Une victime de la repression poilicière en RDC (Photo d’archive)
A l’examen de l’histoire récente de notre pays, il semble que le pouvoir de Kinshasa, ses médias et son opposition n’écouteraient que le langage de la violence. Il les sort de leur torpeur sans que les actions efficaces pour la juguler s’en suivent. Rapidement, l’amnésie emporte tout sur son passage.
Au début de cette semaine(le lundi O9 mai 2011), la presse kinoise a rendu publique le point de vue de l’opposition congolaise (institutionnelle et extra-institutionnelle) sur le calendrier électoral. Elle a jugé ce calendrier anticonstitutionnel et repris certaines de ces critiques vis-à-vis du pouvoir en place eu égard à la confiscation de l’espace public par la majorité au pouvoir, à l’insécurité galopante, aux arrestations arbitraires, etc. S’il faut admirer le fait que cette opposition se soit mise pour une fois, dans sa grande majorité, ensemble, il y a néanmoins des doutes à émettre sur sa capacité de constituer une véritable alternative face au pouvoir en place.
Comment n’arrive-t-elle pas, par exemple, à mobiliser autant de militants que ceux qu’elle mobilise pour ses meetings pour décrier la mauvaise foi du pouvoir en place et ses alliés eu égard à l’insécurité qui sévit à l’Est de notre pays. Quand elle en parle, ce fait est noyé dans les autres comme s’il était à ces autres pareil ! Et pourtant, l’insécurité à l’Est de notre pays est liée à la question récurrente de sa balkanisation et de la confiscation de nos terres par les prédateurs de tous bords et leurs alliés. Il est curieux que certains médias de Kinshasa aient été sortis de leur torpeur par les morts survenus dans la compagnie du Ministre Mashako en tournée à Rutshuru et que tout à coup ils se rendent compte que les différentes « opérations de sécurisation » de cette partie de notre pays initiées par Kinshasa et ses alliés ont été un échec. Sur toute la ligne. Comme si Kinshasa, son opposition et ses médias ne comprenaient que le langage des armes et de la violence ! Un autre fait, apparemment anodin, confirmerait cette hypothèse : l’arrestation arbitraire et la libération d’un journaliste congolais bruxellois, Babi Balukuna, à Kinshasa.
Il a fallu qu’une cinquantaine d’associations de la résistance congolaise de la diaspora disperse une rencontre du PPRD en France, qu’elle décide de s’engager dorénavant dans les actions musclées à l’endroit du pouvoir de Kinshasa et de son opposition pour que nous apprenions que ce Congolais détenu pour délit d’opinion a été libéré !
Pour rappel, les négociations avec le CNDP avaient été initiées par les gouvernants de Kinshasa parce que Nkunda et ses amis avaient pris des armes. (Un politicien Congolais avait dit à ce moment-là du haut de l’Assemblée nationale que Kinshasa ne pouvait négocier qu’avec ceux qui avaient pris des armes. Depuis qu’il est dans l’opposition, il crie contre le pouvoir qui recourt à la violence pour malmener les membres de son parti ! Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas, dit-on !)
Comment expliquait cet état des choses ? Est-ce parce que le pouvoir est aux mains, majoritairement, des seigneurs de la guerre ou parce que la violence subie et/ou imposée décivilise ? Oui. La violence imposée décivilise ; elle ensauvage. Elle convertit ceux qui l’imposent en animaux à visage humain. A un certain moment, ils ne peuvent entendre que ce langage décivilisateur. Qu’importe la couleur de la peau. (Lire à ce propos, Le Discours sur le colonialisme d’Aimé Césaire)
La décivilisation est un refus d’application des règles politiques et de droit au profit de la violence. Elle est une négation de la politique comme action délibérative dans l’édification de l’espace vital et du vivre ensemble. Elle remplace les paroles citoyennes et leurs échanges réciproques pour la défense de leurs droits et libertés fondamentales par le langage de la violence. Celle-ci peut crisper les attitudes chez les citoyens violentés et raidir leurs positions vis-à-vis du pouvoir ensauvagé. Pour dire les choses autrement, l’ensauvagement d’un pouvoir peut engendrer celui des citoyens avant que ledit pouvoir n’entende le langage de la raison. Et au Congo dit démocratique, nous semblons en être là. Et ceux qui instrumentalisent le pouvoir en place pour que la balkanisation du pays soit effective l’encourage sur cette voie de la décivilisation.
Et la revue de presse de Congoforum de ce jour (mercredi 11 avril 2011) ouvre une parenthèse très intéressante à ce sujet. Un journal kinois traitant de la thérapie proposée par l’Occident pour éviter la balkanisation de notre pays écrit (une longue citation) : «
Lorsqu’il s’agit d’apporter une solution durable au problème permanent que connaît l’Est de la RDC, Européens et Américains n’émettent pas sur une même longueur d’ondes. Pour les Européens, la solution aux tensions récurrentes qui fragilisent l’Est de la RDC passe par une gestion partagée des ressources naturelles disséminées dans la région des Grands Lacs et pour lesquelles la RDC en est l’épicentre. C’est le plan développé dans le temps par le président français Nicolas Sarkozy et développé par l’ex-haut représentant de l’Union européenne dans la région des Grands Lacs, Aldo Ajello. Par contre, pour les Américains, la voie de sortie de la crise passe par le renforcement de la force de dissuasion de la RDC. Drôle de lecture. Ainsi, contrairement aux Européens, les Etats-Unis sont convaincus qu’une RDC, forte et capable de se défendre, reste la solution idoine pour une paix durable dans sa partie Est où une véritable industrie de rapine des ressources minières de la RDC s’est installée. Avec extension dans l’ensemble de la région des Grands Lacs. D’où, la loi Dodd-Frank adoptée en 2010 par le Parlement américain pour plus de transparence et de traçabilité des minerais de l’Est de la RD. Congo. C’est pour dire que, derrière les FDLR et toutes les milices armées qui écument la région, il y a cette main invisible, commandée par ceux qui ne veulent pas que l’Etat congolais récupère le contrôle de cette partie du territoire. Tout est mis en mouvement pour le fragiliser davantage avec pour objectif à terme de détacher l’Est du territoire composant la RDC. C’est le schéma inscrit dans le plan de balkanisation de la RDC. Les tensions récurrentes sont donc entretenues à dessein. Au programme, créer le chaos pour, enfin, faire avaliser la thèse de la balkanisation ».
Pour ce journal, il y a une divergence du point de vue thérapeutique entre l’Europe et les USA. A ce point nommé, Guy De Boeck ouvre sa belle parenthèse : « On reste un peu ébahi devant le dernier paragraphe sur les « thérapies divergentes » ! On fait entre autres trop d’honneur à Sarkozy dont la déclaration sur le « partage des ressources » n’a été qu’une mauvaise copie du « Plan Cohen » américain. En réalité le plan de balkanisation et de pillage du Congo est un plan fondamentalement américain, qui est parfois appliqué directement, mais le plus souvent par des « proxys » : ONU, UE, Rwanda, Uganda et bourgeoise congolaise dominante. Conte ces adversaires, le peuple congolais est seul. C’est à lui qu’il appartient de tordre le cou à sa propre bourgeoisie ». A la suite de Guy De Boeck, plusieurs compatriotes Congolais sont d’avis que l’opposition congolaise est du côté de la bourgeoisie dominante aux dépens de nos populations. Une petite preuve est donnée par sa déclaration au sujet des probables élections de novembre 2011. Pour elle, « aux fins d’organiser des élections apaisées, l’Opposition politique exige l’assainissement du climat politique avant, pendant et après le processus électoral, notamment par la libération sans condition des opposants politiques, des militants, des activistes des droits de l’homme et des journalistes irrégulièrement détenus. Ceci constituera un signal fort pour l’ensemble de la classe politique et des forces vives. Face à l’incapacité du Gouvernement en place de sécuriser les acteurs politiques de l’Opposition, cette dernière demande à la Communauté Internationale la mise en place d’un plan de sécurisation par les Nations Unies du processus électoral et de tous les acteurs politiques, particulièrement ceux de l’Opposition. »
Cet appel à la Communauté Internationale et à l’ONU est surprenant. Il est lancé comme si cette fameuse communauté internationale ne faisait pas partie des « proxys » des USA ! Cet appel choisit d’ignorer notre histoire passée et présente. Lumumba est assassiné le 17 janvier 1961 et les casques bleus de l’ONU sont au Congo. Nos filles, nos femmes, nos mamans et les paisibles citoyens de l’Est de notre pays sont violentés, depuis plus de dix ans, au vu et au su de la Communauté Internationale et de l’ONU. Quand les milices de Joseph Kabila tirent sur la maison de Jean-Pierre Bemba au cours du processus électoral de 2006-2007, ce dernier y reçoit les membres de ladite Communauté Internationale !
D’où viennent cette amnésie et cette confusion des genres ? Du carriérisme politique bourgeois ? De l’incapacité à renouveler sa conception politique comme action concertée par la discussion et la délibération entre citoyens jouissant des conditions d’égale liberté et dignité pour un vivre ensemble apaisé ? Disons de la perte du sens de la politique (et de la culture politique) au sens philosophique du terme ? Peut-être…Un milieu humain ensauvagé se dépolitise en se décivilisant. Il ne comprend plus que le langage de la violence. A quelques exceptions près. Dommage !
Que faire ? Il faut un autre leadership politique qui aide à recouvrer le sens de la politique et l’importance de la culture politique. Les signaux sont déjà donnés !
Dieu merci!
Au début de cette semaine(le lundi O9 mai 2011), la presse kinoise a rendu publique le point de vue de l’opposition congolaise (institutionnelle et extra-institutionnelle) sur le calendrier électoral. Elle a jugé ce calendrier anticonstitutionnel et repris certaines de ces critiques vis-à-vis du pouvoir en place eu égard à la confiscation de l’espace public par la majorité au pouvoir, à l’insécurité galopante, aux arrestations arbitraires, etc. S’il faut admirer le fait que cette opposition se soit mise pour une fois, dans sa grande majorité, ensemble, il y a néanmoins des doutes à émettre sur sa capacité de constituer une véritable alternative face au pouvoir en place.
Comment n’arrive-t-elle pas, par exemple, à mobiliser autant de militants que ceux qu’elle mobilise pour ses meetings pour décrier la mauvaise foi du pouvoir en place et ses alliés eu égard à l’insécurité qui sévit à l’Est de notre pays. Quand elle en parle, ce fait est noyé dans les autres comme s’il était à ces autres pareil ! Et pourtant, l’insécurité à l’Est de notre pays est liée à la question récurrente de sa balkanisation et de la confiscation de nos terres par les prédateurs de tous bords et leurs alliés. Il est curieux que certains médias de Kinshasa aient été sortis de leur torpeur par les morts survenus dans la compagnie du Ministre Mashako en tournée à Rutshuru et que tout à coup ils se rendent compte que les différentes « opérations de sécurisation » de cette partie de notre pays initiées par Kinshasa et ses alliés ont été un échec. Sur toute la ligne. Comme si Kinshasa, son opposition et ses médias ne comprenaient que le langage des armes et de la violence ! Un autre fait, apparemment anodin, confirmerait cette hypothèse : l’arrestation arbitraire et la libération d’un journaliste congolais bruxellois, Babi Balukuna, à Kinshasa.
Il a fallu qu’une cinquantaine d’associations de la résistance congolaise de la diaspora disperse une rencontre du PPRD en France, qu’elle décide de s’engager dorénavant dans les actions musclées à l’endroit du pouvoir de Kinshasa et de son opposition pour que nous apprenions que ce Congolais détenu pour délit d’opinion a été libéré !
Pour rappel, les négociations avec le CNDP avaient été initiées par les gouvernants de Kinshasa parce que Nkunda et ses amis avaient pris des armes. (Un politicien Congolais avait dit à ce moment-là du haut de l’Assemblée nationale que Kinshasa ne pouvait négocier qu’avec ceux qui avaient pris des armes. Depuis qu’il est dans l’opposition, il crie contre le pouvoir qui recourt à la violence pour malmener les membres de son parti ! Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas, dit-on !)
Comment expliquait cet état des choses ? Est-ce parce que le pouvoir est aux mains, majoritairement, des seigneurs de la guerre ou parce que la violence subie et/ou imposée décivilise ? Oui. La violence imposée décivilise ; elle ensauvage. Elle convertit ceux qui l’imposent en animaux à visage humain. A un certain moment, ils ne peuvent entendre que ce langage décivilisateur. Qu’importe la couleur de la peau. (Lire à ce propos, Le Discours sur le colonialisme d’Aimé Césaire)
La décivilisation est un refus d’application des règles politiques et de droit au profit de la violence. Elle est une négation de la politique comme action délibérative dans l’édification de l’espace vital et du vivre ensemble. Elle remplace les paroles citoyennes et leurs échanges réciproques pour la défense de leurs droits et libertés fondamentales par le langage de la violence. Celle-ci peut crisper les attitudes chez les citoyens violentés et raidir leurs positions vis-à-vis du pouvoir ensauvagé. Pour dire les choses autrement, l’ensauvagement d’un pouvoir peut engendrer celui des citoyens avant que ledit pouvoir n’entende le langage de la raison. Et au Congo dit démocratique, nous semblons en être là. Et ceux qui instrumentalisent le pouvoir en place pour que la balkanisation du pays soit effective l’encourage sur cette voie de la décivilisation.
Et la revue de presse de Congoforum de ce jour (mercredi 11 avril 2011) ouvre une parenthèse très intéressante à ce sujet. Un journal kinois traitant de la thérapie proposée par l’Occident pour éviter la balkanisation de notre pays écrit (une longue citation) : «
Lorsqu’il s’agit d’apporter une solution durable au problème permanent que connaît l’Est de la RDC, Européens et Américains n’émettent pas sur une même longueur d’ondes. Pour les Européens, la solution aux tensions récurrentes qui fragilisent l’Est de la RDC passe par une gestion partagée des ressources naturelles disséminées dans la région des Grands Lacs et pour lesquelles la RDC en est l’épicentre. C’est le plan développé dans le temps par le président français Nicolas Sarkozy et développé par l’ex-haut représentant de l’Union européenne dans la région des Grands Lacs, Aldo Ajello. Par contre, pour les Américains, la voie de sortie de la crise passe par le renforcement de la force de dissuasion de la RDC. Drôle de lecture. Ainsi, contrairement aux Européens, les Etats-Unis sont convaincus qu’une RDC, forte et capable de se défendre, reste la solution idoine pour une paix durable dans sa partie Est où une véritable industrie de rapine des ressources minières de la RDC s’est installée. Avec extension dans l’ensemble de la région des Grands Lacs. D’où, la loi Dodd-Frank adoptée en 2010 par le Parlement américain pour plus de transparence et de traçabilité des minerais de l’Est de la RD. Congo. C’est pour dire que, derrière les FDLR et toutes les milices armées qui écument la région, il y a cette main invisible, commandée par ceux qui ne veulent pas que l’Etat congolais récupère le contrôle de cette partie du territoire. Tout est mis en mouvement pour le fragiliser davantage avec pour objectif à terme de détacher l’Est du territoire composant la RDC. C’est le schéma inscrit dans le plan de balkanisation de la RDC. Les tensions récurrentes sont donc entretenues à dessein. Au programme, créer le chaos pour, enfin, faire avaliser la thèse de la balkanisation ».
Pour ce journal, il y a une divergence du point de vue thérapeutique entre l’Europe et les USA. A ce point nommé, Guy De Boeck ouvre sa belle parenthèse : « On reste un peu ébahi devant le dernier paragraphe sur les « thérapies divergentes » ! On fait entre autres trop d’honneur à Sarkozy dont la déclaration sur le « partage des ressources » n’a été qu’une mauvaise copie du « Plan Cohen » américain. En réalité le plan de balkanisation et de pillage du Congo est un plan fondamentalement américain, qui est parfois appliqué directement, mais le plus souvent par des « proxys » : ONU, UE, Rwanda, Uganda et bourgeoise congolaise dominante. Conte ces adversaires, le peuple congolais est seul. C’est à lui qu’il appartient de tordre le cou à sa propre bourgeoisie ». A la suite de Guy De Boeck, plusieurs compatriotes Congolais sont d’avis que l’opposition congolaise est du côté de la bourgeoisie dominante aux dépens de nos populations. Une petite preuve est donnée par sa déclaration au sujet des probables élections de novembre 2011. Pour elle, « aux fins d’organiser des élections apaisées, l’Opposition politique exige l’assainissement du climat politique avant, pendant et après le processus électoral, notamment par la libération sans condition des opposants politiques, des militants, des activistes des droits de l’homme et des journalistes irrégulièrement détenus. Ceci constituera un signal fort pour l’ensemble de la classe politique et des forces vives. Face à l’incapacité du Gouvernement en place de sécuriser les acteurs politiques de l’Opposition, cette dernière demande à la Communauté Internationale la mise en place d’un plan de sécurisation par les Nations Unies du processus électoral et de tous les acteurs politiques, particulièrement ceux de l’Opposition. »
Cet appel à la Communauté Internationale et à l’ONU est surprenant. Il est lancé comme si cette fameuse communauté internationale ne faisait pas partie des « proxys » des USA ! Cet appel choisit d’ignorer notre histoire passée et présente. Lumumba est assassiné le 17 janvier 1961 et les casques bleus de l’ONU sont au Congo. Nos filles, nos femmes, nos mamans et les paisibles citoyens de l’Est de notre pays sont violentés, depuis plus de dix ans, au vu et au su de la Communauté Internationale et de l’ONU. Quand les milices de Joseph Kabila tirent sur la maison de Jean-Pierre Bemba au cours du processus électoral de 2006-2007, ce dernier y reçoit les membres de ladite Communauté Internationale !
D’où viennent cette amnésie et cette confusion des genres ? Du carriérisme politique bourgeois ? De l’incapacité à renouveler sa conception politique comme action concertée par la discussion et la délibération entre citoyens jouissant des conditions d’égale liberté et dignité pour un vivre ensemble apaisé ? Disons de la perte du sens de la politique (et de la culture politique) au sens philosophique du terme ? Peut-être…Un milieu humain ensauvagé se dépolitise en se décivilisant. Il ne comprend plus que le langage de la violence. A quelques exceptions près. Dommage !
Que faire ? Il faut un autre leadership politique qui aide à recouvrer le sens de la politique et l’importance de la culture politique. Les signaux sont déjà donnés !
Dieu merci!
Par Jean-Pierre Mbelu (congoone.net)
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