Concertations Nationales comme réponse à la crise post-électorale en République Démocratique du Congo (RDC). Les résultats des élections présidentielle et législatives du 28 novembre 2011 ne sont pas crédibles selon le rapport de la MOE UE du 29 mars 2012.
Que comptent faire l’UE et les Etats-membres pour promouvoir la démocratie et un Etat de droit dans un Congo gouverné par des dirigeants illégitimes ?
DECLARATION DES MEMBRES DES FORCES VIVES DE LA DIASPORA CONGOLAISE DE BELGIQUE
La République démocratique du Congo, notre Nation est en péril et présente le sombre tableau d’un État en pleine désintégration.
L’absence et/ou la défaillance de l’État - due à la fragilité, à l’illégitimité des institutions et au manque de volonté politique de réformer en profondeur les services de sécurité congolais - plonge l’Est de la République démocratique du Congo dans l’insécurité généralisée, allongeant presque tous les jours la longue liste des victimes causées par les conflits armés qui ravagent le pays depuis deux décennies.
Une des conséquences de ces guerres à basse intensité est que notre pays est devenu la capitale mondiale du viol des femmes, touchant même les vieillards, les hommes et les enfants de bas âge. L’Est de la République démocratique du Congo devient le théâtre des tueries et des massacres à grande échelle forçant des centaines de milliers de nos populations au déplacement et à l’exil.
Sur le plan économique, malgré la croissance conjoncturelle macro-économique, plusieurs rapports d’experts nationaux et internationaux classent la République démocratique du Congo, pays non libre économiquement, parmi les États les moins performants du monde et où il ne fait pas bon vivre.
Ces rapports mettent en exergue le pillage systématique des ressources naturelles favorisé par certaines autorités politiques et militaires congolaises, en complicité avec des firmes étrangères sans scrupule.
La traque taxatoire des opérateurs économiques et la corruption quasi institutionnalisée entraînant la fuite des capitaux vers l’étranger, rendent l’environnement des affaires précaire et hostile aux investissements étrangers par l’apport des capitaux frais, nécessaires à la création de l’emploi en faveur du relèvement du pouvoir d’achat du congolais dont le revenu moyen s’élève à moins d’un dollar US par jour.
La situation sociale reste au bord de l’implosion. La desserte en besoins sociaux de base comme l’eau et l’électricité est quasi nihil. L’éducation, l’habitat, le transport, le droit au salaire et à une retraite dignes, la sécurité sociale et les soins de santé ne sont pas la priorité des gouvernants dont le seul objectif reste l’enrichissement personnel illicite.
L’insécurité juridique et l’indépendance judiciaire ne sont presque plus garanties.
L’indépendance du pouvoir judiciaire est devenue un principe vidé de toute sa substance. La justice, infantilisée et instrumentalisée par le pouvoir exécutif, fonctionne à la carte et ne joue plus son rôle démocratique républicain de lutter contre l’impunité, ni de réguler l’ordre social.
La détérioration croissante de la situation des droits de l’homme, dans l’ensemble du pays, reste des plus préoccupantes. La liberté de la presse est loin d’être garantie, les activistes des droits de l’Homme et les opposants sont constamment traqués et subissent les répressions des services de sécurité inféodés au pouvoir politique.
Depuis la tenue des élections congolaises de 2006 et de 2011, dans des conditions qui n’appellent aucun commentaire, la diaspora congolaise, forte de sa contribution financière estimée selon les experts de la Banque Mondiale à 1,1 milliard US en 2010, s’érige en une véritable force sociale et politique du changement qui ne cesse d’exprimer les revendications d’une population congolaise dont les libertés et droits fondamentaux sont constamment bafoués par les gouvernants.
D’où l’organisation régulière des manifestations d’indignation contre le régime congolais dans plusieurs villes en dehors du Congo.
Le 28 novembre 2011, le peuple congolais s’est donc mobilisé comme un seul homme pour prendre son destin en main. Il s’est dignement acquitté de son devoir civique en votant essentiellement pour l’alternance politique.
Un vote qui a poussé la journaliste belge, Colette Braeckman, étiquetée pourtant proche du régime de Kabila et présente à Kinshasa durant les scrutins, à tirer la conclusion suivante :
« La quatrième conclusion, sans préjuger du résultat arithmétique, c’est que les Congolais ont fait usage du plus élémentaire des droits démocratiques : ils ont sanctionné leurs élus. Puni les députés qui se sont votés des indemnités de 6000 dollars par mois en oubliant leurs électeurs.
Congédié bien des arrogants qui croyaient qu’il leur suffirait de distribuer quelques T-shirts en dernière minute. Ils ont adressé un message sévère à un gouvernement -en principe de centre gauche !- qui a oublié le social et permis à la gangrène de la corruption de s’étendre.
Dans de larges couches de la population, le discours de Tshisekedi a fait mouche (…) Le vieux leader a fait mouche parce que, de manière plus incantatoire que chiffrée, il a promis le changement.
L’opposant historique a su catalyser la colère des sans voix, des sans travail, des sans pain, des sans école ; il a bénéficié d’un vote-sanction, dont la sévérité doit faire réfléchir tous ceux qui aspirent à garder ou à prendre le pouvoir. » (Le blog de Colette, 29 novembre 2011)
A la surprise générale et à l’antipode des premiers constats de Madame Braeckman, notamment, la manipulation planifiée et orchestrée des compilations des bulletins de vote, des calculs et des vérifications de cohérence électoraux ont produit des résultats électoraux qui n’étaient conformes ni à la VERITE ni à la JUSTICE en déclarant élus un président et plusieurs députés ne disposant pas de légitimité politique suffisante pour diriger le pays. Cela a rompu toute cohésion nationale utile à l’évolution apaisée et pacifique du pays.
Dans ces conditions de crise de légitimité, il est dès lors difficile que les gouvernés (les populations congolaises) apportent leur soutien et appuient l’action politique des gouvernants. Il s’installe, par conséquent dans ce cas, la déflation du pouvoir politique.
Le corollaire de cette crise de confiance est que depuis la tenue des élections de novembre 2011, Monsieur Joseph Kabila et sa famille politique ne gouvernent plus par l’autorité et la légitimité qu’aurait dû leur conférer leur pouvoir au moyen d’un contrat social électoral crédible et transparent, mais bien par le recours aux moyens coercitifs et abusifs tels que : la monopolisation des médias, les répressions policières illégales des manifestations populaires contre le régime, les intimidations, les arrestations arbitraires, la corruption généralisée, le clientélisme et l’ethno-régionalisme.
Pour rappel, les fraudes électorales étaient tellement énormes et grossières que le Centre Jimmy Carter, la MOE-UE, l’Eglise catholique, l’ONG la Voix des sans Voix de Floribert Chebeya, le CONG-SADC avaient stigmatisé l’absence de crédibilité du processus électoral congolais.
C’est ainsi que l’Eglise catholique, forte de ses 30.000 observateurs, avait même pris le soin d’inviter la CENI à publier des résultats conformes à la VERITE et la JUSTICE.
Les résultats électoraux proclamant Monsieur Joseph Kabila, vainqueur des élections au détriment de son principal challenger Monsieur Etienne Tshisekedi, ont exacerbé les tensions latentes entre les différentes couches sociales et politiques et favorisé l’explosion de la violence par une exponentiation des groupes armés à l’est de la République démocratique du Congo.
Cette tension politique pourrait, selon le CONG-SADC, en cas d’incidents violents, entraîner un « désastre » pour la SADC, l’Afrique Centrale et l’Afrique tout entière. Cette situation a dès lors servi notamment d’alibi à la rébellion M23, soutenue par le Rwanda et l’Ouganda, pour mener une ultime guerre contre notre pays dans le nord Kivu depuis mai 2012.
En vue de prévenir une escalade de violence pouvant dégénérer en une la guerre civile généralisée, les observateurs internationaux en ont appelé soit à revoter soit à dialoguer pour réconcilier le corps électoral avec lui-même et par là-même doter les gouvernants de l’adhésion populaire nécessaire à l’exercice de leurs fonctions en toute sérénité. (cfr Centre Carter, MOE-UE etc.)
C’est cela même la genèse, le fondement et la justification du dialogue pour la cohésion dont il est question à ce jour.
Attendu que Monsieur Joseph Kabila dans son adresse à la Nation déclarait ceci : « Comme Etat et comme Nation, hier comme aujourd’hui, face à l’épreuve de la guerre, la cohésion nationale a été et demeure la condition de notre survie, le bouclier le plus sûr contre toute velléité de balkanisation et de destruction » ;
Attendu qu’en date du 15 décembre 2012, devant les 2 chambres réunies en Congrès, Monsieur Joseph Kabila a solennellement pris l’engagement d’organiser au début de l’année 2013 un cadre pour les échanges entre les différentes les forces vives de la Nation
;Attendu que la Guerre à l’Est du Congo n’est pas un épiphénomène
;Attendu que les forces vives de la diaspora congolaise attendent un dialogue conforme au prescrit de l’Accord-cadre signé le 24 février 2013 à d’Addis-Abeba et à la Résolution 2098 du Conseil de Sécurité du 27 mars 2013
;Attendu qu’il ressort des engagements souscrits par le gouvernement de Monsieur Kabila de se conformer aux prescrits de l’Accord-cadre signé le 24 février 2013 à d’Addis-Abeba et à la Résolution 2098 du Conseil de Sécurité du 27 mars 2013 et que ceux-ci exigent :
« la tenue, avec les bons offices de l’Envoyée Spéciale et du Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies, d’un dialogue politique transparent et sans exclusive entre toutes les parties prenantes congolaises en vue de favoriser la réconciliation et la démocratisation et encourager l’organisation d’élections provinciales et locales crédibles et transparentes ».
;Attendu qu’à la surprise générale, Mr Joseph Kabila a, de manière unilatérale par plusieurs ordonnances : convoqué « ses concertations nationales »
; décidé de sa composition, de sa représentativité en privilégiant naturellement sa famille politique, de sa forme et des thématiques à débattre; nommé les principaux animateurs en prenant à contrepied l’esprit et la lettre de l’Accord-cadre ainsi que de la Résolution 2098 du Conseil de sécurité des Nations Unies
;Eu égard à l’adage juridique « fraus omnia corrumpit »,
Nous, membres des forces vives de la diaspora constatons que notre pays, la République démocratique du Congo, confrontée à une double crise légitimité et de « Leadership », se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins pour enfin se réconcilier avec ses filles et ses fils dans un dialogue réel, franc et sans faux-semblant.
Nous sommes conscients, que le processus de mise en place d’un cadre de dialogue autour de la cohésion nationale est une opportunité inédite et décisive qui pourrait être salutaire pour la République démocratique du Congo lorsqu’on y va dans un souci d’écrire tous ensemble les plus belles pages de l’avenir du Congo.
Car beaucoup de points essentiels de la vie sociopolitique, économique, identitaire et sécuritaire de la RD Congo qui y seront débattus, vont probablement déterminer la suite des événements.
Nous sommes conscients, pour le bon fonctionnement des institutions de l’Etat et de la vie dans la société congolaise en crise, que le mérite d’un dialogue est déjà de constater qu’il y a un problème, qu’il existe une crise profonde qui menace la cohésion nationale.
Et que ce constat amène une majorité de la population à dire qu’il faut dialoguer, tout en évitant que ce dialogue soit perverti, politiquement instrumentalisé au lieu d’aboutir à renforcer la cohésion nationale autour des valeurs républicaines fondatrices d’un Etat de droit démocratique.
Nous estimons que la mise en place du dialogue autour de la cohésion nationale doit être dictée par une volonté réelle de changement et non pour des raisons politiciennes et qu’il faudrait alors éviter que ce dialogue écarte sciemment tel ou tel autre groupe social ou politique en étant le plus inclusif possible avec des objectifs à atteindre clairs.
Nous estimons qu’afin de donner une crédibilité à la structure chargée de mener le dialogue à mettre en place, la représentativité des délégués : Pouvoir - Opposition - Société civile - Communautés ethniques - Diaspora - Experts, la composition, le fonctionnement et l’indépendance de la structure du Dialogue doivent se faire par consensus avec une large unanimité et dans un climat apaisé, avec un minimum de confiance réciproque et exempte de terreur, intimidations ou manipulations politiciennes.
Nous sommes d’avis que la structure du dialogue doit être appuyée, suivant les commissions retenues ou les matières à traiter décidées par consensus, par des experts qui leur permettront de recentrer les débats sur l’essentiel.
Mais si ce dialogue pour la cohésion nationale est institué pour des raisons politiciennes ou pour le partage du pouvoir, il y a fort à parier que l’on va se diriger contre un mur et se perdre dans les conciliabules stériles qui nous ramèneraient à l’époque des accords de Pretoria et de Sun City en 2002, ayant abouti à la formule « 1 + 4 = 0 ».
Nous attirons l’attention sur le fait que la méthodologie de travail et la valeur (juridique) des résolutions qui en sortiraient seront des éléments cruciaux sur lesquels il faudrait faire appel à la volonté de toutes les parties en présence de ne privilégier que l’intérêt collectif que l’ensemble du peuple congolais pourrait en tirer.
De plus, il faudrait faire en sorte que le dialogue se déroule librement, sans se transformer en un ring politique où tous les coups sont permis.
De la sorte, le dialogue entre les différentes forces vives congolaises organisé en tenant compte de ces points d’attention représente un énorme potentiel de jouer un rôle déterminant dans le processus de réconciliation nationale, de cohésion nationale et, de reconstruction sociale et politique.
Le dialogue de la cohésion nationale peut devenir un enjeu majeur de la suite de la vie sociopolitique du Congo. D’où la nécessité d’organiser un dialogue inclusif et républicain entre les différentes forces vives congolaises, sous la supervision de la communauté internationale comme le prévoit l’accord-cadre ».
Nous réaffirmons notre détermination à instaurer au Congo un ETAT de DROIT où règnent la primauté du droit, le respect de la propriété privée, le respect du caractère sacré de la vie humaine, où les services de sécurité et renseignements ne sont pas des organes de répression, où règnent la liberté d’expression et de mouvement ; où est garantie l’indépendance du pouvoir judiciaire ;
Nous, les forces vives de la diaspora congolaise de Belgique posons comme préalables à toute participation au dialogue, ce qui suit :
Sous les auspices de l’envoyée Spéciale et du Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies, Mme Mary Robinson, la mise sur pied d’une commission préparatoire du dialogue national composée des délégués de la MP, l’Opposition parlementaire et extra-parlementaire, la société civile, de la diaspora et des confessions religieuses, les experts ;
Le respect de l’esprit et la lettre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba, de la Résolution 2098 du Conseil de sécurité du 27 mars 2013 ;
L’opposabilité à tous des résolutions, décisions et recommandations du Dialogue Inclusif car Mr Joseph Kabila ne peut être juge et partie ;
Une facilitation africaine neutre ;
La mise sur pied d’un mécanisme de suivi animé aussi bien par les parties prenantes que par la communauté internationale (Secrétariat Général de l’ONU) ;
La sécurisation des délégués au dialogue, particulièrement ceux issus de la diaspora ;
La levée sans condition de l’interdiction des manifestations publiques sur toute l’étendue de la République;
La libération sans condition des prisonniers politiques ;
La levée de la mesure de résidence surveillée qui frappe Monsieur Etienne Tshisekedi ;
L’engagement par Mr Joseph Kabila et sa famille politique de ne pas toucher à l’article 220 de la constitution ;
La décrispation de la tension politique bipolarisée entre l’Opposition rangée principalement autour de Monsieur Etienne Tshisekedi et la majorité présidentielle constellée autour de Monsieur Joseph Kabila ;
Les résolutions qui sortiraient du dialogue organisé conformément aux recommandations susmentionnées soient les plus objectives possibles et opposables à tous avec des engagements clairs, signés par Monsieur Kabila et toutes les parties prenantes au dialogue, en termes de :
- respect de la Constitution et l’interdiction de modifier les articles immuables ;
- mise en place d’un processus cohérent, pragmatique et transparent des réformes des services de sécurité ;
- mise en place d’un nouveau processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR) drastique et crédible qui tienne compte des erreurs du passé, en évitant d’intégrer notamment les combattants des groupes armés qualifiés de forces négatives par les différents rapports d’experts des Nations Unies ;
- promotion de la bonne gouvernance, de l’Etat de droit et de la démocratie participative ;
- réforme profonde de l’appareil judiciaire, la mise sur pied de la Cour Constitutionnelle non politisée (devant succéder à la CSJ), la lutte contre l’impunité, l’instauration d’une Cour pénale spéciale pour la RDC ;
- réforme des institutions d’appui à la démocratie et Etat de droit (CENI, Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de Communication : CSAC).
- respect et promotion des droits fondamentaux des citoyens et de la liberté de presse
- engagement politique clair en faveur de l’obligation de rendre des comptes sur la gestion publique auprès des institutions ad hoc.
En attendant que TOUS les préalables et les recommandations susmentionnés soient rencontrés, NOUS rejetons toute participation à la formule actuelle des concertations convoquées par Monsieur Joseph Kabila aussi longtemps qu’elles ne se conformeront pas à l’esprit et à la lettre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba ainsi qu’à la résolution 2098 du Conseil de sécurité des nations unies.
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Pour les forces vives de la Diaspora
Me Laurent Mutambayi, LL.M Jean-Jacques Wondo Omanyundu
Juriste Politologue et Criminologue
Fait à Bruxelles, le samedi 15 août 2013
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