samedi 22 janvier 2011

La paix, l'enjeu des élections en Centrafrique

Bangui (République centrafricaine). Les électeurs sont appelés aux urnes dimanche pour choisir leur président et également leurs députés.
Bangui (République centrafricaine). Les électeurs sont appelés aux urnes dimanche pour choisir leur président et également leurs députés.
© Eric Deroo
Par Carine Frenk
Quelque 1,8 million d'électeurs centrafricains sont appelés aux urnes dimanche 23 janvier pour des élections présidentielle et législatives dont l'enjeu principal est la paix, dans un pays ruiné par des années d'instabilité. La campagne électorale s'achève ce vendredi soir à minuit. Pour cette élection présidentielle, 4 candidats défient le chef de l'Etat sortant François Bozizé.
Le chef de l'Etat est candidat à sa propre succession. Ce général est arrivé au pouvoir à Bangui le 15 mars 2003 à la tête d'une rébellion. Arrivé par les armes, il a été légitimé par les urnes lors de la présidentielle de 2005. Il se présente en grand favori et dans son entourage, on fait savoir qu'il compte à tout prix l'emporter dès le premier tour. On dit aussi qu'il voudrait pouvoir compter sur une large majorité à la chambre des députés, pour pouvoir notamment faire passer une réforme de la Constitution afin de supprimer la limitation du nombre de mandats présidentiels et être encore candidat en 2016.
François Bozizé a notamment à son actif le versement des salaires des fonctionnaires centrafricains. Les 20 000 fonctionnaires qui cumulaient sous le régime de son prédécesseur, Ange-Félix Patassé, 36 mois d'arriérés.
Patassé, Ziguélé et les autres candidats
L'ex-président Patassé est revenu d'exil à la faveur du dialogue politique. Lui aussi affirme qu'il va être élu dès le premier tour. Il a fait campagne en candidat indépendant, sans son parti le MLPC qui lui a tourné le dos.
Dans ses anciens fiefs de Bangui, nul n'a oublié les exactions des combattants congolais de Jean-Pierre Bemba qu'il avait fait venir pour essayer de sauver son régime contre la rébellion de François Bozizé. Lui assure ne plus être le Patassé d'hier. Tout au long de cette campagne électorale, il a joué la carte du mysticisme, affirmant que « Dieu lui a confié le ministère de l'unité du peuple centrafricain ». Ange-Félix Patassé est, si l'on peut dire, « l'inconnue » de ce scrutin.
L'ancien Premier ministre d'Ange-Félix Patassé, Martin Ziguélé a le soutien du MLPC. Ce technocrate est arrivé au second tour de la dernière présidentielle. Pendant cette campagne électorale, il a sillonné tout le pays, s'attaquant avant tout au président Bozizé et minimisant la candidature d'Ange-Félix Patassé. Une chose est sûre, les 3 hommes vont se disputer l'électorat du grand quart Nord-Ouest, la région qui peut faire basculer le résultat.
Sont également candidats : Emile Nakombo pour le RDC. C'est la formation de feu le général Kolingba, qui fut chef d'Etat avant Ange-Félix Patassé. Le RDC est un parti important sur la scène politique centrafricaine mais Emile Nakombo n'est pas André Kolingba et le RDC a connu des divisions en interne ces derniers mois.
Il y a enfin l'ancien ministre de la Défense Jean-Jacques Demafouth, chef de file des ex-rebelles de l'APRD. Les combattants n'ont pas encore désarmé. Jean-Jacques Demafouth assure qu'ils n'interviendront pas le jour du vote pour influencer les électeurs et qu'ils reconnaitront les résultats des élections si le processus est correct. Mais sur l'antenne de RFI, Jean-Jacques Demafouth a toutefois émis de sérieux doutes, parlant « de cafouillages terribles ».
La paix et la stabilité
Pour que la paix s'instaure dans le pays, il ne faut pas que ces élections soient contestées. Sur les 16 préfectures que compte la Centrafrique, 8 vivent sous l'occupation de différents groupes de rebelles et d'ex-rebelles or aujourd'hui, tous les candidats de l'opposition se montrent très critiques sur l'organisation de ces élections. Ils dénoncent l'absence d'indépendance du président de la Commission électorale, l'impréparation du vote, les violations de la loi électorale et surtout l'absence d'un fichier électoral crédible. La loi prévoyait par exemple une liste électorale permanente et informatisée. Or on va voter avec des listes manuelles, des listes qui doivent être affichées seulement samedi à Bangui et qui ne seront de fait pas corrigées. Alors, la voie est ouverte à la contestation post-électorale.
Sur RFI vendredi matin 21 janvier, le président Bozizé s'est dit quant à lui confiant. « Il n'y a pas à s'inquiéter. On cherche les poux pour rien. Tout est au point », s'est exclamé le chef de l'Etat parlant des « mensonges » de certains opposants.
Les résultats provisoires seront connus dans les huit jours après la clôture du scrutin. C'est la Commission électorale qui les proclamera.

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