Mgr Monsengwo prêche-t-il dans le désert ?jeudi 6 janvier 2011Une fois de plus, l’Eglise catholique de la République démocratique du Congo (RDC) s’est vu obligée d’intervenir dans les affaires politiques de son pays. En effet, le 5 janvier dernier, cette communauté religieuse, à travers la voix du cardinal Laurent Monsengwo, a opposé un refus catégorique au projet pour le moins périlleux de Joseph Kabila, d’imposer un scrutin présidentiel à un tour à son peuple. Bien entendu, cette Eglise n’est pas à sa première sortie pour prévenir une crise politique ou, en tout cas, pour interpeller les acteurs politiques congolais sur leur gestion de la cité. Pour rappel, lorsqu’en 1990, le tristement célèbre Mobutu Sese Seko avait mis l’ex-Zaïre en lambeaux avec une économie moribonde, reposant sur un régime dictatorial qui battait presque le record mondial en son temps, l’Eglise catholique avait joué un rôle prépondérant dans la réconciliation nationale congolaise. C’est bel et bien le même cardinal Monsengwo qui avait dirigé, entre 1990 et 1992, la fameuse Conférence nationale souveraine (CNS) qui avait réussi à réunir les filles et fils de l’ex-Zaïre pour fumer le calumet de la paix. Seulement, sa parole d’aujourd’hui pèse-t-elle aussi lourd que celle de 1990 ou le cardinal n’est-il qu’un pauvre héraut qui prêche dans le désert ? Selon toute vraisemblance, Kabila et son staff n’hésiteront pas à balayer du revers de la main le cri du coeur de Monsengwo. En effet, la politique, sous nos tropiques, est ainsi faite que les hommes qui y jouent le jeu n’ont généralement aucun égard ni pour la vertu cardinale, ni pour celle théologale. Sur le continent noir, l’on assiste d’ailleurs à l’émergence d’une race de politiciens opportunistes qui n’hésitent pas à faire appel aux confessions religieuses toutes les fois que leur pays, par leur faute, se transforme en un pandémonium. Mais ces mêmes politiciens, une fois la paix rétablie, sans scrupule aucun, ne trouvent pas mieux que de remercier les “ hommes de Dieu ” en monnaie de singe. Des exemples, on en trouve à profusion. Au "Pays des Hommes intègres" (Burkina Faso), l’Eglise catholique, à travers le Collège de sages, a pesé de tout son poids pour stabiliser un pays qui ressemblait fort à un bateau ivre, suite à la crise sociopolitique consécutive à l’assassinat du confrère Norbert Zongo en 1998. Mais quand il s’est agi pour la même Eglise, à l’issue d’une conférence épiscopale l’année dernière, de se prononcer défavorablement sur la modification de l’article 37 de la Constitution burkinabè qui limite les mandats du président à deux, l’entourage du président Blaise Compaoré a, stricto sensu, vite trouvé qu’elle s’est mêlée de ce qui ne la regardait pas. Incroyable, mais politiquement vrai ! Et l’Eglise catholique de la RDC risque de connaître le même sort que celui qu’a connu sa consœur burkinabè. Mais une chose est sûre : elle aura joué son rôle. La RDC dont une bonne partie est livrée, depuis belle lurette, aux ténèbres de la barbarie, avec un pouvoir central qui bafoue les droits fondamentaux des citoyens, n’a point besoin d’une autre crise. Ainsi, si Kabila n’en faisait qu’à sa tête, il endosserait l’entière responsabilité des dérapages que viendrait à connaître le processus électoral.
Boulkindi COULDIATI
Source: Observateur de Paalga
Source: Observateur de Paalga
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