Jeudi, 16 Mai 2013
C’était un 17 mai 1997. Des enfants dont l’âge variait entre 10 et 14 ans encadrés par des éléments de l’armée régulière rwandaise faisaient leur entrée triomphale clans la capitale congolaise.
Ces adolescents, appelés «kadogo» étaient venus de Bukavu et de Goma à pieds transportant à dos leurs armes et munitions, traversant des cours d’eau de toutes natures, montagnes, vallées, forêts, marécages pour arriver à Kinshasa.
Cette traversée du territoire congolais d’Est en Ouest avait duré sept mois, car d’autres éléments armés avaient pris à partir de Kisangani des bateaux pour naviguer sur le fleuve Congo.
C’est ainsi que des troupes régulières rwandaises, ougandaises, burundaises ainsi que des mercenaires érythréens et somaliens s’étaient retrouvés rassemblés dans toutes les villes et localités de la RDC. Une véritable agression internationale pour chasser le régime du MPR-parti Etat.
Ils furent accueillis en libérateurs par les populations congolaises qui croyaient en finir une fois pour toutes avec le régime mobutiste.
La joie allait être de courte durée, car une fois installés au pouvoir, nos « libérateurs » allaient enlever leurs fausses barbes pour dévoiler leur véritable face de criminels impénitents qui poursuivaient d’autres ambitions, notamment le pillage des ressources minérales et plus tard la partition du territoire congolais en plusieurs provinces et territoires qu’ils allaient rattacher à leurs pays.
Le Rwanda visant le Nord au Sud-Kivu tandis que l’Ouganda rêvait de s’emparer de vastes territoires situés à l’Est de la Province Orientale, notamment le Haut Uélé et le Kibali-Ituri.
Les accords de Lemera
L’histoire dira un jour son mot sur la création de ce mouvement politico-militaire dénommé Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL). Selon les animateurs de ce mouvement, l’AFDL constituait un rassemblement de quatre partis politiques créés successivement par Laurent-Désiré KABILA, Déogratias BUGERA, Anselme MASASU Nindaga et KISASE Ngandu.
Ces leaders se seraient retrouvés dans la localité de Lemera située sur les hauteurs de la chaîne des montagnes de Mitumba, qui traverse le Nord-Katanga jusqu’au Nord-Kivu. Ce serait dans cette localité que ces quatre leaders auraient conclu un accord dit de Lemera destiné à libérer le Congo du régime mobutiste.
Sur le plan économique, l’AFDL allait instaurer le socialisme éclairé qui allait s’accaparer de toutes les terres. Personne n’a jamais vu le contenu de cet accord et le président de l’AFDL ne croyait pas bien dire en dénonçant cet accord et en qualifiant ce mouvement d’un conglomérat d’aventuriers au cours d’une adresse faite à la population dans la salle des Congrès du Palais du Peuple pour annoncer la création des Comités des Pouvoirs Populaires (CPP) au lendemain de l’éclatement de la guerre du RCD-Goma.
Preuve s’il en fallait une que cet accord n’a jamais existé ou que leurs initiateurs qui sont tous décédés à l’exception de Deo BUGERA n’ont jamais pu en dire un mot au risque d’être accusés de haute trahison.
Rencontre Mobutu-Tshisekedi au Cap-Saint-Martin
Après la prise des villes de Bukavu, Goma, Beni et Butembo, Etienne TSHISEKEDI qui négociait dans le pur secret avec le tout dernier directeur de Cabinet de Mobutu, en l’occurrence le professeur Félix VUNDUAWE Te Pemako, se rendit à Nice pour y rencontrer le maréchal Mobutu en pleine convalescence.
A son retour, il était question de mettre en place un gouvernement de large union nationale avant comme mission principale d’entamer des négociations de paix avec les deux Etats voisins de l’Est, à savoir le Rwanda et l’Ouganda ainsi que les puissances occidentales, particulièrement les USA dirigés à l’époque par le Démocrate Bill CLINTON.
Tous les espoirs étaient permis, étant donné que le Rwanda comptait sur un nouvel ordre politique en RDC pour éradiquer les poches des FDLR qui constituaient une forte menace pour sa sécurité tant intérieure qu’extérieure.
Le général James KABAREHE avait fait un aveu de taille en déclarant que Kigali avait hésité pour continuer à accompagner les éléments de I’AFDL jusqu’à Kinshasa, car l’immensité du territoire était un risque certain d’un encerclement militaire au cas où les ex-Zaïrois organisaient une résistance populaire ou bénéficiaient d’une assistance militaire d’une puissance amie.
Hélas ! De retour à Kinshasa au milieu du mois de décembre 1996, le maréchal effectua un virage de 180 degré en reconduisant le gouvernement illégitime, illégal et très contesté de Léon KENGO.
La guerre s’intensifia et la ville de Kisangani qui constituait le verrou vers Kinshasa tomba au mois de mars 1997 entre les mains des troupes de l’AFDL soutenues par celles du Rwanda et l’Ouganda. Deux mois après, la capitale tomba sans coup férir à l’exception des localités et villes de la province de l’Equateur.
Mobutu et L.D. KABILA sur le bateau Outeniqua
Au mois de mars, la prise de la ville de Kisangani ouvrit la voie vers Mbuji-Mayi et Lubumbashi. Les parrains sud africains avec à leur tête le président Nelson MANDELA organisèrent une rencontre entre Mobutu et L.D. KABILA dans le bateau de guerre sud-africain dénommé Outeniqua au large du port de Pointe Noire au Congo-Brazzaville.
Cette rencontre ne dura que l’espace d’une demi-heure et l’on projeta une autre que L.D. KABILA boycotte probablement sur conseil’ de ses parrains rwandais dès lors que les troupes de l’AFDL avaient déjà dépassé Kikwit en route vers Kinshasa.
La fuite de Mobutu
Au début du mois de mai, la situation sécuritaire de Kinshasa était devenue intenable, dans la mesure où les bruits de bottes résonnaient à partir de Kenge, une localité située à deux cents kilomètres de la capitale.
Le général MAHELE, alors chef d’Etat Major-Général des FAZ, prit son courage en mains pour demander à Mobutu de s’éloigner de la capitale où sa sécurité n’était plus protégée.
Le 16 mai, le cortège emmenant Mobutu et certains membres de sa famille biologique quitta Kinshasa vers 11 heures en direction de la ville de Gbadolite où il ne passa que 24 heures avant de s’envoler vers Lomé au Togo chez son ami feu le président EYADEMA.
L.D. KABILA s’autoproclame chef de l’Etat
Une semaine avant la chute de Kinshasa, à la surprise générale, L.D. KABILA s’était autoproclamé chef de l’Etat au cours d’une conférence de presse tenue à Lubumbashi à l’hôtel KARAVIA devenu le siège provisoire de l’AFDL.
L’AFDL s’installe à Kinshasa
En provenance de Lubumbashi devenue la capitale provisoire de ce mouvement, Deo BUGERA, secrétaire général et véritable patron de l’AFDL, descendit le dimanche 18 mai 1997 à Kinshasa à la tête d’une forte délégation de hauts responsables.
Parmi lesquels le chef des «kadogo» dénommé Anselme MASASU Nindaga, MAWAPANGA Mwana Nanga, Didier KAZADI Nyembwe, Jeannot MWENZE Kongolo et Babi MBAYI. Au cours d’une conférence de presse tenue à l’hôtel Intercontinental, Deo BUGERA annonça une série des mesures, notamment celle faisant des directeurs les plus anciens en grade des PDG des entreprises du Portefeuille de l’Etat.
L.D. KABILA investi au Stade des Martyrs
Arrivé le jeudi 22 mai à Kinshasa, L.D. KABILA mit immédiatement en place un gouvernement dit de Salut Public comprenant certaines personnalités non membres de l’AFDL, dont feu Me Moreno. KINKELA Vi Kansi, Dr Jean-Baptiste SONDJI, Gabriel KAPITA Shabangi, Justine KASAVUBU Mpoyo, Paul BANDOMA, etc.
Les postes-clé étaient détenus par les membres de l’AFDL, tandis que les rennes des forces armées étaient entre les mains des officiers rwandais avec à leur tête le général James KABAREHE que l’on présentait comme un «munyamulenge» pur sang.
Le samedi 24 mai, le stade des Martyrs connut l’une de ses heures de gloire. Plusieurs chefs d’Etat et de gouvernement, dont particulièrement ceux des pays ayant participé à la guerre dite de l’AFDL se retrouvèrent dans ce stade pour participer aux festivités de l’investiture du nouveau chef d’Etat congolais.
On y dénombra l’Angolais Edouardo Dos SANTOS, l’Ougandais Yoweri Kaguta MUSEVENI, le rwandais BIZIMUNGU, le Burundais Pierre BOYOYA, le Sud-Africain THABO Mbeki, le Zimbabwéen Robert MUGABE, le Zambien Fréderic CHILUBA, et.
Le mouroir de Kitona
Quelques jours après, un communiqué lu sur les antennes de la radiotélévision nationale ordonna à tous les officiers des ex-FAZ de prendre toutes les dispositions pour rejoindre, au plus tard 72 heures la base militaire de Kitona pour un séminaire de formation idéologique.
Dépourvue des installations adéquates pour l’hébergement des ces dizaines des centaines d’officiers, cette base se transforma en un mouroir. Plus de la moitié des vaillants officiers formés dans les académies militaires prestigieuses de l’Occident et de la Chine y perdirent la vie suite à la famine et aux maladies contagieuses, telles la diarrhée, la fièvre typhoïde, la tuberculose, etc. Entretemps, dans le plus grand secret, des officiers des renseignements de Kigali et de l’Ouganda se mirent à vider les coffres de l’Etat Major Général des FAZ de toutes les archives, notamment les documents secrets et surtout les cartes et autres documentations militaires de première main.
A Kinshasa, le ministère de la Justice de I’AFDL déclencha la chasse aux sorcières en procédant à des arrestations intempestives des dignitaires de l’ancien régime qui n’avaient pas pris le chemin de l’exil.
Ils furent jetés sans ménagement dans les cachots du Parquet de Grande Instance de Gombe et de l’Etat Major de la Gendarmerie juste en face de l’Institut Supérieur de Commerce, avant de rejoindre la prison centrale de Makala après sa réhabilitation.
Il n’y eut jamais de procès à part celui intenté contre le général KIKUNDA Ombala qui se termina en eau de boudin, faute des preuves.
F.M.
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