lundi 22 novembre 2010

Bemba livrerait ses ex

MISE EN LIGNE LE 22 NOVEMBRE 2010 | LE SOFT INTERNATIONAL N° 1078 DATÉ 22 NOVEMBRE 2010.

Sur papier, c’est une affaire CPI-RCA mais la R-dC pourrait être mise à l’épreuve par le procès qui s’ouvre lundi à la CPI. A La Haye, on s’attendait à l’appel d’inattendus témoins et, dimanche soir, des proches du dossier n’excluaient pas des retentissants rebondissements...
Le V.I.P congolais - r-dcongolais, nous l’écriverions - de la Cour Pénale Internationale! Ainsi le présentait sobrement mais insidieusement samedi 20 novembre le journal français de référence mondiale le Monde.

Jean-Pierre Bemba Gombo, 47 ans, n’est pas le chef d’une petite bande de mauvais garçons cueilli quelque part dans l’ex-Zaïre, c’est un vrai poids lourd de la vie politique du pays que la CPI tient pour la première fois dans ses filets dans cette République Démocratique du Congo où la première guerre mondiale africaine a fait rage, dévastant tout sur son passage, faisant 5 millions de morts.

Richissime homme d’affaires, né d’une des familles les plus fortunées du pays, il est diplômé de la meilleure école de commerce de la Belgique francophone, est le patron du premier parti d’opposition au Parlement avec une soixantaine de Députés qu’il contrôle strictement.


JPB VEUT POUVOIR PARLER. Le crésus de R-dC pèse plusieurs centaines de millions d’euros, pilote lui-même son Boeing acquis à l’autre geôlier de la CPI Charles Taylor poursuivi dans les massacres et les amputations de bras survenus dans la guerre de Sierra-Léone du temps où il était à la tête du Libéria et où le chef des rebelles du Front national patriotique fit alliance avec un autre chef de la rébellion en Sierra Léone, l’Hitler d’Afrique, Foday Sankoh. Les deux hommes s’emparèrent des mines de diamants qui leur permirent de s’approvisionner en armes.

Jean-Pierre Bemba a été arrêté le 23 février 2008 dans l’une de ses villas de Belgique alors qu’il s’apprêtait à se rendre en famille dans un restaurant de la Capitale belge. Il y passait un week-end après des vacances à Faro, la cité balnéaire du Portugal où ce proche de l’ancien dictateur Mobutu possède sur les bords de la Méditerranée, à l’exemple de son modèle, une villa.

En clair, le type d’homme que rebutent toutes les organisations de gauche au monde et les associations bien-pensantes ou «consciences» du monde...

Jean-Pierre Bemba sait ce qui l’attend au bout de chemin. Au mieux, il pourrait prendre trente ans (il n’est pas interdit de rêver mais les Mandela ne courent pas la rue) ou la perpétuité.

C’est ce que nous déclarait Luis-Moreno Ocampo, le procureur de la CPI dans une interview exclusive (Le Soft International n°977 daté 19 janvier 2009) peu avant les audiences de confirmation des charges.

«La Cour peut prononcer contre une personne qui serait déclarée coupable d’un crime de sa compétence une peine d’emprisonnement de 30 ans ou plus ou une peine d’emprisonnement à perpétuité, si l’extrême gravité du crime et la situation personnelle du condamné le justifient. Il est évidemment tout à fait prématuré de discuter de la peine que M. Bemba pourrait recevoir à ce stade, alors même que l’audience de confirmation des charges est en cours. Il faut attendre d’abord une éventuelle confirmation des charges, puis le procès devant la Chambre d’instance et la procédure devant la Chambre d’appel, s’il devait y avoir un appel, et la décision finale».

Au pire, il n’ignore pas les précédents. On ne connaît pas ceux qui sont passés par la justice internationale qui ont retrouvé plus tard l’air libre en se réactivant. Au contraire, nombre n’ont pu supporter le coup: ils ont été brisés.

Depuis sa cellule de Scheveningen aux Pays-Bas, celui que ses partisans appellent affectueusement «Le Chairman», qui continue de soulever des foules dans la Capitale, chez lui en Équateur, qui continue de rallier l’opposition notamment dans les milieux de la diaspora - des autocars auraient été loués par des milieux anti-Kabila pour La Haye - n’ignore rien.

Il a conscience de s’être trouvé un jour au mauvais moment au mauvais endroit. Conscient de devoir payer cash la faute. Si la prison l’a assagi, il a juré, aux dires des proches du dossier, de ne pas devoir payer seul.

Avec l’ouverture officielle de ce procès lundi 22 novembre, il souhaite pouvoir raconter son histoire et raconter celle de son mouvement le MLC. Si, sur papier ce procès est celui de la République centrafricaine, les dégâts collatéraux pourraient être ressentis à Kinshasa.

Jean-Pierre Bemba veut pouvoir parler. Il veut raconter la chaîne de commandement des années rébellion. Il souhaite se faire entendre. Ses avocats r-dcongolais - le principal, l’avocat kinois de choc d’origine bandundu-kwiloise Nkwebe Liriss, l’associé, l’avocat du barreau bruxellois Aimé Kilolo Musamba d’origine katangaise - ont, depuis plusieurs mois, mis au point la ligne de défense. Ils entendent opposer une riposte fulgurante.

On s’attendait à l’appel d’inattendus témoins et, dimanche soir, des proches du dossier n’excluaient pas des retentissants rebondissements...

Au dernier moment, selon des proches du dossier, son team de défense aurait gommer certains témoins pour... «absence de pertinence des dépositions devant le procureur».

Mais malgré l’attente des partisans, il n’est pas évident cependant que ce procès démarre effectivement lundi 22 novembre.

Déjà que l’affaire sera appelée en début d’après-midi. On s’attendait lundi à une banale cérémonie d’identification des parties au procès avant un renvoi à une date ultérieure.

Luis-Ocampo Moreno au Soft International: «Les procès pour des crimes graves et complexes, tels que ceux qui sont reprochés à M. Bemba, peuvent prendre du temps. La complexité de la définition des crimes et des modes de responsabilité, les niveaux de preuve requis, la protection des témoins, le respect des droits des accusés et des principes du procès équitable entraînent des procédures qui prennent parfois beaucoup de temps. La procédure devant la CPI cependant est organisée de telle sorte que lorsque le procès proprement dit débute, il puisse se dérouler dans les plus courts délais possibles. Ainsi, la procédure en cours devant la Chambre Préliminaire, permet de faire en sorte que le dossier qui arrive devant les juges d’instance soit le plus possible finalisé et complet et que la plus grande partie des questions préliminaires soient d’ores et déjà réglées au moment où le procès débute et lorsque les charges sont confirmées par les juges préliminaires».
T. MATOTU
lesoftonline.net 22/11/2010

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