dimanche 31 août 2014

PALU : Un véritable pavé dans la mare

29/08/2014

 
Antoine Gizenga Fundji

Si de Kingakati est sortie l’idée de la rédaction d’une nouvelle constitution consacrant la quatrième République, au Palu, l’éventuelle Constitution à venir devra consacrer plutôt la première République. 

Conformément à sa position traditionnelle, « le Palu ne rougirait pas en cas de putsch contre la Constitution du 18 février 2006, elle-même une œuvre de putschistes des composantes 1+4 ». 

A la lumière de sa déclaration, le parti de Gizenga considère que seul un parlement élu, avec comme vocation se muer en constituante, peut rétablir la légalité tracée par la Loi fondamentale de 1960. Un véritable pavé dans la mare.

Le Palu est parti pour la relance d’un vrai débat républicain, pourvu qu’il soit bien appréhendé par l’ensemble de la classe politique, particulièrement au sein de la Majorité au pouvoir. 

Le programme des manifestations prévues à l’occasion de la célébration du cinquantenaire a levé un pan de voile sur la vision globale qu’Antoine Gizenga et ses troupes se font du devenir de la République démocratique du Congo.

La vision du Palu planifie la création de la République telle que voulue par l’acte créateur, bien que lui-même étant par essence « un putsch imposé par l’étranger », selon un cadre du parti-cinquantenaire contacté par la Rédaction. Allusion est faite à la Loi fondamentale votée par le parlement belge, avec comme seul mérite la création de l’Etat congolais le 30 juin 1960.

Ce fut un premier dérapage à la base de la dérive constitutionnelle caractéristique de la RDC jusqu’à ce jour. Les élus ont été chassés par le président Kasa-Vubu. 

Bien que réhabilités, ils n’ont pu rédiger la Constitution créant la République. Conséquence, « le pays s’était doté d’un chef de l’Etat, sans jamais se doter d’un président de la République jusqu’à ce jour », note-t-on au Palu.

On est là devant un cas avéré de congé pour l’éternité décidé par la suite par le président Joseph Kasa-Vubu, qui a préféré mettre en place une simple Commission constitutionnelle devant produire ce que l’on avait baptisé à époque la « Constitution de Luluabourg » ; adoptée par voie de référendum populaire en 1964. Un deuxième putsch !

Pour consommer jusqu’à la lie cette violation continue de la Constitution, le président Kasa-Vubu, à en croire le même cadre du Palu, « a tenté d’investir le gouvernement Evariste Kimba, issu de la minorité au Parlement, sans succès ». 

C’est dans ce contexte que le général Mobutu fait son apparition sur la scène politique pour faire du balai par un coup de force militaire. Bref, la Constitution de Mobutu fut tout simplement « une imposture ». Troisième putsch !

Qu’est-ce à dire ? Jusque-là, la légalité républicaine est restée un vain mot. Le fil conducteur étant complètement coupé, l’Etat légué par la Belgique en 1960 ne s’est donc jamais déterminé. 

A l’avènement de Laurent-Désiré Kabila, le 17 mai 1997, révèle notre source, « Nous lui avions proposé de revenir symboliquement à la légalité dont il s’était toujours réclamé. Pour des raisons diverses, cela ne s’était pas fait. Et pourtant, il fallait revenir à la légitimité de 1960 suspendue dans les limbes. M’Zée avait pris les armes justement pour le rétablissement de la légalité sabordée en septembre 1960 ».

Apparemment, note le cadre du Palu, le retour aux sources de même que la réconciliation avec les « pères fondateurs » n’ont jamais préoccupé personne. Suivant cette même clef de lecture, le Palu estime que la Constitution du 18 février 2006 est frappée du même anathème. 

« Tant que le péché originel ne serait pas balayé de la mémoire collective ; tant que la légalité originelle, c’est-à-dire la mise en place d’une Constitution par le fait d’un Constituant élu, l’histoire du pays restera violentée », martèle ce militant du Parti lumumbiste unifié.

Création de la 1ère République

Tout changement de Constitution ou de République ne peut s’obtenir qu’en respectant les dispositions en vigueur, sous peine de tomber dans les travers des violations. 

Le Palu n’entend pas laisser faire tout changement de Constitution en dehors de ce schéma. Le débat politique ainsi lancé ouvre la voie à une réflexion en profondeur.

« Le raisonnement est simple. Si vous changez les statuts d’une ONG, sans recourir aux mécanismes prévus par les précédents statuts, il y a création d’une nouvelle société », illustre ce cadre du Palu. 

Il démontre aussi que la Constitution du 18 février 2006 est le quatrième putsch enregistré par la République. Because, elle a été rédigée par la volonté des belligérants, autrement dit, des putschistes. 

Comme quoi, cette Constitution n’a pas suivi la voie de la légalité, parce qu’elle a été assumée par des constituants sans légitimité. Ce sont des personnes non élues qui ont décidé de son contenu, mettant le peuple devant un fait accompli.

A la question de savoir si le Parlement actuel est habilité à effectuer ce changement, la réponse est sans ambages : « Ce Parlement n’a pas vocation de se constituer en Constituante, même s’il s’agit des élus. Les parlementaires actuellement en fonction ne peuvent proposer qu’une révision de la Constitution, au risque d’opérer, eux aussi, un putsch ». 

La création de la République n’a qu’une seule clef, une Constituante venant du peuple. Faudrait-il aller de putsch en putsch, le cadre du Palu ne le soutient pas. 

Toutefois, il renchérit : « Le Palu n’aura pas d’état d’âme face au putsch contre une Constitution des putschistes ».

Bref, la Loi fondamentale est le produit d’un putsch colonial. Elle n’a pas permis la création de la République. La première légalité n’était donc pas républicaine. La Constitution de Luluabourg, fruit d’une Commission n’a rien résolu. 

L’imposture de Mobutu, une grosse parenthèse de l’histoire de la RDC, n’a pu permettre au pays de se muer en République, encore moins la Constitution du 18 février 2006, synthèse de volonté des belligérants.

Il s’ensuit que tout changement de la Constitution qui ne passerait pas par le harnais de la légalité tracée par le texte fondateur de l’Etat congolais est un putsch contre la légalité. La conséquence la plus directe est que tous les chefs de l’Etat que le pays a connus ne sont pas des présidents de la République d’autant plus que cette dernière n’a jamais été créée. 

Il est donc temps d’éviter à la nouvelle Constitution de se souiller par le péché originel. Raison pour laquelle, il faudrait désormais recourir rien qu’à des élus ayant vocation de se muer en constituante pour proposer un texte constitutionnel rédigé par leur soin.
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[lePotentiel]

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