04/10/2013
Des corps de migrants entreposés sur un quai du port de Lampedusa. © Agence de santé de Palerme.
L'île italienne de Lampedusa a vécu, jeudi, une véritable tragédie. Plus de 130 migrants sont morts lors du naufrage de leur embarcation et 200 sont toujours portés disparus.
Alors que les recherches ont repris vendredi, les autorités italiennes n'ont "plus d'espoir de retrouver des survivants".
"On n'a plus de place, ni pour les vivants ni pour les morts", a déclaré, effondrée, la maire de Lampedusa, Giusi Nicolini. "C'est une horreur, une horreur; ils n'arrêtent pas d'apporter des corps".
Selon les autorités italiennes, l'embarcation qui a fait naufrage, jeudi 3 octobre, aux larges des côtes de Lampedusa, serait partie de Libye et transportait 450 à 500 migrants, en majorité des Somaliens et Érythréens. Seulement 150 d'entre eux ont pu être sauvés, ce qui porte le bilan des victimes à environ 300.
Les sauveteurs italiens ont interrompus les recherches autour de l'épave, qui gît à 40 mètres de profondeur, dans la soirée de jeudi avant de les reprendre vendredi vers 04h30 GMT.
"Il y a encore plein de cadavres. On ne peut pas dire combien; ils sont tous serrés les uns contre les autres, on ne voit que les premiers", a expliqué à la chaîne SkyTG24 l'un des sauveteurs, Giovanni de Gaetano, visiblement sous le choc.
"Nous voulons en remonter le plus possible à la surface pour les rendre si possible à leurs familles", a ajouté l'un de ses collègues, les yeux rougis par la fatigue.
En surface, les recherches se sont poursuivies dans la nuit afin de repérer des corps qui flotteraient à la surface. Mais, selon les déclarations d'un membre de la Garde des finances, la police financière qui opère aussi dans le secteur, "nous n'avons plus d'espoir de retrouver des survivants.
Deuil national
Alors que les autorités italiennes rapportaient le chiffre de 93 morts, jeudi en fin de journée, la découverte d'au moins 40 nouveaux cadavres, autour et dans l'embarcation, par des plongeurs des garde-côtes, est venir alourdir le bilan.
Parmi ces nouvelles victimes, les médias italiens ont évoqué la présence de femmes et d'enfants.
"C'était tragique de voir les corps des enfants", a déclaré Pietro Bartolo, un responsable sanitaire de l'île. Selon lui, Lampedusa "n'a pas assez de cercueils" et a dû en faire acheminer par avion.
Le compte Twitter du Palais Chigi où siège la présidence du Conseil des ministres en Italie, a annoncé qu'un "deuil national allait être proclamé".
Rome a confirmé l'annonce en décrétant un "deuil national" pour la journée de vendredi. Une minute de silence sera observée dans toutes les écoles ainsi qu'avant tous les matchs de football du championnat.
Scène cauchemardesque
Angelino Alfano, dépêché sur place, a confirmé que le skipper du bateau avait été arrêté. "C'est un Tunisien de 35 ans qui avait été expulsé d'Italie en avril", a-t-il précisé.
Le bateau de pêche a commencé à prendre l'eau et "de peur qu'il ne coule, les migrants ont enflammé une couverture (pour attirer l'attention), mais cela a provoqué un incendie, puis le navire a chaviré", selon M. Alfano.
Capture d'écran d'une vidéo des garde-côtes italiens montrant les rescapés du naufrage, au matin du 3 octobre 2013 à Lampedusa. © AFP
Rafaele Colapinto, un pêcheur venu apporter son aide sur place, a décrit une scène cauchemardesque : "On a vu un océan de têtes, on a mis une demi-heure pour embarquer chacun d'entre eux car ils glissaient à cause du gazole".
Sur terre, une jeune Érythréenne encore en vie a été retrouvée parmi les cadavres déposés dans un hangar, après qu'un sauveteur eut remarqué qu'elle respirait encore.
La jeune femme a été placée en réanimation à l'hôpital de Palerme, en Sicile, où elle se trouve dans un état grave, déshydratée, en hypothermie, atteinte d'une pneumonie après avoir ingéré, comme les autres victimes, du gazole échappé du bateau.
Nicolini accuse l'Europe
Mme Nicolini, la maire de Lampedusa, a envoyé un télégramme amer au Premier ministre Enrico Letta lui demandant de "venir compter les morts avec (elle)" et a accusé l'Europe de "détourner le regard (..) face à l'énième massacre d'innocents qui a lieu devant (son) île".
Elle a rappelé que Lampedusa, plus proche des côtes nord-africaines que de la Sicile, est "depuis des années" la destination des immigrés clandestins.
Angelino Alfano, a déclaré de son côté que le drame est "européen, (et) pas seulement italien", demandant que l'Italie, où ont afflué 25 000 migrants cette année (trois fois plus qu'en 2012), puisse étendre ses patrouilles "au-delà de ses eaux territoriales".
La ministre de l'Intégration Cécile Kyenge, première Noire dans un gouvernement italien, a réclamé l'instauration de "couloirs humanitaires pour rendre plus sûres ces traversées sur lesquelles spéculent des organisations criminelles".
Le président Giorgio Napolitano a quant à lui demandé à "l'Europe de stopper le trafic criminel d'êtres humains en coopération avec les pays de provenance" et réclamé "la surveillance des côtes d'où partent ces voyages du désespoir et de la mort".
Le pape, qui s'était rendu pour son tout premier voyage hors de Rome à Lampedusa début juillet – pendant lequel il avait déjà attiré l'attention sur les drames de l'immigration - a parlé de "honte" face aux "nombreuses victimes de cet énième naufrage".
Selon le réseau d'ONG Migreurop à Paris, en vingt ans, 17 000 migrants sont morts en tentant de rallier l'Europe.
La dernière tragédie la plus meurtrière remonte à juin 2011, quand 200 à 270 migrants originaires d'Afrique subsaharienne et fuyant la Libye s'étaient noyés en tentant de gagner Lampedusa.
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Jeune Afrique
(Avec AFP)
Des corps de migrants entreposés sur un quai du port de Lampedusa. © Agence de santé de Palerme.
L'île italienne de Lampedusa a vécu, jeudi, une véritable tragédie. Plus de 130 migrants sont morts lors du naufrage de leur embarcation et 200 sont toujours portés disparus.
Alors que les recherches ont repris vendredi, les autorités italiennes n'ont "plus d'espoir de retrouver des survivants".
"On n'a plus de place, ni pour les vivants ni pour les morts", a déclaré, effondrée, la maire de Lampedusa, Giusi Nicolini. "C'est une horreur, une horreur; ils n'arrêtent pas d'apporter des corps".
Selon les autorités italiennes, l'embarcation qui a fait naufrage, jeudi 3 octobre, aux larges des côtes de Lampedusa, serait partie de Libye et transportait 450 à 500 migrants, en majorité des Somaliens et Érythréens. Seulement 150 d'entre eux ont pu être sauvés, ce qui porte le bilan des victimes à environ 300.
Les sauveteurs italiens ont interrompus les recherches autour de l'épave, qui gît à 40 mètres de profondeur, dans la soirée de jeudi avant de les reprendre vendredi vers 04h30 GMT.
"Il y a encore plein de cadavres. On ne peut pas dire combien; ils sont tous serrés les uns contre les autres, on ne voit que les premiers", a expliqué à la chaîne SkyTG24 l'un des sauveteurs, Giovanni de Gaetano, visiblement sous le choc.
"Nous voulons en remonter le plus possible à la surface pour les rendre si possible à leurs familles", a ajouté l'un de ses collègues, les yeux rougis par la fatigue.
En surface, les recherches se sont poursuivies dans la nuit afin de repérer des corps qui flotteraient à la surface. Mais, selon les déclarations d'un membre de la Garde des finances, la police financière qui opère aussi dans le secteur, "nous n'avons plus d'espoir de retrouver des survivants.
Deuil national
Alors que les autorités italiennes rapportaient le chiffre de 93 morts, jeudi en fin de journée, la découverte d'au moins 40 nouveaux cadavres, autour et dans l'embarcation, par des plongeurs des garde-côtes, est venir alourdir le bilan.
Parmi ces nouvelles victimes, les médias italiens ont évoqué la présence de femmes et d'enfants.
"C'était tragique de voir les corps des enfants", a déclaré Pietro Bartolo, un responsable sanitaire de l'île. Selon lui, Lampedusa "n'a pas assez de cercueils" et a dû en faire acheminer par avion.
Le compte Twitter du Palais Chigi où siège la présidence du Conseil des ministres en Italie, a annoncé qu'un "deuil national allait être proclamé".
Rome a confirmé l'annonce en décrétant un "deuil national" pour la journée de vendredi. Une minute de silence sera observée dans toutes les écoles ainsi qu'avant tous les matchs de football du championnat.
Scène cauchemardesque
Angelino Alfano, dépêché sur place, a confirmé que le skipper du bateau avait été arrêté. "C'est un Tunisien de 35 ans qui avait été expulsé d'Italie en avril", a-t-il précisé.
Le bateau de pêche a commencé à prendre l'eau et "de peur qu'il ne coule, les migrants ont enflammé une couverture (pour attirer l'attention), mais cela a provoqué un incendie, puis le navire a chaviré", selon M. Alfano.
Capture d'écran d'une vidéo des garde-côtes italiens montrant les rescapés du naufrage, au matin du 3 octobre 2013 à Lampedusa. © AFP
Rafaele Colapinto, un pêcheur venu apporter son aide sur place, a décrit une scène cauchemardesque : "On a vu un océan de têtes, on a mis une demi-heure pour embarquer chacun d'entre eux car ils glissaient à cause du gazole".
Sur terre, une jeune Érythréenne encore en vie a été retrouvée parmi les cadavres déposés dans un hangar, après qu'un sauveteur eut remarqué qu'elle respirait encore.
La jeune femme a été placée en réanimation à l'hôpital de Palerme, en Sicile, où elle se trouve dans un état grave, déshydratée, en hypothermie, atteinte d'une pneumonie après avoir ingéré, comme les autres victimes, du gazole échappé du bateau.
Nicolini accuse l'Europe
Mme Nicolini, la maire de Lampedusa, a envoyé un télégramme amer au Premier ministre Enrico Letta lui demandant de "venir compter les morts avec (elle)" et a accusé l'Europe de "détourner le regard (..) face à l'énième massacre d'innocents qui a lieu devant (son) île".
Elle a rappelé que Lampedusa, plus proche des côtes nord-africaines que de la Sicile, est "depuis des années" la destination des immigrés clandestins.
Angelino Alfano, a déclaré de son côté que le drame est "européen, (et) pas seulement italien", demandant que l'Italie, où ont afflué 25 000 migrants cette année (trois fois plus qu'en 2012), puisse étendre ses patrouilles "au-delà de ses eaux territoriales".
La ministre de l'Intégration Cécile Kyenge, première Noire dans un gouvernement italien, a réclamé l'instauration de "couloirs humanitaires pour rendre plus sûres ces traversées sur lesquelles spéculent des organisations criminelles".
Le président Giorgio Napolitano a quant à lui demandé à "l'Europe de stopper le trafic criminel d'êtres humains en coopération avec les pays de provenance" et réclamé "la surveillance des côtes d'où partent ces voyages du désespoir et de la mort".
Le pape, qui s'était rendu pour son tout premier voyage hors de Rome à Lampedusa début juillet – pendant lequel il avait déjà attiré l'attention sur les drames de l'immigration - a parlé de "honte" face aux "nombreuses victimes de cet énième naufrage".
Selon le réseau d'ONG Migreurop à Paris, en vingt ans, 17 000 migrants sont morts en tentant de rallier l'Europe.
La dernière tragédie la plus meurtrière remonte à juin 2011, quand 200 à 270 migrants originaires d'Afrique subsaharienne et fuyant la Libye s'étaient noyés en tentant de gagner Lampedusa.
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Jeune Afrique
(Avec AFP)
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