samedi 22 juin 2013

RDC : Le moment est venu pour mettre fin à l’aventure militaire dans l’Est

22/06/2013


M23

Il faut aller jusqu’au bout et obtenir la disparition du M23 avec ou sans l’appui des Nations unies et des voisins agresseurs de la CIRGL. Comme un roseau au milieu des eaux troubles, Kinshasa a l’obligation de résister, résister et toujours résister.

Kinshasa ne se montre plus favorable à poursuivre avec le schéma des négociations avec le M23, tel que tracé dans le cadre de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL).

La résolution portant déploiement d’une brigade d’intervention dans l’Est ayant désormais reçu l’aval du Conseil de sécurité des Nations unies, Kinshasa estime que le moment est venu pour la communauté internationale et d’autres pays de la région des Grands Lacs de fédérer leurs énergies afin de mettre fin à l’aventure militaire dans l’Est de la RDC.

En s’écartant du schéma de la CIRGL, Kinshasa s’inscrit désormais dans la logique dictée par l’Onu. Faudrait-il encore qu’il tienne jusqu’au bout pour faire triompher sa cause ?

Le blocage a pris finalement le pas sur l’impasse qui s’est dessinée depuis quelque temps dans les pourparlers engagés depuis décembre 2012 à Kampala (Ouganda) entre Kinshasa et le M23.

Avec le changement de donne issu de l’adoption par le Conseil de sécurité des Nations unies de la Résolution créant une brigade d’intervention dans l’Est de la RDC, Kinshasa s’est trouvé un bel alibi pour ne plus se laisser embrigader dans la logique de la CIRGL qui lui a imposé des négociations avec le M23, un mouvement rebelle que les Nations unies classent dans les rangs des forces négatives.

En effet, le gouvernement s’est saisi de cette brèche. Et, apparemment, il n’est pas prêt à la lâcher. Si bien que, depuis un temps, le gouvernement de la RDC ne trouve plus d’intérêt à poursuivre, à Kampala, les discussions avec le M23. Une position qu’il a pris le soin de communiquer à la facilitation ougandaise.

Pourtant, le M23 a dépêché depuis quelques jours ses délégués dans la capitale ougandaise, dans l’espoir, a fait savoir sa direction politique, de reprendre les négociations avec Kinshasa. Mais, dans la capitale congolaise, l’on n’entend plus céder au chantage du M23.

Ainsi, pour Kinshasa, seul la signature d’un accord dûment acquis au niveau de la facilitation ougandaise pourrait justifier un éventuel retour de ses délégués à Kampala. Ce qui reste encore moins évident, au regard des divergences qui continuent encore à opposer les deux délégations.

François Muamba, coordonnateur du comité exécutif du Mécanisme national de suivi de l’accord-cadre d’Addis-Abeba, est formel.

« Les rebelles du M23 cherchent un certificat pour montrer à la face du monde qu’elles ne sont pas forces négatives et que la brigade d’intervention ne vienne pas les attaquer », a-t-il déclaré à l’Agence Chine nouvelle.

Kinshasa, à l’instar de la communauté internationale, considère désormais le M23 comme une force négative qui ne devait plus mériter ses égards. François Muamba ne s’en cache pas. « Nous n’avons pas à faire avec le M23, nous allons discuter avec la médiation ougandaise, pas avec les forces négatives».

Néanmoins, dans les rangs du M23, l’on continue de croire à un revirement de la situation du côté de Kinshasa.

« Les délégués du gouvernement ont promis de revenir hier (NDLR : le 18 juin) à Kampala pour qu’on continue les discussions, mais ils ne sont pas arrivés », a indiqué le porte-parole du M23, Amani Kabasha. Et d’ajouter : « Nous devons discuter et soumettre nos propositions sur ledit accord de paix».

TENIR JUSQU’AU BOUT

Tout compte fait, la partie congolaise, menée en bateau par la CIRGL à Kampala, appréhende de mieux en mieux les vrais enjeux de la crise dans l’Estde son territoire. Des positions courageuses sont désormais l’apanage de la délégation de Kinshasa aux pourparlers de Kampala.

La langue de bois diplomatique et hypocrite cède de plus en plus la place à un discours cohérent, approprié pour faire face aux agresseurs que sont justement certains Etats voisins, membres influents de la Conférence internationale sur la région des Grands lacs.

Il s’agit du Rwanda et de l’Ouganda, nommément cités par des experts onusiens chargés de faire toute la lumière sur la violation de l’embargo sur les armes décidé par le Conseil de sécurité des Nations unies.

Malgré ces évidences, et contre l’opinion interne, le gouvernement s’est rendu aux pourparlers de Kampala afin d’ôter tout prétexte aux agresseurs. Kinshasa est allé loin jusqu’à accepter la médiation ougandaise, pays sur qui des preuves documentées de soutien au M23 sont avérées.

Mis à nu suite à la stratégie adoptée par Kinshasa, Kigali et Kampala ont multiplié tergiversations, manœuvres dilatoires, chantages..., par le M23 interposé, pour faire fléchir la délégation venue de Kinshasa.

Ce faisant, faire monter l’opinion et la population contre leurs autorités et obtenir, en final, ce que le M23 n’a pu réussir sur le terrain militaire malgré sa supériorité supposée.

LA STRATEGIE A PORTE

Fléchir sans rompre, cette stratégie a porté. A ce jour, une reprise en main de la situation s’est imposée de soi. L’hypocrisie ayant trop duré de part et d’autre, quelqu’un devrait prendre l’initiative de la rupture de ce tacite « Gentlemen agreement » contraire aux intérêts de la République démocratique du Congo.

L’attitude congolaise se comprend aussi dans la mesure où le M23 et ses soutiens ont poussé trop loin jusqu’à tenter d’obtenir en douceur et sur la table des pourparlers le contrôle officiel d’un pan entier du territoire congolais.

Une couleuvre que le gouvernement était invitée à avaler, sans coup férir! Ce que l’opinion publique congolaise interprétait comme une haute trahison par les Congolais.

La ligne rouge ne pouvant plus être franchie, la délégation de Kinshasa a pris son courage entre les mains afin d’exiger l’atterrissage pur et simple des pourparlers. La médiation ougandaise qui en a la charge tenterait de faire perdurer le suspense, mais se bute à la vigilance des Congolais.

Aussi, la délégation de Kinshasa est-elle tenue à ne point céder à ce chantage odieux d’un accord qui laisserait aux agresseurs l’administration des territoires congolais actuellement sous contrôle du M23.
SE PREPARER A LA RESISTANCE

Il faut aller jusqu’au bout et obtenir la disparition du M23 avec ou sans l’appui des Nations unies et des voisins agresseurs de la CIRGL. Comme un roseau au milieu des eaux troubles, Kinshasa a l’obligation de résister, résister et toujours résister.

Actuellement, il est apparu que les accords conclus au sein de la CIRGL n’ont été nullement à l’avantage de la RDC. Loin de là. Tout a été fait pour faire plier davantage la RDC, de façon à ce que, se retrouvant dos au mur, il cède à toute forme de pression.

En décembre 2012, la CIRGL a obtenu gain de cause en contraignant la RDC à s’asseoir à Kampala sur une même table avec ses bourreaux, le M23.

Mais, l’intrusion du président tanzanien dans la crise de l’Est, avec sa proposition d’un dialogue élargi et global dans la région qui obligerait le Rwanda et l’Ouganda à négocier également avec ses rebelles, a sensiblement changé la donne.

Si Kigali et Kampala refusent de rencontrer ses rebelles, pourquoi en sera alors le cas pour Kinshasa. En quoi ces deux pays, visiblement indexés par l’ONU comme parrains du M23, feraient-ils exception ?

Dans la gestion de crise dans les Grands Lacs, il y a eu depuis toujours une politique de deux poids deux mesures. Vaut mieux tard que jamais, dit-on. Après avoir été entraîné dans des schémas de sortie de crise compromettants pour son avenir, Kinshasa s’est finalement ressaisi.

Il s’agit pour l’instant de tenir tout en se préparant davantage pour parer à toute éventualité. « Qui veut la paix prépare la guerre », renseigne un vieil adage.

[Le Potentiel]

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