mardi 25 juin 2013

Dossier milice «Bakata Katanga» : Qui se moque de qui au Katanga ?

image Miliciens Mai-Mai «Bakata Katanga» 

La "démission" qu’affiche "Joseph Kabila" face à l’instabilité qui se développe au Katanga surprend plus d’un analyste. 

L'Ong de défense des droits humains, Justicia a.sb.l., invite "Joseph Kabila" à faire une "déclaration publique pour clarifier sa position" sur l’insécurité pour les personnes et les biens qui se développe dans la province du Katanga. 

Suite à l’attaque de la Prison centrale de Kasapa, menée dans la nuit du 22 au 23 juin, par les désormais fameux "maï maï Ba Kata Katanga", Justicia a.sb.l. invite "Joseph Kabila" à faire une "déclaration publique pour clarifier sa position" sur l’insécurité pour les personnes et les biens qui se développe dans la province du Katanga. C’est ce qu’indique cette association de défense des droits humains dans un communiqué daté du dimanche 23 juin 2013.

Le 23 mars dernier, les maï maï "Ba Kata Katanga" faisaient irruption dans la ville de Lubumbashi. Les autorités provinciales semblaient prises de cours. La suite est connue. Trois mois après, ces miliciens ont récidivé en attaquant la prison centrale de la Kasapa.

L’attaque a eu lieu dans la nuit du samedi 22 et dimanche 23 juin. Ils ont tenté sans succès de faire évader un officier de l’armée congolaise (FARDC), non autrement identifié. Les assaillants ont cependant été trouvés en possession d’une tenue militaire portant le nom d’un certain capitaine Ngoy Mutonkole.

C’est la deuxième fois, en l’espace de deux ans, que des combattants maï maï osent narguer les pouvoirs publics dans une opération de ce genre. La première date du 7 septembre 2011 au cours de laquelle l’ex-chef milicien Kyungu Mutanga, alias "Gédéon" a pu "faire la belle".

Dimanche, des observateurs dissimulaient mal leur stupéfaction face au silence du pouvoir kabiliste tant au niveau provincial que national. Le très volubile ministre des Médias, Lambert Mende Omalanga, est devenu économe de sa parole. "Joseph Kabila" qui concentre toutes les affaires sécuritaires entre ses mains n’est ni audible ni visible. Rien de bien nouveau.

"Kabila est plus préoccupé par 2016 que par les actions des maï maï au Katanga, commente un observateur. Le président de la République devait prononcer un discours le 2 juin dernier pour donner des orientations aux 500 participants aux concertations nationales. Rien ne s’est passé.

Depuis lors, il se fait invisible". Et d’ajouter: "Il devait par la suite prononcer un discours de clôture de ces assises le 30 juin prochain". On note la même "discrétion" au niveau du Parquet général de la République, de l’Agence nationale de renseignements (ANR), de l’ex-Demiap (renseignements militaires) et de la garde présidentielle dite garde républicaine, dirigés pourtant par des natifs du Katanga.

Il en est de même des ministères de l’Intérieur, de la Défense nationale et de la Justice. A quel jeu se livre ce beau monde?

Vacuité au sommet de l’Etat

 

Face à ce qui ressemble bien à une vacuité délibérée au sommet de l’Etat, Justicia A.s.b.l, se dit "surprise" par l’insécurité qui prend des proportions inquiétantes dans la province du Katanga. Pour cette association, il s’agit d’une "insécurité voulue et provoquée" par des miliciens qui appartiendraient tantôt à une organisation dénommée "Corak", tantôt "Kata Katanga".

Se fondant sur des "informations concordantes", ce groupement signale l’attaque de certaines positions des FARDC "vers la route Kinsevere et le village Shindaika par les miliciens mai mai, Corak ou Kata Katanga".

Après avoir rappelé la bruyante entrée, des Bakata Katanga, le 23 mars, à Lubumbashi, "sous prétexte de se rendre aux autorités congolaises", l’association de relever qu’une "commission parlementaire instituée à cet effet a remis au bureau de l’Assemblée nationale un rapport d’enquête au mois d’avril".

Quel est le sort réservé à ce rapport? Nul ne le sait. Justicia a.s.b.l. de noter que ce rapport "aurait du être examiné de toute urgence mais dont la lecture a été renvoyée aux calendes grecques pendant que la situation sur terrain ne fait que pourrir et les commanditaires vaquent librement et en toute impunité à leurs activités criminelles".

"En outre, poursuite-elle, en septembre 2011, des éléments armés avaient lancé un assaut sur la prison centrale de la Kasapa et avaient réussit à y extraire près d’un millier des personnes ainsi que le Seigneur de guerre Gédéon Kyungu Mutanga, lequel, quelques mois âpres, a réussit à mettre à feu et à sang certains territoires du Nord Katanga".

Incapacité ou complicité?

 

Justicia a.s.b.l. de se poser des questions sur le "manque d’intérêt" qu’affichent les gouvernants congolais face à la détérioration de la situation sécuritaire au Katanga. Est-ce par "incapacité institutionnelle" ou par "complicité frisant la haute trahison?", s’interroge-t-elle.

Dans son communiqué, cette association fait, par ailleurs, état d’une lettre datée du 6 mai 2013 adressée à toutes les autorités politico-administratives et aux agences des Nations Unies. L’auteur de cette missive serait le "Mouvement pour l’indépendance du Katanga". Celui-ci y affirme sa volonté de "développer des stratégies pour des attaques généralisées de la ville de Lubumbashi au 30 juin 2013".

Dans ses "recommandations", Justicia a.s.b.l invite "Joseph Kabila" "en sa qualité de garant de la nation" à faire "ne serait-ce qu’une déclaration publique pour clarifier sa position sur ces incidents qui continuent à mettre en péril des nombreuses vies des compatriotes et qui a des répercussions néfastes sur l’économie et la vie sociale des habitants de la province du Katanga".

Deux poids, deux mesures...

 

La "démission" qu’affiche "Joseph Kabila" face à l’instabilité qui se développe au Katanga surprend plus d’un analyste. En 2007 et 2008, l’homme avait fait preuve d’ardeur pour broyer la vie de plusieurs centaines d’adeptes du mouvement politico-religieux "Bundu dia Kongo". Ceux-ci étaient accusés de sédition.

Les opérations ont été menées par des éléments du tristement célèbre "Bataillon Simba", commandé à l’époque par un certain major Christian Ngoy Kenga-Kenga, sous la supervision du "général" John Numbi Banza. Les victimes protestaient contre un vote truqué lors de l’élection du gouverneur et du vice-gouverneur de la province du Bas-Congo.

Bilan : 304 morts et plusieurs blessés. On se souviendra des moyens militaires déployés, fin 2010 et avril 2011, dans la province de l’Equateur, pour «mâter» les «Enyele» dans le district du Sud Ubangi.

La Monusco - dont les éléments «cohabitent» avec les rebelles du M-23 dans les «territoires occupés» au Nord Kivu - était venue à la rescousse des «forces loyalistes» pour traquer les "insurgés".

Deux poids, deux mesures?

Revenons au Katanga. Les observateurs sont affligés par le discours ambigu tenu par les autorités provinciales. Lors de l’entrée des maï maï à Lubumbashi le 23 mars, un conseiller du gouverneur Moïse Katumbi laissait entendre, sans rire, que "les maï maï sont entrés à Lubumbashi pour se rendre aux autorités provinciales".

Lors de l’attaque, plusieurs semaines auparavant, de la localité de Kinsevere près de Lubumbashi, Katumbi a fait une communication le 18 février à la presse locale disculpant les maï maï. "Ce ne sont pas les maï-maï mais des bandits qui ont tué sept personnes", déclarait-il.

Quel sont les faits matériels qui lui permettaient de faire une telle affirmation? Président de l’Assemblée provinciale du Katanga, Gabriel Kyungu wa Kumwanza va inviter les combattants maï maï "à déposer les armes pour intégrer les FARDC". Qui se moque de qui au Katanga?

[Baudouin Amba Wetshi]
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Ci-après, le texte intégral du communiqué de Justicia a.s.b.l :

COMMUNIQUE DE PRESSE N° 008/2013

 

Attaque de la prison centrale de la Kasapa par les miliciens Maï Maï : Des mesures sécuritaires doivent être renforcées pour protéger cette institution pénitentiaire

Justicia Asbl, une organisation de promotion et de défense des droits de l’homme et du Droit international humanitaire basée au Katanga en république Démocratique du Congo est surprise de la recrudescence de l’insécurité dans la province du Katanga, insécurité voulue et provoquée par des miliciens, tantôt se nommant mai mai, tantôt CORAK et parfois Kata Katanga.

Dans la nuit de samedi à dimanche 23 juin 2013 vers 1 H 30 du matin, un groupe de personnes, dont le nombre n’est pas déterminé, provenant de la Commune Annexe et avançant en file indienne vers la prison centrale de la Kasapa, située à 6 km du centre ville de Lubumbashi , a été appréhendé par un militaire en tenue civile assurant la surveillance de la prison, alors qu’il allait se soulager dans la brousse située à proximité de la prison.

Ce dernier alertera ses collègues restés à la guérite qui se déploieront tout au tour du centre pénitentiaire. Ces miliciens arrivés au niveau du centre de controle ouvriront le feu et en riposte, les éléments FARDC commis à la garde de la prison tueront un milicien mai mai, blesseront un autre au niveau des côtes et mettront la main sur un troisième sur qui il sera trouvé une tenue militaire sur laquelle était inscrite Capitaine Ngoy Mutonkole.

Des informations concordantes font état de l’attaque de certaines positions FARDC vers la route Kinsevere et village SHINDAIKA par les miliciens mai mai, CORAK ou Kata Katanga.

Pour rappel, le 23 mars 2013, des colonnes de centaines des miliciens dits Kata Katanga ont sillonné presque toute la ville de Lubumbashi sous prétexte de se rendre aux autorités congolaises.

Apres leur neutralisation, ils ont été acheminés à la prison de Ndolo à Kinshasa ou ils subissent un interrogatoire, pendant que les enfants ayant été recruté dans ce mouvement ont été confiés aux organisations de protection de l’enfant qui les hébergent dans une maison d’accueil.

Une commission parlementaire instituée à cet effet a remis au bureau de l’Assemblée nationale un rapport d’enquête au mois d’avril, lequel aurait du être examiné de toute urgence mais dont la lecture a été renvoyée aux calendes grecques pendant que la situation sur terrain ne fait que pourrir et les commanditaires vaquent librement et en toute impunité à leurs activités criminelles.

En outre, en septembre 2011, des éléments armés avaient lancé un assaut sur la prison centrale de la Kasapa et avaient réussit à y extraire près d’un millier des personnes ainsi que le Seigneur de guerre Gédéon Kyungu Mutanga, lequel, quelques mois âpres, a réussit à mettre à feu et à sang certains territoires du Nord Katanga.

Comme si la situation sécuritaire qui prévaut dans la province du Katanga n’intéressait personne, aucune institution de la République n’ose s’y pencher de manière sérieuse. Est-ce par manque d’intérêt, par incapacité institutionnelle ou par complicité frisant la haute trahison ?

Par ailleurs, dans une lettre datée du 06 mai 2013 et adressée à toutes les autorités politico administratives et aux agences des Nations Unies, le mouvement pour l’indépendance du Katanga affirme développer des stratégies pour des attaques généralisées de la ville de Lubumbashi au 30 juin 2013.

S’agissant des derniers événements en date, il faut signaler que n’eut été le hasard ayant renvoyé cet élément FARDC à se soulager en brousse et n’eut été aussi son courage à alerter ses collègues pour des dispositions utiles, tous les éléments commis à la surveillance de cette prison seraient morts et les prisonniers libérés, surtout profitant de l’obscurité totale dans laquelle se trouve cette prison et de l’absence des moyens de communication.

Eu égard à ce qui précède, Justicia Asbl recommande :

Au Président de la République Démocratique du Congo, en sa qualité de garant de la nation :

- De faire ne serait-ce qu’une déclaration publique pour clarifier sa position sur ces incidents qui continuent à mettre en péril des nombreuses vies des compatriotes et qui a des répercussions néfastes sur l’économie et la vie sociale des habitants de la province du Katanga

A l’Assemblée nationale et au sénat :

- D’inscrire de toute urgence l’examen du rapport parlementaire sur les événements du 23 mars dernier parmi les priorités et ce à travers une cession extraordinaire pour proposer au Gouvernement et à la justice, des mesures et sanctions contre toutes les personnalités impliquées dans ces actes de terrorisme.

Aux autorités tant civiles que militaires du Katanga :

- De continuer à rassurer la population pour qu’elle ne cède pas au chantage et autres messages d’attaques et de déstabilisation de la ville de Lubumbashi

- De renforcer des mesures de sécurisation de la population et de ses biens ;

- D’électrifier aux moyens des projecteurs puissants la prison centrale de la Kasapa et ses environs et doter en matériels de communication (talkie walkie et appareils de communication) et de moyens de déplacement les éléments police et FARDC commis à la garde de la prison de Kasapa.

Aux miliciens mai mai , CORAK ou Kata Katanga :

- De recourir aux moyens pacifiques et constitutionnellement garantis pour faire valoir leur revendication

Aux Forces Armées de la RDC et autres services de sécurité :

- De continuer courageusement à se battre pour la protection des populations et de leurs biens et préserver ainsi l’unité de la nation

A la population :

- De travailler en étroite collaboration avec les services de sécurité pour dénoncer toute tentative de déstabilisation des institutions,

Fait à Lubumbashi, le 23 Juin 2013
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1.CORAK c’est la Coordination pour l’Organisation du Référendum d’autodétermination du Katanga, ce mouvement milite pour l’independance du Katanga

2.Le Tribunal Militaire Garnison de Lubumbashi a condamné à 20 ans de Servitude pénale principale et expulsion des Forces Armées de la RDC du Capitaine Ngoyi Mukonkole Chef de Bureau ordonnancement, section logistique de la 6eme Région militaire pour tentative de détournement des minutions

3. Le dimanche 16 juin 2013, des affrontements ont été signalés entre éléments FARDC et miliciens Kata Katanga au village Shindaïka à une vingtaine de kilomètres de la ville de Lubumbashi et d’autres encore sur la route Kasenga. Le bilan de ces affrontements reste pour le moins incertain.
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© KongoTimes

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