Des combattants pro-Ouattara, en patrouille à Abidjan le 13 avril. © AFP
Entre ex-rebelles, militaires légitimistes et fidèles de Gbagbo en fuite, la confusion règne. La création d’un corps de défense unifié est un immense défi.
En prenant une ordonnance, le 17 mars, pour instituer les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), le président Alassane Ouattara signait l’arrêt de mort des Forces de défense et de sécurité (FDS). Si cette décision offrait également un nouveau « logo » aux ex-Forces nouvelles, elle visait aussi, dans l’immédiat, à faciliter le ralliement d’éléments pro-Gbagbo avant le déclenchement de la grande offensive militaire sur Abidjan. Cela a fonctionné. En partie seulement. Car un mois après la chute de Gbagbo et malgré l’allégeance des galonnés au nouveau chef de l’État devant les caméras de télévision, bon nombre de militaires restés fidèles au président sortant sont toujours aux abonnés absents. Disparus dans la nature avec armes et bagages, ils seraient près de 14 000 hommes – sur un effectif global de 60 000 – à ruminer l’humiliante défaite militaire subie grâce aux appuis des Français de Licorne et des Casques bleus des Nations unies. Les appels répétés des autorités ne semblent pas porter leurs fruits. « Les ex-FDS ont besoin d’être rassurées pour regagner les casernes, et ce n’est toujours pas le cas », confie un officier.
« Bande armée »
Tous les sites stratégiques (état-major des armées, ministère de la Défense, casernes…) sont actuellement occupés – et sécurisés – par des ex-rebelles. C’est ainsi que le « comzone » Chérif Ousmane, devenu commandant des FRCI, a pris ses quartiers au camp Gallieni et s’est installé dans les bureaux du général Philippe Mangou, chef d’état-major théoriquement encore en service. Le général Soumaïla Bakayoko, chef d’état-major des ex-Forces armées des Forces nouvelles (FAFN), tente de mettre en place, avec des officiers des ex-FDS, le nouveau commandement d’une armée nationale à refonder intégralement. Les considérations budgétaires entrent dans l’équation : l’entretien des ex-FDS, particulièrement choyées, coûtait 200 milliards de F CFA (305 millions d’euros) par an.
En attendant, l’ordre public est assuré par les FRCI, peu professionnelles, décriées, et dont certains éléments relèvent avant tout de la « bande armée ». « C’est un défi immense pour le président Ouattara. Il nous faut dans un premier temps purger les effectifs », explique un proche du chef de l’État.
État-major
La matrice de cette restructuration demeure l’accord de Ouagadougou de 2007 : 5 000 membres des ex-Forces nouvelles doivent rejoindre la nouvelle armée, et 4 000 autres la police et la gendarmerie. Quant aux dix anciens « comzones », ils devraient remiser le treillis, faire valoir leurs droits à la retraite avec le grade et les avantages acquis dans la rébellion. À la clé également, de fortes primes et éventuellement de prestigieuses affectations comme attachés de défense dans des ambassades – tout cela est en discussion.
Une short-list du prochain état-major circule aussi. Le général Mathias Doué, patron de l’armée sous Gbagbo jusqu’en 2004, est revenu d’exil. L’autre « nominé » est le général Michel Gueu, un proche du Premier ministre Guillaume Soro. « Ouattara préférera nommer un homme de l’Ouest pour se réconcilier avec cette partie du pays qui a tant souffert », croit savoir un fin connaisseur du dossier. La France aurait suggéré quelques noms d’officiers généraux, tous saint-cyriens. Mais aucun de ces noms n’a « fuité ».
Quant à l’appellation de cette nouvelle armée : secret-défense. Seule certitude : ce ne sera ni FDS, ni FRCI. Pour chasser les mauvais fantômes. Et conjurer les « chiens de guerre » issus des deux camps.
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