16 septembre 2012
Le Parlement a ouvert sa session ordinaire de septembre dans un contexte tout à fait particulier. Une fois de plus, la situation sécuritaire qui prévaut dans la partie Est de la RDC s’est invitée dans le débat.
Si bien qu’au-delà du thème ordinaire de la session, consacrée essentiellement au projet de loi des finances pour l’exercice 2013, le Parlement devait mettre cette session à profit pour comprendre les contours de ce nouveau drame de l’Est du pays.
D’ores et déjà, une motion de défiance court contre le vice-Premier ministre, ministre de la Défense. Le Parlement a donc une responsabilité envers le peuple, dont il est l’émanation, et la nation tout entière.
C’est l’occasion d’aborder sans tabou la question de la guerre de l’Est du pays pour en briser le mystère, longtemps entretenu par les deux Chambres du Parlement.
Le Parlement a promis de rompre le silence sur la situation précaire qui prévaut dans la partie Est du territoire national. A la Chambre basse du Parlement, le vice-Premier ministre, ministre de la Défense, est attendu dans les tout prochains jours pour s’expliquer. Ça sera alors son deuxième rendez-vous devant les députés nationaux.
L’Assemblée nationale attend recevoir d’Alexandre Luba Ntambo des explications nécessaires en rapport avec « la gestion de la situation sécuritaire dans l’Est de la RDC, ce conformément aux articles 146 de la Constitution et 209 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale ». C’est ce qu’a annoncé samedi à l’ouverture au Grand Hôtel Kinshasa de la session ordinaire de septembre Aubin Minaku, président de la Chambre basse du Parlement.
La motion de défiance lancée contre le ministre de la Défense relance le débat sur l’implication réelle du Parlement dans la guerre de l’Est du pays, menée - avec le soutien plus que jamais confirmé du Rwanda - par les troupes rebelles du Mouvement du 23 mars.
Il y a quelques mois, l’Assemblée nationale s’était intéressée à la même question. Mais, se couvrant derrière le « secret défense », l’Assemblée nationale avait jugé mieux de traiter la question à huis clos, loin des regards de la population, qu’elle était censée défendre.
Que l’Assemblée nationale ait décidé aujourd’hui de rouvrir le débat, empruntera-t-elle la même voie ? La question est sur toutes les lèvres.
Depuis la première interpellation du vice-Premier ministre, ministre de la Défense et du ministre de l’Intérieur à l’Assemblée nationale, la question de l’Est du pays a nettement évolué. Aujourd’hui, il était plus qu’avéré que derrière les rebelles du M23, il y a la main rwandaise qui commande toutes les opérations ; Kigali fournissant armes et munitions aux troupes rebelles.
Dans le temps, lorsqu’elle s’est penchée sur le dossier, le Parlement s’était refusé à citer nommément le Rwanda, se couvrant derrière des considérations diplomatiques, relevant de la seule compétence du gouvernement.
Or à ce jour, le soutien du Rwanda aux rebelles du M23 passe pour un « secret de polichinelle », comme l’avait si bien dit le président de la République dans un face-à-face avec la presse congolaise. En relançant le dossier de la guerre l’Est du pays, le Parlement n’a aucune raison d’entretenir le suspense.
C’est le moment de crever l’abcès. Devant les députés nationaux et invités conviés à l’ouverture de la session ordinaire de septembre, Aubin Minaku, président de l’Assemblée nationale, l’a clairement signifié. Il y va, semble-t-il dire, de la survie de la République démocratique du Congo, en pays indépendant et souverain.
Démanteler les complicités internes
Aussi, a-t-il relevé que « la problématique sécuritaire dans l’Est du pays ou dans n’importe quel autre coin de la République s’érige désormais en nous et devant nous comme un véritable défi à relever. Elle soulève clairement la question de l’existence et de la survie de notre pays en tant que nation et en tant qu’Etat souverain ».
« Nous sommes condamnés, note-t-il, à gagner tout d’abord le combat pour une paix durable avant de prétendre à un développement durable, ensuite au statut de pays émergent ».
« Sans la paix, pense-t-il, il n’y a pas de véritable développement ». Autant de raison qui oblige le Parlement à ouvrir véritablement la boîte de Pandore en vue de mettre à nu l’énigme de l’Est. Des traîtres, il n’en existe certainement par rapport à ce qui se passe. Sinon, rien ne saurait justifier qu’une situation de crise se pérennise dans cette partie de la RDC.
Le président de l’Assemblée nationale l’a subtilement évoqué dans son discours de samedi dernier. Ainsi, lorsqu’il évoque des problèmes touchant à l’efficacité des hommes en uniforme engagés au front, il a fait remarquer qu’ « il n’y a pas de place pour les traîtres à la patrie, à la solde de l’étranger ».
Que Minaku soulève la question, cela n’est nullement fortuit. La situation instable de l’Est du pays tient, entre autres, à la traîtrise et à la trahison qui a gagné certaines institutions de la RDC, principalement l’armée et les services de sécurité. Aubin Minaku le sait.
Sinon, il n’aurait pas évoqué le sujet le week-end dernier.
Le peuple, médusé et impatient de connaître la vérité, attend que ses élus s’impliquent à fond pour éventrer le boa et faire éclore enfin la vérité au grand jour.
C’est la seule façon d’obtenir son implication dans le combat pour le retour d’une paix durable dans la partie Est de la RDC.
La session de septembre est une belle occasion pour les deux Chambres du Parlement de faire amende honorable devant le peuple dont elles sont l’émanation. Entretenir inutilement le suspense, comme ce fut le cas lors de la première une interpellation du ministre de la Défense, ne fera qu’élargir le fossé déjà béant entre le peuple et ceux qui le représentent au Parlement.
A présent que la responsabilité internationale du Rwanda est « établie » dans la nouvelle guerre menée par les troupes rebelles du M23, le peuple congolais attend de son Parlement des actions et des gestes forts pour pousser le gouvernement à briser le silence.
Il s’agit, dans un premier temps, de démanteler tous les réseaux nationaux qui tirent allègrement profit de la situation instable de l’Est du territoire national. Le Parlement doit en effet contraindre le gouvernement à réorganiser le système de défense et de sécurité national pour accroître sa capacité d’action.
« Trop, c’est trop ! Le peuple congolais en a assez de la guerre de qui fait couler beaucoup de sang et sème la désolation parmi nos populations, faisant planer le spectre d’une balkanisation planifiée sans compter le pillage illicite de nos ressources naturelles », a martelé le président de l’Assemblée nationale.
Le peuple congolais le lui réplique aussi, en revendiquant son droit le plus légitime de comprendre exactement ce qui se passe dans l’Est du pays. Le tabou longtemps entretenu autour de cette guerre n’a plus sa raison d’être.
Le Potentiel
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