vendredi 19 novembre 2010

La RDC et la réforme de l'armée : le choix de l'Africom s'impose

Par  Le Potentiel

Le rapport rendu public le mardi 16 novembre par International Crisis Group a remis au-devant de l’actualité l’urgence pour la RDC de se doter d’une armée forte et républicaine, capable de garantir l’intégrité territoriale. Les Etats-Unis, qui se déploient dans la sous-région via l’Africom, est une piste à explorer et elle se prête au contexte.
Devant l’incapacité de la RDC à mener en solitaire le grand chantier de la réforme de l’armée, le choix d’un partenaire crédible s’impose. Et pour cause. L’instabilité permanente de la partie Est de la RDC témoigne de manière éloquente de l’incapacité des FARDC à garantir l’intégrité du territoire national. Elle n’a pas la réputation d’être une armée de dissuasion.
Cet avis est partagé par beaucoup d’observateurs qui considèrent les FARDC dans leur forme actuelle comme un ensemble hétéroclite dont les éléments, issus de différentes factions armées qui se sont battues pendant les différentes guerres de rébellion, résistent à l’intégration.
D’ores et déjà, d’aucuns estiment que cette résistance ne serait pas gratuite. Elle procéderait d’un schéma visant à niveler la RDC vers le bas afin d’en faire du beurre où rentrent tous les couteaux des puissances étrangères. Lesquelles bénéficient des complicités internes.
Il y a quelques mois, le rapprochement entre la RDC et le Rwanda dans la traque des éléments des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR) a été présenté comme une panacée pour une paix durable non seulement à l’Est du pays mais aussi dans les Grands Lacs.
Aujourd’hui, il vient d’être prouvé que les opérations menées conjointement par les FARDC (RDC) et l’APR (Rwanda) n’ont été qu’un coup médiatique qui n’a pas atteint son objectif principal, à savoir la neutralisation des forces négatives qui déstabilisent l’Est de la RDC.
LE PAVE DE CRISIS GROUP
Le pavé est venu de Crisis Group qui a consacré son « Rapport Afrique » n°165 du 16 novembre 2010 intitulé : « Congo : pas de stabilité au Kivu malgré le rapprochement avec le Rwanda ». Le rapport conclut à l’urgence de recadrer la stratégie – militaire et sécuritaire - mise en œuvre au Kivu. « Admettant la dégradation actuelle des conditions sécuritaires et politiques au Kivu, et reconnaissant les difficultés à améliorer la situation économique des populations, les autorités congolaises et leurs partenaires internationaux doivent réviser leur plan de résolution du conflit appliqué depuis la fin 2008 », suggère International Crisis Group.
Cette conclusion exprime une fois de plus la nécessité pour l’armée congolaise d’accroître davantage sa capacité de résistance pour mieux s’affirmer sur le terrain des opérations. Du coup, l’épineuse question de la réforme de l’armée revient à la surface. La RDC doit se doter d’une armée capable de réagir efficacement lorsque l’intégrité du pays est menacée ou quand la sécurité des biens et des personnes est mise à mal.
Mais, la question, et la plus importante, est celle-ci : avec quel (s) acteur (s) la RDC peut s’engager dans ce grand chantier de la réforme de l’armée.
Depuis l’Accord global et inclusif de Sun City en 2003, la question de l’armée a été cooptée par les parties signataires comme une urgence pour asseoir véritablement l’autorité de l’Etat sur l’ensemble du territoire national. Curieusement, le projet – voulu prioritaire – s’est embourbé dans une logique sectaire, chaque partie signataire de l’Accord global et inclusif cherchant avant tout à garantir ses intérêts ou à protéger son aire d’influence. Au finish, la réforme a pataugé au point de s’enliser.
De ce point de vue, il est indispensable pour le gouvernement de réorienter sa stratégie en se choisissant de nouveaux partenaires - efficaces et crédibles - avec qui il peut mener à bon port la réforme inéluctable des FARDC. Les plâtrages tentés par-ci par-là ont accouché d’une souris. C’est le cas du mixage qui a laissé un arrière-goût encore ressenti aujourd’hui.
Les conclusions présentées par International Crisis Group dans son rapport du 16 novembre rejoignent l’idée du le gouvernement de s’entourer des services d’un organe dont l’influence s’étend sur l’ensemble de l’Afrique centrale.
Ainsi, les Etats-Unis qui ont pris l’option, par Africom, de se déployer en Afrique centrale, avec la RDC comme point focal, sont bien placés pour accompagner le gouvernement congolais dans la refondation des FARDC.
Recevant dernièrement un groupe de journalistes dans sa base de Stuttgart en Allemagne, le commandant de l’Africom, le général William Kip Ward, a motivé l’existence de son unité en ces termes : « L’objectif de l’Africom est d’avoir un bon partenariat avec l’Afrique dans le cadre d’un respect mutuel de la souveraineté de chaque pays. Dans tout ce qu’ils font, ce qui est important est de soutenir le bien-être des peuples africains ».
Pour le cas spécifique de la RDC, le général William Kip Ward a fait mention d’un « partenariat de longue durée », soulignant que « ce qui se passe à Kisangani, c’est l’exemple de cet engagement (…) ». « Ce que l’Africom fait en RDC n’est pas un secret. Ce qu’il espère faire pour l’avenir n’est pas un secret non plus », a-t-il indiqué avant de rassurer que l’Africom veut surtout que ses actions et celles du gouvernement aillent dans le même sens au bénéficie de la RDC.
CONVERGENCE PARALLELE
Plus rassurant, le Général Kip Ward a rappelé que « ce que nous faisons (Ndlr : les Etats-Unis) va aller dans le même sens que ce que les populations congolaises et le gouvernement souhaitent faire ».
Cette démarche rejoint celle de Crisis Group qui pense qu’« il est désormais nécessaire d’appliquer une autre approche plaçant la population congolaise au coeur de la méthode de résolution de conflit ».
Selon le Général Ward, l’intérêt de l’Africom pour la RDC se justifie, entre autres, par la protection de la population civile et la défense de l’intégrité territoriale de la RDC. « Quand les populations congolaises sont en sécurité et vivent en paix, quand ils voient des possibilités d’un avenir meilleur par rapport à ce qu’ils vivent aujourd’hui. Cela est dans l’intérêt général des USA et de la communauté internationale… ».
A travers Africom, les Etats-Unis ont fait un choix qui se justifie non seulement par ses impératifs de sécurité intérieure et extérieure mais surtout par la nécessité d’une paix durable dans la sous-région de l’Afrique centrale. Ce qui place, d’une certaine manière, la RDC au centre de tous les enjeux.
Les Etats-Unis ont clairement exprimé leur désir d’aider la RDC à réussir le pari de réformer une armée en déconfiture. C’est au gouvernement de parvenir à décrypter ce message pour un partenariat mutuellement avantageux.

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