mardi 11 septembre 2012

Manipulation de Kigali : La RDC doit rester proactive et vigilante sur le terrain diplomatique


10/09/2012


Louise MUSHIKIWABO et Raymond TSHIBANDA

Un jour après son passage devant le Comité des sanctions, le Chef de la diplomatie congolaise s'est adressé aux membres du Conseil de Sécurité de l'ONU. Raymond Tshibanda a expliqué , notamment , au Conseil que les preuves convaincantes présentées par le Groupe d'experts dans l'additif à son Rapport d'étape, ainsi que l'histoire des conflits à répétition qui endeuillent la région des Grands-Lacs depuis le 02 aout 1998.

Il nous revient des sources diplomatiques congolaises que ce plaidoyer a été clair et incisif. Par contre, les arguments du Rwanda n'ont pas été convaincants selon des sources concordantes. Du côté congolais, l'on note ainsi une certaine satisfaction.

Mais, il faut attendre la suite des événements. D'autant plus qu'il existe des lobbies rwandais très actifs dans la région des Grands-Lacs et au niveau international pour défendre les intérêts de Kigali. Il va falloir que la RDC reste proactive et vigilante sur le terrain diplomatique pour contrer les actions éventuelles de manipulation de Kigali et de ses lobbies passés maîtres dans la désinformation et la duplicité.

Poursuivant l'offensive diplomatique engagée depuis trois mois, le chef de la diplomatie congolaise Raymond Tshibanda, revient d'un périple euro-américain qui l'a conduit successivement à New York, Washington et Londres.

Il était question de présenter le plaidoyer de la République démocratique du Congo auprès de la communauté internationale et faire entendre la voix de la RDC, par rapport à la guerre imposée par la rébellion du M23 au Nord-Kivu. Mais aussi sur le soutien de Kigali à cette rébellion.

Ainsi, cette rébellion qui a des ramifications en dehors du pays pousse la RDC à déployer une intense activité diplomatique. Dernièrement, le ministre des Affaires étrangères, Coopération Internationale et Francophonie, Raymond Tshibanda a présenté le plaidoyer de la RDC devant le Comité des sanctions du Conseil de sécurité de l'ONU.

Il s'est ensuite livré au même exercice devant les Etats membres du Conseil de sécurité des Nations unies à New York. Profitant de sa présence aux Etats-Unis, le Chef de la diplomatie congolaise a eu aussi quelques contacts au Département d'Etat américain à Washington DC.

Pour récapituler, Raymond Tshibanda et la ministre rwandaise des Affaires étrangères étaient auditionnés devant le Comité des Sanctions du Conseil de sécurité. Chaque partie devait défendre ses thèses. Comme les experts des Nations-Unies devaient faire un exposé sur le rapport accablant qu'ils ont produit sur le soutien du Rwanda au M 23.

Le chef de la diplomatie congolaise a présenté son plaidoyer. Pour rappel, cette structure a été créée par le Conseil de sécurité par la résolution 1533 concernant la République démocratique Congo. Il s'est agi des consultations relatives à l'additif du Rapport d'étape du Groupe d' Experts sur la RDC, publié le 27 juin 2012.

Au fait, le Comité des sanctions est un organe subsidiaire du Conseil de sécurité. Celui-ci aura donc à se pencher de la manière la plus attentive sur le Rapport final du Groupe d'experts relatif à la situation sécuritaire dans l'Est de la RDC.

C'est après qu'il va faire ses recommandations sur la suite à lui réserver. Selon les informations recueillies, l'additif du rapport d'étape établit clairement que des personnalités rwandaises occupant des fonctions de haut rang dans le gouvernement rwandais et dans l'armée rwandaise, soutiennent les rebelles du M23, en leur fournissant des armes, la logistique militaire et des troupes.

En ce qui le concerne, Raymond Tshibanda a expliqué qu'une telle implication d'officiels de haut rang, en fonction dans une armée étrangère, en appui à une rébellion, est constitutive d'un acte d'agression qu'il appartient au Conseil de sécurité de constater conformément au Chapitre VII de sa Charte.

En conséquence, le Chef de la diplomatie congolaise a clos son propos en invitant le Comité à geler les biens et avoirs de toutes ces personnalités, à interdire leurs déplacements et à inscrire le M23 comme force négative et nouveau groupe terroriste, au même titre que l' Armée de Résistance du Seigneur, " LRA " et les Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda, " FDLR ".

A son avis, ces mesures créeront sans doute les conditions d'un retour rapide à la paix dans cette partie orientale de notre pays. Cette éventualité de sanctions ira dans le même sens que l'action des Chefs d' Etats et de gouvernement réunis à Addis-Abeba au Sommet extraordinaire de la Conférence Internationale sur la région des Grands-Lacs (CIRGL).

Autant que les chefs d'Etat et de gouvernement l'ont réitéré au dernier Sommet ordinaire de l'Union Africaine. Selon l'argumentaire de la RDC, des sanctions appliquées avec fermeté contre le Rwanda pour son soutien au M23, s'impose.

Raymond Tshibanda devant le Conseil de Sécurité de l'ONU

Un jour après son passage devant le Comité des sanctions, le Chef de la diplomatie congolaise s'est adressé aux membres du Conseil de Sécurité de l'ONU. Raymond Tshibanda a expliqué , notamment , au Conseil que les preuves convaincantes présentées par le Groupe d'experts dans l'additif à son Rapport d'étape, ainsi que l'histoire des conflits à répétition qui endeuillent la région des Grands-Lacs depuis le 02 aout 1998, appellent quelques considérations suivantes. Entre autres, il en a cité celles-ci :

- L'attitude du Rwanda à l' égard de la RDC est caractérisée par une violation grave et persistante des principes énoncés dans la Charte des Nations Unies (articles 1, 2,6 et 39 de la charte) d'une part, et constitue une menace constante à la paix et à la sécurité internationale d'autre part.

- Le soutien prouvé du Rwanda au M23 est la cause d'une tragédie humanitaire dans l'Est de la RDC et contribue de manière directe à la souffrance intolérable de plus de 500.000 déplacés internes et externes, femmes et enfants compris.

- Ce soutien facilite aussi l'exploitation illégale, en toute impunité et au dépend des populations congolaises meurtries, des ressources minières de la République démocratique du Congo, dont le Conseil a stigmatisé le rôle négatif dans la perpétuation de l'insécurité et des conflits dans la région des Grands-Lacs.

- Contre toutes les évidences, le Rwanda nie systématiquement son implication dans la détérioration de la situation au Nord-Kivu. Cela démontre qu'il n'existe pas de volonté réelle de ce pays de mettre un terme définitif à la situation d'instabilité qu' il entretient méthodiquement et délibérément dans l'Est de la RDC en violation de toutes les règles du droit international.

Fort de ce cette argumentation, le gouvernement de la RDC, par la bouche de Raymond Tshibanda a demandé au Conseil de Sécurité : "

1. De réitérer sa condamnation du M23 qui doit, comme le lui ont demandé les Chefs d' Etat et de Gouvernement de la région des Grands-Lacs, cesser immédiatement toute action militaire et toute action politique anticonstitutionnelle ;

2. De condamner le Rwanda pour son soutien au M23 en territoire congolais, tel que documenté par l'additif du Rapport d'étape du Groupe d'experts sur la République démocratique du Congo ;

3. De concourir à la mise en œuvre de la décision unanime des Chefs d' Etat et de gouvernement de la région des Grands-Lacs, dont celui du Rwanda, et qui a été endossée par l'Union Africaine, de mettre immédiatement en place une force internationale neutre chargée d'éradiquer le M23 et le FDLR, considérés tous deux comme forces négatives d'une part et d'assurer le contrôle et la sécurisation de la frontière entre la RDC et le Rwanda d' autre part.

4. D'examiner dans cette optique, l'élargissement et le renforcement du mandat de la MONUSCO, la révision de ses règles d'engagement et la reconfiguration de ses effectifs. "

Face à l'impérieuse nécessité pour le Conseil d'assumer en toute circonstance sa mission de maintien de la paix et de la sécurité internationale, il est de notre avis que des mesures fermes, dissuasives et contraignantes doivent être prises contre le Rwanda. Une action énergétique du Conseil parait en effet indispensable pour rétablir la paix et permettre aux pays de la région de coopérer dans la fraternité, le respect mutuel, et pour le grand bien de leurs populations respectives.

En définitive, la RDC a fait passer ses thèses. Il nous revient des sources diplomatiques congolaises que ce plaidoyer a été clair et incisif. Par contre, les arguments du Rwanda n'ont pas été convaincants selon des sources concordantes.

Du côté congolais, l'on note ainsi une certaine satisfaction. Mais, il faut attendre la suite des événements. D'autant plus qu'il existe des lobbies rwandais très actifs dans la région des Grands-Lacs et au niveau international pour défendre les intérêts de Kigali.

Il va falloir que la RDC reste proactive et vigilante sur le terrain diplomatique pour contrer les actions éventuelles de manipulation de Kigali et de ses lobbies passés maîtres dans la désinformation et la duplicité.

L'avenir nous en dira plus.


Raymond Tsibanda reçu au Département d'Etat

Dans le cadre de l'offensive diplomatique en rapport avec la guerre au Nord-Kivu, Raymond Tshibanda, ministre des Affaires étrangères a été reçu au Département d'Etat américain et par la suite à la Maison Blanche à Washington DC, capitale fédérale des Etats-Unis.

C'est après l'étape de New York que le ministre Tshibanda s'est rendu à Washington DC où il a eu des entretiens avec des personnalités en charge de la politique étrangère américaine.

Dans un premier temps, il a été reçu par Mélanie Verveer, ambassadeur Spécial en charge des questions du genre. Cette personnalité a échangé avec le ministre Raymond Tshibanda sur le rôle de la femme dans la prévention des conflits et la préservation de la paix dans les Grands - Lacs.

Dans la foulée, le chef de la diplomatie congolaise a pris langue avec l'ambassadeur Stephen RAPP, chargé des crimes de guerre. Avec lui, il a évoqué la réforme du système judiciaire congolais et la coopération entre la RDC et la justice internationale.

Le ministre congolais a rassuré son interlocuteur sur la ferme volonté de la RDC de renforcer les capacités de son appareil judicaire et de travailler en synergie avec la justice internationale, afin de mettre fin à l'impunité dont jouissent les seigneurs de guerre et autres dirigeants des forces négatives opérant en RDC comme le M23, les FDLR et la LRA .

Poursuivant la série de ses contacts, le ministre Tshibanda a pris langue avec deux Sous -Secrétaires d' Etat américains. Madame Maria Otero, Sous-secrétaire d' Etat chargée de la protection des civils, de la démocratie et des droits de l'homme, a échangé avec le ministre Tshibanda.

Au menu : la question de la lutte contre le recrutement des enfants soldats dans les mouvements rebelles, le renforcement des institutions d'appui à la démocratie en RDC et le rôle de la Monusco dans la protection des populations civiles.

Par ailleurs, Raymond Tshibanda a rencontré Wendy SHERMAN, Sous-secrétaire d' Etat américain en charge des affaires politiques. Avec celui-ci, l'entretien a porté sur les conséquences qui découlent du soutien que le Rwanda accorde au M23, notamment sur les populations civiles, en violation flagrante de la Charte des Nations Unies et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.

Selon le ministre des Affaires étrangères de la RDC, pour des raisons de crédibilité et d'efficacité dans sa mission de préserver la paix et la sécurité internationale, le Conseil de sécurité se doit de sanctionner les auteurs de ces violations.

Selon les informations disponibles, les deux personnalités ont évoqué le renforcement de la coopération militaire entre les Etats-Unis d'Amérique et la RDC. Après avoir présenté au ministre Tshibanda les salutations de son homologue américain, Mme Hillary Clinton, absente de Washington puisqu'en mission dans le Pacifique, la Sous-secrétaire d' Etat, Wendy SHERMAN, a réaffirmé la position ferme des USA contre le M23 et l'appui que ce mouvement reçoit du Rwanda.

Il a promis le soutien de son pays au gouvernement de la RDC, auprès du Conseil de sécurité et dans ses efforts pour combattre les forces négatives dans le Kivu. Sur le chemin de retour, Raymond Tshibanda a effectué une escale à Londres pour un entretien avec son homologue britannique William Hague.

A l'ordre du jour, il a été question, une fois encore, de la situation sécuritaire dans l'Est du pays, la crise humanitaire qui en résulte, la responsabilité du Rwanda et la nécessité des sanctions contre ce pays.

Enfin, pour donner des résultats, le plaidoyer de la RDC doit porter au-delà des officiels des puissances occidentales. Il faut aussi toucher l'opinion publique internationale.

Le ministre des Affaires étrangères, Coopération internationale et Francophonie, a terminé son séjour américain par une conférence de presse au siège de l'ONU à New York.

Par contre, à Londres, c'est à des millions des téléspectateurs repartis sur les cinq continents qu'il a choisi de s'adresser directement. Il a été l'invité de la BBC télévision. Ainsi, il était passé, dans une émission spéciale " Hard Talk ", pour défendre le point de vue de la RDC dans le conflit qui l'oppose au Rwanda, le soutien du M23.

[Didier Munsala Buakasa]
© KongoTimes

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