mardi 16 avril 2013

Le M23 n'a d'autre recours que la stratégie belliciste

mardi 16 avril 2013



D'une manière générale, le M23 (créé en 2012) n'a d'autre recours que la stratégie belliciste - appliquée depuis l'AFDL (1996) qui a donné naissance respectivement au RCD/Goma (1998), au CNDP avec le colonel Mutebusi en 2004 à Bukavu (Sud-Kivu) et avec le général Laurent Nkunda au Nord-Kivu à partir de fin 2006 - pour faire valoir ses revendications.

Ainsi, chaque fois qu'il se sent en danger ou menacé, il s'exprime par la voie militaire comme moyen pour faire la politique et consolider son assise politico-militaire et financière à l'Est de la République démocratique du Congo (RDC). Il s’agit d’une stratégie dictée par ses parrains rwandais.

On se souvient du vote le 15 novembre 1996 au Conseil de sécurité des Nations Unies de la résolution 1080 autorisant la mise sur pied d'une force multinationale temporaire de quelques 12.000 hommes sous le commandement canadien, pour assurer la protection des réfugiés dans l'Est du Zaïre et éviter la tension polarisante d'attaque des réfugiés Hutu par le FPR rwandais. (Cf Les armées au Congo-Kinshasa, p180).

Le Rwanda, sentant que cela allait déjouer ses plans d'attaque du Congo, avait devancé tout le monde en mettant au point un plan destiné à faire avorter l'intervention des forces de l'ONU.

Le jour même du vote de cette résolution, l'APR et l'AFDL soumettaient à des bombardements intensifs l'immense camp des réfugiés de Mugunga - noyau de la capacité militaire des Ex-APR et interhamwe Hutu rwandais - dans l'intention de court-circuiter le plan de l'ONU.

Cette intervention mit à mal la mise en application de la résolution 1080 en mettant l'ONU devant un fait accompli, en la mettant dans l’incapacité d’envoyer la force d'interposition. Ce fut la phase décisive de la guerre de 1996-1997 au Congo.

Ainsi, mutatis mutandis, il n'est pas exclu (ce n'est qu'une hypothèse et non une conviction) que le M23 n'use du même mode opératoire lorsqu'il se sentira de plus en plus en danger ou aura la confirmation que la brigade d’intervention de la Monusco viendra l'éradiquer.

Alors, il n'aura pas d'autre choix que celui de se renforcer militairement, en occupant éventuellement la ville de Goma (capitale du Nord-Kivu), pour placer les enchères très haut et ré-exiger le déploiement de la Brigade ou la révision de la mission de cette dernière.

Ce serait une brigade internationale dont la mission ne serait plus de neutraliser ou de traquer le M23 présenté comme un groupe négatif, mais celle d'attaquer d'autres groupes et de s'interposer entre le M23 et le reste des FARDC et autres groupes.

C'est une hypothèse plausible d'autant que les pourparlers entre le gouvernement congolais et la rébellion du M23 à Kampala (Ouganda) tendent à accoucher d'une souris ou vers l'impasse.

Or, dans la stratégie rwandaise de « Fighting and talking » clonée aussi par le M23, lorsque la négociation échoue, ce sont les armes qui reprennent le droit pour faire avancer autrement les choses...

Problèmes techniques et opérationnels à régler

Pour l'efficacité de la Brigade d’intervention composée de 3.069 hommes à venir, il y aura sans doute des problèmes techniques et opérationnels à régler avant qu'elle ne commence à mener effectivement des missions de combat sur le terrain.

Malgré l'optimisme affiché, je ne vois pas cette brigade fin prête avant début juin 2013. Et d'ici là, tout reste encore possible diplomatiquement.

De plus, une nouvelle alliance de dupes entre Kinshasa et le M23 n'est pas non plus à exclure, comme en mars 2009 avec le CNDP court-circuitant les efforts diplomatiques du moment.

C’est une hypothèse à ne pas rejeter compte tenu de la proximité du M23 avec le CNDP qui reste encore un allié politique (jusqu'à preuve du contraire) de Kinshasa.

Il serait peut-être stratégiquement mieux de laver le linge sale en famille que par l'intervention des Nations Unies, avec un accord qui rendrait caduque ou présenterait moins opportuniste la présence de cette brigade internationale. Wait and see !

D'autre part, la présence de la brigade d’intervention va provoquer à coup sûr un effet dissuasif qui aura tendance à réduire temporairement l'intensité de la violence. Elle va également provoquer un effet de déplacement des milices armées vers des zones qui ne se retrouvent pas dans le rayon d'action de la Brigade d'intervention comme en 2003 avec Artemis à Bunia...

Mais à long terme, les milices pourront se reconstituer et réoccuper le terrain si rien n'est fait au niveau congolais, c'est-à-dire « former et équiper correctement les FARDC qui ne font pas l'objet d'embargo ».

En effet, l'embargo sur les armes en RDC ne touche uniquement que les groupes armées auxquels des officiers généraux FARDC - cités dans des rapports d’experts onusiens - vendent des armes et munitions destinées aux FARDC.

Jean-Jacques Wondo
Le Potentiel

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