samedi 9 octobre 2010

Le pétrole congolais est-il une " manne maudite "


image Célestin MBUYU - Le ministre des Hydrocarbures de la RDC

Exploitation du pétrole et du gaz : la RDC n’a pas pris rendez-vous, demain, avec la transparence. Elle n’est pas pressée de forcer la délimitation de la frontière maritime avec l’Angola sur le plateau pétrolier de l’Atlantique. Elle entretient un mystère sur le gaz méthane du Lac Kivu, qu’exploite déjà le Rwanda. La voici entraînée dans un contentieux avec des investisseurs autour du gisement pétrolier du lac Albert, commun avec l’Ouganda. Plus inquiétant, son Code sur les hydrocarbures peine à prendre corps à l’Assemblée nationale !
Le pétrole congolais est-il une « manne maudite ? » A entendre la langue de bois qui a entouré les réponses du ministre des Hydrocarbures aux préoccupations des députés nationaux, hier vendredi, à l’Assemblée nationale, il y a lieu de croire à une opacité totale sur la politique pétrolière de la RDC. Célestin Mbuyu répliquait à la question orale avec débats à lui adressée par le député Christophe Masumbuko sur le stockage et la commercialisation des produits pétroliers. Il y est allé point par point, mais sans assouvir la soif ni des élus du peuple ni même de l’ensemble du peuple congolais qui le suivait grâce à la magie du petit écran.
Abordant la loi sur la délimitation des frontières maritimes entre la RDC et l’Angola, dossier délicat dans lequel la RDC accuse l’Angola d’exploiter illégalement des centaines de milliers de barils du pétrole de sa concession, le ministre Mbuyu a indiqué que cette question relève du ministère de l’Intérieur. Toutefois, il a fait savoir que le gouvernement congolais a fait recours à un arbitrage international et il attend.

D’UN MYSTERE A UN AUTRE

En effet, faut-il le rappeler, en mai 2009, la RDC a déposé une requête auprès des Nations unies pour l’extension de son plateau continental dans le cadre de la délimitation des frontières maritimes conformément à la législation internationale en vigueur régissant les frontières maritimes. Ainsi, dans la requête exprimée par le gouvernement congolais, l’espace maritime actuel de la RDC devrait être porté de 40 à 200 km au large de la côte, soit une étendue de 4.000 km². L’équivalent de la surface que couvre la zone pétrolière d’où l’Angola puise 500.000 barils par jour pendant que la RDC ne produit que 20.000 barils/jour.
Dans sa réponse, le ministre des Hydrocarbures a également abordé les questions relatives à l’exploitation commune du pétrole du lac Edouard (Graben Albertine) entre la RDC et l’Ouganda. Rappelons que l’attribution des blocs exploitables aux investisseurs annoncés fait du bruit sur les plans aussi bien local qu’international. Là aussi, Célestin Mbuyu a été laconique. « A ce jour, l’Ouganda ne produit pas encore du pétrole sur le Lac Albert », a-t-il déclaré. Avant d’ajouter que les négociations étaient encore en cours.
L’autre question, que l’on entoure du mystère, est relative à l’exploitation du gaz méthane du Lac Kivu entre la RDC et le Rwanda. Ici encore, le ministre a employé la langue de bois, minimisant l’avance prise par le voisin dans ce dossier. Alors qu’il est connu qu’en juillet 2009, la RDC et le Rwanda avaient signé, à Kinshasa, un avenant pour l’exploitation commune du gaz méthane du Lac Kivu en vue de produire de l’énergie électrique d’une capacité de 200 mégawatts sous l’arbitrage de la Banque mondiale.

METTRE DE L’ORDRE

Dans l’accord, les deux pays avaient convenu de se partager 100 mégawatts, chacun, pour résoudre le déficit en électricité de leurs villes situées dans cette région des Grands Lacs. Il s’agit d’abord de Bukavu et Goma d’une part, de Gisenyi et Cyangugu, d’autre part. Le ministre projette le découpage du Lac Kivu puisque, selon lui, « ni le Rwanda ni la RDC ne pourra exploiter à lui seul le gaz du lac sans risque d’explosion » du fond lacustre.
Quant au contentieux qui oppose le gouvernement à Tullow Oil et Divine Inspiration, le ministre a coupé net. « Tullow Oil n’a aucun droit de se plaindre puisqu’il sait que pour obtenir un bloc il faut une ordonnance présidentielle, ce qu’il n’a pas », a révélé Célestin Mbuyu, qui a ajouté que « officiellement, Tullow Oil n’est pas encore au courant du refus de sa candidature par le gouvernement de la RDC ».
In fine, le ministre des Hydrocarbures a mis en garde quiconque, dans les milieux des investisseurs, croit que la léthargie actuelle dans le secteur pétrolier va continuer longtemps. «Ici chez nous, le pétrole est un secteur juteux qui profite aux prédateurs. D’ici à 2015, la RDC jouira valablement de son pétrole comme d’autres Etats », a-t-il martelé.
Un coup d’œil sur les prévisions budgétaires 2011 indique que les redevances pétrolières attendues devraient intervenir à hauteur de 13 %. D’où le ministre en charge des Hydrocarbures en a appelé à la responsabilité des députés. Ils devront rapidement examiner et voter le Code des hydrocarbures afin de permettre au gouvernement de « mettre de l’ordre » dans le secteur.
(Le Potentiel)

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