Mayoyo Bitumba Tipo-Tipo
Le 30 septembre 2010, Louis Michel, parlementaire européen et ministre d’Etat belge, lançait à Bruxelles le cercle dénommé ‘‘Les amis du Rwanda’’ au Parlement européen, avec l’ambition de faire de ce cercle ‘‘le premier interlocuteur du Rwanda" devant ‘‘supporter, valoriser et promouvoir les intérêts du Rwanda à travers les différentes institutions de l’Union Européenne’’ tout en se chargeant ‘‘d’informer sur les progrès engrangés par le Rwanda dans les différents domaines : le développent économique, les avancées sociales et la démocratie’’. L’initiative intervenait au moment où le mot génocide était utilisé dans un rapport de l’ONU pour qualifier les massacres commis par l’Armée Patriotique Rwandaise (APR) lors de l’offensive des ‘‘rebelles’’ de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre (AFDL) entre 1996 et 1997.
Pour comprendre le projet de Louis Michel, qui, à la veille des élections congolaises de 2006, saluait en ‘‘Joseph Kabila’’ l’espoir pour le Congo, aujourd’hui devenu le cauchemar des Congolais, il convient de se rappeler comment se positionne ce démocrate belge face aux violations des droits de l’homme et à l’impunité à travers le monde. Qu’on se souvienne de la décision prise le 25 novembre 1998 par les magistrats de la Chambre des Lords en Angleterre contre l’ex-dictateur chilien Augusto Pinochet. Partout en Occident, elle fut saluée comme une avancée pour la justice internationale, la carapace diplomatique protégeant les criminels politiques de haut niveau étant considérée comme une insulte pour la dignité humaine. Evoquant l’attitude de la Belgique dans ce cas, Louis Michel, alors ministre belge des Affaires étrangères, affirmait qu’elle présentait «l’énorme avantage de forcer un débat au Chili sur la nature et le contexte de la démocratisation de ce pays. Car, la réconciliation nationale ne peut pas consacrer l’impunité de ceux qui furent les tortionnaires. Politiquement et moralement, les démocrates chiliens sont obligés de se poser la question de la légitimité de la politique de l’oubli» (Le Matin, 15 mars 2000).
En créant le cercle ‘‘Les amis du Rwanda’’ au Parlement européen, Louis Michel se lance politiquement et moralement dans la promotion du pouvoir rwandais actuel. Dessinons le portrait de ce régime, comparons ses exploits dans les domaines du respect des droits de l’homme et de la justice à ceux du régime Pinochet, et voyons si ‘‘Les amis du Rwanda’’ est un cercle qui vaut la peine de naître et d’être respecté et soutenu au sein d’une institution aussi prestigieuse et donneuse de leçons de démocratie, de justice et de respect des droits de l’homme au reste de l’humanité. Comme Pinochet, l’actuel maître du Rwanda, Paul Kagamé, a accédé au pouvoir par un coup d’éclat. De la même manière qu’ils avaient applaudi le coup d’Etat de Pinochet, les puissances occidentales font la part trop belle au cliché de ‘‘Kagamé investi du rôle de libérateur’’. Mais la vérité n’y trouve pas son compte et oblige à regarder le régime rwandais tel qu’il est.
Le régime Kagamé est l’émanation du Front Patriotique Rwandais (FPR), mouvement rebelle parti d’Ouganda et accusé par plusieurs organisations de défense des droits de l’homme d’avoir commis de nombreux massacres à caractère génocidaire tout au long de la rébellion. Arrivé dans la capitale Kigali à la faveur des accords de paix d’Arusha, le FPR fut accusé d’avoir abattu l’avion présidentiel le 6 avril 1994. Un attentat sans précédent en Afrique dans lequel périrent le président Juvénal Habyarimana et son homologue burundais, Cyprien Ntariamira. Mouvement de la minorité tutsi (14% de la population contre 85% d’Hutu), le FPR n’avait aucun intérêt à aller aux élections, objectif final de la période de transition qui se profilait à l’horizon. En attentant à la vie du président hutu, il avait déclenché le génocide de 500.000 Tutsi et Hutu modérés auquel il s’est toujours félicité d’avoir mis fin.
Par la suite, le FPR, métamorphosé en Armée Patriotique Rwandaise (APR), fut accusé de plusieurs grands massacres à titre de vengeance : les massacres de plus de 6.000 personnes à Kibeho, dans le sud du Rwanda en 1994, attestés par un rapport des Nations Unies ; les massacres de 50.000 Hutu, dans le sud-est du Rwanda toujours en 1994, dénoncés dans le rapport du consultant américain Robert Gersony ; et les massacres de 200.000 réfugiés hutu, entre 1996 et 1997 au Congo, rapportés par le juge chilien Roberto Garreton. Toujours au Congo, la dictature de Kagamé a commis bien d’autres violations flagrantes du droit international et des droits de l’homme : agression caractérisée contre ce pays, pillage systématique de ses ressources naturelles et surtout holocauste oublié de plus ou moins 6.000.000 de Congolais, la plus grande tragédie humaine depuis la Deuxième Guerre mondiale. En plus du long chapelet de crimes égrenés ci-dessus, Kagamé impose aux Rwandais, Hutu et Tutsi confondus, un régime de terreur où la délation est institutionnalisée en système judiciaire. Il mène une politique criminelle systématique de se débarrasser de ses opposants qui sont loin des ses griffes. Alors qu’il affirme construire une nation dans laquelle il n’y aurait ni Hutu ni Tutsi, des membres de son ethnie minoritaire monopolisent les postes du sommet de l’Etat à la base de la pyramide sociale. Quant au droit des Rwandais d’élire librement leurs dirigeants, il est verrouillé par un système électoral dont le secret de l’isoloir n’est qu’apparent, car en y laissant ses empreintes digitales, une exclusivité mondiale, tout Rwandais sait que voter contre Kagamé serait signer son arrêt de mort.
Le régime militaire d’Augusto Pinochet, qui renversa par un coup d’État le gouvernement du président démocratiquement élu Salvador Allende avec la ‘‘bénédiction’’ des Etats-Unis, gouverna le Chili pendant 17 ans (1973-1990). Ce régime est connu à travers le monde entier pour ses multiples atteintes aux droits de l’homme : environ 3.000 morts et ‘‘disparus’’, 27.000 personnes torturées et plusieurs centaines de milliers d’exilés. On comprend dès lors que Louis Michel hausse le ton contre la politique de l’oubli. N’est-il pas un digne représentant de ce pays qui en 1990 avait suspendu la coopération avec le Zaïre de Mobutu où les troupes d’élite de la Division spéciale présidentielle avaient massacré un étudiant à l’Université de Lubumbashi ? N’est-il pas issu de ce grand pays dont les parlementaires avaient eu le courage de voter une loi dite de compétence universelle pour châtier les responsables des crimes contre l’humanité à travers le monde ? Quant au régime militaire de Paul Kagamé, qui renversa par un acte terroriste le gouvernement du dictateur modéré Juvénal Habyarimana également avec la ‘‘bénédiction’’ des Etats-Unis, il gouverne le Rwanda depuis 16 ans (1994-2010) et, avec des scores électoraux staliniens, il a toutes les chances de battre le record de longévité mondiale. Face à Paul Kagamé, le plus grand criminel de l’histoire encore en vie (dixit le professeur belge Filip Reyntjens), force est de constater qu’Augusto Pinochet fut un enfant de chœur. Louis Michel souffrirait-il tout d’un coup d’amnésie en soutenant ouvertement un régime mille et une fois plus criminel que celui de Pinochet ?
Non, Louis Michel est un homme qui respire la bonne santé si bien répandue dans le monde occidental. A travers son soutien au régime criminel de Paul Kagamé, il démontre simplement combien l’Occident est un accident dans l’histoire de l’humanité, tellement qu’il a l’habitude de se disqualifier comme donneur de leçons à travers son éternelle indignation sélective. A la lumière du portrait du Rwanda actuel, il serait plus judicieux pour Louis Michel de baptiser son cercle ‘‘Les amis des Nazis Tutsi’’ au Parlement européen. En effet, en servant de relais au discours des autorités de Kigali sur tous les massacres et autres violations du droit international et des droits de l’homme dont elles sont accusées, le cercle ‘‘Les amis du Rwanda’’ fait preuve d’un parti pris pro-Kagamé flagrant, qui est incompatible avec la mission et la déontologie de toute association sérieuse de promotion des droits de la personne et du développement. Quand on lit les objectifs de ce cercle, on comprend que ses membres européens s’égarent volontairement dans une vision manichéenne des causes et des effets du conflit rwandais, qu’ils exonèrent la rébellion tutsi du FPR de sa grande part de responsabilité dans l’engrenage implacable qui transforma le Rwanda et l’est du Congo en annexe de l’enfer, qu’ils minimisent ou excusent les crimes commis par l’APR dans toute la région des Grands Lacs, et qu’ils offrent, comble d’immoralité, une prime aux tueurs, agresseurs et pilleurs tutsi gravitant autour de Kagamé.
Le cercle ‘‘Les amis du Rwanda’’ au Parlement européen est un véritable scandale qu’un démocrate occidental ne peut se permettre que s’agissant de l’Afrique, continent faible qu’on peut piétiner en toute impunité. On peut même se demander si le véritable objectif de ce cercle n’est pas de créer un écran de fumée appelé développement derrière lequel on cacherait les crimes des Nazis tutsi au pouvoir à Kigali. Mais pendant combien de temps ? ‘‘Les amis du Rwanda’’, qui sont en réalité les ennemis de l’écrasante majorité des peuples de la région des Grands Lacs (y compris les masses laborieuses tutsi), souffrent d’une terrible myopie politique. Pendant des décennies, les pouvoirs coloniaux avaient caché leurs crimes derrière la mission civilisatrice et la modernité. L’un de ces pouvoirs, la Belgique, se vantait même d’avoir mis au point une colonisation modèle dont les habitants étaient heureux pour l’éternité. Pourtant, la jouissance des avancées technologiques et scientifiques de la civilisation européenne par les Africains et bien d’autres peuples colonisés n’avait pas réussi à éclipser à leurs yeux les valeurs de décence et d’honneur, de liberté et de justice, de respect et de dignité. Les démocraties occidentales étant instrumentalisées depuis des décennies par les lobbies de tout genre, ‘‘Les amis du Rwanda’’ réussiront sans aucun doute dans leur mission consistant à soigner l’image d’un régime criminel auprès du Parlement européen et de l’opinion publique internationale. Mais ils auront beau multiplier les jumelages, mettre en œuvre d’événements culturels rwandais à Bruxelles et en Europe, instaurer une journée Rwanda au Parlement européen et organiser des workshops thématiques sur le Rwanda et des visites au Rwanda, ce n’est pas cela qui ramènera une paix durable dans ce pays et dans toute la région des Grands Lacs.
En protégeant et en offrant des primes aux Nazis tutsi au pouvoir à Kigali, ‘‘Les amis du Rwanda’’, de même que bon nombre de puissances occidentales dont les Etats-Unis, la Grande Bretagne, la France de Sarkozy et la Belgique, allument le feu dans les cœurs des Hutu et des Congolais. Ce feu qui couve aujourd’hui embrasera de nouveau la région tôt ou tard. Et devant l’ouragan de l’Histoire, les Nazis tutsi tomberont même s’ils auront réussi à transformer le Rwanda en un pays de cocagne, avec l’aide occidentale. ‘‘Les amis du Rwanda’’ devraient donc forcer un débat au sein de leurs pays respectifs sur la nature du développement de ce petit pays. Car, rien ne peut consacrer l’impunité de ceux qui furent les agresseurs, pilleurs et tueurs et qui continuent de l’être, même si leur ethnie fut victime d’un génocide fortement médiatisé en Occident pour des raisons racistes et stratégiques que l’on connait. Comme l’avait si bien dit le grand démocrate et ministre belge des Affaires étrangères Louis Michel au sujet du cas Pinochet, ‘‘politiquement et moralement, [Les amis du Rwanda] sont obligés de se poser la question de la légitimité de la politique de l’oubli’’.
Pour comprendre le projet de Louis Michel, qui, à la veille des élections congolaises de 2006, saluait en ‘‘Joseph Kabila’’ l’espoir pour le Congo, aujourd’hui devenu le cauchemar des Congolais, il convient de se rappeler comment se positionne ce démocrate belge face aux violations des droits de l’homme et à l’impunité à travers le monde. Qu’on se souvienne de la décision prise le 25 novembre 1998 par les magistrats de la Chambre des Lords en Angleterre contre l’ex-dictateur chilien Augusto Pinochet. Partout en Occident, elle fut saluée comme une avancée pour la justice internationale, la carapace diplomatique protégeant les criminels politiques de haut niveau étant considérée comme une insulte pour la dignité humaine. Evoquant l’attitude de la Belgique dans ce cas, Louis Michel, alors ministre belge des Affaires étrangères, affirmait qu’elle présentait «l’énorme avantage de forcer un débat au Chili sur la nature et le contexte de la démocratisation de ce pays. Car, la réconciliation nationale ne peut pas consacrer l’impunité de ceux qui furent les tortionnaires. Politiquement et moralement, les démocrates chiliens sont obligés de se poser la question de la légitimité de la politique de l’oubli» (Le Matin, 15 mars 2000).
En créant le cercle ‘‘Les amis du Rwanda’’ au Parlement européen, Louis Michel se lance politiquement et moralement dans la promotion du pouvoir rwandais actuel. Dessinons le portrait de ce régime, comparons ses exploits dans les domaines du respect des droits de l’homme et de la justice à ceux du régime Pinochet, et voyons si ‘‘Les amis du Rwanda’’ est un cercle qui vaut la peine de naître et d’être respecté et soutenu au sein d’une institution aussi prestigieuse et donneuse de leçons de démocratie, de justice et de respect des droits de l’homme au reste de l’humanité. Comme Pinochet, l’actuel maître du Rwanda, Paul Kagamé, a accédé au pouvoir par un coup d’éclat. De la même manière qu’ils avaient applaudi le coup d’Etat de Pinochet, les puissances occidentales font la part trop belle au cliché de ‘‘Kagamé investi du rôle de libérateur’’. Mais la vérité n’y trouve pas son compte et oblige à regarder le régime rwandais tel qu’il est.
Le régime Kagamé est l’émanation du Front Patriotique Rwandais (FPR), mouvement rebelle parti d’Ouganda et accusé par plusieurs organisations de défense des droits de l’homme d’avoir commis de nombreux massacres à caractère génocidaire tout au long de la rébellion. Arrivé dans la capitale Kigali à la faveur des accords de paix d’Arusha, le FPR fut accusé d’avoir abattu l’avion présidentiel le 6 avril 1994. Un attentat sans précédent en Afrique dans lequel périrent le président Juvénal Habyarimana et son homologue burundais, Cyprien Ntariamira. Mouvement de la minorité tutsi (14% de la population contre 85% d’Hutu), le FPR n’avait aucun intérêt à aller aux élections, objectif final de la période de transition qui se profilait à l’horizon. En attentant à la vie du président hutu, il avait déclenché le génocide de 500.000 Tutsi et Hutu modérés auquel il s’est toujours félicité d’avoir mis fin.
Par la suite, le FPR, métamorphosé en Armée Patriotique Rwandaise (APR), fut accusé de plusieurs grands massacres à titre de vengeance : les massacres de plus de 6.000 personnes à Kibeho, dans le sud du Rwanda en 1994, attestés par un rapport des Nations Unies ; les massacres de 50.000 Hutu, dans le sud-est du Rwanda toujours en 1994, dénoncés dans le rapport du consultant américain Robert Gersony ; et les massacres de 200.000 réfugiés hutu, entre 1996 et 1997 au Congo, rapportés par le juge chilien Roberto Garreton. Toujours au Congo, la dictature de Kagamé a commis bien d’autres violations flagrantes du droit international et des droits de l’homme : agression caractérisée contre ce pays, pillage systématique de ses ressources naturelles et surtout holocauste oublié de plus ou moins 6.000.000 de Congolais, la plus grande tragédie humaine depuis la Deuxième Guerre mondiale. En plus du long chapelet de crimes égrenés ci-dessus, Kagamé impose aux Rwandais, Hutu et Tutsi confondus, un régime de terreur où la délation est institutionnalisée en système judiciaire. Il mène une politique criminelle systématique de se débarrasser de ses opposants qui sont loin des ses griffes. Alors qu’il affirme construire une nation dans laquelle il n’y aurait ni Hutu ni Tutsi, des membres de son ethnie minoritaire monopolisent les postes du sommet de l’Etat à la base de la pyramide sociale. Quant au droit des Rwandais d’élire librement leurs dirigeants, il est verrouillé par un système électoral dont le secret de l’isoloir n’est qu’apparent, car en y laissant ses empreintes digitales, une exclusivité mondiale, tout Rwandais sait que voter contre Kagamé serait signer son arrêt de mort.
Le régime militaire d’Augusto Pinochet, qui renversa par un coup d’État le gouvernement du président démocratiquement élu Salvador Allende avec la ‘‘bénédiction’’ des Etats-Unis, gouverna le Chili pendant 17 ans (1973-1990). Ce régime est connu à travers le monde entier pour ses multiples atteintes aux droits de l’homme : environ 3.000 morts et ‘‘disparus’’, 27.000 personnes torturées et plusieurs centaines de milliers d’exilés. On comprend dès lors que Louis Michel hausse le ton contre la politique de l’oubli. N’est-il pas un digne représentant de ce pays qui en 1990 avait suspendu la coopération avec le Zaïre de Mobutu où les troupes d’élite de la Division spéciale présidentielle avaient massacré un étudiant à l’Université de Lubumbashi ? N’est-il pas issu de ce grand pays dont les parlementaires avaient eu le courage de voter une loi dite de compétence universelle pour châtier les responsables des crimes contre l’humanité à travers le monde ? Quant au régime militaire de Paul Kagamé, qui renversa par un acte terroriste le gouvernement du dictateur modéré Juvénal Habyarimana également avec la ‘‘bénédiction’’ des Etats-Unis, il gouverne le Rwanda depuis 16 ans (1994-2010) et, avec des scores électoraux staliniens, il a toutes les chances de battre le record de longévité mondiale. Face à Paul Kagamé, le plus grand criminel de l’histoire encore en vie (dixit le professeur belge Filip Reyntjens), force est de constater qu’Augusto Pinochet fut un enfant de chœur. Louis Michel souffrirait-il tout d’un coup d’amnésie en soutenant ouvertement un régime mille et une fois plus criminel que celui de Pinochet ?
Non, Louis Michel est un homme qui respire la bonne santé si bien répandue dans le monde occidental. A travers son soutien au régime criminel de Paul Kagamé, il démontre simplement combien l’Occident est un accident dans l’histoire de l’humanité, tellement qu’il a l’habitude de se disqualifier comme donneur de leçons à travers son éternelle indignation sélective. A la lumière du portrait du Rwanda actuel, il serait plus judicieux pour Louis Michel de baptiser son cercle ‘‘Les amis des Nazis Tutsi’’ au Parlement européen. En effet, en servant de relais au discours des autorités de Kigali sur tous les massacres et autres violations du droit international et des droits de l’homme dont elles sont accusées, le cercle ‘‘Les amis du Rwanda’’ fait preuve d’un parti pris pro-Kagamé flagrant, qui est incompatible avec la mission et la déontologie de toute association sérieuse de promotion des droits de la personne et du développement. Quand on lit les objectifs de ce cercle, on comprend que ses membres européens s’égarent volontairement dans une vision manichéenne des causes et des effets du conflit rwandais, qu’ils exonèrent la rébellion tutsi du FPR de sa grande part de responsabilité dans l’engrenage implacable qui transforma le Rwanda et l’est du Congo en annexe de l’enfer, qu’ils minimisent ou excusent les crimes commis par l’APR dans toute la région des Grands Lacs, et qu’ils offrent, comble d’immoralité, une prime aux tueurs, agresseurs et pilleurs tutsi gravitant autour de Kagamé.
Le cercle ‘‘Les amis du Rwanda’’ au Parlement européen est un véritable scandale qu’un démocrate occidental ne peut se permettre que s’agissant de l’Afrique, continent faible qu’on peut piétiner en toute impunité. On peut même se demander si le véritable objectif de ce cercle n’est pas de créer un écran de fumée appelé développement derrière lequel on cacherait les crimes des Nazis tutsi au pouvoir à Kigali. Mais pendant combien de temps ? ‘‘Les amis du Rwanda’’, qui sont en réalité les ennemis de l’écrasante majorité des peuples de la région des Grands Lacs (y compris les masses laborieuses tutsi), souffrent d’une terrible myopie politique. Pendant des décennies, les pouvoirs coloniaux avaient caché leurs crimes derrière la mission civilisatrice et la modernité. L’un de ces pouvoirs, la Belgique, se vantait même d’avoir mis au point une colonisation modèle dont les habitants étaient heureux pour l’éternité. Pourtant, la jouissance des avancées technologiques et scientifiques de la civilisation européenne par les Africains et bien d’autres peuples colonisés n’avait pas réussi à éclipser à leurs yeux les valeurs de décence et d’honneur, de liberté et de justice, de respect et de dignité. Les démocraties occidentales étant instrumentalisées depuis des décennies par les lobbies de tout genre, ‘‘Les amis du Rwanda’’ réussiront sans aucun doute dans leur mission consistant à soigner l’image d’un régime criminel auprès du Parlement européen et de l’opinion publique internationale. Mais ils auront beau multiplier les jumelages, mettre en œuvre d’événements culturels rwandais à Bruxelles et en Europe, instaurer une journée Rwanda au Parlement européen et organiser des workshops thématiques sur le Rwanda et des visites au Rwanda, ce n’est pas cela qui ramènera une paix durable dans ce pays et dans toute la région des Grands Lacs.
En protégeant et en offrant des primes aux Nazis tutsi au pouvoir à Kigali, ‘‘Les amis du Rwanda’’, de même que bon nombre de puissances occidentales dont les Etats-Unis, la Grande Bretagne, la France de Sarkozy et la Belgique, allument le feu dans les cœurs des Hutu et des Congolais. Ce feu qui couve aujourd’hui embrasera de nouveau la région tôt ou tard. Et devant l’ouragan de l’Histoire, les Nazis tutsi tomberont même s’ils auront réussi à transformer le Rwanda en un pays de cocagne, avec l’aide occidentale. ‘‘Les amis du Rwanda’’ devraient donc forcer un débat au sein de leurs pays respectifs sur la nature du développement de ce petit pays. Car, rien ne peut consacrer l’impunité de ceux qui furent les agresseurs, pilleurs et tueurs et qui continuent de l’être, même si leur ethnie fut victime d’un génocide fortement médiatisé en Occident pour des raisons racistes et stratégiques que l’on connait. Comme l’avait si bien dit le grand démocrate et ministre belge des Affaires étrangères Louis Michel au sujet du cas Pinochet, ‘‘politiquement et moralement, [Les amis du Rwanda] sont obligés de se poser la question de la légitimité de la politique de l’oubli’’.
Mayoyo Bitumba Tipo-Tipo
© Congoindépendant 2003-2010
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