jeudi 16 août 2012

«Joseph Kabila» ou «L’Etat, c’est moi !»


"Joseph Kabila" brandit la Constitution qu’il venait de promulguer le 18 février 2006.

Le 18 février 2006, la République démocratique s’est dotée d’une nouvelle Constitution.

Le président de la République, le Parlement, le gouvernement et les Cours et tribunaux ont été consacrés comme étant les «Institutions» de la République.

Ce qui suppose l’instauration du principe sacro-saint de séparation des Pouvoirs : le Parlement légifère et contrôle l’action de l’exécutif ; le président de la République représente la nation et promulgue les lois ; le gouvernement gouverne et administre le pays et rend compte devant la représentation nationale ; la Justice veille au respect des lois et sanctionne les contrevenants.

Six années après, l’institution «Président de la République» usant de la corruption et de l’intimidation a fini par phagocyter les trois autres.

Et ce, au détriment des «préoccupations» qui avaient servi de balises aux rédacteurs de la loi fondamentale.
A savoir : le fonctionnement harmonieux des institutions, l’Etat de droit, lutte contre l’impunité, alternance démocratique, la bonne gouvernance et la volonté de barrer la route à toute dérive dictatoriale.

Six années après, force est de constater que le Pouvoir judiciaire a perdu son indépendance - les magistrats sont nommés et révoqués au gré des caprices présidentiels et à l’insu du Conseil supérieur de la magistrature

-, le gouvernement rend compte de son action au Parlement sans toutefois conduire pleinement la politique de la nation (le 29 mai 2009, le président de la République a retiré au Premier ministre la gestion du compte du trésor).

A titre d’exemple, le porte-parole du gouvernement tient des points de presse pour évoquer des questions ponctuelles qui n’ont pas fait l’objet de délibération du Conseil des ministres.

Le Parlement, composé en majorité des membres de la «majorité présidentielle» ne joue plus son rôle de "contrôleur" de l’exécutif. Il n’est plus qu’une "chambre" d’enregistrement.

Deux faits récents mettent à nu cette dangereuse omnipotence de l’institution présidentielle. Le premier. Depuis bientôt une année, le Parlement congolais a voté le texte légal instituant la Cour constitutionnelle conformément à l’article 157 de la Constitution.

Cette nouvelle juridiction sera composée de neuf membres désignés, de manière paritaire, par le président de la République, le Parlement et le Conseil supérieur de la magistrature. Le texte a été envoyé à la Cour suprême de justice (CSJ) afin d’obtenir un arrêt de conformité à la Constitution. Ce qui a été fait.

Depuis plusieurs mois, ledit texte portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle est «bloqué» au Cabinet de «Joseph Kabila». Celui-ci prend tout son temps pour procéder à la promulgation.

Les motivations des atermoiements «présidentiels» paraissent faciles à deviner. L’homme redoute d’avaliser la création d’une haute juridiction dont le contrôle pourrait lui échapper.

Là où le bat blesse est que la CSJ n’a jamais notifié son arrêt précité aux deux Chambres du Parlement. Auquel cas, l’article 140 de la Constitution aurait été d’application.

Celui-ci stipule : «Le président de la République promulgue la loi dans les quinze jours de sa transmission après l’expiration des délais prévus par les articles 136 et 137 de la Constitution. A défaut de promulgation de la loi par le Président de la République dans les délais constitutionnels, la promulgation est de droit».

Le 28 avril dernier, la composition du gouvernement du Premier ministre Matata Ponyo a été divulguée. Suite au changement intervenu dans la dénomination de certains ministères, un projet d’ordonnance portant organisation et fonctionnement du gouvernement a été sous à la sanction présidentielle.

Le texte vient à peine d’être signé. La raison de ce retard est connue de «Joseph Kabila» seul. Une chose paraît sûre : Matata, à l’instar d’Antoine Gizenga et d’Adolphe Muzito, est un Premier ministre sans pouvoir.

Le gouvernement n’a aucune prise sur l’administration publique, les Forces armées, la police nationale et les services de sécurité.

Que reste-t-il de la Constitution promulguée le 18 février 2006 ? Pas grand chose.

«Joseph Kabila» peut bomber le torse en criant haut et fort : «L’Etat, c’est moi ! ». Jusqu’à quand ?

Toute Constitution a pourtant le rôle crucial de limiter le pouvoir des gouvernants tant au sein de l’Etat que de la société. Objectif : prévenir les abus et autre excès du pouvoir.

L’omnipotence de l’institution «Président de la République» n’a généré aucune efficacité. Bien au contraire. L’arbitraire est de retour. La crise de légitimité mêmement. Quel gâchis!

Baudouin Amba Wetshi
© Congoindépendant

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