Le "raïs", alias "Papa roméo", alias "raïs président".
Un seul sujet alimente actuellement les commérages dans le Tout-Kinshasa-politique. Il s’agit du très fameux "gouvernement de cohésion nationale". Huit mois après l’annonce faite par le "raïs président", alias "Papa roméo" de la mise en place "bientôt" d’un "gouvernement de cohésion nationale" afin de contrer la menace qui planait sur le pays, il n’y a toujours rien sous le soleil.
"Taiseux", le successeur de Mzee reste fidèle à lui-même : motus et bouche cousue. L’homme aime se faire mousser. Histoire de se rendre intéressant. "On ne presse pas le président", avait déclaré, à TV5Monde, le "Tshaku national" chargé des Médias.
En attendant que le "raïs" daigne bien fixer l’opinion sur la consistance ou non de sa promesse, c’est la panique générale! Tous les carriéristes et autres arrivistes qui se voyaient déjà "en haut de l’affiche" affublés du titre "Son Excellence" sont au bord de la crise des nerfs.
Adieu donc "l’ascenseur social" et la très incontournable voiture avec chauffeur. Dernièrement, l’autorité immorale, pardon, l’autorité morale de la majorité présidentielle est allée “se reposer” dans sa ferme de Kingakati.
Les médias de la Kabilie y ont vu un signe du remaniement imminent. Rien ne s’est passé. Des "analystes" prédisaient la main sur le coeur que le nouveau gouvernement devait être connu avant le 15 juin, date de la clôture de la session parlementaire. Rien ne s’est passé non plus.
Selon mon ami qui sait tout sur tout et presque tout sur rien au sujet des potins de Kinshasa-Lez-Immondices, certains Kinois ont donné au “rais”, alias "le garant de la nation", alias le commandant suprême des FARDC, de la police nationale et de la garde présidentielle, le surnom de "Boulanger de Kingakati".
Intrigué par ce sobriquet, j’ai posé, à mon ami, une question quelque peu naïve : “Pourquoi donner à l’autorité morale de la MP le surnom de boulanger alors qu’il n’a jamais tenu une seule boulangerie?”.
Irrité par mon manque d’imagination, l’ami de répondre sur un ton frisant le racisme : “Quand descendras-tu de ton cocotier Negro? Ne sais-tu pas qu’un boulanger passe son temps à tout rouler dans la farine?"
A en croire mon ami, le "raïs" a roulé tout le monde dans la farine. Il a roulé non seulement les presidents des deux chambres du Parlement mais surtout les membres de l’opposition dite "républicaine" qui passent désormais aux yeux des "combattants" pour des "collabos".
"Pourquoi le raïs a-t-il fait cela alors qu’il semblait sincère à propos de la nécessité de renforcer la cohésion nationale?", ai-je demandé.
Réplique de l’ami : "Les raisons qui avaient poussé le raïs à plaider en faveur de la cohésion nationale ont disparu avec la défaite des rebelles du M23 et les avertissements de la communauté internationale sur le respect la Constitution".
Il ajoute : "Papa roméo est un homme fourbe et calculateur. Il ne fait jamais rien pour rien. A fortiori, il ne donnera jamais quelque chose sans rien recevoir en retour. Pour quel intérêt doit-il partager le pouvoir avec des opposants?".
Pour mon ami qui sait décidément tout sur tout, derrière le gouvernement de cohésion nationale se dissimulait la volonté du raïs de lancer une nouvelle transition avec pour but de modifier les articles de la charte fondamentale qui l’empêchent de rester calife à la place du calife après le 19 décembre 2016.
Devant mon incrédulité, l’ami de me rappeler que le "raïs" a évoqué, pour la première fois, le concept "cohésion nationale" dans son discours du 7 septembre 2013.
"A cette époque, il explique-t-il, la guerre faisait rage entre les FARDC et la bande à Sultani Makenga et Bertrand Bisimwa".
Mon ami qui a une mémoire d’éléphant de citer un passage de cette harangue : “Sauf à trahir la mémoire des martyrs de notre indépendance et de tous ceux qui, de génération en génération, ont donné de leur vie pour maintenir à jamais allumée la flamme de la liberté, nous devons tous nous sentir interpellés par cette menace et nous mobiliser, comme un seul homme, pour y faire face».
A en croire l’ami, lors de la clôture des travaux des Concertations nationales, le 5 octobre, le raïs insista sur la nécessité de «dégager les voies et moyens susceptibles de rétablir et de consolider la cohésion interne (…) ».
Selon lui, il ajoutait : « C’est aussi la preuve, une fois encore, que lorsque la nation est en danger, ou lorsqu’il s’agit d’établir des bases solides pour l’avenir du pays, les Congolaises et Congolais sont capables de dépassement de soi et de sursaut patriotique ».
Dans son allocution du 23 octobre 2013, « Papa Roméo » annoncera notamment : “(…), dans le cadre de ma politique d’ouverture, prônée depuis mon investiture, un "gouvernement de cohésion nationale" sera bientôt mis en place.
Il comprendra aussi bien des représentants de la majorité que ceux de l’opposition et de la société civile et aura pour missions prioritaires le rétablissement de la paix et de l’autorité de l’Etat à travers le pays, la consolidation de la cohésion nationale, la poursuite de la reconstruction, l’appui au processus de décentralisation et à l’organisation des élections, et l’amélioration des conditions sociales des populations".
Mon ami, qui est décidément dans le secret des Dieux, assure que le «raïs» a reçu, en novembre 2013, une centaine de recommandations sélectionnées par les "Concertateurs".
A en croire mon ami, le raïs avait fait savoir que « des mesures importantes seront annoncées pour y donner suite». Depuis lors, c’est le silence radio.
Huit mois après le message du raïs du 23 octobre 2013, tous les opportunistes sont aux aguets. Ils attendent, tels des fauves affamés, que "Papa roméo" leur jette quelques os à croquer. Bref, qu’il leur donne "à manger".
Le Tout-Kinshasa-politique guette les faits et gestes de l’homme de Kingakati attendant désespérément la désignation du nouveau "Premier" chargé de former le "gouvernement de cohesion nationale". "La défaite des rebelles du M23 le 5 novembre 2013 a été le premier facteur qui a fait changé d’avis le raïs, souligne mon ami.
Le message du secrétaire d’Etat américain John Kerry lui demandant de respecter la Constitution suivi par ceux des envoyés spéciaux de la communauté internationale a engendré le doute".
Pour mon ami, le "raïs" espérait avoir de nouveaux alliés pour briguer un troisième mandat. "C’est un pari qui devient difficile à réaliser", fait-il remarquer.
Citant une pièce de Shakespeare, mon ami de conclure : "Beaucoup de bruit pour rien". Pédant, il ajoute une expression latine : "Oderint, dum metuant". Traduction : "Qu’ils me haïssent, pourvu qu’ils me craignent".
Il ne me reste plus qu’à clamer : Vive le “Boulanger de Kingakati” pour sa capacité à rouler tout le monde dans la farine!
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Issa Djema
© Congoindépendant
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