28/04/2012
Roger MEECE - Chef de la MONUSCO
Après dix ans d’une présence controversée, le temps est venu de s’interroger sur la portée réelle de la mission onusienne en RDC. Ne serait-elle pas finalement ce tireur des ficelles des tensions récurrentes qui fragilisent la partie Est de la RDC ?
Plusieurs assertions corroborent cette thèse. Dix ans de présence intensive en RDC, avec un budget annuel de plus d’un milliard USD, la Monusco a échoué sur toute la ligne. D’abord, en tant que mission d’observation, ensuite comme mission de stabilisation.
Une nouvelle rébellion est en gestation en Ituri. Elle porterait la marque de Bosco Ntaganda, général FARDC en cavale. La révélation est de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation du Congo (Monusco).
Curieusement, la nouvelle tombe à deux mois de l’examen par le Conseil de sécurité des Nations unies du mandat des forces onusiennes en RDC. La révélation de la Monusco est la preuve de plus de l’incapacité de la Monusco à jouer véritablement son rôle. Une façon de se dédouaner pour camoufler sa compromission.
Human Rights Watch et Amnesty International ont unanimement salué la volonté clairement affichée par Kinshasa de capturer Bosco Ntaganda, général FARDC issu des rangs de l’ex-rébellion du CNDP.
Les deux ONG appelaient, en même temps, Kinshasa à tout mettre en œuvre non seulement pour neutraliser Ntaganda mais surtout le livrer à la Cour pénale internationale pour qu’il réponde des atrocités commises en Ituri aux côtés de Thomas Lubunga, actuellement en détention à La Haye (Pays-Bas).
La forte mobilisation internationale qui a suivi la déclaration de Kinshasa a nettement démontré que Ntaganda représentait une sérieuse menace pour la paix en RDC. La Monusco vient d’en donner la preuve.
En effet, au cours de son point de presse hebdomadaire du mercredi 25 avril, la Monusco a ouvertement étalé ses inquiétudes à propos de la résurgence d’un mouvement rebelle dans le district de l’Ituri en Province Orientale.
De l’avis de la Monusco qui s’adressait à la presse via son porte-parole militaire, Félix Prosper Basse, cette rébellion en gestation porterait la marque de Bosco Ntaganda, général en fuite, actuellement pourchassée par les FARDC.
TENTATIVE DE DECRYPTAGE
La nouvelle suscite bien des interrogations, pour autant que c’est la Monusco qui en a eu la primeur. Il y a certainement quelque chose de caché derrière cette révélation de la mission onusienne. Et des hypothèses pour pénétrer les enjeux en présence sont légion.
La première est que la Monusco se prépare à défendre dans deux mois son mandat devant le Conseil de sécurité des Nations unies. A l’issue de cet examen de passage, la Monusco espère obtenir des Nations unies une prorogation d’une année de plus de son mandat en RDC.
La résurgence d’une rébellion dans la partie Est pourrait jouer en sa faveur. D’où, son empressement à annoncer la nouvelle avant d’en avoir totalement la confirmation.
Pour étayer sa thèse de gestation d’une nouvelle rébellion, la Monusco se base sur de simples allégations contenues dans des «rapports annonçant la conduite possible d’une rébellion par le général Bosco Ntaganda en Ituri» datant du 17 avril 2012.
A cet effet, elle a annoncé, dans le communiqué présenté le mercredi 25 avril, avoir mis ses forces en alerte en mettant sur pied des «mécanismes appropriés visant à assurer une surveillance optimale de la situation sécuritaire prévalant dans le district de l’Ituri».
Selon le porte-parole de la Monusco, la situation sécuritaire en Ituri est stable, mais demeure imprévisible, particulièrement dans les localités de Bukiringi, Aveba, Gety, Chekele, Krogo, Nyamani, situées dans le territoire d’Irumu, et contrôlées par des miliciens du Front de résistance patriotique de l’Ituri (FRPI).
La deuxième hypothèse qui, vraisemblablement, aurait obligé la Monusco à livrer l’information au public est, sans doute, la position géostratégique de l’Ituri.
En effet, l’on doit se rappeler que ce district de l’Ituri a été, à plusieurs reprises, confronté à des tensions de tous genres entre ses différentes ethnies, principalement les Hema et les Lendu, notamment autour du contrôle des ressources naturelles enfouies dans son sous-sol, essentiellement l’or.
En plus de l’or, l’Ituri regorge du pétrole, du reste confirmé par la récente découverte d’une nappe pétrolifère sur le lac Albert, frontalier à l’Ouganda.
L’Ituri est donc une zone stratégique au centre de grands enjeux économiques régionaux. La présence annoncée de Bosco Ntaganda dans cette zone n’est pas innocente. Elle obéit à une logique tracée en avance.
Cet ancien seigneur de guerre est un habitué de l’Ituri. Il a évolué au début des années 2000 avec Thomas Lubanga dans l’Union des patriotes congolais (UPC).
Après le démantèlement de l’UPC, Ntaganda est allé tisser des liens avec Laurent Nkunda au sein du CNDP dans le Nord-Kivu.
C’est à partir du CNDP qu’il a été intégré dans les FARDC où il a été gratifié du grade de général. C’était au terme de la signature de l’accord de paix à Goma en 2008.
L’annonce faite par Kinshasa de l’arrêter pour finalement le présenter devant les cours et tribunaux aura été la petite goutte qui a fait déborder le vase. Depuis, l’homme est en cavale dans les collines de l’Est.
Aujourd’hui, la Monusco l’annonce en Ituri où il serait à la tête d’une rébellion en gestation. Qui le soutient ? Et dans quel but ? La Monusco est restée muette sur le sujet.
Toujours est-il que Ntaganda n’a pas tardé à se signaler. N’avait-il pas promis qu’il se battrait jusqu’au bout ? Kinshasa subit aujourd’hui le revers de l’accord contre-nature qu’il avait signé à Goma en février 2008.
Mais, pour la Monusco, l’éveil de Bosco Ntaganda est le signe d’une incapacité à accomplir véritablement sa tâche en RDC. En annonçant la gestation d’une probable rébellion dans l’Est du pays, la Monusco veut simplement se dédouaner pour justifier une fois de plus sa présence en RDC.
Pour des observateurs avisés, la Monusco devrait, dans ce dossier, afficher un profil bas. Peut-elle expliquer comment Bosco Ntaganda a pu quitter l’Ituri pour rejoindre le Nord-Kivu ?
Par où est-il passé alors qu’à l’époque l’homme était recherché et que les troupes onusiennes écumaient la région. Bosco Ntaganda rentre en Ituri au moment où un autre milicien, son ancien compagnon d’armes, en l’occurrence Cobra Matata a donné de la voix sans qu’une action musclée soit engagée à son encontre.
Peut-être que le moment venu des langues se délieront et la complicité de la mission onusienne sera étalée au grand jour.
DEMASQUER LE COUPABLE
Après dix ans d’une présence controversée, le temps est venu de s’interroger sur la portée réelle de la mission onusienne en RDC. Ne serait-elle pas finalement ce tireur des ficelles des tensions récurrentes qui fragilisent la partie Est de la RDC ?
Plusieurs assertions corroborent cette thèse. Dix ans de présence intensive en RDC, avec un budget annuel de plus d’un milliard USD, la Monusco a échoué sur toute la ligne. D’abord, en tant que mission d’observation, ensuite comme mission de stabilisation.
Le moment est plutôt venu de changer de fusil d’épaule en réfléchissant sur une autre manière de ramener la paix dans l’Est de la RDC. Sans la Monusco.
D’autant plus que, apparemment, celle-ci souffle le chaud et le froid. Il semble qu’elle serait convaincue que la fin de la guerre en RDC est synonyme de la fin de sa mission.
Raison pour laquelle elle laisse faire, encourage l’entretien des conflits armés et l’ouverture de nouveaux foyers de tensions de manière à justifier sa présence. La rébellion annoncée dans l’Est rentre dans cette stratégie.
[Le Potentiel]
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Roger MEECE - Chef de la MONUSCO
Après dix ans d’une présence controversée, le temps est venu de s’interroger sur la portée réelle de la mission onusienne en RDC. Ne serait-elle pas finalement ce tireur des ficelles des tensions récurrentes qui fragilisent la partie Est de la RDC ?
Plusieurs assertions corroborent cette thèse. Dix ans de présence intensive en RDC, avec un budget annuel de plus d’un milliard USD, la Monusco a échoué sur toute la ligne. D’abord, en tant que mission d’observation, ensuite comme mission de stabilisation.
Une nouvelle rébellion est en gestation en Ituri. Elle porterait la marque de Bosco Ntaganda, général FARDC en cavale. La révélation est de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation du Congo (Monusco).
Curieusement, la nouvelle tombe à deux mois de l’examen par le Conseil de sécurité des Nations unies du mandat des forces onusiennes en RDC. La révélation de la Monusco est la preuve de plus de l’incapacité de la Monusco à jouer véritablement son rôle. Une façon de se dédouaner pour camoufler sa compromission.
Human Rights Watch et Amnesty International ont unanimement salué la volonté clairement affichée par Kinshasa de capturer Bosco Ntaganda, général FARDC issu des rangs de l’ex-rébellion du CNDP.
Les deux ONG appelaient, en même temps, Kinshasa à tout mettre en œuvre non seulement pour neutraliser Ntaganda mais surtout le livrer à la Cour pénale internationale pour qu’il réponde des atrocités commises en Ituri aux côtés de Thomas Lubunga, actuellement en détention à La Haye (Pays-Bas).
La forte mobilisation internationale qui a suivi la déclaration de Kinshasa a nettement démontré que Ntaganda représentait une sérieuse menace pour la paix en RDC. La Monusco vient d’en donner la preuve.
En effet, au cours de son point de presse hebdomadaire du mercredi 25 avril, la Monusco a ouvertement étalé ses inquiétudes à propos de la résurgence d’un mouvement rebelle dans le district de l’Ituri en Province Orientale.
De l’avis de la Monusco qui s’adressait à la presse via son porte-parole militaire, Félix Prosper Basse, cette rébellion en gestation porterait la marque de Bosco Ntaganda, général en fuite, actuellement pourchassée par les FARDC.
TENTATIVE DE DECRYPTAGE
La nouvelle suscite bien des interrogations, pour autant que c’est la Monusco qui en a eu la primeur. Il y a certainement quelque chose de caché derrière cette révélation de la mission onusienne. Et des hypothèses pour pénétrer les enjeux en présence sont légion.
La première est que la Monusco se prépare à défendre dans deux mois son mandat devant le Conseil de sécurité des Nations unies. A l’issue de cet examen de passage, la Monusco espère obtenir des Nations unies une prorogation d’une année de plus de son mandat en RDC.
La résurgence d’une rébellion dans la partie Est pourrait jouer en sa faveur. D’où, son empressement à annoncer la nouvelle avant d’en avoir totalement la confirmation.
Pour étayer sa thèse de gestation d’une nouvelle rébellion, la Monusco se base sur de simples allégations contenues dans des «rapports annonçant la conduite possible d’une rébellion par le général Bosco Ntaganda en Ituri» datant du 17 avril 2012.
A cet effet, elle a annoncé, dans le communiqué présenté le mercredi 25 avril, avoir mis ses forces en alerte en mettant sur pied des «mécanismes appropriés visant à assurer une surveillance optimale de la situation sécuritaire prévalant dans le district de l’Ituri».
Selon le porte-parole de la Monusco, la situation sécuritaire en Ituri est stable, mais demeure imprévisible, particulièrement dans les localités de Bukiringi, Aveba, Gety, Chekele, Krogo, Nyamani, situées dans le territoire d’Irumu, et contrôlées par des miliciens du Front de résistance patriotique de l’Ituri (FRPI).
La deuxième hypothèse qui, vraisemblablement, aurait obligé la Monusco à livrer l’information au public est, sans doute, la position géostratégique de l’Ituri.
En effet, l’on doit se rappeler que ce district de l’Ituri a été, à plusieurs reprises, confronté à des tensions de tous genres entre ses différentes ethnies, principalement les Hema et les Lendu, notamment autour du contrôle des ressources naturelles enfouies dans son sous-sol, essentiellement l’or.
En plus de l’or, l’Ituri regorge du pétrole, du reste confirmé par la récente découverte d’une nappe pétrolifère sur le lac Albert, frontalier à l’Ouganda.
L’Ituri est donc une zone stratégique au centre de grands enjeux économiques régionaux. La présence annoncée de Bosco Ntaganda dans cette zone n’est pas innocente. Elle obéit à une logique tracée en avance.
Cet ancien seigneur de guerre est un habitué de l’Ituri. Il a évolué au début des années 2000 avec Thomas Lubanga dans l’Union des patriotes congolais (UPC).
Après le démantèlement de l’UPC, Ntaganda est allé tisser des liens avec Laurent Nkunda au sein du CNDP dans le Nord-Kivu.
C’est à partir du CNDP qu’il a été intégré dans les FARDC où il a été gratifié du grade de général. C’était au terme de la signature de l’accord de paix à Goma en 2008.
L’annonce faite par Kinshasa de l’arrêter pour finalement le présenter devant les cours et tribunaux aura été la petite goutte qui a fait déborder le vase. Depuis, l’homme est en cavale dans les collines de l’Est.
Aujourd’hui, la Monusco l’annonce en Ituri où il serait à la tête d’une rébellion en gestation. Qui le soutient ? Et dans quel but ? La Monusco est restée muette sur le sujet.
Toujours est-il que Ntaganda n’a pas tardé à se signaler. N’avait-il pas promis qu’il se battrait jusqu’au bout ? Kinshasa subit aujourd’hui le revers de l’accord contre-nature qu’il avait signé à Goma en février 2008.
Mais, pour la Monusco, l’éveil de Bosco Ntaganda est le signe d’une incapacité à accomplir véritablement sa tâche en RDC. En annonçant la gestation d’une probable rébellion dans l’Est du pays, la Monusco veut simplement se dédouaner pour justifier une fois de plus sa présence en RDC.
Pour des observateurs avisés, la Monusco devrait, dans ce dossier, afficher un profil bas. Peut-elle expliquer comment Bosco Ntaganda a pu quitter l’Ituri pour rejoindre le Nord-Kivu ?
Par où est-il passé alors qu’à l’époque l’homme était recherché et que les troupes onusiennes écumaient la région. Bosco Ntaganda rentre en Ituri au moment où un autre milicien, son ancien compagnon d’armes, en l’occurrence Cobra Matata a donné de la voix sans qu’une action musclée soit engagée à son encontre.
Peut-être que le moment venu des langues se délieront et la complicité de la mission onusienne sera étalée au grand jour.
DEMASQUER LE COUPABLE
Après dix ans d’une présence controversée, le temps est venu de s’interroger sur la portée réelle de la mission onusienne en RDC. Ne serait-elle pas finalement ce tireur des ficelles des tensions récurrentes qui fragilisent la partie Est de la RDC ?
Plusieurs assertions corroborent cette thèse. Dix ans de présence intensive en RDC, avec un budget annuel de plus d’un milliard USD, la Monusco a échoué sur toute la ligne. D’abord, en tant que mission d’observation, ensuite comme mission de stabilisation.
Le moment est plutôt venu de changer de fusil d’épaule en réfléchissant sur une autre manière de ramener la paix dans l’Est de la RDC. Sans la Monusco.
D’autant plus que, apparemment, celle-ci souffle le chaud et le froid. Il semble qu’elle serait convaincue que la fin de la guerre en RDC est synonyme de la fin de sa mission.
Raison pour laquelle elle laisse faire, encourage l’entretien des conflits armés et l’ouverture de nouveaux foyers de tensions de manière à justifier sa présence. La rébellion annoncée dans l’Est rentre dans cette stratégie.
[Le Potentiel]
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