lundi 19 novembre 2012

CHAOS EN RDC : les Casques bleus et la stratégie de l’ange bleu

November 18, 2012


Le 14 juillet 1960, le Conseil de Sécurité vote une résolution conforme aux vœux du gouvernement congolais, qui demande à la Belgique de retirer ses troupes du territoire de la République du Congo et autorise le secrétaire général de l’ONU, Dag Hammarskjöld, à fournir une assistance technique militaire au gouvernement congolais jusqu’à ce que les forces armées congolaises soient en mesure de remplir entièrement leurs tâches.


L’Organisation des Nations Unies au Congo (ONUC) venait de voir le jour. Mais au lieu de prendre fait et cause pour le gouvernement légitime du pays, les casques bleus mettent sur le même piédestal la province sécessionniste du Katanga soutenue par la Belgique et le gouvernement congolais.

De fait, les Nations Unies entérinent la situation néocoloniale au Katanga. Que d’assurer le maintien de la paix et le rétablissement de l’ordre, les casques bleus des Nations Unies se mirent au service de la déstabilisation du gouvernement congolais allant jusqu’à prendre part à l’assassinat du premier chef de gouvernement du Congo, Patrice Emery Lumumba.

Les 2 000 hommes de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL), créée en 1978, pour confirmer le retrait des troupes israéliennes du sud du Liban et restaurer « la souveraineté de l’État libanais », n’ont pas empêché le pays de sombrer dans la violence.


En avril 1994, alors que le Rwanda est pongé dans une spirale de violence la plus extrême, les États-Unis et la Belgique exigent le retrait pur et simple des casques bleus de la Mission des Nations Unies (MINUAR) du pays.

Dans la correspondance qu’il adresse au secrétaire générale de l’ONU, Boutros Boutros-Ghali, le ministre belge des Affaires étrangères Willy Claes─ qui plus tard sur recommandation américaine sera récompensé par une nomination au poste de secrétaire général de l’OTAN ─, recommande « la suspension de la mission de la MINUAR » dont l’utilité est devenue « sans objet ».

Devant la levée de bouclier de plusieurs pays, l’oncle Sam menaça d’opposer son veto à toute initiative tendant à maintenir la force onusienne au pays des mille collines.

L’ONU venait, par cet acte, de condamner à mort des milliers de Rwandais au moment où ces ceux-ci avaient plus que jamais besoin de son aide. Le contingent militaire onusien passera de 3000 à 270 hommes, pour la plupart des contingents ghanéen et bangladais. Boutros-Ghali déclarera plus tard que « le génocide rwandais est à 100% de la responsabilité américaine ».

L’opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD), créée le 31 juillet 2007 après l’adoption de la résolution 1769 du Conseil de sécurité, a pour mandat de protéger les civils, assurer la sécurité de l’aide humanitaire, de surveiller et de vérifier l’application des accords, de favoriser un processus politique ouvert, de contribuer à la promotion des droits de l’homme et de l’État de droit et de surveiller la situation le long des frontières avec le Tchad et la République centrafricaine (RCA) et en rendre compte.

Mais depuis, la situation sur le terrain n’a pas changé, elle est allée en s’aggravant. En Côte d’Ivoire, les casques bleus de l’Opération des Nations Unies (ONUCI), que d’assurer le maintien de la paix, ont plongé le pays dans le désordre.


Depuis 1999, les 17000 hommes de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) sont incapables d’assurer la sécurité des populations civiles dans les régions de l’Est en proie à l’insécurité entretenue par des groupes armés soutenus par les pays voisins. Actuellement, de violents affrontements opposent l’armée congolaise aux éléments rwandais du M23.

Que fait la MONUSCO?

Elle observe. Pendant ce temps, des hommes, des femmes et des enfants sont massacrés, des centaines de milliers d’autres déplacés, et le pays est pillé. Les Congolais sont indignés.

«En tout cas, je ne sais pas ce que fait la MONUSCO», soutient Nathalie interviewée par un média étranger. Ils sont venus au Congo pendant la guerre pour protéger les Congolais, surtout ceux de l’Est. Malgré leur présence sur place, il y a toujours la guerre.

Le viol continue, les tueries et les déplacements des populations», déplore-t-elle. Son jugement est sans appel: «Ils ne font rien pour protéger la population. Je crois qu’ils sont là pour faire autre chose que la population ignore.»

Mais à quoi servent les casques bleus de l’ONU? En réalité, pas grand-chose si ce n’est défendre les intérêts de certaines puissances.



Si la MONUSCO n’est pas plus efficace que ne l’ont été la MINUAR au Rwanda en 1994, la FINUL au Liban en 1978 ou encore l’ONUCI en Côte d’Ivoire… c’est simplement parce qu’on ne veut pas qu’elle le soit.

Nous assistons à ce que le général Bricmont a appelé la « stratégie de l’ange bleu », c’est-à-dire une stratégie de déstabilisation globale qui consiste à faire semblant de s’occuper d’un problème alors qu’en réalité on ne n’en occupe pas.

Peut-être faudrait-il également s’intéresser aux motivations de ces « soldats de la paix », et donc à l’origine même du concept (casque bleu), alors que les casques bleus sont perçus par l’opinion publique comme une nécessité pour mettre fin aux conflits dans le monde.

En 1956, lorsque le premier ministre canadien, Lester B. Person, alors président de l’Assemblée générale des Nations unies, dépose une résolution pour la création d’une force internationale d’intervention d’urgence ─ précurseur du concept des Bérets bleus et des Casques bleus, faisant ainsi de M. Pearson le père du concept international du maintien de la paix; le prix Nobel de la paix qu’il a reçu pour l’initiative en témoigne incontestablement ─ en vue de régler la crise de Suez, l’objectif visé, mais non avoué, est de confier à des organisations comme l’ONU et le Commonwealth, le soin de défendre les intérêts de l’Occident, pour ne pas frustrer l’URSS et certains États du Sud─ Guerre froide oblige.

Plus concrètement, le Canada s’efforçait de maintenir l’unité et la cohésion d’organisations internationales essentielles aux intérêts de l’Occident, en particulier l’OTAN.

Par l’intermédiaire des casques bleus de l’ONU, les puissances occidentales étaient assurées d’agir sans soulever la méfiance des Soviétiques et autres États du Sud. C’est ce qui explique, en grande partie, l’incroyable attitude des casques bleus au pays de Lumumba.

Pour ainsi dire, la MONUSCO ne fait que renforcer le souci d’hégémonie des puissances qui profitent du chaos généré pour continuer à piller en toute quiétude les richesses de la RDC. Les casques bleus n’empêchent pas les massacres; ils comptabilisent seulement les morts et font rapport.

« Ils sont des mercenaires de la paix, note un diplomate. Mais ils restent avant tout des mercenaires. On ne peut donc pas leur demander d’aller se faire tuer comme des soldats défendant leur terre ou leur pays.»

Chose certaine : l’évocation constante de cette forme mythique et idéalisée de « maintien de la paix » ne sert en fait qu’à obscurcir le véritable rôle des missions dites de « maintien de la paix » dans les zones d’importance stratégique; lesquelles missions sont utilisées encore aujourd’hui en RD Congo ─ MONUSCO ─ par les mêmes puissances du Nord pour atteindre des objectifs inavoués dans la région des Grands Lacs africains.

Patrick Mbecko

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