dans le parc « contredira la volonté affichée par la RDC dans les fora internationaux et portera une atteinte certaine à son image d’acteur international », alors que l’établissement « recommence à accueillir des touristes » et pourrait être « un acteur majeur de l’économie locale du Kivu ».
Selon la même source, la lettre priait surtout le Premier ministre de « confirmer » à la Banque mondiale « l’engagement de la RDC à préserver l’intégrité du Parc national des Virunga afin de nous permettre de poursuivre nos financements dans le domaine de la conservation de la nature et du développement durable des forêts en RDC », alors que l’exploitation pétrolière dans le parc « ne pourra pas respecter l’intégrité des richesses en biodiversité du parc et ce, en conformité avec les engagements légaux de la RDC ». C’est, sans doute, ce qu’est venu chercher la semaine dernière, la directrice générale de l’Unesco lors de son passage à Kinshasa.
La RDC a donc intérêt à laver le plus rapidement possible l’affront dont elle se couvre vis-à-vis surtout de la communauté internationale. En urgence, il s’agit de ramener Soco International en obtempérer dont elle fait montre sur le terrain. Car, de plusieurs sources, confirme par ailleurs La Libre Belgique, le personnel du consortium pétrolier (Dominion Petroleum, Soco International et Cohydro), qui s’est vu attribuer le bloc 5, est particulièrement « arrogant » et, depuis le début décembre 2010, « entre dans le parc en ignorant totalement les instructions du directeur de celui-ci, avec du matériel de prospection ».
Par  Le Potentiel
Vives inquiétudes après l’attribution depuis juin 2010 à Soco International, une société pétrolière britannique, d’un bloc situé dans le parc national des Virunga au Nord-Kivu. Sur la scène internationale, des remous ne se sont fait attendre. Irina Bukova, directrice générale de l’Unesco, a fait le déplacement de Kinshasa pour rappeler Kinshasa à l’ordre. Entre le pétrole et la protection de la biodiversité, Kinshasa a fait son choix.
Le dossier est pris au sérieux au plus haut niveau de l’échiquier international que la directrice générale de l’Unesco, Irina Bukova, s’est vue dans l’obligation de faire le déplacement de Kinshasa pour s’enquérir de la situation auprès des autorités congolaises. La pomme de discorde est bien évidemment l’attribution depuis juin 2010 à Soco International, une société pétrolière britannique, du bloc 5 du rift albertin Est, situé en plein cœur du parc national des Virunga, au Nord-Kivu. Or, le parc des Virunga est classé depuis des années patrimoine mondial de l’humanité. Donc, relevant de la compétence partagée entre l’Etat congolais et l’Unesco qui en assure la sauvegarde au niveau international.
Que l’Etat congolais attribue unilatéralement un permis de recherche dans le périmètre du parc des Virunga, cela ne pouvait qu’irriter l’Unesco. Ce qui a valu le déplacement pour Kinshasa de sa directrice générale pour faire entendre, de vive voix, aux autorités sa désapprobation.
Tiraillée de tous côtés, Soco International tente tant bien que mal de mener à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, une opération de marketing pour se faire blanchir auprès de la population, en s’efforçant de présenter la meilleure face de son projet. Mais elle rencontre des résistances, notamment de la part de l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN) et des ONG locales.
Du côté de Soco International, l’on semble minimiser l’affaire, faisant foi à l’ordonnance présidentielle qui lui donne l’autorisation de prospecter dans le périmètre du parc. De l’autre côté, l’ICCN a promis de faire valoir ses droits en ne ménageant aucun effort pour faire barrage à Soco.
Le déplacement de Kinshasa
Lors de son dernier séjour à Kinshasa, Irina Bukova n’a pas manqué d’évoquer le sujet lors d’une réunion à la Primature sur l’état des lieux des sites congolais, classés patrimoine mondial de l’humanité, dont en bonne position le parc des Virunga.
Organisation inter et non gouvernementales, donateurs et autorités congolaises à Kinshasa, tous, autour du Premier ministre, Adolphe Muzito, ont débattu du sujet. Un rendez-vous diplomatique pour réfléchir aux mesures à prendre pour restaurer et sauvegarder ces sites en péril et «redéfinir le soutien apporté par la communauté internationale et adopter les grandes lignes d’un plan d’action ».
Virunga, Garamba, Kahuzi-Biega, Salonga, Réserve de la faune à Okapis. Cinq parcs nationaux riches d’une biodiversité unique, qui ne font pourtant pas le poids face à l’exploitation minière artisanale illégale qui pour l’UNESCO, « a un impact sur plusieurs sites, tandis que l’attribution de nouvelles concessions minières et pétrolières pourrait affecter leur statut de sites du patrimoine mondial ». Certaines espèces rares arpentent pourtant cette région des Grands Lacs africains, comme le gorille de Grauer, l’okapi – figurant sur la liste rouge des animaux menacés par l’UICN - ou le rhinocéros blanc du Nord pour n’en citer que quelques-uns de ces animaux en voie de disparition.
Mais, Kinshasa a fait fi de toutes ces spécificités, en accordant à Soco International, sans référence à l’Unesco, un permis de recherche sur un périmètre protégé suivant des accords et conventions internationales dûment ratifiées par la RDC.
José Endundo Bononge, ministre de l’Environnement et Conservation de la nature et Tourisme, a beau se défendre. Mais, l’acte posé par le gouvernement traduit la légèreté dans la gestion de la chose publique. Bien plus, il est la preuve de l’ignorance de certaines dispositions sur lesquelles la RDC se doit de se conformer. Car, bien que situés en RDC, les sites considérés par l’Unesco, agissant par mandat de la communauté internationale, font l’objet d’une gestion partagée entre la communauté internationale et les Etats qui les hébergent.
En accordant de manière unilatérale à Soco International un permis de recherche pétrolière dans le périmètre du parc des Virunga, le gouvernement a fait preuve d’une immaturité déconcertante qui frise le ridicule pour un Etat qui se veut respecté et respectable. Comment en est-on arrivé là ? N’y a-t-il pas eu d’experts au niveau du ministère des Hydrocarbures ou de l’Environnement pour ramener le gouvernement sur le droit chemin ?
Ainsi, comme dans les circonstances antérieures, presque similaires – rappelez-vous des carrés miniers attribués ça et là par le Cadastre minier – l’argent a circulé pour que tout le gouvernement soit frappé d’amnésie en faisant passer un dossier qui ternit au niveau international l’image de la RDC qui mérite, comme l’a si rappelé le sénateur, son qualificatif de « République des inconscients ».
En 2000, signale-t-on, la Fondation des Nations unies (FNU) et l’Unesco ont pourtant lancé un vaste chantier de 4 ans pour « conserver la biodiversité en zones de conflits armés » en RDC. Jusqu’en juin 2010 lorsque Soco a reçu droit par ordonnance présidentielle d’explorer dans le parc des Virunga, le gouvernement était totalement ignorant de cette initiative. Alors qu’à ce propos, un projet-pilote de 2,15 millions d’euros réalisé par l’Unesco, l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICNN), la coopération technique allemande et d’autres ONG.
Colère de la Banque mondiale
Comme l’on pouvait s’y attendre, la Banque mondiale n’a pas tardé à réagir à la décision de Kinshasa d’attribuer à une société pétrolière un bloc dans le périmètre du parc des Virunga
Le 30 novembre 2010, rapporte La Libre Belgique, la Banque mondiale a adressé une lettre au Premier ministre Adolphe Muzito, soulignant que « le démarrage des opérations » pétrolières dans le parc « contredira la volonté affichée par la RDC dans les fora internationaux et portera une atteinte certaine à son image d’acteur international », alors que l’établissement « recommence à accueillir des touristes » et pourrait être « un acteur majeur de l’économie locale du Kivu ».
Selon la même source, la lettre priait surtout le Premier ministre de « confirmer » à la Banque mondiale « l’engagement de la RDC à préserver l’intégrité du Parc national des Virunga afin de nous permettre de poursuivre nos financements dans le domaine de la conservation de la nature et du développement durable des forêts en RDC », alors que l’exploitation pétrolière dans le parc « ne pourra pas respecter l’intégrité des richesses en biodiversité du parc et ce, en conformité avec les engagements légaux de la RDC ». C’est, sans doute, ce qu’est venu chercher la semaine dernière, la directrice générale de l’Unesco lors de son passage à Kinshasa.
La RDC a donc intérêt à laver le plus rapidement possible l’affront dont elle se couvre vis-à-vis surtout de la communauté internationale. En urgence, il s’agit de ramener Soco International en obtempérer dont elle fait montre sur le terrain. Car, de plusieurs sources, confirme par ailleurs La Libre Belgique, le personnel du consortium pétrolier (Dominion Petroleum, Soco International et Cohydro), qui s’est vu attribuer le bloc 5, est particulièrement « arrogant » et, depuis le début décembre 2010, « entre dans le parc en ignorant totalement les instructions du directeur de celui-ci, avec du matériel de prospection ».

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