05 fév 2014
Turbulences pour le régime Kabila. Coup de force manqué, assassinat d’un haut gradé de l’armée congolaise et un gouvernement d’union nationale qui se fait attendre… Joseph Kabila devra rapidement prendre des décisions.
Affiche du président Joseph Kabila à Lubumbashi en 2013 © Ch. Rigaud
La fin de l’année 2013 était pleine de promesses et de bonnes nouvelles pour le président Joseph Kabila : retour en grâce diplomatique et en légitimité avec le soutien de la communauté internationale dans la crise à l’Est, puis défaite militaire de la rébellion du M23 et enfin mise en place de « Concertations nationales » pour retrouver un nouveau souffle à sa majorité.
Mais l’année 2014 s’annonce plus incertaine que jamais en République démocratique du Congo (RDC). En l’espace de quelques semaines, tous les clignotants sont repassés au rouge pour le régime Kabila. Et tout d’abord sur le plan sécuritaire.
Coup de force raté
Le 30 décembre, une série d’attaques secouent Kinshasa faisant plus de 100 morts. Les assaillants visent l’aéroport, la télévision nationale et le quartier général de l’armée. A la tête de ce groupe, un obscur pasteur katangais, Joseph Mukungubila, basé à Lubumbashi au Katanga.
Le relatif amateurisme des attaquants, la réponse disproportionnée des forces de sécurité congolaises et la facilité avec laquelle les adeptes de Mukungubila se sont infiltrés dans des lieux aussi sensibles, sont extrêmement inquiétants sur la solidité du régime de Joseph Kabila.
Circonstance aggravante : tous les regards se sont immédiatement sur un ancien proche de Joseph Kabila : l’ancien chef de la police, John Numbi, accusé d’avoir aider les assaillants.
John Numbi est également accusé de soutenir les Bakata Katanga, un groupe sécessionniste qui défi régulièrement les autorités congolaises à Lubumbashi et sème la terreur au nord de la province.
Comment refonder l’appareil sécuritaire ? Que faire de l’encombrant John Numbi ? Comment juguler les Bakata Katanga ?
Joseph Kabila devra trouvera rapidement les réponses à ces questions.
Décisions sécuritaires
Quelques jours seulement après les attaques du 30 décembre, un autre événement secoue le pays : l’assassinat du colonel Mamadou Ndala, tombeur du M23 et « héros national » depuis la défaite des rebelles en novembre dernier. C’est un vrai coup dur pour Kinshasa.
Sa disparition surprise sonne la fin de l’euphorie congolaise après la mise en déroute du M23 par l’armée régulière (FARDC) et l’ONU.
Mais l’assassinat de Mamadou Ndala constitue surtout le révélateur de l’état dans lequel se trouve l’armée congolaise : une armée à reconstruire. Les premiers soupçons se portent en effet rapidement sur des responsabilités internes au sein même des FARDC.
La « résurrection » de l’armée congolaise, tant vantée par Kinshasa, n’est donc pas encore une réalité. Joseph Kabila a donc du pain sur la planche pour réformer l’institution militaire.
Car même si le M23 est défait, une quarantaine d’autres groupes armés sévissent encore dans l’Est du pays… et l’armée congolaise est attendue au tournant. Là encore le temps des décisions a sonné.
Décisions politiques
Sur le plan de la politique intérieure, les atermoiements de Joseph Kabila, place le président congolais dans une situation des plus inconfortables.
Les promesses faites à l’issue des Concertations nationales tardent à se concrétiser et le gouvernement de « cohésion nationale » annoncé comme « imminent » fin octobre 2013, se fait toujours attendre.
Joseph Kabila peine à trouver la composition de ce qui pourrait devenir sa nouvelle majorité et sur laquelle s’appuyer pour les prochaines échéances électorales.
Doit-il chercher son nouveau Premier ministre à l’extérieur (comme il l’a toujours fait) où l’intérieur de son parti, le PPRD ?
Doit-il intégrer une frange de l’opposition dans son gouvernement ? Que faire des ex-rebelles du M23 que l’amnistie qui vient d’être voté pourrait réintégrer dans le jeu politique ?
Pourquoi ne pas garder l’actuel Premier ministre Matata Ponyo, qui rassure les bailleurs internationaux, mais qui agacent dans son propre camp ?
Autant de questions auxquelles Joseph Kabila devra vite trouver la réponse.
L’impossible troisième mandat
L’heure des choix est venue pour le président Kabila.
Dès 2015, de nouvelles échéances électorales sont en vues et en 2016, l’élection présidentielle semble focaliser toutes les attentions du président congolais.
La Constitution ne lui permettant pas de se représenter une troisième fois, l’entourage de Joseph Kabila travaille sur toutes les hypothèses : révision de la Constitution grâce à une nouvelle majorité élargie au parlement, report du calendrier électoral, création d’une nouvelle période de transition qui permettrait de « remettre les compteur à zéro » et au président de briguer un nouveau mandat, mise en planche d’un scénario « Poutine-Medvedev » qui placerait un homme-lige au pouvoir avant le retour de Joseph Kabila… tout est possible, même la candidature de la soeur du président, Jaynet Kabila.
Une chose est sûre, en 2014, Joseph Kabila devra trouver un début de réponse à toutes ces questions.
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Christophe RIGAUD
Afrikarabia
Turbulences pour le régime Kabila. Coup de force manqué, assassinat d’un haut gradé de l’armée congolaise et un gouvernement d’union nationale qui se fait attendre… Joseph Kabila devra rapidement prendre des décisions.
Affiche du président Joseph Kabila à Lubumbashi en 2013 © Ch. Rigaud
La fin de l’année 2013 était pleine de promesses et de bonnes nouvelles pour le président Joseph Kabila : retour en grâce diplomatique et en légitimité avec le soutien de la communauté internationale dans la crise à l’Est, puis défaite militaire de la rébellion du M23 et enfin mise en place de « Concertations nationales » pour retrouver un nouveau souffle à sa majorité.
Mais l’année 2014 s’annonce plus incertaine que jamais en République démocratique du Congo (RDC). En l’espace de quelques semaines, tous les clignotants sont repassés au rouge pour le régime Kabila. Et tout d’abord sur le plan sécuritaire.
Coup de force raté
Le 30 décembre, une série d’attaques secouent Kinshasa faisant plus de 100 morts. Les assaillants visent l’aéroport, la télévision nationale et le quartier général de l’armée. A la tête de ce groupe, un obscur pasteur katangais, Joseph Mukungubila, basé à Lubumbashi au Katanga.
Le relatif amateurisme des attaquants, la réponse disproportionnée des forces de sécurité congolaises et la facilité avec laquelle les adeptes de Mukungubila se sont infiltrés dans des lieux aussi sensibles, sont extrêmement inquiétants sur la solidité du régime de Joseph Kabila.
Circonstance aggravante : tous les regards se sont immédiatement sur un ancien proche de Joseph Kabila : l’ancien chef de la police, John Numbi, accusé d’avoir aider les assaillants.
John Numbi est également accusé de soutenir les Bakata Katanga, un groupe sécessionniste qui défi régulièrement les autorités congolaises à Lubumbashi et sème la terreur au nord de la province.
Comment refonder l’appareil sécuritaire ? Que faire de l’encombrant John Numbi ? Comment juguler les Bakata Katanga ?
Joseph Kabila devra trouvera rapidement les réponses à ces questions.
Décisions sécuritaires
Quelques jours seulement après les attaques du 30 décembre, un autre événement secoue le pays : l’assassinat du colonel Mamadou Ndala, tombeur du M23 et « héros national » depuis la défaite des rebelles en novembre dernier. C’est un vrai coup dur pour Kinshasa.
Sa disparition surprise sonne la fin de l’euphorie congolaise après la mise en déroute du M23 par l’armée régulière (FARDC) et l’ONU.
Mais l’assassinat de Mamadou Ndala constitue surtout le révélateur de l’état dans lequel se trouve l’armée congolaise : une armée à reconstruire. Les premiers soupçons se portent en effet rapidement sur des responsabilités internes au sein même des FARDC.
La « résurrection » de l’armée congolaise, tant vantée par Kinshasa, n’est donc pas encore une réalité. Joseph Kabila a donc du pain sur la planche pour réformer l’institution militaire.
Car même si le M23 est défait, une quarantaine d’autres groupes armés sévissent encore dans l’Est du pays… et l’armée congolaise est attendue au tournant. Là encore le temps des décisions a sonné.
Décisions politiques
Sur le plan de la politique intérieure, les atermoiements de Joseph Kabila, place le président congolais dans une situation des plus inconfortables.
Les promesses faites à l’issue des Concertations nationales tardent à se concrétiser et le gouvernement de « cohésion nationale » annoncé comme « imminent » fin octobre 2013, se fait toujours attendre.
Joseph Kabila peine à trouver la composition de ce qui pourrait devenir sa nouvelle majorité et sur laquelle s’appuyer pour les prochaines échéances électorales.
Doit-il chercher son nouveau Premier ministre à l’extérieur (comme il l’a toujours fait) où l’intérieur de son parti, le PPRD ?
Doit-il intégrer une frange de l’opposition dans son gouvernement ? Que faire des ex-rebelles du M23 que l’amnistie qui vient d’être voté pourrait réintégrer dans le jeu politique ?
Pourquoi ne pas garder l’actuel Premier ministre Matata Ponyo, qui rassure les bailleurs internationaux, mais qui agacent dans son propre camp ?
Autant de questions auxquelles Joseph Kabila devra vite trouver la réponse.
L’impossible troisième mandat
L’heure des choix est venue pour le président Kabila.
Dès 2015, de nouvelles échéances électorales sont en vues et en 2016, l’élection présidentielle semble focaliser toutes les attentions du président congolais.
La Constitution ne lui permettant pas de se représenter une troisième fois, l’entourage de Joseph Kabila travaille sur toutes les hypothèses : révision de la Constitution grâce à une nouvelle majorité élargie au parlement, report du calendrier électoral, création d’une nouvelle période de transition qui permettrait de « remettre les compteur à zéro » et au président de briguer un nouveau mandat, mise en planche d’un scénario « Poutine-Medvedev » qui placerait un homme-lige au pouvoir avant le retour de Joseph Kabila… tout est possible, même la candidature de la soeur du président, Jaynet Kabila.
Une chose est sûre, en 2014, Joseph Kabila devra trouver un début de réponse à toutes ces questions.
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Christophe RIGAUD
Afrikarabia
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