Le général en exil Kayumba Nyamwasa lors d'une comparution devant une cour de Johannesburg, le 21 juin 2012. Reuters/Siphiwe Sibeko
C’est une exclusivité RFI : depuis un an et demi, la justice
française demande en vain à l’Afrique du Sud l’autorisation d’interroger
le général rwandais en exil Kayumba Nyamwasa dans le cadre de l’enquête
sur l’attentat du 6 avril 1994 au Rwanda.
Cet ancien homme fort du FPR,
le Front patriotique rwandais, a affirmé à RFI en juillet dernier
détenir des informations susceptibles d’impliquer le président Paul
Kagame dans cette attaque et qu’il était prêt à en parler à un juge
français.
Le juge antiterroriste Marc Trévidic a rédigé en mars 2012 une
commission rogatoire internationale afin de pouvoir interroger le
général Kayumba Nyamwasa, ancien chef d’état-major de l’armée rwandaise,
aujourd’hui en exil en Afrique du Sud.
Selon des sources bien informées, cette commission rogatoire a été transmise en avril 2012 à la chancellerie puis envoyée un mois plus tard aux autorités sud-africaines. Une requête jusqu’ici restée sans suite.
Ce n’est pas la première fois que le juge Trévidic se heurte au mur sud-africain. Il avait déjà réclamé l’extradition de Kayumba Nyamwasa. Une information confirmée par le parquet français en juillet 2010.
Si le général rwandais n’a jamais été inculpé pour son rôle présumé dans l’attentat contre l’avion de l’ancien président Juvénal Habyarimana, il est toujours sous le coup d’un mandat d’arrêt. Un simple interrogatoire plutôt que l’extradition, ce changement de stratégie ne semble pas avoir porté ses fruits.
Le silence de Pretoria
Le porte-parole du ministère sud-africain des Affaires étrangères, Clayson Monyela, s’est refusé à tout commentaire. « C’est au ministère de la Justice de s’exprimer », a-t-il expliqué.
Son homologue au ministère de la Justice n’a, lui, répondu à aucune des sollicitations de RFI. Cette affaire a-t-elle été évoquée par la ministre française de la Justice lors de sa visite en début de semaine en Afrique en Sud ?
Christiane Taubira accompagnait le président François Hollande lors de sa visite d’Etat, elle a bien rencontré son homologue sud-africain. La chancellerie française se refuse à son tour à tout commentaire « sur une affaire en cours d’instruction ».
Un autre responsable français se refuse à parler de blocage et affirme simplement que « le délai d’examen (d’une commission rogatoire internationale, ndlr) est parfois long et pas seulement en Afrique du Sud ». Cela fait plus d’un an et demi que cette dernière a été transmise à Pretoria.
L’attente des parties civiles
« Les autorités sud-africaines paraissent embarrassées », explique Me Philippe Meilhac, l’avocat de la famille du président rwandais Juvénal Habyarimana.
« Mais c'est quelqu'un qui dit ouvertement qu'il a des choses à dire, il faut absolument l'entendre. » En juillet dernier, dans un entretien exclusif accordé à RFI, Kayumba Nyamwasa affirmait détenir des preuves de l’implication de Paul Kagame ; il se disait prêt à rencontrer le juge Trévidic et à répondre de ses actes.
Ces déclarations avaient tout de même suscité une certaine méfiance de la part des parties civiles qui s’interrogeaient sur les raisons pour lesquelles celui qui est l’un des plus acerbes opposants au président rwandais décidait de s’exprimer près de vingt ans après les faits.
Après la diffusion de cet entretien, la présidence rwandaise avait déclaré ne pas souhaiter y répondre.
Au moment de l’attentat de 1994, Kayumba Nyamwasa était le chef des renseignements militaires du Front patriotique rwandais, la rébellion dirigée par Paul Kagame. C’est à ce titre qu’il dit détenir des informations pouvant impliquer l’actuel chef de l’Etat rwandais, tout en ayant lui-même « la conscience tranquille ».
Le prédécesseur du juge Trévidic, Jean-Louis Bruguière, avait à l’issue de ses huit années d’enquête estimé qu’au contraire, le général rwandais était impliqué et avait émis un mandat d’arrêt contre lui et huit autres personnalités du régime.
Plusieurs témoins accusaient Kayumba Nyamwasa d’avoir participé à des réunions de planification de l’attentat et même à sa mise en œuvre. L’enquête du juge Bruguière, qui mettait en cause l’actuel pouvoir rwandais, avait été très critiquée à Kigali comme à Paris.
Lorsqu’il reprend le dossier en 2007, Marc Trévidic semble reprendre l’instruction à zéro. Il demande pour la première fois des expertises balistiques et acoustiques pour tenter de déterminer d’où provenaient les missiles qui avaient abattu l’avion du président Habyarimana.
En janvier 2012, les conclusions des ces expertises avaient été transmises aux parties civiles et avaient fuité dans la presse. Si elles ne permettent pas de déterminer avec certitude qui, du FPR ou des extrémistes hutus, est responsable de cet attentat, elles semblent indiquer que les missiles provenaient du camp militaire de Kanombe ou de ses environs, une zone réputée sous le contrôle des militaires proches des extrémistes hutus.
Mais l’existence de cette commission rogatoire internationale demandant à pouvoir interroger Kayumba Nyamwasa montre que le juge Marc Trévidic n’exclut encore aucune hypothèse.
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Selon des sources bien informées, cette commission rogatoire a été transmise en avril 2012 à la chancellerie puis envoyée un mois plus tard aux autorités sud-africaines. Une requête jusqu’ici restée sans suite.
Ce n’est pas la première fois que le juge Trévidic se heurte au mur sud-africain. Il avait déjà réclamé l’extradition de Kayumba Nyamwasa. Une information confirmée par le parquet français en juillet 2010.
Si le général rwandais n’a jamais été inculpé pour son rôle présumé dans l’attentat contre l’avion de l’ancien président Juvénal Habyarimana, il est toujours sous le coup d’un mandat d’arrêt. Un simple interrogatoire plutôt que l’extradition, ce changement de stratégie ne semble pas avoir porté ses fruits.
Le silence de Pretoria
Le porte-parole du ministère sud-africain des Affaires étrangères, Clayson Monyela, s’est refusé à tout commentaire. « C’est au ministère de la Justice de s’exprimer », a-t-il expliqué.
Son homologue au ministère de la Justice n’a, lui, répondu à aucune des sollicitations de RFI. Cette affaire a-t-elle été évoquée par la ministre française de la Justice lors de sa visite en début de semaine en Afrique en Sud ?
Christiane Taubira accompagnait le président François Hollande lors de sa visite d’Etat, elle a bien rencontré son homologue sud-africain. La chancellerie française se refuse à son tour à tout commentaire « sur une affaire en cours d’instruction ».
Un autre responsable français se refuse à parler de blocage et affirme simplement que « le délai d’examen (d’une commission rogatoire internationale, ndlr) est parfois long et pas seulement en Afrique du Sud ». Cela fait plus d’un an et demi que cette dernière a été transmise à Pretoria.
L’attente des parties civiles
« Les autorités sud-africaines paraissent embarrassées », explique Me Philippe Meilhac, l’avocat de la famille du président rwandais Juvénal Habyarimana.
« Mais c'est quelqu'un qui dit ouvertement qu'il a des choses à dire, il faut absolument l'entendre. » En juillet dernier, dans un entretien exclusif accordé à RFI, Kayumba Nyamwasa affirmait détenir des preuves de l’implication de Paul Kagame ; il se disait prêt à rencontrer le juge Trévidic et à répondre de ses actes.
Ces déclarations avaient tout de même suscité une certaine méfiance de la part des parties civiles qui s’interrogeaient sur les raisons pour lesquelles celui qui est l’un des plus acerbes opposants au président rwandais décidait de s’exprimer près de vingt ans après les faits.
Après la diffusion de cet entretien, la présidence rwandaise avait déclaré ne pas souhaiter y répondre.
Au moment de l’attentat de 1994, Kayumba Nyamwasa était le chef des renseignements militaires du Front patriotique rwandais, la rébellion dirigée par Paul Kagame. C’est à ce titre qu’il dit détenir des informations pouvant impliquer l’actuel chef de l’Etat rwandais, tout en ayant lui-même « la conscience tranquille ».
Le prédécesseur du juge Trévidic, Jean-Louis Bruguière, avait à l’issue de ses huit années d’enquête estimé qu’au contraire, le général rwandais était impliqué et avait émis un mandat d’arrêt contre lui et huit autres personnalités du régime.
Plusieurs témoins accusaient Kayumba Nyamwasa d’avoir participé à des réunions de planification de l’attentat et même à sa mise en œuvre. L’enquête du juge Bruguière, qui mettait en cause l’actuel pouvoir rwandais, avait été très critiquée à Kigali comme à Paris.
Lorsqu’il reprend le dossier en 2007, Marc Trévidic semble reprendre l’instruction à zéro. Il demande pour la première fois des expertises balistiques et acoustiques pour tenter de déterminer d’où provenaient les missiles qui avaient abattu l’avion du président Habyarimana.
En janvier 2012, les conclusions des ces expertises avaient été transmises aux parties civiles et avaient fuité dans la presse. Si elles ne permettent pas de déterminer avec certitude qui, du FPR ou des extrémistes hutus, est responsable de cet attentat, elles semblent indiquer que les missiles provenaient du camp militaire de Kanombe ou de ses environs, une zone réputée sous le contrôle des militaires proches des extrémistes hutus.
Mais l’existence de cette commission rogatoire internationale demandant à pouvoir interroger Kayumba Nyamwasa montre que le juge Marc Trévidic n’exclut encore aucune hypothèse.
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