La poignée de mains Ban-Ki moon et "Joseph Kabila" lors d’une visite à Kisangani. Photo d’archives
Au cours d’une conférence de presse conjointe, mercredi 22 mai, avec le président de la Banque mondiale, le Dr Jim Yong Kim, le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, a "exhorté" les parties en conflit, en l’occurrence le gouvernement congolais et les rebelles du M23, "à arrêter les hostilités" et à reprendre «immédiatement» des pourparlers de Kampala.
Depuis Bunagana, le M23 dénonce, dans un communiqué daté du 24 mai 2013, une "épuration ethnique" qui serait en cours à Goma. Les victimes seraient des "Congolais banyarwanda". Ceux-ci seraient déportés à Bukavu et à Minova.
Pour le numéro 1 des Nations Unies, il est tout à fait "inacceptable" que des femmes, des enfants et des personnes vulnérables soient violés, rappelant au passage la mission de l’ONU qui consiste à assurer la protection des personnes les plus faibles. Il a souligné qu’aucun principe ne peut justifier les violations des droits des femmes et des enfants.
Evoquant la prochaine "entrée en action" de la brigade d’intervention de l’ONU, le secrétaire général a précisé que son Organisation se trouvent encore "dans la phase de recrutement". Il a néanmoins rappelé que "cette brigade a un mandat particulier pour maintenir la paix et la sécurité quelque soit la situation". Et que la coordination de cette mission sera décidée par le Conseil de sécurité.
Camouflet
Pour les observateurs, l’exhortation faite, par Ban-Ki moon, aux plus hautes autorités congolaises ne peut être interprétée que comme un "camouflet". Au motif que ces autorités semblaient dormir sur leurs lauriers dans l’attente du déploiement de la brigade onusienne.
En prenant cette position, disent-ils, le patron de l’ONU, en bon diplomate, paraît décidé à faire l’économie d’un affrontement armé en privilégiant une "solution politique". La force ne pouvant ainsi intervenir qu’en guise d’ultime recours. La diplomatie n’est-elle pas définie comme l’art de résoudre les différends par la voie de dialogue?
Les mêmes observateurs relèvent une certaine convergence entre le point de vue exprimé par Ban-Ki moon et la position soutenue par le Rwanda de Paul Kagamé.
Dans une interview accordée à J.A n°2732, édition datée du 19-25 mai 2013, le chef d’Etat rwandais a eu ces mots parlant de la brigade des Nations Unies : "Je crains que cela n’ait aucun sens, mais laissons-les essayer : le Rwanda ne s’y oppose pas, même si je sais à l’avance que cela ne résoudra rien".
Et d’ajouter : "La solution doit être politique. En quoi une brigade d’intervention équipée de drones de surveillance est-elle le remède au déficit de gouvernance, d’infrastructures, d’institutions et d’administration dont sont victimes les populations?"
"Vaste blague"
Depuis le mois de décembre dernier les officiels venus de Kinshasa "discutaient" - pour ne pas parler de négociations - avec les rebelles du M23 lesquels constituent ni plus ni moins qu’une émanation du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple) avec lequel "Joseph Kabila" avait signé un Accord dit de paix.
C’était le 23 mars 2009. Les pourparlers sont dans l’impasse.
Deux raisons majeures.
A Kampala, les délégués du M23 ont monté les enchères en exigeant la démission de "Joseph Kabila" "du fait qu’il a été mal élu" lors des consultations politiques du 28 novembre 2011.
Mi-janvier, Abbé Apollinaire Malu Malu qualifiait de "vaste blague" les exigences des rebelles. «Il n’est pas question, déclarait-il, de remettre en cause l’ordre constitutionnel et institutionnel de la RDC».
Malu Malu de rappeler que les pourparlers se limitent à une évaluation de l’application de l’Accord du 23 mars 2009. C’est la première raison. Depuis la signature, le 24 février dernier à Addis Abeba, de l’Accord-cadre de paix par onze Etats africains suivi par l’adoption, le 28 mars, de la résolution 2098 par le Conseil de sécurité, les gouvernants congolais s’illustraient par une désinvolture autant que d’une arrogance de mauvais aloi. C’est la seconde raison.
Ils arboraient et continuent à arborer une mine triomphaliste alors que l’armée nationale partie du territoire national continue à échapper à l’autorité du gouvernement tant provincial du Nord Kivu que de l’exécutif national.
Le 1er avril dernier, Raymond Tshibanda, ministre des Affaires étrangères, invitait, sans vergogne, les rebelles du M23 à «cesser d’exister comme un mouvement politico-militaire». Le ministre des Médias, Lambert Mende Omalanga, d’enchainer que si le M23 ne s’exécutait pas, "la Brigade d’intervention s’occupera à mettre fin à son existence".
"Epuration ethnique"
Au moment de boucler ces lignes, un communiqué du porte-parole du M23, daté du 24 mai 2013, fait état de l’arrestation de plusieurs dizaines de "Congolais Banyarwanda" à Goma. Les individus interpellés auraient été "transférés à Minova et ou à Bukavu".
"La stigmatisation d’une partie de la communauté nationale, prise pour bouc émissaire des problèmes auxquels le pays est confronté, est à la base de beaucoup de frustrations ayant conduit à des guerres récurrentes", souligne le communiqué.
Le M23 dit tenir le gouvernement "pour unique responsable" de ce qu’il qualifie d’"épuration ethnique" et lance un "appel pathétique à toute la Communauté humaine, aux institutions internationales, en l’occurrence la Mission d’Observation des Nations-Unies pour la Stabilisation du Congo, MONUSCO en sigle, qui a pour mission de protéger les populations civiles, à mettre un terme à la collaboration avec les instances sécuritaires du Gouvernement congolais".
"Notre Mouvement se réserve le droit d’adopter toute attitude susceptible de garantir la sécurité et la protection à tous les citoyens congolais ainsi que toute personne étrangère ayant choisi de vivre au Congo."
La visite de Ban-Ki moon au Congo-Kinshasa et dans la sous-région des Grands Lacs sonne-t-elle "l’heure de vérité" pour "Joseph Kabila" et ses "petits soldats"?
B.A.W (avec ACP)
© Congoindépendant
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