dimanche 22 février 2015

A Kinshasa, Alexander De Croo lance une charge contre le régime Kabila

dimanche 22 février 2015
 
Le ministre en charge de la Coopération au développement, en déplacement au Congo, a critiqué vertement des mesures liberticides du régime local.

 
Alexander De Croo et Didier Reynders à leur arrivée à Kinshasa samedi. ©Belga.

Le vice-Premier ministre Alexander De Croo (Open-VLD) a frappé fort à son arrivée à Kinshasa, samedi soir, pour sa première visite en RDC en tant que membre du gouvernement notamment chargé de la Coopération au développement. 

S’adressant aux journalistes qui l’accompagneront au cours de cette visite de cinq jours - visite en tandem avec le vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders (MR) -, Alexander De Croo a lancé : « Nous ne pouvons pas accepter le statu quo des dernières semaines en RDC. Nous ne pouvons pas accepter les arrestations aléatoires, le blocage d’internet et des communications numériques, l’instrumentalisation de la justice, etc. »

« Il faut en parler entre partenaires adultes, a poursuivi le vice-Premier libéral flamand. Nous devons faire quelque chose avec l’amitié belgo-congolaise qui puisse améliorer la situation de la population congolaise. Il est temps de changer les choses. Et les Congolais doivent être les acteurs de ce changement. » 

Cette charge contre le régime de Joseph Kabila a été lancée dans les jardins de l’ambassade de Belgique, où l’ambassadeur Michel Lastschenko recevait à dîner la délégation officielle et les journalistes, fraîchement débarqués de l’avion de Brussels Airlines. 

Détail important : Didier Reynders n’était pas présent à ce dîner, pris par d’autres engagements – sans doute aussi importants que discrets – ailleurs dans la capitale congolaise. 

Pour sûr, s’il avait été là, il aurait pris la parole à son tour et tempéré les ardeurs de son homologue et coreligionnaire flamand…

Imprévu

Car la charge d’Alexander De Croo n’était pas prévue. Elle a pris de court les diplomates présents : « Les Flamands sont comme ça, ils sont plus agressifs sur la RDC, c’est traditionnel, historique », nous disait l ’un d’eux. 

Un autre expliquait : « Nous sommes venus ici maintenant pour assurer l’essentiel, c’est-à-dire que les élections présidentielles aient bien lieu fin 2016, comme prévu, et que la transition démocratique se fasse dans les meilleures conditions possibles. »

La Belgique est globalement satisfaite des développements récents en RD Congo au plan institutionnel : la loi électorale n’a pas été amendée dans un sens qui aurait permis à Jospeh Kabila de prolonger son second mandat, et un calendrier électoral très précis a été publié pour cette année et 2016. 

Ces développements ont été imposés par la rue, mais à un prix : les manifestations de janvier ont fait 27 morts dans le pays, dont 23 à Kinshasa.

En tout cas, nul ne crie victoire : la concrétisation du calendrier électoral semble impossible dans les délais, et son financement extrêmement problématique. 

Il s’agit d’organiser pas moins de sept scrutins d’ici la date du 27 novembre 2016, prévue pour la présidentielle et les législatives.

Kabila à cran

Il est évident que la charge d’Alexander De Croo ne rendra pas plus aisé le dialogue avec les autorités congolaises sur ces questions.

Le président congolais est, du reste, déjà à cran avec ce qu’il considère comme des ingérences étrangères dans les affaires intérieures de son pays. 

Voici une semaine, il a convoqué une quinzaine d’ambassadeurs – dont l’ambassadeur Michel Lastschenko – pour dénoncer l’attitude de la Monusco, la mission de l’ONU en RDC, qui a refusé de collaborer plus longtemps dans l’est de la RDC avec l’armée congolaise, en raison du passé sulfureux de deux de ses généraux (récemment nommés, justement pour lancer l’offensive contre les rebelles hutus). La RDC « n’est pas sous la supervision de l’ONU », a alors déclaré Jospeh Kabila.

Les reproches du président congolais ne se limitent bien sûr pas qu’au rôle de la Monusco. Joseph Kabila est irrité par l’attitude générale des Occidentaux, qu’il perçoit comme le poussant sans ménagement vers la sortie. 

Voici une semaine, il a d’ailleurs critiqué l’appui étranger aux ONG et à la société civile congolaises : « Arrêtez d’aider des aventuriers avec l’argent de votre coopération au développement, a-t-il dit aux ambassadeurs, et construisez plutôt des hôpitaux et des routes ! »
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Maroun Labaki
Le Soir

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