Ray Lema, le grand musicien français d'origine congolaise, chantre de la world music, était au Brésil au début du mois.
Il a ouvert la Virada Cultural par un concert avec le Jazz Sinfônica de São Paulo.
Nous l'avons rencontré. En exclusivité pour Aujourd'hui le Brésil.
Il a ouvert la Virada Cultural par un concert avec le Jazz Sinfônica de São Paulo.
Nous l'avons rencontré. En exclusivité pour Aujourd'hui le Brésil.
Ray Lema à São Paulo, le 3 mai 2012. Photo Ludovic Seydoux
Nul n’est besoin de présenter le grand musicien français d’origine congolaise, si ce n’est de rappeler le parcours musical du chantre de la world music. Après avoir fait carrière dans l’ex-Zaïre où il a dirigé le Ballet national, il s’installe en France en 1982. Il sillonne alors la planète au gré des rencontres musicales les plus diverses et inattendues, de Stewart Coppeland (ex-batteur de Police) aux Voix Bulgares, en passant par les Tyour Gnaoua d’Essaouira, l’Orchestre de Chambre de Sundsvall en Suède, le chanteur et compositeur Chico César au Brésil et, tout dernièrement, le Jazz Sinfônica de São Paulo dont la collaboration a été enregistrée sur CD et DVD, actuellement distribué en France et bientôt au Brésil.
Comment s’est faite votre rencontre avec João Mauricio Galindo, chef d’orchestre de l’orchestre symphonique de jazz de São Paulo ?
C’est au cours de l’année de la France au Brésil en 2009, à l’initiative du Consulat de France à São Paulo, que le maestro a choisi de collaborer avec moi. João Mauricio Galindo s’est rendu en France pour me rencontrer.
Il a fait ce choix parmi de nombreux musiciens français parce qu’il a apprécié mes compositions.
Son arrangeur de musique symphonique a trouvé une variété de styles. Il lui était donc possible de passer d’un univers à un autre, d’un registre musical à un autre, ce qui m’a aussi, dans un même temps, encouragé à composer pour un orchestre symphonique.
Dans ce type de collaboration, les partitions créées par l’arrangeur à partir de mes compositions sont la propriété de l’orchestre. Mon souhait est qu’il puisse, après ce travail d’arrangement musical, me les remettre. C'est ce qu’il s’est passé au Brésil ; João Mauricio Galindo et les quatre arrangeurs musicaux m’ont fait cette joie et cet honneur.
Quelles sont les particularités de travailler avec un grand ensemble ?
Seuls les arrangeurs brésiliens peuvent saisir les arcanes internes de la musique africaine, respecter la fibre musicale, à la différence de certains arrangeurs occidentaux.
Le problème réside uniquement dans le casting des musiciens et la nécessité d’un travail de répétition très important.
Ce type d’orchestre symphonique de jazz est soumis à une administration très lourde et des problèmes financiers.
Car la priorité est surtout mise sur la formation symphonique classique qui bénéficie en outre, de tous les crédits financiers.
Or le travail que fait cet orchestre de jazz symphonique est extraordinaire et il s’est constitué, depuis plus de 20 ans, un repertoire très riche, ayant accompagné des jazzmen illustres.
Notre collaboration avec le maestro João Mauricio Galindo a fait l’objet d’un album, leur premier enregistrement à ce jour, produit par One Drop, ma société de production musicale française.
Vous avez la réputation d’être très exigeant avec vos batteurs et pour cause, vous avez été le directeur du Ballet national du Congo. Quelles difficultés avez-vous rencontré lors de vos répétitions avec cet orchestre, s’il en est ?
Les Occidentaux ont poussé l’harmonie à son plus haut point, tandis que les musciens africains ont surtout développé l’élément rythmique. Or ces deux éléments sont complémentaires et devraient être développés conjointement.
Le bassin du Congo, l'ex-Zaïre, est le centre de la polyrythmie, inexistant au Brésil et qui reste à développer. Les percussionnistes brésiliens sont certes d’origine africaine, mais le flambeau, depuis 5 siècles, n’a pas été repris.
J’ai été directeur du Ballet national du Congo et à ce titre j'ai bien étudié la grande variété de rythmes des différentes ethnies qui composent le pays. Je constituais un cercle, y postionnais un percussionniste et demandais à chacun de l’accompagner.
Et je m’apercevais que chaque ethnie avait son propre accent rythmique. C’est avec une approche scientifique que jai disséqué chacune de ces musiques traditionnelles et leurs accents rythmiques spécifiques.
Avez-vous ressenti des liens entre la culture du Congo et celle des Afro-brésiliens au Brésil ?
Oui à ma grande surprise ! À Salvador, les influences du bassin de l’Afrique centrale sont très importantes. Importance que l’on retrouve dans la rythmique de l’orchestre de percussion Olodum.
Néanmoins, je ne retrouve pas la résonnance de la tradition ancestrale. Cela demanderait un travail considérable pour enseigner la polyrythmie au Brésil. Challenge que je serais ravi de relever avec ces orchestres de percussions de type Olodum.
Quel est votre lien avec le Brésil ?
Je suis venu pour la première fois en 1987. J’ai collaboré avec beaucoup de musiciens brésisiliens dont Chico Cesar, Gilberto Gil que j’ai croisé sur scène, ainsi qu’Olodum.
Je crois beaucoup en ce pays, à son potentiel matériel et intellectuel.
Pays émergent qui va peser et contribuer à redéfinir un nouveau modèle de développement économique mondial.
C’est un pays avec un métissage de plusieurs cultures : indigènes, afro-brésiliennes, européennes, japonaises, prenant le meilleur de chacune. Les colons portugais, à l’instar des Anglosaxons, ont été beaucoup moins séparatistes, peut-être parce qu'il y a eu une colonisation exclusivement masculine.
Tout ceci laisse présager de très belles perspectives et un héritage culturel que je partage pleinement avec ma musique, et cet album en particulier.
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