Lundi 15 octobre 2007- Une même histoire tragique pour deux festivités contradictoires.
Entre réjouissance avec l’actuel président burkinabè, Blaise Compaoré, et recueillement sur la tombe du premier président du Burkina Faso, Thomas Sankara, le peuple conscient burkinabè se démarque.
Il va au cimetière des martyrs de la Révolution du 4 août 1983 pour passer des heures d’émotions avec le président Thomas Sankara.
Des Burkinabè viennent d’envoyer un signal fort au président Compaoré. Ils mettent également à nu les tares de sa gestion politique. Regarder vers l’avenir.
C’est un credo du président Blaise Compaoré quand on évoque le nom de son frère d’armes, ami, compagnon et témoin de mariage, le capitaine Thomas Sankara.
L’actuel président du Faso reste invariable quand des journalistes l’interrogent au sujet de l’assassinat du dernier président de la Haute-Volta et du premier président du Burkina Faso.
Sur les ondes de Radio France internationale, le président Blaise Compaoré tenait ces propos le 30 juin 2001.
Les exigences de l’Etat de droit
"C’est bien beau de toujours appuyer sur le dossier Sankara, sur tel ou tel aspect justement de ce dossier. Mais il ne faut pas oublier que la justice a certainement beaucoup de dossiers. Le ministre de la Défense n’est pas là pour traiter des questions de justice, il y a certainement d’autres préoccupations.
Mais il reste que pour tout ce qui concerne tous les dossiers judiciaires, je peux vous assurer qu’il n’y aura pas d’obstacles à ce qu’un dossier suive son cours de bout en bout dans notre pays.
C’est l’Etat de droit que nous avons choisi et nous entendons assumer nos responsabilités en la matière".
L’Etat de droit a des exigences. Celles des vérités politiques. Le président du Faso Blaise Compaoré peine à persuader les Burkinabè. Le dossier de son témoin de mariage lui colle à la peau. Et plus il parle, plus il se dévoile.
Ce ne sont non plus ses conseillers politiques qui peuvent le tirer de l’affaire. Ils le conduisent dans des errements politiques et dans des déclarations compromettantes.
Quand on revisite le dossier du président Sankara, vingt ans après son assassinat, on constate que les thérapies pour tourner la page douloureuse de l’arrêt brutal de la révolution démocratique et populaire n’arrivent pas à guérir le mal.
Le mal est profond. Très profond. Ni un charlatan puissant ni un guérisseur de classe exceptionnel ne peut sauver le régime du président Compaoré.
L’exemple le plus illustratif est la célébration avec des moyens techniques et financiers incalculables des "20 de renaissance démocratique". L’intitulé de la célébration pose un problème d’ordre politique.
La vie constitutionnelle du Burkina Faso date du 2 juin 1991. Si c’est cette date qui marque l’ère de la démocratisation de notre pays, les militants du parti au pouvoir ont perdu tout sens de calcul.
Le simple calcul mental montre que les idéologues du Congrès pour la démocratie et le progrès (s’ils sont écoutés) ont voulu mener à bateau le peuple burkinabè.
On pouvait faire l’économie de cette aberration politique qui dénote des tentatives de masturbation des Burkinabè. On peut convenir que les stratèges de Blaise Compaoré voulaient empêcher l’effet ravageur de l’année Thomas Sankara.
Cependant, les maladresses de l’entourage du président du Faso ont donné plus d’éclat à la commémoration des 20 ans de l’assassinat du président Thomas Sankara.
Le refus des salles sollicitées par le comité d’organisation de l’année Thomas Sankara a suscité de l’indignation au sein des masses laborieuses. La censure du spot télé au niveau de la télévision nationale a fini par persuader les Burkinabè des intentions du pouvoir. Or, les politologues savent que toute censure produit l’effet contraire du résultat escompté.
Elle crée un sentiment de révolte chez le citoyen qui voit l’un de ses droits élémentaires bafoué. La réaction du peuple burkinabè a été à la hauteur du mépris des princes de nos jours.
La chaleur humaine du cimetière
Malgré l’arsenal financier, technique et médiatique utilisés, la mayonnaise de la célébration du coup d’Etat du 15 octobre 1987 n’a pas été digeste.
Les festivités des 20 ans du pouvoir de Blaise Compaoré ont été un échec cuisant sur le plan de la mobilisation de la conscience citoyenne.
Des Burkinabè ont préféré la chaleur humaine qui se dégageait de l’Atelier théâtre du Burkina aux salles feutrées de Ouaga 2000. Les Burkinabè ont préféré les bousculades autour de la tombe du président
Thomas Sankara au cadre forcé du rond-point des Nations unies avec ses voies barrées. Ce n’est pas une invention de journaliste. C’est la triste réalité. Les garants de la sécurité de la république peuvent renseigner le président du Faso.
Ceux qui étaient à toutes les manifestations en tenue civile sont les témoins privilégiés du président Compaoré. Entraînant une partie des Burkinabè dans des concerts budgétivores et des marches de soutien semblables aux temps de partis uniques, l’irruption de Blaise Compaoré à la présidence du Faso n’est plus un effet de hasard. Elle conforte la thèse d’un crime prémédité avec un cerveau.
La célébration des 20 ans est une gaffe politique qui a des rebondissements sur le plan judiciaire. La plainte déposée par la veuve Sankara et ses deux enfants peut changer de qualification.
On parlait de contre ’’X’’ en supposant que les auteurs du crime n’étaient pas encore connus. Maintenant que les militants du CDP ont dit haut et fort que le 15 octobre 2007 marque les 20 ans de prise de pouvoir de Blaise Compaoré, et par parallélisme de forme, les 20 ans de l’assassinat du président Thomas Sankara, on ne doit plus chercher de midi à 14 heures.
Le parti au pouvoir désigne son champion Blaise Compaoré comme responsable du drame du 15 octobre 1987. Les Burkinabè doivent tirer toutes les conséquences de droit. Les propos de maladie de Blaise Compaoré lors du crime ne résistent pas à la vérité des faits.
Le plus choquant dans la célébration des 20 ans du coup d’Etat du régime Compaoré c’est qu’elle n’est pas juridique. Chaque organisation ou corporation peut décider de festoyer une date dans la légalité républicaine.
Mais nous pensons que ceux qui chantent les louanges du patron de Kosyam ont renié certaines valeurs traditionnelles burkinabè. Le jour de l’assassinat de tout burkinabè, ne parlons pas d’un chef d’Etat, est un deuil. Il se vit dans le recueillement. Ceux qui ont voulu faire ombrage aux activités de l’année ont bafoué le sens du respect des morts du 15 octobre 1987.
Seul à répondre
Pourquoi le régime Compaoré avait jugé bon d’associer les forces morales et traditionnelles le 30 mars 2001 pour demander "pardon" au nom de l’Etat des violences politiques et des crimes politiques de 1960 à 2001 ?
De nos jours, certains responsables religieux et coutumiers doivent avoir le moral en berne en assistant impuissants aux festivités des 20 ans du régime de Blaise Compaoré.
Le 15 octobre 1987, des Burkinabè, un révolutionnaire, le premier magistrat burkinabè ont été abattus par un commando militaire. C’est un deuil. Un deuil qui dépasse les frontières de notre pays. Des citoyens du monde et des hommes et femmes ont traversé des continents pour marquer d’une pierre blanche cette page noire de l’histoire politique de notre pays.
Comme pour leur montrer la nature cynique du régime de la quatrième république, on leur donne à voir des concerts à prix d’or, des marches de soutien. Le président du Faso, Blaise Compaoré, ne fait qu’augmenter ses péchés. Le listing est très fastidieux d’en dénombrer.
Il aurait pu éviter cette dérive politique pour rester en harmonie avec sa conscience et en phase avec l’aspiration d’une partie de son peuple. Nous disons simplement que le président Blaise Compaoré est le seul qui a vécu des expériences exceptionnelles de vie avec le président Sankara.
S’il n’avait rien à voir avec l’assassinat de son témoin de mariage, il aurait pu se repentir du vivant des parents de Thomas Sankara. Joseph Sambo et Marguerite Sankara ont rejoint leur fils à l’au-delà sans avoir vu le président Blaise Compaoré.
En s’associant aux vingt ans de renaissance démocratique, le président Compaoré se ferme progressivement les portes du pardon. Cela ne pouvait être autrement. Quand on est entouré de conseillers qui ne raisonnent que pour l’estomac, on prend de mauvaises décisions.
La célébration des 20 ans de son arrivée au pouvoir présente les signes de faiblesse du régime. Elle montre une volonté de banalisation de la vie humaine. La mort n’a plus de sens. Même celle d’un ami et compagnon d’armes. L’essentiel est le maintien du pouvoir politique vaille que vaille.
Les assassinats ou les complices de l’assassinat du président Thomas Sankara ont été des chevilles ouvrières de la célébration d’un crime politique 20 ans après. A l’heure du bilan, Blaise Compaoré sera le seul à répondre.
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Pascal Ziguebila
Source : Le Libérateur N°42 du 20 oct. au 04 nov. 2007
Entre réjouissance avec l’actuel président burkinabè, Blaise Compaoré, et recueillement sur la tombe du premier président du Burkina Faso, Thomas Sankara, le peuple conscient burkinabè se démarque.
Il va au cimetière des martyrs de la Révolution du 4 août 1983 pour passer des heures d’émotions avec le président Thomas Sankara.
Des Burkinabè viennent d’envoyer un signal fort au président Compaoré. Ils mettent également à nu les tares de sa gestion politique. Regarder vers l’avenir.
C’est un credo du président Blaise Compaoré quand on évoque le nom de son frère d’armes, ami, compagnon et témoin de mariage, le capitaine Thomas Sankara.
L’actuel président du Faso reste invariable quand des journalistes l’interrogent au sujet de l’assassinat du dernier président de la Haute-Volta et du premier président du Burkina Faso.
Sur les ondes de Radio France internationale, le président Blaise Compaoré tenait ces propos le 30 juin 2001.
Les exigences de l’Etat de droit
"C’est bien beau de toujours appuyer sur le dossier Sankara, sur tel ou tel aspect justement de ce dossier. Mais il ne faut pas oublier que la justice a certainement beaucoup de dossiers. Le ministre de la Défense n’est pas là pour traiter des questions de justice, il y a certainement d’autres préoccupations.
Mais il reste que pour tout ce qui concerne tous les dossiers judiciaires, je peux vous assurer qu’il n’y aura pas d’obstacles à ce qu’un dossier suive son cours de bout en bout dans notre pays.
C’est l’Etat de droit que nous avons choisi et nous entendons assumer nos responsabilités en la matière".
L’Etat de droit a des exigences. Celles des vérités politiques. Le président du Faso Blaise Compaoré peine à persuader les Burkinabè. Le dossier de son témoin de mariage lui colle à la peau. Et plus il parle, plus il se dévoile.
Ce ne sont non plus ses conseillers politiques qui peuvent le tirer de l’affaire. Ils le conduisent dans des errements politiques et dans des déclarations compromettantes.
Quand on revisite le dossier du président Sankara, vingt ans après son assassinat, on constate que les thérapies pour tourner la page douloureuse de l’arrêt brutal de la révolution démocratique et populaire n’arrivent pas à guérir le mal.
Le mal est profond. Très profond. Ni un charlatan puissant ni un guérisseur de classe exceptionnel ne peut sauver le régime du président Compaoré.
L’exemple le plus illustratif est la célébration avec des moyens techniques et financiers incalculables des "20 de renaissance démocratique". L’intitulé de la célébration pose un problème d’ordre politique.
La vie constitutionnelle du Burkina Faso date du 2 juin 1991. Si c’est cette date qui marque l’ère de la démocratisation de notre pays, les militants du parti au pouvoir ont perdu tout sens de calcul.
Le simple calcul mental montre que les idéologues du Congrès pour la démocratie et le progrès (s’ils sont écoutés) ont voulu mener à bateau le peuple burkinabè.
On pouvait faire l’économie de cette aberration politique qui dénote des tentatives de masturbation des Burkinabè. On peut convenir que les stratèges de Blaise Compaoré voulaient empêcher l’effet ravageur de l’année Thomas Sankara.
Cependant, les maladresses de l’entourage du président du Faso ont donné plus d’éclat à la commémoration des 20 ans de l’assassinat du président Thomas Sankara.
Le refus des salles sollicitées par le comité d’organisation de l’année Thomas Sankara a suscité de l’indignation au sein des masses laborieuses. La censure du spot télé au niveau de la télévision nationale a fini par persuader les Burkinabè des intentions du pouvoir. Or, les politologues savent que toute censure produit l’effet contraire du résultat escompté.
Elle crée un sentiment de révolte chez le citoyen qui voit l’un de ses droits élémentaires bafoué. La réaction du peuple burkinabè a été à la hauteur du mépris des princes de nos jours.
La chaleur humaine du cimetière
Malgré l’arsenal financier, technique et médiatique utilisés, la mayonnaise de la célébration du coup d’Etat du 15 octobre 1987 n’a pas été digeste.
Les festivités des 20 ans du pouvoir de Blaise Compaoré ont été un échec cuisant sur le plan de la mobilisation de la conscience citoyenne.
Des Burkinabè ont préféré la chaleur humaine qui se dégageait de l’Atelier théâtre du Burkina aux salles feutrées de Ouaga 2000. Les Burkinabè ont préféré les bousculades autour de la tombe du président
Thomas Sankara au cadre forcé du rond-point des Nations unies avec ses voies barrées. Ce n’est pas une invention de journaliste. C’est la triste réalité. Les garants de la sécurité de la république peuvent renseigner le président du Faso.
Ceux qui étaient à toutes les manifestations en tenue civile sont les témoins privilégiés du président Compaoré. Entraînant une partie des Burkinabè dans des concerts budgétivores et des marches de soutien semblables aux temps de partis uniques, l’irruption de Blaise Compaoré à la présidence du Faso n’est plus un effet de hasard. Elle conforte la thèse d’un crime prémédité avec un cerveau.
La célébration des 20 ans est une gaffe politique qui a des rebondissements sur le plan judiciaire. La plainte déposée par la veuve Sankara et ses deux enfants peut changer de qualification.
On parlait de contre ’’X’’ en supposant que les auteurs du crime n’étaient pas encore connus. Maintenant que les militants du CDP ont dit haut et fort que le 15 octobre 2007 marque les 20 ans de prise de pouvoir de Blaise Compaoré, et par parallélisme de forme, les 20 ans de l’assassinat du président Thomas Sankara, on ne doit plus chercher de midi à 14 heures.
Le parti au pouvoir désigne son champion Blaise Compaoré comme responsable du drame du 15 octobre 1987. Les Burkinabè doivent tirer toutes les conséquences de droit. Les propos de maladie de Blaise Compaoré lors du crime ne résistent pas à la vérité des faits.
Le plus choquant dans la célébration des 20 ans du coup d’Etat du régime Compaoré c’est qu’elle n’est pas juridique. Chaque organisation ou corporation peut décider de festoyer une date dans la légalité républicaine.
Mais nous pensons que ceux qui chantent les louanges du patron de Kosyam ont renié certaines valeurs traditionnelles burkinabè. Le jour de l’assassinat de tout burkinabè, ne parlons pas d’un chef d’Etat, est un deuil. Il se vit dans le recueillement. Ceux qui ont voulu faire ombrage aux activités de l’année ont bafoué le sens du respect des morts du 15 octobre 1987.
Seul à répondre
Pourquoi le régime Compaoré avait jugé bon d’associer les forces morales et traditionnelles le 30 mars 2001 pour demander "pardon" au nom de l’Etat des violences politiques et des crimes politiques de 1960 à 2001 ?
De nos jours, certains responsables religieux et coutumiers doivent avoir le moral en berne en assistant impuissants aux festivités des 20 ans du régime de Blaise Compaoré.
Le 15 octobre 1987, des Burkinabè, un révolutionnaire, le premier magistrat burkinabè ont été abattus par un commando militaire. C’est un deuil. Un deuil qui dépasse les frontières de notre pays. Des citoyens du monde et des hommes et femmes ont traversé des continents pour marquer d’une pierre blanche cette page noire de l’histoire politique de notre pays.
Comme pour leur montrer la nature cynique du régime de la quatrième république, on leur donne à voir des concerts à prix d’or, des marches de soutien. Le président du Faso, Blaise Compaoré, ne fait qu’augmenter ses péchés. Le listing est très fastidieux d’en dénombrer.
Il aurait pu éviter cette dérive politique pour rester en harmonie avec sa conscience et en phase avec l’aspiration d’une partie de son peuple. Nous disons simplement que le président Blaise Compaoré est le seul qui a vécu des expériences exceptionnelles de vie avec le président Sankara.
S’il n’avait rien à voir avec l’assassinat de son témoin de mariage, il aurait pu se repentir du vivant des parents de Thomas Sankara. Joseph Sambo et Marguerite Sankara ont rejoint leur fils à l’au-delà sans avoir vu le président Blaise Compaoré.
En s’associant aux vingt ans de renaissance démocratique, le président Compaoré se ferme progressivement les portes du pardon. Cela ne pouvait être autrement. Quand on est entouré de conseillers qui ne raisonnent que pour l’estomac, on prend de mauvaises décisions.
La célébration des 20 ans de son arrivée au pouvoir présente les signes de faiblesse du régime. Elle montre une volonté de banalisation de la vie humaine. La mort n’a plus de sens. Même celle d’un ami et compagnon d’armes. L’essentiel est le maintien du pouvoir politique vaille que vaille.
Les assassinats ou les complices de l’assassinat du président Thomas Sankara ont été des chevilles ouvrières de la célébration d’un crime politique 20 ans après. A l’heure du bilan, Blaise Compaoré sera le seul à répondre.
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Pascal Ziguebila
Source : Le Libérateur N°42 du 20 oct. au 04 nov. 2007
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