dimanche 9 janvier 2011

AFRIQUE : LAURENT GBAGBO CONTINUATEUR DE PATRICE LUMUMBA.

Afrique : Laurent Gbagbo continuateur de Patrice Lumumba.Un débat agite l’Afrique entière en ce moment, pour ne pas dire le monde entier, celui du vainqueur de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire. Qui des deux protagonistes, Laurent Gbagbo ou Alassane Ouattara, a remporté le scrutin du 28 novembre 2010 ω
Naturellement, les prises de positions des uns et des autres ne sont, avant tout, que le reflet des intérêts réciproques qu’ils défendent. De ce fait, on a envie de dire, personne n’a tort, personne n’a raison. Malgré tout, au-delà de la réponse à la question de savoir qui a été le vainqueur de ce duel, les élections en Côte d’Ivoire sont en train de poser un problème crucial qui dépasse très largement les seules frontières de ce pays. C’est celui de savoir, pour les peuples africains, s’il faudrait poursuivre le combat entamé depuis la fin du second conflit mondial en 1945 pour sortir de la domination étrangère, de la servitude du monde occidental, autrement dit, affronter les forces extracontinentales d’oppression d’hier toujours en vie, ou non.
L’histoire des relations Afrique/pays occidentaux continue, par-delà la proclamation des indépendances, à partir de l’année 1957 avec le Ghana, d’être caractérisée par une irrépressible propension à la subordination, par l’Occident, du continent noir. Dans l’esprit de nombreux Européens, plus généralement les membres de la classe politique, mais aussi, malheureusement, de très nombreux dirigeants africains, l’indépendance de l’Afrique ne revêt aucune signification. La souveraineté nationale, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, ne sont rien d’autre que bavardage ennuyeux, dès lors qu’il s’agit du continent noir. Il faudrait se souvenir que Jacques Chirac, grand copain, devant Dieu, des despotes africains, avait estimé que la démocratie était un luxe pour cette partie du monde. Il s’opposait, ouvertement, à François Mitterrand qui était en train de pousser les chefs d’Etats africains à ramener leurs pays respectifs à la démocratie.
Les pays occidentaux, dans leurs relations avec l’Afrique, ont pour caractéristique majeure de maquiller la défense de leurs intérêts égoïstes sous des apparences  diverses, tantôt humanistes, tantôt philanthropiques, mais, éternellement paternaliste et méprisante. Au nom des crimes de guerre, cause ô combien juste, le Président Omar el Béchir du Soudan est poursuivi par le Tribunal Pénal International. Mais, dans le même temps, Ariel Sharon d’Israël, Georges Bush des Etats Unis d’Amérique, passent tranquillement, sans la moindre inquiétude, leurs derniers jours. N’est-ce pas là une illustration scandaleuse de l’inégalité de traitement dont l’Afrique est continuellement la victime, de la part de la « communauté internationale » ω
Voici que la Côte d’Ivoire se retrouve au centre du monde à l’issue d’un scrutin, comme il s’en déroule tant un peu partout. D’où vient subitement cet intérêt pour ce petit pays, sans bombe atomique,  qui occupe une toute petite place sur la mappemonde ω Quels sont ces grands défenseurs de la démocratie en Côte d’Ivoire, qui sont souvent si muets, et dans les mêmes circonstances, dans d’autres pays africains ω Que disent-ils des récentes révélations sur les fraudes à la dernière présidentielle au Gabon ω Où ont-ils rangé leurs langues face au président biélorusse qui vient de jeter « démocratiquement » en prison sept de ses concurrents à l’élec-tion présidentielle ω
Table
I – La Côte d’Ivoire et le Congo : deux pays hautement convoités par l’Occident
 A – Une néo-colonie et un pilier de la « Françafrique » : la Côte d’Ivoire
 B – Zéro indépendance : le Congo belge.
II –  La révolte, la prison, le pouvoir, l’assassinat : Gbagbo - Lumumba.
 A – Patrice Lumumba et le MNC
 B – Laurent Gbagbo et le FPI
II –  Double « Non » : à Léopoldville et à Abidjan.
A - Le discours de l’indépendance de Patrice Lumumba.
B – Zéro Paris le 14 juillet 2010 par Laurent Gbagbo.
IV – ONU en 1960,  « communauté internationale » en 2010.
 A – Le rôle trouble de l’ONU  en Afrique : Togo, Cameroun, Congo « belge ».
 B – Le rôle trouble de la « communauté internationale » en Côte d’Ivoire.
V – Crise ivoirienne et enjeu de libération nationale en Afrique
 A – L’arbre qui cache la forêt : le scrutin du 28 novembre 2010
 B – Briser les chaînes de la vassalité.
Tableau comparatif de la lutte de Patrice Lumumba et de celle de Laurent Gbagbo contre l’Occident.
Patrice LumumbaLaurent Gbagbo
1956Emprisonnement pour une annéeMars 1971Emprisonnement par Houphouët-Boigny pour 2 ans
21 juin 1960Emprisonnement pour six mois6 mars 1992Emprisonnement par Alassane Ouattara pour 2 ans
23 juin 1960Accession au pouvoir13 nov 2000Accession au pouvoir
Juillet 1960Sécession du Katanga suscitée par les pays occidentaux19 sept 2002Rébellion dans le Nord suscitée par les pays occidentaux
4 sept 1960Limogeage de Patrice Lumumba par Kasavubu23 jan 2003Tentatives diplomatiques d’éviction de Laurent Gbagbo à Marcoussis
19 sept 1960Lumumba placé en résidence surveillée par Mobutu4 mars 2007Accord de Ouagadougou : diminution du pouvoir de Laurent Gbagbo
17 jan 1961Assassinat de Patrice Lumumba28 nov 2010Second tour de l’élection présidentielle.
     (…) Comment Charles de Gaulle, lui-même, traitait-il ces « indigènes » aux cheveux crépus, aux nez épatés et aux derrières bombés qui l’avaient fait roi, pendant que ses propres compatriotes collaboraient, allègrement, avec l’ennemi, c’est-à-dire l’Allemagne nazie ω Jacques Foccart, son secrétaire général aux affaires africaines nous le révèle, au cours d’un entretien qu’il avait eu avec lui le vendredi 8 novembre 1968 :
« …Vous savez, cela suffit comme cela avec vos Nègres (…) on ne voit plus qu’eux : il y a des nègres à l’Elysée tous les jours, vous me les faites recevoir, vous me les faites inviter à déjeuner, je suis entouré de nègres ici (…) foutez-moi la paix avec vos Nègres, je ne veux plus en voir d’ici deux mois, vous entendez ω Plus une audience avant deux mois. Ce n’est pas tellement en raison du temps que cela me prend, bien que ce soit déjà fort ennuyeux, mais cela fait très mauvais effet à l’extérieur, on ne voit que des Nègres tous les jours à l’Elysée. Et puis, je vous assure, c’est sans intérêt (…) en tout cas, c’est un ordre, c’est dit maintenant, je ne veux pas en voir un seul dans les deux mois qui viennent… » (2)
Chapitre V : Crise ivoirienne et enjeu de libération nationale en Afrique
La crise ivoirienne, en vérité, vient poser, de la manière la plus éclatante qui soit, la question de la sortie du continent africain de la camisole de force dans laquelle le monde occidental l’a enfermé depuis le départ. C’est celui-ci qui décide de ce qui est « bon » ou « mauvais », de ce qui est convenable ou ne l’est nullement, pour elle. C’est également celui-ci qui, tout juste hier, avait fait des indépendances africaines une nouvelle époque de servitude pour les populations du continent noir. Il avait soutenu les pires régimes qui soient, en Afrique. Il avait hissé au pouvoir des personnages qu’il n’aurait, en aucun jour, accepté pour lui-même. Il l’avait fait, sans état d’âme, au nom de la sauvegarde du « monde libre », c’est-à-dire, le sien. Aujourd’hui, il continue à dicter sa loi, comme bon lui semble. Il proclame, souverainement, arbitrairement, péremptoirement, ce qui est bon pour la Côte d’Ivoire, et ce qui ne l’est pas. Le chef d’Etat français pousse l’outrecuidance au point d’émettre des ultimatums à l’endroit du président ivoirien.
Et la terre entière demeure muette sur ce comportement ô combien cavalier et méprisant. Naturellement, il estime être, en le faisant, dans son bon droit, celui du respect de la volonté du peuple.
Mais, ce faisant, à supposer qu’il l’eut fait pour une bonne cause, il est cependant difficile pour un Africain jaloux de sa liberté, de sa dignité, d’accepter une telle désinvolture, lorsque l’on se souvient que, dans le même temps, le même personnage se garde bien d’une telle insolence face aux conflits qui se déroulent dans les autres parties du monde. Il y a mépris, tout simplement. (…)
A – L’arbre qui cache la forêt : le scrutin du 28 novembre 2010. (…)
Pour venir à bout de Laurent Gbagbo, l’Occident a expérimenté plusieurs formules : invasion armée, forces d’interposition complices, demande de démission de Laurent Gbagbo comme condition sine qua non pour la résolution de la « crise ivoirienne ». Mais, les unes les autres n’ont pas produit les résultats escomptés.
Le scrutin du 28 novembre 2010, a été ainsi au centre d’un vaste complot international aux ramifications africaines nombreuses. L’Union Africaine, étrangement silencieuse lorsque les dirigeants africains ont entrepris, les uns après les autres, de faire sauter le verrou de la limitation des mandats à la présidence de la République, en violation flagrante d’une résolution de cette même Union Africaine, est rapidement montée au créneau. Des chefs d’Etats non élus, voire élus « démocratiquement » avec des scores de partis uniques, 80%, parfois même des criminels, sont subitement reconvertis en grands vertueux de la démocratie. Comment ne pas penser que ces personnages, à la suite de quelque promesse de financement ou d’avantage personnel, sont tout bonnement aux ordres ω Comment ne pas penser de même pour l’Union Africaine et la CDEAO ω (…)
(2) Jacques Foccart, le Général en Mai, Journal de l’Elysée, Tome II.
© Correspondance de : Enoh Meyomesse

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