mardi 12 juillet 2011

Revue par pays du rapport de la Cnuced sur la politique industrielle en Afrique

Intersection d'autoroutes en construction près de Johannesbourg en 2010.
Intersection d'autoroutes en construction près de Johannesbourg en 2010.
Par Marie Joannidis
Selon le rapport 2011 de la Cnuced, le niveau d’industrialisation et l’évolution récente du secteur manufacturier diffèrent beaucoup parmi les 54 pays d’Afrique. De l’Afrique du Sud à la Guinée, revue par pays.
L’Afrique du Sud, qui représentait dans les années 1990 un tiers environ des capacités manufacturières de l’Afrique, fait partie des pays « en progrès », selon la Cnuced. Avec une Valeur ajoutée manufacturière (VAM) par habitant de 581 dollars en 2010, elle est parvenue à un niveau d’industrialisation nettement plus poussé que les autres pays africains, à l’exception des Seychelles et de Maurice. Malgré ces avancées, la croissance industrielle sud-africaine a été très médiocre durant les deux dernières décennies.
Parmi les autres pays en progrès, le Swaziland, qui a enregistré des taux de croissance de sa VAM par habitant d’environ 1,9 % au cours des deux dernières décennies. Etle Maroc et le Gabon, avec des taux de croissance respectivement de 1,6 et 1 %.

Beaucoup en sont encore au stade du rattrapage

Si les pays africains « en avance » et « en progrès » possèdent déjà une importante base manufacturière, beaucoup en sont encore au stade du rattrapage pour leur industrialisation. Ils sont donc plus vulnérables à une détérioration brutale de leur trajectoire de croissance industrielle. Ainsi, après une croissance industrielle rapide au cours de la période 1990-2010, le Soudan reste un des pays les moins industrialisés du monde et souffre de sa dépendance vis-à-vis d’activités manufacturières liées aux ressources naturelles ainsi que du ralentissement de la croissance industrielle ces dernières années. Ce pays a également connu ces deux dernières décennies l’un des processus les plus dynamiques de croissance manufacturière parmi les pays africains. Mais avec une VAM par habitant de 66 dollars, sa base industrielle reste très réduite.

Au Mozambique et en Ouganda, la croissance industrielle a également été rapide, mais ces pays ont encore une VAM par habitant très faible. Comme dans le cas de l’Angola et du Soudan, il n’est pas garanti que leur trajectoire de croissance se poursuive. Des efforts seraient nécessaires, en particulier pour transformer les rares activités manufacturières existantes en une base industrielle bien établie. L’industrialisation au Lesotho progresse également de façon relativement stable, mais elle repose sur un secteur manufacturier de basse technologie et à forte intensité de main-d’œuvre.

Le retard d’un groupe important de pays africains s’accentue de plus en plus par rapport aux groupes de pays qui réussissent mieux. La plupart ont une VAM par habitant inférieure à la moyenne africaine de 100 dollars et ils n’ont pas enregistré de croissance industrielle importante ces vingt dernières années. Ils sont en général fortement tributaires d’exportations de ressources naturelles non transformées et leur secteur manufacturier contribue peu au PIB.

Le Cameroun moins dépendant des ressources naturelles

Leur activité industrielle est dominée en outre par les produits alimentaires et le raffinage du pétrole. Les pays de ce groupe n’ont pas fait de réel progrès sur la voie de l’industrialisation.

Au Kenya et au Sénégal, par exemple, la VAM par habitant n’a pas dépassé un niveau de 50 dollars environ au cours des vingt dernières années. En outre, elle ne représente guère que le dixième de leur PIB et les activités manufacturières existantes se situent presque exclusivement dans des secteurs liés aux ressources naturelles.

Bien que le Botswana soit un pays un peu plus industrialisé et qu’il ait connu une croissance industrielle modérée, il est lui aussi fortement tributaire d’activités manufacturières liées aux ressources naturelles.

L’exemple du Cameroun montre cependant que les pays africains peuvent arriver à devenir moins dépendants d’activités manufacturières liées aux ressources naturelles. Ce pays a développé ces deux dernières années son industrie textile et il est devenu nettement moins tributaire des produits du bois. En termes de croissance et de structure industrielle, la Tanzanie et le Nigeria sont plus actifs dans les secteurs à forte intensité de technologie que d’autres pays. La Tanzanie s’est diversifiée dans l’industrie chimique et au Nigeria les secteurs de l’automobile, des produits chimiques et des machines électriques constituent un cinquième environ de la VAM totale du pays.

Les pays dont la croissance se dégrade

Parmi les pays dont la croissance se dégrade et certains qui se désindustrialisent, la Côte d’Ivoire, le Sénégal et la Mauritanie ont une VAM par habitant inférieure aujourd’hui à son niveau d’il y a vingt ans. Mais le pays de ce groupe qui a le plus gros problème de désindustrialisation est le Zimbabwe ce qui met en relief l’importance de la stabilité politique pour le développement industriel.

Un grand nombre de pays ont une base manufacturière quasiment voire totalement inexistante. Ces pays ont une VAM par habitant inférieure à 20 dollars et la plupart sont classés dans la catégorie des pays les moins avancés (PMA). Il s’agit notamment du Rwanda, de la RD-Congo, du Burundi, du Mali, de la Sierra Leone, du Liberia, du Niger, de la Guinée, de la Guinée-Bissau et de Djibouti. Au Niger et en Guinée, cependant, la part des exportations manufacturières dans les exportations totales est assez forte en raison des exportations de produits d’uranium pour le premier et des produits d’aluminium pour le second.

Certains toutefois ont eu du succès dans ce secteur. L’Éthiopie, par exemple, a réussi à développer son industrie de la floriculture. Alors qu’elle n’était que le vingt-quatrième exportateur mondial de fleurs coupées en 2001, elle a bondi à la cinquième place en 2007.

Le Malawi a aussi fait certains progrès en développant son secteur du textile et du vêtement. Mais en dépit de ces avancées, il est évident que les pays de ce groupe sont confrontés à de sérieux problèmes pour s’engager dans des activités manufacturières et les développer. Il est peu probable qu’ils puissent véritablement y parvenir sans une intervention délibérée des pouvoirs publics.

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