dimanche 1 juin 2014

Rwanda : les «révélations» du capitaine Barril font long feu

26 mai 2014

Annoncé comme explosif de mois en mois depuis février 2014, l’ouvrage du chef mercenaire devait paraître le 26 mai. Sa diffusion est de nouveau reportée, peut-être au 10 juin.

 


C’est à sa façon un petit monstre du Loch Ness : on en parle d’autant plus que personne ne le voit. Le livre « explosif » promis par les Editions Jean Picollec, « Le capitaine Barril brise le silence, la tragédie du Rwanda, ses origines, ses coupables » est affiché depuis des semaines sur les grands sites de vente en ligne, Amazon, la FNAC… 

Après plusieurs reports, il était annoncé en librairie pour le lundi 26 mai 2014. Mais le texte semble poser problème aux avocats dont s’entoure Paul Barril. La pénultième version du manuscrit a-t-elle été jugée inadéquate ? 

L’ancien chef du GIGN devenu chef mercenaire a publié dans le passé quatre livres où il ne s’embarrassait pas de nuances. Dans « Guerres secrètes à l’Elysée », il accusait par exemple François Mitterrand d’avoir fait assassiner son conseiller spécial François de Grossouvre, tout en établissant un lien entre cet assassinat et l’attentat contre l’avion du président rwandais Juvénal Habyarimana, le 6 avril 1994 – attentat qui servit de signal au génocide des Tutsi. 

Mais depuis qu’une information judiciaire a été ouverte contre lui par le Parquet de Paris pour complicité de génocide au Rwanda, Paul Barril semble voué aux formulations alambiquées.

Ces dernières semaines, le chef mercenaire n’en a pas moins fait la promotion de son livre fantôme : « Si Paul Kagame s’en prend à la France pour les commémorations du 20e anniversaire du génocide rwandais, c’est qu’il est au courant de la sortie de mon livre. C’est un président très affaibli, lâché par les Tutsi. Il sait que plusieurs de ses anciens proches collaborateurs, aujourd’hui en exil, me rencontrent. »


A quoi joue exactement Paul Barril, lui-même désormais visé par deux instructions liées au génocide des Tutsi du Rwanda en 1994 ? 


Depuis vingt ans, il répète, avec chaque fois plus de conviction dans la voix et de moins en moins de vraisemblance, que Paul Kagame est l’instigateur de l’attentat qui a coûté la vie, le 6 avril 1994, au président rwandais Juvénal Habyarimana, qui avait fini par s’opposer au scénario du génocide-éclair. Le refrain négationniste bien connu.

Du contenu du livre on ne connaît que l’étonnant résumé de l’éditeur. Il commence par cette phrase : « Il y a 20 ans, le Rwanda fut ravagé par un massacre exterminant plus d’un million de ses habitants ». Paul Barril, d’un coup de baguette magique, veut priver ce « massacre » de coupables, une posture caractéristique des négationnistes. 


Le résumé poursuit : « Grâce à une propagande habile, au conformisme des médias occidentaux et au poids des lobbies anglo-saxons, le vainqueur, Paul Kagamé, fit gober à l’opinion internationale que ce fût un génocide anti-tutsis commis par ces « affreux » hutus ». 

On comprend mieux pourquoi le chef mercenaire peine à signer le « bon à tirer » de ses roublardises. Il annone sa thèse d’une voix chevrotante sur les plateaux de télévision qui acceptent de le recevoir.

« Pourquoi ceux qui veulent révéler la vérité sont traités de révisionnistes voire de négationnistes ? », résume encore l’éditeur. Pourquoi ? Pas la peine d’insister : on a déjà compris que la démonstration sera grossière, comme le fut l’instruction du juge Jean-Louis Bruguière, trafiquée par Paul Barril et son acolyte Fabien Singaye.


Les Editions Jean Picollec affirment encore que « un tel livre est sain car il essaye de ne pas radoter mais combattre bobards, mensonges et manipulations ». La formule est singulièrement éclairante pour qui a suivi l’interview de Paul Barril par le journaliste Marc Perelman, enregistrée le 26 mars 2014 par France 24


« Ces jours-ci sort un livre titré Le capitaine Barril brise le silence , la tragédie du Rwanda, ses origines, ses coupables », annonçait Marc Perelman. 

Deux mois après « ces jours –ci », la bombe promise a pris l’aspect d’un pétard mouillé.
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Jean-François DUPAQUIER 

AFRIKARABIA

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