jeudi 24 avril 2014

Dictature, mode d'emploi

L’homme des arts, Jean-Louis Barrault nous apprend que « La dictature c’est 'ferme ta gueule', la démocratie, c’est 'cause toujours' ».

Existe-t-il une définition aussi parfaite de la dictature ? Tout y est. 'Ferme ta gueule' ou je te la casse... Où est donc la voix du peuple ?

L’homme des arts, Jean-Louis Barrault nous apprend que « La dictature c’est 'ferme ta gueule', la démocratie, c’est 'cause toujours' ». Existe-t-il une définition aussi parfaite de la dictature ? Tout y est. 'Ferme ta gueule' ou je te la casse.

La violence, l’insolence, l’intolérance,la méprise,l’orgueil et tout ce qui appartient à ce champ lexical, se disputent la place dans la vie du dictateur. Sans le dire, Jean-Louis Barrault a avoué qu’il est malsain de désigner celui qui répond à la définition de la dictature, par le terme qui convient : Dictateur. 

Chez nous, on dit « il faut appeler un chat, un chat ». Mais qui osera voir un chat et dire : « Regardez ! Je vois un beau un chat » ? Il n’aura pas respecté le ‘’ferme ta gueule’’. Il faut donc se taire car, c’est ainsi que s’exprime la dictature. Et ça fonctionne bien.

Dans le silence on peut tout faire. Le prince peut déporter dans des camps de concentration ceux sur qui il règne en maître sans que cela n’ébranle le monde. Il peut affamer des milliers de citoyens, les tenir loin de leurs ancêtres. 

Les vopos, membres de la Stasitropicale et autres gardiens du temple aux pratiques rustres peuvent torturer ceux qui tomberont dans leur chaude colère. 

Dans une dictature bien organisée, comme celle qu’on connait mais qu’on ne peut pas nommer, par peur, tout peut arriver au citoyen insoumis.

Le code de bonne conduite, le classique des termes admis se rédigent dans le secret. Le citoyen, un peu sot, qui pense être dans une démocratie et croit qu’il peut ‘’causer toujours’’, comme le dit Jean-Louis Barrault, se surprend à se voir imposer des termes qu’il a du mal à articuler. 

Le Prince lui dit : « Tu ne diras pas ceci, tu ne diras pas cela », « tu devras désormais voir le gris et dire que c’est le rose fouchard », « si tu n’adaptes pas ton lexique à celui que nous t’imposons, tu iras saluer le cimetière ». 

Le citoyen doit être réglé comme une montre et sonner comme une horloge programmée par son maître. On est au 21ème siècle, quelque part dans un point du globe dont on chante, à se rompre la gorge, les avancées démocratiques.

Dans cet admirable cauchemar, le peuple ne trouve aucun ami. Les Etats qui disent être nos amis sont indifférents. Les diplomates se cachent. Les hommes de Dieu se taisent. 

La société civile se contente d’être inexistante. La chefferie traditionnelle ne répond qu’aux convocations du représentant du Prince. En fait, le peuple torturé est seul à souffrir. Sa voix n’existe pas et si, par pure grâce, elle existe, elle est inaudible. Personne pour la porter aux yeux du monde. 

Les artistes chanteurs engagés sont censurés. Les écrivains dont les œuvres adressent des messages verts au Prince sont bâillonnés. Les journaux qui déplaisent au prince sont en permanence interdits de parution. Ceux qui résistent à la bourrasque sont canalisés. 

Les médias publics financés par les maigres avoirs du peuple sont pris en otage par le prince. Les informations sont tamisées. Les activités des politiques contraires sont poursuivies par les vopos ? Où est donc la voix du peuple ?

On ne cessera de s’interroger. Où est donc la voix du peuple si tant est que la souveraineté appartient au peuple ? 

Où sont les droits du peuple si tant est que c’est le peuple que nous servons et que toute notre pensée doit être orientée vers le bien être de ce peuple ? 

Où est donc la liberté du peuple quand, fortement martyrisé, il lui est interdit de présenter à son geôlier, ses blessures? 

Tout ce drame a été résumé par Jean-Louis Barrault : « La dictature c’est ‘’ferme ta gueule’’, la démocratie, c’est ‘’cause toujours’’ ». C’est ainsi que fonctionne notre dictature.
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Alain Bouikalo
Juriste
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Cameroonvoice

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