jeudi 24 mars 2011

RDC/Armée : distraction interdite !

Parmi les préalables à satisfaire avant l’organisation des élections de 2006, les participants au Dialogue Intercongolais, à Sun City (Afrique du Sud), avaient identifié la réforme de l’armée, de la police et des services de sécurité.
 Tout le monde était d’avis que sans paix et sécurité, il était impossible d’amener les Congolais aux urnes. Hélas, après la mise en place des institutions de Transition et de leurs animateurs à partir de juin 2003, le dossier relatif à la refondation de l’armée nationale s’est transformé en un interminable feuilleton de divergences entre la hiérarchie militaire du pays et les responsables des ex-mouvements rebelles. Au bout du compte, le CNDP de l’ex-général Nkunda a imposé le « mixage » en lieu et place du « brassage » ainsi que le maintien de ses troupes au Nord-Kivu. Pour ce qui est des soldats du MLC, leur refus de se faire « brasser » s’est soldé par deux « guerres », la première en août 2006, le jour de la proclamation des résultats du 1er tour de l’élection présidentielle, et la seconde en mars 2007, trois mois après l’investiture du Président de la République élu.

Des questions sur l’unité de commandement…
       Même si les FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo) fonctionnent sous la tutelle du ministère de la Défense et de leur état-major général, l’unité de commandement en leur sein ne cesse de susciter des questions. En effet, pas plus tard que le lundi 14 mars 2011, l’assistance présente au procès des assassins présumés de Floribert Chebeya, ancien Directeur Exécutif de l’Ong de défense des droits de l’homme la « Voix des Sans Voix », était ahurie d’apprendre que le Bataillon Simba de la Police Nationale Congolaise opère comme une unité privée du général John Numbi.
       Il a été donné d’apprendre que ses hommes avaient quitté les FARDC avec tenues, armes et munitions, sans se référer à qui que ce soit. Depuis le 23 juillet 2007, date de leur intégration au sein de la PNC, personne ne contrôle leur dotation en armes et munitions, puisqu’ils disposent de leur propre dépôt. Ainsi donc, quatre ans et demi après la naissance de la 3me République, celle-ci héberge une « unité armée » indépendante, qui ne reconnaît l’autorité que d’un individu, en
l’occurrence le général John Numbi.
       Le cas du Bataillon Simba rappelle un autre : celui du CNDP. Il n’est un secret pour personne que sur les terres du Nord-Kivu, les troupes du général Bosco Ntaganda, tout en revendiquant leur appartenance aux FARDC, obéissent plus aux ordres de leurs supérieurs de l’ex-rébellion qu’à ceux de l’armée régulière. On se souvient que l’année dernière, dans la foulée du cessez-le-feu et de leur intégration au sein de l’armée nationale, elles avaient opposé une fin de non recevoir à l’appel du ministre de la Défense les exhortant à se présenter dans les centres de brassage. En dépit des menaces de toutes sortes, les ex-officiers et soldats CNDP ne sont ni « mixés » ni « brassés ».
       Les éléments de différentes nébuleuses Mai-Mai du Nord comme du Sud-Kivu, intégrés ou candidats à l’intégration se comportent, selon les circonstances, tantôt en membres des FARDC, tantôt en miliciens relevant des groupes armés. Les dérapages qui font les choux gras des rapports des organisations non gouvernementales de défense des droits
de l’homme sont souvent imputables à ces inciviques sans foi ni loi.
       Est-ce possible d’évoluer vers une armée ou une police républicaine, dès lors que des galonnés continuent d’entretenir des milices privées, au vu et su de tout le monde ?
Distraction supplémentaire
       Au moment où l’armée nationale cherche encore la voie de sortie de ses douleurs d’enfantement, une distraction supplémentaire frappe à ses portes, sous la forme de nièmes opérations militaires conjointes à planifier avec les armées rwandaise et ougandaise. En tout cas, l’option a été levée récemment à Kigali, lors de la 3me Conférence des
présidents des Parlements des Etats de Grands Lacs, à laquelle ont pris part leurs homologues belges.
       Pour nombre d’analystes, il n’est pas normal, en effet, qu’au jour d’aujourd’hui, la défense nationale et la sécurité intérieure de la RDC fassent l’objet des réflexions, alors que le pays est gouverné par des autorités ayant la légitimité populaire et qu’il ne fait pas, pour l’heure, face à une rébellion armée et structurée. Logiquement, les questions sécuritaires à l’intérieur des frontières nationales sont à régler par les Congolais eux-mêmes, sans le concours des Rwandais, des
Ougandais ou des Burundais.
       L’ouverture aux pays voisins ne pourrait se justifier que dans l’hypothèse de la survenance des problèmes sécuritaires au niveau des frontières communes. Aussi, est-il impérieux pour les Congolais de jeter toutes leurs énergies et leurs moyens dans l’œuvre de construction de l’armée nationale, à placer absolument sous le régime des priorités des priorités. Car, sans une armée républicaine, capable de remplir ses missions régaliennes, le pays ne peut ni se démocratiser, ni se développer, ni s’affirmer comme Etat indépendant.
                                                       Kimp

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