"Les Multinationales sont au cœur de ce conflit"
L’artiste musicien congolais Ray Lema, qui fait l’honneur de la RD Congo sur le plan mondial, affirme dans un entretien avec le correspondant du Potentiel en France Robert Kongo que « le conflit dans l’Est du Congo est voulu et entretenu, les multinationales sont au cœur de ce conflit qui sert la cause de l’Occident ».
Comment analysez-vous la situation en RD Congo, attaquée par les rebelles soutenus par le Rwanda et l’Ouganda dans sa partie orientale ?
C’est une suite logique de la colonisation. L’Occident a un train de vie qui dépend de nos matières premières. Nous regorgeons de richesses minières et forestières d’une valeur inestimables.
C’est notre malheur : le Diamant, l’Or, le Cuivre, le Colombo Tantalite (Coltan), la Beauxite, le Fer, le Manganèse, le Charbon, le Pétrole, le Zinc, l’Argent, le Gaz méthane, le Schistes bitumeux, le Cobalt…
Il n’est pas étonnant que nous soyons enviés par nos voisins et convoités par les grandes puissances du monde.
Le conflit dans l’Est du Congo est voulu et entretenu. Les multinationales sont au cœur de ce conflit qui sert la cause de l’Occident. C’est un secret de polichinelle.
A vous entendre, les Congolais ne devraient donc pas compter sur l’Occident pour résoudre le conflit dans l’Est du Congo ?
Il faut comprendre que l’Occident n’est pas là pour résoudre nos problèmes. Je répète avec force que l’Occident tient à son train de vie qui dépend des richesses de notre sol et de notre sous-sol.
Par exemple, si l’Assemblée nationale congolaise votait une loi visant à interdire, encore qu’elle en ait les moyens, l’exploitation du Coltan, métal stratégique dans le secteur de l’électronique, la situation serait grave pour l’Occident.
Le Congo est aujourd’hui la source la plus importante du Coltan pour l’Occident, loin devant le Niger et l’Australie. Les occidentaux sont au Congo pour leurs propres intérêts. Ils ne sont pas là pour nous aider à pacifier l’Est du pays.
La Monusco, cette armée des Nations Unies déployée au Congo, et qui a coûté des sommes considérables, illustre jusqu’au scandale l’impuissance et la lâcheté de la communauté internationale.
Depuis le début de ce conflit, cette structure de l’ONU n’a rien changé au Congo.
Si l’on compte le nombre de Congolais dont la mort est liée à la guerre au Kivu, qui dure depuis 16 ans, sous d’autres cieux, cela s’appellerait holocauste.
A une certaine époque, vous avez été interdit du Congo. Pourquoi ?
Quand je terminais ma mission en tant que directeur de musique du Ballet national, la présidence zaïroise, à l’époque, a voulu faire un opéra à la gloire de Mobutu.
Par principe, je ne pouvais pas chanter les louanges de Mobutu .
Conséquence : j’ai été dépouillé de tous mes biens et je suis retourné vivre dans ma famille. Quelque temps après, en 1979, j’ai eu la chance de recevoir une invitation de Rockefeller Foundation. Je suis donc parti aux Etats-Unis.
Lors d’une émission sur une antenne de radio africaine à Paris, vous débattiez sur la situation politique en Afrique. Etes-vous un artiste engagé ?
Je suis un artiste très engagé pour la reconnaissance de la culture africaine. Notre culture a été prise en otage depuis des lustres. J’essaie de militer pour que nous devenions des personnes libres dans la tête.
Pour ce faire, il faut que nous réhabilitions notre culture car elle est un atout de développement et un facteur d’identité et de cohésion sociale. Il est donc temps que l’Afrique se reconstruise, au sens large du terme, pour donner une meilleure image d’elle-même.
L’avenir de nos enfants, petits enfants… en dépend.
La gouvernance des pays africains depuis les indépendances est tant décriée. Une autre Afrique est-elle possible, selon vous ?
Absolument. Rien dans la vie n’est statique car il n y a pas une nuit éternelle ni un jour éternel. Je pense sincèrement que l’Afrique s’éveillera. Je parle beaucoup avec des jeunes africains. Ils sont dans les entreprises et ils sont créatifs. Ils pensent tous que l’Occident s’essouffle.
Par contre , en Afrique, nous avons des potentialités pour assurer notre développement.
Il nous faut sortir de cette passivité et ne pas nous contenter de regarder l’Occident comme un modèle.
Je crois en l’Afrique qui reste un continent d’avenir ; un continent au potentiel considérable. Nous avons des génies en Afrique. Je dis que demain, c’est l’Afrique.
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Robert Kongo
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