lundi 6 juin 2011

RDC : Crise de confiance entre «Joseph KABILA» et la communauté internationale



05/06/2011 
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Joseph KABILA et son homologue francais Nicolas SARKOZY.

Selon des observateurs, le climat diplomatique est de plus en plus délétère dans la capitale congolaise. On assiste manifestement à une crise de confiance entre «Joseph Kabila» et certains acteurs de la «communauté internationale».

Le ministre congolais des Affaires étrangères, Alexis Thambwe Mwamba a pris la très fâcheuse habitude de convoquer les chefs des missions diplomatiques en poste à Kinshasa au pour leur transmettre des «communications» pouvant faire l’objet d’une simple «note verbale». Le 1er mars dernier, le corps diplomatique était réuni au « Salon rouge» pour une communication notamment sur les élections, la crise ivoirienne et situation en Libye. Jeudi 3 juin, Thambwe a récidivé. Il a invité ses interlocuteurs à un «devoir de neutralité» en perspectives des échéances électorales.

Selon des observateurs, le climat diplomatique est de plus en plus délétère dans la capitale congolaise. On assiste manifestement à une crise de confiance entre «Joseph Kabila» et certains acteurs de la «communauté internationale» qui lui avaient apporté un soutien sans faille lors de l’élection présidentielle de 2006.
Analyse

Le ministre congolais des Affaires étrangères a donc réuni, jeudi 3 juin 2011, les ambassadeurs et chefs des missions diplomatiques accrédités en RD Congo pour leur transmettre «une brève et importante communication» relative «à la tenue prochaine des élections». Après avoir réitéré la «ferme volonté» du chef de l’Etat et du gouvernement congolais «d’organiser des élections libres, transparentes et démocratiques auxquelles tous les prétendants à la magistrature suprême devront prendre part en toute liberté», le ministre Thambwe a attiré l’attention de ses interlocuteurs sur «le souhait» du gouvernement congolais «de voir le corps diplomatique fasse preuve de NEUTRALITE ABSOLUE. (sic !)».

Thambwe d’expliquer que les autorités congolaises ne verraient aucun inconvénient à ce que les diplomates prennent langue avec des «opérateurs politiques de tout bord». «En revanche, précisera-t-il, le gouvernement (…) n’accepterait cependant pas que les ambassades deviennent des officines où se peaufineraient des stratégies politiques d’appui à l’opposition politique et d’intrusion pure et simple dans la politique intérieure» de la RD Congo. Et de conclure son sur un ton comminatoire en invoquant «le droit» de l’Etat congolais «de tirer les conclusions qui s’imposent au cas où une mission diplomatique irait bien au-delà de la mission lui dévolue (…).»
Le «nouveau chouchou» de l’Occident

L’article 41 de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques astreint les diplomates au respect des lois ainsi qu’à la non-immixtion dans les «affaires domestiques» du pays d’accueil. Comment pourrait-on garantir l’observation stricte de cette disposition pour le moins idéaliste entre Etats inégaux ? Quels sont les moyens de pression dont dispose la RD Congo - un Etat largement dépendant de l’aide extérieure – face aux représentants de l’Union européenne ou ceux des pays tels que les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni ? La «communication» du ministre Thambwe ressemble fort à de la «gesticulation diplomatique». Une manière de casser le thermomètre en espérant éradiquer la fièvre. Question : comment en est-on arrivé là alors que tout semblait baigner dans l’huile?

Le 16 janvier 2001, le président Laurent-Désiré Kabila, qualifié mondialement d’«imprévisible», meurt dans des circonstances non-élucidées à ce jour. Suite à un «vote secret» (dixit Léonard She Okitundu au quotidien «Le Monde»), le gouvernement et les chefs militaires ont désigné le général-major Joseph Kabila pour assurer l’intérim à la tête du pays. Le 26 janvier, «Joseph» est investi. Le nouveau président est soutenu par deux lobbies. Au plan interne, il y a le lobby luba du Katanga qui lui décerne la «qualité» de « Muluba du Katanga à 100%», par la bouche du Grand Chef Kasongo Nyembo. A l’extérieur, il y a un nébuleux lobby occidental incarné notamment par Louis Michel, alors ministre belge des Affaires étrangères et des personnalités belges francophones. Le ministre Michel n’a que des éloges sur la «grande capacité d’écoute» du successeur de Mzee.

A Bruxelles, New York, Paris et Washington, le tapis rouge est déroulé sous les pieds du nouveau chef de l’Etat congolais. Nul doute que l’homme est le «nouveau chouchou» de l’Occident. «Kabila impressionne à Bruxelles», titre le quotidien bruxellois «Le Soir» daté du 5 février 2001. «Joseph Kabila, nouvel espoir de la paix en RDC», renchérit le très sérieux journal français «Libération» du 4 février 2001. «Mobutu était le diable, Joseph Kabila est plus humble», commentait un journaliste belge.
Imposteur

Qui est «Joseph Kabila»? Où est-il né ? Quel est son parcours ? Quid de sa filiation avec le défunt président? Ce sont des interrogations qui turlupinaient et continuent à turlupiner les Zaïro-Congolais. «Joseph» a été bombardé président de la RD Congo sans qu’il ait détenu la «nationalité congolaise d’origine» puisqu’il a fait, selon sa mère putative Sifa Mahanya, son service militaire en Tanzanie. Pire, le «CV» du « raïs » demeure un mystère. Ce n’est que le 16 décembre 2002, qu’une dépêche de l’Agence France Presse est venue donner quelques bribes d’informations. L’homme «serait» né le 5 juin 1972 à Lulenge dans le maquis de LD Kabila. Le réquisitoire lu lors de l’investiture par le procureur général de la République d’alors, Luhonge Kabinda Ngoy, mentionne «Hewa Bora II» - une dénomination fictive donnée par LD Kabila à son maquis - comme lieu de naissance du nouveau président. Avant de porter le patronyme de Kabila, le quatrième président congolais s’appelait Kabange, Mtwale, Hyppolite.

«Pour des raisons de sécurité», explique Célestin Kabuya Lumuna dans son ouvrage « Les quatre présidents du Congo». Dans son opuscule «Pourquoi j’ai choisi Kabila», Vital Kamerhe situe le lieu de naissance du «raïs» à Fizi. L’historien belge Erik Kennes écrit dans «Essai biographique sur LD Kabila », publié chez L’Harmattan, que Joseph Kabila est né tantôt à Yungu (p.229), tantôt à Mpiki (p.298). Joseph Kabila est-il réellement l’homme qu’il prétend être ? Aux journalistes qui l’interrogent à ce sujet, l’intéressé de lancer : « Le chien aboie la caravane passe. Il y a de fois où la caravane écrase le chien.» Confronté à la même situation, Barack Obama a fait publier son acte de naissance par le service d’état civil de l’Etat d’Hawaï.
«Le nouveau Kabila»

La communication faite par le ministre Thambwe aux diplomates est révélatrice d’un vrai malaise frisant une crise de confiance entre le président sortant congolais et ceux qui l’ont fait roi en 2006. Lors de ce scrutin, la «communauté internationale» a fait preuve d’un interventionnisme sans précédent jusqu’à «interdire» certains thèmes touchant au parcours personnel du président-candidat. «Tout ce qui s’apparente à des discussions de type ethnique ou identitaire est à rejeter. Ce sont des débats de société qu’il faut avoir (…)», déclarait Louis Michel dans une interview accordée à l’hebdomadaire «Jeune Afrique» n°2355 daté du 25 février 2006. L’Occident a mis en jeu la somme de 450.000 $US pour financer les élections. Il escomptait, en contrepartie, voir les entreprises du monde occidental bénéficier des marchés dans le cadre de la «reconstruction». Hélas, la «jeune démocratie congolaise» reste bien fragile. La première «alerte» a lieu, le 20 août 2006, lorsque des éléments de la garde prétorienne de Kabila pilonnent au mortier la résidence de son challenger Jean-Pierre Bemba Gombo. Celui-ci y recevait une délégation des ambassadeurs des pays membres du CIAT (Comité international d’accompagnement de la transition).

En novembre 2006, « Joseph Kabila » est proclamé «vainqueur» face Bemba qui lâche une phrase qui continue à susciter la controverse dans les milieux congolais : «J’ai accepté l’inacceptable». Le leader du MLC voulait-il dire que la nébuleuse «communauté internationale» l’a dépossédé de sa victoire au profit de «l’homme à la grande capacité d’écoute» ? Dans un entretien au «Soir» de Bruxelles, daté 16 novembre 2006, le «président élu» révèle un pan de sa véritable personnalité : «Beaucoup de gens ne connaissent pas le président Kabila. Ils se trompent s’ils pensent qu’après les élections ce sera la même chose que pendant la transition. Ce sera la rigueur, et surtout la discipline, car sans la discipline, on ne peut pas construire une nation.»

En réalité, «Joseph», moulé dans la culture de la violence par son passé de soldat de l’Armée patriotique rwandaise (dixit Denis Polisi, ancien secrétaire général du FPR – voir page 141 de l’ouvrage «Les nouveaux prédateurs» de Colette Braeckman), n’a aucun projet ni grand dessein pour la RD Congo. Il n’a rien à proposer à la population sauf la violence.

Le 6 décembre 2006 a lieu l’investiture du «président élu». Le Premier ministre belge d’alors, Guy Verhofstadt, a fait le voyage de Kinshasa en compagnie de «son» chef de la diplomatie, Louis Michel. «Je vous annonce la fin de la recréation», clame le «raïs» avec emphase lors de son allocution inaugurale. Dès le lendemain de cette cérémonie, l’homme change tous ses numéros de téléphone. Il devient injoignable. Et ce, même pour ces anciens parrains. Le président a apparemment pété un plomb.
Dérive autoritaire

Au mois de janvier 2007, sous prétexte de rétablir l’autorité de l’Etat, des membres du «bataillon Simba» de la police nationale massacrent des adeptes du mouvement politico-religieux «Bundu dia Kongo» dans la province du Bas-Congo. L’opération est rééditée en février 2008. Bilan total : 400 morts. «Ce qui s’est passé dans le Bas-Congo, confie «Joseph» au «Soir» daté 24 avril 2008, n’était pas une simple manifestation de mécontentement, il s’agissait d’une rébellion en gestation, d’une révolte contre les institutions établies. Il y avait un grand projet de déstabilisation qui a été déjoué et il a fallu sévir avec rigueur.» Fin mars 2007, le tout-Kinshasa assiste avec stupeur aux affrontements sanglants entre la garde rapprochée de Bemba et les éléments de la garde de Kabila. Bilan : 600 morts.

La communauté internationale est inquiète mais se tait. Elle est inquiète de la dérive autoritaire du régime. L’armée, la police et les services de renseignements fonctionnent dans une brutalité digne des milices.

Ancien chercheur d’Amnesty International, Andrew Philip de dénoncer «le système judiciaire qui n’offre au citoyen moyen ni défense ni recours contre les abus du pouvoir.» Pour les Occidentaux, il est urgent d’attendre avant de consentir l’assistance financière promise estimée à 2 milliards $ US. Fatigué d’attendre, «Joseph», qui en voulait 7 milliards, décide de faire appel aux Chinois à travers les fameux contrats. «Je crois donc qu’avec nos partenaires, il faut commencer à se dire quelques vérités et pas seulement d’un seul côté, confie «Kabila» au Soir du 24 avril 2008. Ma vérité à moi, c’est qu’ils n’ont pas été assez rapides. Chez moi à Ankoro, on dit ceci : «Deux promesses non tenues, c’est déjà un mensonge». On m’a fait tellement des promesses.»

La décision de Joseph Kabila de faire modifier certains articles de la Constitution «sans un vrai débat», à quelques mois des élections, à sceller ce qui ressemble bien à une «crise de confiance» entre les alliés d’hier. Comme son prédécesseur, le «raïs» est gratifié de l’épithète «imprévisible». Lors d’une récente rencontre avec des Congolais de Belgique, le MR Charles Michel a surpris l’assistance en martelant : «Kabila nous a déçus !». Loin est donc l’époque où l’autre Michel, prénommé Louis, déclarait sans sourciller : «Joseph Kabila incarne l’espoir pour le Congo».

Les Congolais seraient mal inspirés de croire que la «communauté internationale» a pris la résolution de faire «dégager» «Joseph Kabila». Comme en Tunisie et en Egypte, cette mission incombe aux citoyens. C’est à dire aux Congolais. La communauté internationale se contentera d’accompagner la dynamique nouvelle impulsée par les filles et fils du pays...
Baudouin Amba Wetshi
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