lundi 30 juillet 2012

Causes du maintien et de la recrudescence des groupes armés


le dimanche 29 juillet 2012



Plusieurs causes concourent au maintien et/ou à la résurgence des groupes armés. En plus de l’échec des processus mis à place pour la formation d’une armée nationale structurée et intégrée, échecs entretenus et voulus par les gouvernements successifsde Kinshasa, le recours à des expédients politiques liés au processus électoral ont joué un rôle important dans le regain des activités des groupes armes.

Lien entre les élections et le regain de violence

Le regain des violences a partir de février 2012 a obéi au contexte du processus électoral lui-même pour lequel la partie Est a voulu marquer sa désapprobation contre la politique menée par la majorité de 2006-2011.

En effet, pour n’avoir pas réalisé les promesses de campagne de 2006 relatives à la restauration de la sécurité, la population de l’Est du pays trouvaient dans les élections un moyen de se débarrasser d’un système incapable de mettre fin aux malheurs vécus tout au long de ce mandat, ce qui a entraîné une campagne en faveur de l’opposition. Ce qui n’a pas plu aux partisans du président sortant Joseph Kabila.

Ainsi, les tentatives manquées des candidats aux élections de faire valoir leurs projets de société ont engendré de la violence entre électeurs, cette situation a étéexploitée par les groupes armés pour semer un climat de terreur qui a affecté directement ou indirectement le processus électoral.

C’est dans ce cadre que les matériels de campagne du parti Mouvement Social pour le Renouveau (MSR) ont été pillés sur la route Komanda-Bunia par les miliciens du groupe Cobra Matata en Ituri et qu’au Sud-Kivu, le président Joseph Kabila n’a pas pu battre campagne dans le territoire de Fizi suiteà l’activisme du groupe Yakotumba.

Dans le territoire de Masisi, l’enquête a noté que le fait pour la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) d’avoir confié le transport des matériels électoraux aux régiments, partisans du CNDP de par leur composition, a permis à ce groupe de contrôler tout le processus et de rassurer une victoire au candidat Joseph Kabila, en dépit de l’hostilité des populations civiles.

De fait, les éléments du CNDP ont eu à voter en lieu et place de la population (Kirolirwe et Kichanga) et à ravir les cartes d’électeurs (Mweso) pendant qu’ailleurs, ils ontempêché les témoins des partis politiques autres que le CNDP d’accéder aux bureaux de vote (Ngungu, Murambi, Rushoga.

Il ressort des entretiens avec certains notables Hunde que leur communautéenvisageait d’autres voies d’expression au cas où la CENI ne prenait pas la mesure d’annuler ce scrutin car, de leur point de vue, il s’agissait bien d’une politique claire visant leur extermination en tant que peuple autochtone.

Ces notables continuent à décrier la même situation dans la collectivité de Bwito, territoire de Rutshuru, oùles élections ont été sécurisées par les FDLR du groupe Soki empêchant aux Hunde de porter le choix aux candidats d’origine hunde, en particulier le candidat Kadogo.

L’enquête a noté que les deux premières semaines du mois de mars 2012 ont été caractérisées par le déploiement de plusieurs unités de régiments dans le territoire de Masisi, en prévision des opérations en vue de neutraliser le groupe APCLS pour le soutien que son leader a eu à apporter à l’Honorable Mitondeke, qui aurait remporté plus de voix dans la circonscription de Masisi.

Concernant, l’affaire Mitondeke ;des entretiens avec certains notables Hunde, il s’est dégagé une divergence des vues entre les partisans du pouvoir de Kinshasa qui ont soutenu l’option d’une rébellion que se proposait à mener le Candidat Député et d’autres qui y voyaient une tentative de museler la communauté Hunde et de l’effacer sur la scène politique de la province et du pays.

Des critiques les plus acerbes sont venues de l’ONG Synergie des femmes pour les victimes des violences sexuelles, «SFVS» qui, dans une note d’information, perçoitl’attaque contre le domicile de l’honorable Mitondeke, sous couvert d’une perquisition, comparativement à l’impunité dont bénéficie le Général Bosco Ntaganda, comme une balance de terreur judiciaire contre les personnes ayant une opinion divergente à celle du pouvoir en place.

La disqualification des incriminations par la haute Cour de justice (Cour suprême de justice) à Kinshasa, passant de l’organisation d’une insurrection à l’incitation à la haine ethnique, dénote de la légèreté avec laquelle l’enquête judiciaire dans cette affaire a été menée et ce,en dépit des positions divergentes soutenues par les différentes parties.

La base ayant servi à asseoir la condamnation du député Mitondeke risque de renforcer les craintes exprimées par certains notables Hunde de voir s’instaurer dans la province du Nord-Kivu une politique visant la destruction en tout ou en partie de la communauté Hunde. C’est cette option qui a semblé entourer l’organisation chaotique des élections dans cette partie de la RDC.

A Lubero, la police a mis aux arrêts des témoins des partis politiques de l’Opposition sur ordre des éléments du régiment du Colonel Murenzi pendant les opérations de dépouillement etla compilation des résultats des élections législatives nationales.

Sur la route Butembo-Goma, les éléments du groupe armé de Soki arrêtent tout véhicule au motif que les ressortissants de Lubero ont facilité l’élection de Joseph Kabilaalors que c’est dans les localités du territoire de Rutshuru, contrôlées en grande partie par ce groupe que le parti politique Union des Congolais pour le progrès (UCP) de M. Eugène Serufuli a battu campagne pour le présidentJoseph Kabila et y a remporté plus des voix au détriment des candidats des partis de l’Opposition.

A Kasindi, dans le territoire de Beni, M. Bwambale Kakolele a organisé un raid contre la population civile au motif qu’elle se serait attaquée à la délégation de campagne que conduisait le ministre Ferdinand Kambere Kalumbi du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD), pendant que dans la ville de Butembo, le même ministre a utilisé le milicien Kitelemire alias Saperita et des Colonels Vita Kitambala et James Kasereka Matabishi pour justifier les actions de pacification menée par son candidat président Joseph Kabila.

Dans le territoire d’Uvira, la tentative de suspendre le chef de collectivité de la plaine par l’administrateur du territoire au motif qu’il aurait facilité l’élection de l’honorable Bitakwira a échoué suite à la menace de ce chef de collectivité de faire descendre les groupes armés actifs sur le plateau dans la vallée et couper ainsi la route qui relie Bukavu à Uvira.

L’enquête a relevé de différentes variations de l’utilisation des groupes armés dans le regain de violences électorales au point de conclure que la violence a facilité l’organisation chaotique des élections, voulue et entretenue par le pouvoir organisateur en vue de contrebalancer le taux de suffrage exprimé défavorable à la majorité 2006-2011.

Les fraudes issues de l’organisation chaotique des élections constituent des sources de reconstitution et/ou de maintien des groupes armés. En effet, alors qu’il était établi que certaines personnalités proches de la majorité de 2006-2011 ne pouvaient pas emporter les élections, la désorganisation de certaines étapes du processus électoral par la CENI a abouti à l’élection de ces personnalités. Ce qui peut conduire à un autre moyen d’expression qui n’est que l’organisation ou la reconstitution des groupes armés.

Aussi, la volonté de refuser l’intégration dans les institutions politiques des animateurs des partis politiques issus de groupes signataires des accords de Goma et le fait d’avoir privé les cadres politiques de moyens pour battre campagne, pourtant devenus membres de la majorité présidentielle, poussent certains acteurs à recourir à la réorganisation des groupes armés pour faire entendreleurs voix.

Telle a été la menace proférée à la CENI par le secrétaire général du parti politique dénommé «Alliance des forces patriotiques et populaires du Congo» (AFPC), M. Gédéon Kasereka. 

Cette dénonciationsemble avoir obtenu gain de cause auprès du Ministre de l’intérieur, Adolphe Lumanu, qui l’a nommé Bourgmestre de la Commune de Karisimbi à Goma, à la veille de son option pourla députation nationale.

La faiblesse des accords d’intégration des groupes armes dans l’Armée nationale

Une des causes du regain de la violence est à chercher dans la violation des résolutions n°DIC/CDS/02 et DIC/CDS/03 portant respectivement sur le désarmement des groupes armés et le retrait des troupes étrangères ainsi que l’identification des nationaux devant faire partie de l’armée et la démobilisation des enfants.

En effet, lors de la formation de l’armée suivant les dispositions de l’AGI, certains cadres du RCD-Goma voyaient dans l’application de ces résolutions une tendance de nier leur appartenance à la nationalité congolaise.

D’où, l’organisation de la résistance qui prendra plus tardla forme d’une rébellion en 2004 avec l’attaque de Bukavu par Jules Mutebutsi et la création du CNDP en 2007 par le trio Laurent Nkunda-Bosco Ntaganda-Sultani Makenga.

La discrimination entre les éléments de différents groupes armés appelés à l’intégration est la deuxième faiblesse à relever.

A ce propos, l’enquête a noté que le gouvernement congolais a violé les dispositions des accords de paix de Goma, pour le cas récent,en intégrant les éléments du seul CNDP dans les FARDC au détriment de plus de dix autres groupes armés signataires de cess accords ; surtout c’est à tort que l’on opte pour l’intégration des éléments de groupes armés qui, pour la plupart, n’ont jamais eu l’idée d’intégrer l’armée.

L’option de recourir à la lutte armée réside souvent dans la défense d’une terre menacée d’occupation ou tout simplement s’opposer à l’exécution d’une décision judiciaire ou administrative intervenue dans le règlement d’un conflit foncier.

Il faut également mentionner le fait de limiter les activités de la réforme à la seule phase d’identification des effectifs des éléments de troupes de l’armée et de la police sans passer aux autres phases de formation, d’entretien et d’équipement des troupes.

La requalification des programmes issus de la Conférence de Goma (Programme Amaniet STAREC) a été effectuée aux dépens de leur volet intégration des groupes armés. Institué pour permettre principalement l’intégration des groupes armés, le programme Amani mué en Programme STAREC, bien qu’étendu sur la Province Orientale et la province du Katanga, est plus orienté vers les activités de développement laissant le volet militaire et sécuritaire aux opérations Amani yetu, Amani leo, Amani kamilifu, etc., lesquelles opérations se sont révélées limitées et désastreuses contre les populations civiles.

Par ailleurs, le cadre légal censé encadrer la réforme de l’armée était fondamentalement inadapté au contenu même de la reforme. En particulier, la loi de 2011 a maintenu les subdivisions des structures de l’armée instaurées par la loi de 2004.

Le fait pour le gouvernement d’introduire les secteurs et régiments, structures non prévues par la loi, constitue une volonté de désintégrer les forces armées au bénéfice des groupes armés identifiés selon leurs origines et/ou les communautés ethniques.

En effet, s’il a été établi que le commandement d’une brigade n’était pas facile à assumer, le gouvernement aurait renvoyé la loi à la nouvelle lecture devant le parlement en vue d’y introduire les structurations relatives aux secteurs et régiments d’autant que ces structuresont été utilisées bien avant la promulgation de la loi de 2011 sur les forces armées.

Les faiblesses des institutions de sécurité dues à la mauvaise gestion du secteur de sécurité

Les partenaires au développement engagés dans le processus de reforme du secteur de sécurité ont toujours insisté sur la nécessité de distinguer la chaine de commandement du circuit des finances de l’armée. Malgré cela, les chaines de commandement parallèles survivent toujours.

Le gouvernement n’a jamais répondu favorablement à cette démarche des partenaires, essentielle dans le processus de réforme, parce qu’il a maintenula chaine de paie des éléments dans la chaine de commandent, rendant ainsi les institutions de sécurité très faibles et soumises aux tempéramentsdes commandants.

Les défections enregistrées suite au non paiement de la solde des militaires sous le commandement du Colonel Bonane en constituent une preuve. Il y a lieu de relever que le contrôle administratif qu’effectue le gouvernement à l’Est du pays est toujours faible.

Faiblesse des autorités politico-administratives locales

Le fait de n’avoir pas parachevé le processus électoral de 2006 par l’organisation des élections urbaines, municipales et locales a rendu les autorités politico-administratives dépendantes de l’autorité de nomination.

La conséquence qui en résulte est l’instauration d’une gestion de la territoriale fondée sur le clientélisme politique au détriment d’une responsabilisation qui découlerait de la démocratie à la base.

Les autorités territoriales s’empêchent de prendre des initiatives dans le cadre de la sécurisation de leurs entités de peur de perdre leur poste ou d’être en contradiction avec les autorités nationales qui les ont nommées.

L’enquête note que la plupart des groupes armés évoluent dans les entités coutumières (chefferie et secteur) qui ne disposent pas de moyens matériels, politiques et humains suffisants pouvant permettre la prise en charge efficiente et efficace de la question délicate liée à l’activisme des groupes armés.

L’administrateur du territoire étant devenu une autorité déconcentrée aux termes de la Constitution et des lois sur la décentralisation et ne peut rien entreprendre de sa propre initiative.

Il a été relevé la quasi inexistence des forces de police dans les majeures parties ayant constitué le rayon de l’enquête, à l’exception de grands centres comme Bukavu et Uvira dans le Sud-Kivu, Beni, Butembo et Goma dans le Nord-Kivu ainsi que Bunia et Komanda en Ituri.

Les chefs-lieux de territoires possèdent des éléments de police en nombre très limité, incapables d’assurer le maintien de l’ordre et de la tranquillité publique.

Cette inoccupation des espaces par les forces de l’ordre facilite le mouvement des groupes armés et permet à la population de nourrir l’intention de se faire sécuriser par les jeunes de leurs communautés ethniques ou tribales.

L’exploitation illégale et irrégulière des ressources naturelles etle trafic des armes

Aucune initiative gouvernementaleni régionale n’a traité avec efficacité la question relative à l’exploitation illégale des ressources naturelles et de trafic des armes.

Les acteurs engagés dans divers processus de paix n’ont jamais eu le souci de retracer le circuit lié au ravitaillement en armes des groupes armés et de l’évacuation des produits miniers issus des territoires contrôlés par ceux-ci.

L’enquête s’est intéressée à la question de savoir comment les groupes armés quine quittent pas les zones qu’ils contrôlent sont dotés en armes et uniformes identiques à celles des FARDC et comment ils arrivent à évacuer leurs produits miniers.

La conclusion qui s’impose est celle de l’existenced’une nette collaboration entre les forces régulières de sécurité et les groupes armés. Cette collaboration est fondée sur un échange des minerais contre les matériels militaires,y compris les armes.

C’est dans ce sens que l’on trouve facilement les groupes armés dotés de la même tenue que les forces armées régulières alors que les comptes rendus faits par le porte-parole de l’armée laissent penser qu’il n’y a que les éléments de groupes armés qui tombent lors de combat.

L’on note, par exemple, que le Général Masunzu de la 9ème région militaire entretient un port d’évacuation à Saint Laïc sur le lac Kivu, tenu par M. Alexis, pendant que le Colonel Makenga maintient un port autonome dénommé Amani leo pour l’évacuation des produits miniers obtenus dans le cadre des opérations menées par le Colonel Kahimbi.

Dans le Masisi, le pasteur Ramazani Omer, ancien gérant de la société Sodexmin, entretient un circuit de trafic de minerais venant des territoires occupés par Janvier Karairi en collaboration avec certains agents de l’ANR et du CNDP.

Aussi, les puits de Mubi et Bisie, source d’affrontements armés entre les troupes de l’APCLS de Janvier Karairi contre les éléments de Maï-Maï Cheka permettent aux éléments de l’armée régulière d’ériger des barrières sur la route Sake-Goma en vue de contrôler et, le cas échéant, conduire vers la frontière avec le Rwanda les négociants et acheteurs venus de ces territoires.

Dans leterritoire de Beni, la société d’exploitation du bois ENRA trouve son rendement sensiblement réduit et menace de fermer ses activités suite à l’exploitation de ses concessions par le Colonel Bisambaza, commandant du régiment déployé à Beni, bien qu’elle ait eu à saisir les autorités compétentes pour obtenir la cessation de cette exploitation illégale du bois par les militaires.

Gestion foncière et clivages ethniques

Les conflits fonciers nés entre les communautés ont entrainé desclivages entre les ethnies de la plupart des territoires de l’Est du pays. Le conflit dans le Masisi tire ses origines dans la mauvaise gestion des terres depuis l’implantation de la population d’expression rwandaise, venue du Rwanda, suite à la politique de transplantation mise en place par la colonisation belge.

Cinquante ans après l’indépendance, les gouvernements successifs de la RDC n’ont pas fait un effort déterminant pour disposer d’une politique de gestion des terres alors que la question ne se pose plus au seul territoire de Masisi. Le territoire de Lubero, habité en majorité par les Nande, n’est pas épargné.

Au cours du second semestre de l’année 2011, avec lephénomène Hutu-Nande, le Sud du territoire a failli basculer dans la violence intercommunautaire n’eut étéles efforts des comités locaux de conciliation, institués par le programme STAREC.

La guerre en Ituri des années 2000 a opposé les agriculteurs Lendu aux éleveurs Hema sur fond des terres.

De ces conflits, le gouvernement congolais n’a pas encore tiré les leçons qui s’imposent.
«Ethnicisation» des forces de sécurité et politisation des groupes armés

Devant l’incapacité de l’Etat à assurer la sécurité de la population, les communautés croient pouvoir se sécuriser elles-mêmes par l’organisation des groupes armés à vocation ethnique.

A défaut, elles recourent tout simplement à la politisation des forces de sécurité pour obtenir la recomposition des groupes armés existants ou des forces régulières de sécurité.

Tel a été le cas de la scission du groupe armé PARECO qui a donné naissance au groupe PARECO/FAP du Colonel Mugabo et a toujours été la position défendue par les membres de la communauté tutsi, qui se sont toujours opposés à l’arrestation du Général Bosco Ntaganda et qui menacent de déclencher un climat d’insécurité au cas où le gouvernement s’hasarderait à exécuter le mandat d’arrêt lancé par la CPI contre celui qu’ils considèrent comme leur protecteur attitré.

C’est dans ce cadre que les éléments du CNDP ont refusé toute mutation en dehors des territoires du Nord-Kivu et du Sud-Kivu au motif qu’ils sont seuls capables d’assurer la sécurité de leurs frères d’expression rwandaise.

Fin 2010 et début 2011, les régiments issus du processus d’intégration accélérée ont opposé un refus catégorique à la décision présidentielle de les déployés à l’Ouest de la République.

Des membres notables de la communauté tutsi ont adressé une lettre ouverte au secrétaire général de l’ONU, dans laquelle ils sollicitaient l’intervention de ce dernier en vue d’obtenir la cessation de ce qu’ils qualifiaient de conspiration contre la communauté tutsi pour épargner la région des Grands Lacs du nouveau cycle de conflits armés aux conséquences incalculables, après la décision rendue le 14 mars 2012 par la CPI concernant la responsabilité pénale de Thomas Lubanga dans le recrutement des enfants soldats.

Dans cette lettre, les auteurs prennent fait et cause pour Bosco Ntaganda et soutiennent que son intervention en Ituri visait à arrêter un génocide contre les Hema, une composante des groupes ethniques «nilotiques» considérés comme proches des Tutsi.

Les signataires soulignent que c’est grâce à l’option de prendre les armes que ces groupes ethniques vivent en sécurité et qu’il serait donc absurde de considérer les actes de Bosco Ntaganda comme desactes infractionnels alors qu’il s’agit d’actes héroïques et salvateurs.

En 2004 déjà, c’est pour les mêmes raisons de protection de la communauté tutsi que Laurent Nkunda a tenté de justifier son intervention à Bukavu pour soutenir l’attaque menée par le Colonel Jules Mutebutsi contre le Général Nabiolwa.

M. Azarias Ruberwa, alors vice-président de la République dans le gouvernement de transition, avait aussi tenté d’évoquer les mêmes raisons au lendemain du massacre des réfugiés tutsi à Gatumba au Burundi, deux situations similaires qui ont failli faire compromettre le processus de paix sous l’empire de l’Accord global et inclusif.

De même, les opérations menées dans la partie Est s’adaptent aux acteurs. Lorsqu’il s’agit des groupes armés autres que ceux issus de la rébellion CNDP, les FARDC emploient la méthode forte alors que pour les éléments issus du CNDP, c’est la négociation qui prévaut.

Tel a été le cas lorsque le Colonel Kahasha a fait défection dans la localité d’Eringeti et contre qui le Colonel Ngelesa, porte-parole des opérations, a promis de le contraindre par la force alors que pour la défection des unités du Colonel Bonane en Ituri, le Général Amisi Gabriel, alias Tango Four, est parti négocier leur reddition et le gouvernement congolais a consenti que son acte est un cas d’indiscipline.

Dans la ville de Bukavu, l’inspecteur Luzembo a été surpris par la décision l’obligeant d’intégrer dans la police de circulation routière et le département de la protection de l’enfant du territoire d’Uvira des élémentsbanyarwanda dont le processus d’intégration n’est connu que du seul commissaire général de la police, Charles Bisengimana, et ne rendent compte qu’au seul Commissaire général.

Selon les renseignements recueillis par l’enquête, cette décision a été motivée par le fait que l’inspecteur Luzembo se vantait d’être à la tête d’un corps constitué des Congolais authentiques.

Cette tendance consistant en unepolitisation à outrance des forces de sécurité dans la région des Grands Lacs est l’une des causes de compromission des processus de paix de toute la région, au mépris des mécanismes de dialogue souvent mis en place pour tenter de résoudre les différends entre les communautés et de poser les bases d’une cohabitation pacifique des peuples.

Incohérences et absurdités de l’appui de la MONUSCO

Lors de la prise d’armes par les éléments des FARDC issus du processus d’intégration accélérée au camp Rumangabo au Nord-Kivu, les délégués de la Mission onusienne avaient boycotté la cérémonie au motif qu’ils ne pouvaient pas siéger à côté du Général Bosco Ntaganda sous le coup d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale pour les crimes commis en Ituri.

C’est dans ce sens que le Conseil de sécurité s’est dit préoccupé par la promotion des responsables notoires de graves violations des droits de l’Homme au sein des FARDC.

Or, certains contingents militaires de la Mission onusienne mènent des opérations aux côtés des régiments commandés par les mêmes personnes décriées, les côtoient dans les réunions d’évaluation de ces opérations, arguant qu’il appartient au gouvernement congolais de prendre les mesures pour écarter ces personnes.

Or, pour les cas de Thomas Lubanga, Mathieu Ngudjolo et Germain Katanga, la Mission onusienne a joué un rôle de premier plan dans leur arrestation et transfert à la Cour pénale internationale.

Aussi, pendant que les FARDC combattent les groupes armés nationaux, la Mission onusienne organise des rencontres pour obtenir la reddition de certains leaders, notamment le cas Muhambalyaki qui a bénéficié de plusieurs visites des délégués de la Monusco.

Par ailleurs, les paragraphes 11 et 15 de la résolution 1991 demande à la Monusco d’appuyer le gouvernement congolais dans l’élaboration et la mise en œuvre d’une stratégie nationale globale de développement de secteur de sécurité d’une part et dans l’exécution du programme national de désarmement, démobilisation et réinsertion des éléments armés à l’Est, d’autre part.

Ainsi, en appuyant les opérations menées par les FARDC contre les groupes armés, la Monusco viole ses obligations légales et rend, de ce fait, incohérent et absurde son appui aux FARDC et aux efforts de paix qui visent la lutte contre l’impunité.

L’incohérence de l’appui de la Monusco s’explique aussi par les réactions de la population de l’Est. C’est le cas notamment avec l’attaque du village Kamananga, en date du 13 mai 2012, par les FDLR.

Les habitants qui avaient échappé à l’attaque de ces derniers, lors de leur retour dans le village se sont pris contre la base d’opérations mobile de la MONUSCO de Kamananga, blessant 11 casques bleus et les accusant de «protecteurs des FDLR et des Maï-Maï de Raia Mutomboki».

Rapport de Osisa
Le Potentiel

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