Mercredi 14 mai 2014
DR.
De nos jours, tout le monde s’accorde, en s’inspirant de l’histoire des sociétés humaines, sur l’idée selon laquelle l’immigration constitue une richesse pour celles-ci.
Et, avec la mondialisation et la crise de l’emploi, le phénomène de l’immigration est devenu global. Mais, sur le continent africain, ce phénomène renvoie massivement à la condition de la jeunesse, ainsi qu’à celle d’une bonne partie de l’intelligentsia africaine.
A l’heure actuelle, le mot immigration rime avec tragédie. Récemment, de nombreux corps de migrants africains ont été repêchés au large de l’île de Lampedusa. Rappelons que ce ne sont pas les premières victimes, et certainement pas les dernières.
Les régimes et pouvoirs en place n’offrent aucune perspective socioéconomique stable et solide
Le Maroc et la Libye servent de « pays de transit » aux migrants. Mais avec le chaos et le vide sécuritaires qui se sont durablement installés dans la Libye post-kadhafiste, ce pays est devenu la nouvelle perle des migrants.
Les autorités libyennes viennent de demander l’aide de l’Union européenne (UE) pour stopper cette immigration clandestine massive. En effet, les migrants n’hésitent pas à emprunter des embarcations de fortune pour atteindre les terres européennes.
Du côté de l’UE, on promet aux nouvelles autorités libyennes « une mission d’assistance aux frontières ».
Et, du côté libyen, on n’éprouve aucun scrupule moral à faire du chantage pour obtenir des ressources financières de l’UE, en brandissant la menace d’une ouverture totale des frontières du pays aux migrants, afin qu’ils « envahissent » le sol européen.
Mais, en vérité, quel est ici le fond du problème, notamment en ce qui concerne les migrants africains ? Soulignons que, sur le continent noir, dans la plupart des pays, de nombreux migrants, notamment les jeunes, citadins ou ruraux, sont attirés par le modèle occidental.
Qu’on le veuille ou non, il existe un véritable mythe autour de l’eldorado occidental.
Et, il faut dire que nombre de jeunes du continent subissent la propagande de certains médias occidentaux qui ont tendance à leur présenter, de manière mensongère, l’Occident comme la solution définitive à leurs problèmes, à leur malaise existentiel.
Or, au cœur des sociétés occidentales elles-mêmes, notamment européennes, du fait de la crise récurrente de l’emploi, nombre de jeunes émigrent aux Etats-Unis et au Canada.
Cela dit, avec la mondialisation en cours, l’impact du modèle occidental sur l’évolution des sociétés africaines contemporaines est énorme. Mais la source du malaise existentiel des migrants, qui les pousse à prendre le large, se nomme la mal- gouvernance.
Et les jeunes du continent refusent de s’accommoder de cette mal- gouvernance. Leur ressentiment contre les régimes et pouvoirs en place, lesquels ne leur offrent aucune perspective socioéconomique stable et solide, les conduit, inéluctablement vers l’envie d’un ailleurs meilleur.
Souvent, ces jeunes candidats à l’immigration sont devenus étrangers à leur propre société. Ils ne croient plus aux valeurs morales ancestrales, encore moins à la valeur du travail, mais à la réussite sociale immédiate.
Tout est fait pour étouffer les rêves de la jeunesse
Pourquoi ? Sous leurs yeux, ils constatent au quotidien, tout le clinquant, le matérialisme frivole des élites dirigeantes, et la nature intrinsèquement perverse de nombre de régimes africains.
Sous le couvert de régimes dits démocratiques, modernes, une minorité d’individus tiennent dans leurs mains, les leviers de tous les pouvoirs et de toute la richesse nationale. Ainsi, on se réclame de la démocratie, et l’on en viole les règles.
Ici, tout est fait pour étouffer les rêves de la jeunesse, contrer les forces du changement, et saborder la volonté démocratique des peuples du continent. Dans une telle situation, tout devient précaire, rien n’est sûr et certain.
Cette mal- gouvernance rend les Etats incapables de prendre en charge le destin collectif.
Pire, nombre de dirigeants cultivent au sein de leur Etat ce que Raymond Aron nomme « l’esprit totalitaire, c’est-à-dire l’esprit de violence, l’exercice arbitraire d’une autorité sans limites, l’abus de la force ».
Or, pour la stabilité sociale et le développement des Etats africains, il faut s’attaquer efficacement à cette question décisive : la question migratoire. Car l’Afrique reste le continent où menace en permanence « la bombe démographique ».
Cela dit, on ne peut vaincre ce phénomène migratoire qu’en dotant notre continent d’une nouvelle mentalité, d’une vision complètement nouvelle du monde.
Au-delà de la nécessité d’une prise de conscience populaire, il faut mener, à l’intérieur de chaque Etat, un travail sur les imaginaires africains.
Mais la responsabilité des gouvernants africains est capitale, puisqu’il leur incombe l’immense tâche de créer pour la jeunesse de leur pays, un véritable climat politique qui permette d’avoir confiance en l’avenir.
A ce titre, la restauration de la bonne gouvernance est et reste effectivement une condition indispensable, une étape décisive du développement des Etats du continent.
Cela dit, probablement, la solution est-elle dans la voie d’un néo-panafricanisme actif. Car sans unité, et sans solidarité entre sociétés et Etats du continent, rien n’arrêtera ce désir collectif d’émigration qui affecte la jeunesse africaine.
En attendant, les dirigeants africains , face à cette bombe migratoire, doivent cesser de développer des « sophismes organiques », tendant à confondre leur désir avec le réel de leurs peuples.
Et enfin, de Dakar à Bamako, des actes vertueux de gouvernance doivent être capables d’amener les jeunes à renoncer à cette formule terrifiante : « Barcelone ou la mort ».
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« Le Pays »
DR.
De nos jours, tout le monde s’accorde, en s’inspirant de l’histoire des sociétés humaines, sur l’idée selon laquelle l’immigration constitue une richesse pour celles-ci.
Et, avec la mondialisation et la crise de l’emploi, le phénomène de l’immigration est devenu global. Mais, sur le continent africain, ce phénomène renvoie massivement à la condition de la jeunesse, ainsi qu’à celle d’une bonne partie de l’intelligentsia africaine.
A l’heure actuelle, le mot immigration rime avec tragédie. Récemment, de nombreux corps de migrants africains ont été repêchés au large de l’île de Lampedusa. Rappelons que ce ne sont pas les premières victimes, et certainement pas les dernières.
Les régimes et pouvoirs en place n’offrent aucune perspective socioéconomique stable et solide
Le Maroc et la Libye servent de « pays de transit » aux migrants. Mais avec le chaos et le vide sécuritaires qui se sont durablement installés dans la Libye post-kadhafiste, ce pays est devenu la nouvelle perle des migrants.
Les autorités libyennes viennent de demander l’aide de l’Union européenne (UE) pour stopper cette immigration clandestine massive. En effet, les migrants n’hésitent pas à emprunter des embarcations de fortune pour atteindre les terres européennes.
Du côté de l’UE, on promet aux nouvelles autorités libyennes « une mission d’assistance aux frontières ».
Et, du côté libyen, on n’éprouve aucun scrupule moral à faire du chantage pour obtenir des ressources financières de l’UE, en brandissant la menace d’une ouverture totale des frontières du pays aux migrants, afin qu’ils « envahissent » le sol européen.
Mais, en vérité, quel est ici le fond du problème, notamment en ce qui concerne les migrants africains ? Soulignons que, sur le continent noir, dans la plupart des pays, de nombreux migrants, notamment les jeunes, citadins ou ruraux, sont attirés par le modèle occidental.
Qu’on le veuille ou non, il existe un véritable mythe autour de l’eldorado occidental.
Et, il faut dire que nombre de jeunes du continent subissent la propagande de certains médias occidentaux qui ont tendance à leur présenter, de manière mensongère, l’Occident comme la solution définitive à leurs problèmes, à leur malaise existentiel.
Or, au cœur des sociétés occidentales elles-mêmes, notamment européennes, du fait de la crise récurrente de l’emploi, nombre de jeunes émigrent aux Etats-Unis et au Canada.
Cela dit, avec la mondialisation en cours, l’impact du modèle occidental sur l’évolution des sociétés africaines contemporaines est énorme. Mais la source du malaise existentiel des migrants, qui les pousse à prendre le large, se nomme la mal- gouvernance.
Et les jeunes du continent refusent de s’accommoder de cette mal- gouvernance. Leur ressentiment contre les régimes et pouvoirs en place, lesquels ne leur offrent aucune perspective socioéconomique stable et solide, les conduit, inéluctablement vers l’envie d’un ailleurs meilleur.
Souvent, ces jeunes candidats à l’immigration sont devenus étrangers à leur propre société. Ils ne croient plus aux valeurs morales ancestrales, encore moins à la valeur du travail, mais à la réussite sociale immédiate.
Tout est fait pour étouffer les rêves de la jeunesse
Pourquoi ? Sous leurs yeux, ils constatent au quotidien, tout le clinquant, le matérialisme frivole des élites dirigeantes, et la nature intrinsèquement perverse de nombre de régimes africains.
Sous le couvert de régimes dits démocratiques, modernes, une minorité d’individus tiennent dans leurs mains, les leviers de tous les pouvoirs et de toute la richesse nationale. Ainsi, on se réclame de la démocratie, et l’on en viole les règles.
Ici, tout est fait pour étouffer les rêves de la jeunesse, contrer les forces du changement, et saborder la volonté démocratique des peuples du continent. Dans une telle situation, tout devient précaire, rien n’est sûr et certain.
Cette mal- gouvernance rend les Etats incapables de prendre en charge le destin collectif.
Pire, nombre de dirigeants cultivent au sein de leur Etat ce que Raymond Aron nomme « l’esprit totalitaire, c’est-à-dire l’esprit de violence, l’exercice arbitraire d’une autorité sans limites, l’abus de la force ».
Or, pour la stabilité sociale et le développement des Etats africains, il faut s’attaquer efficacement à cette question décisive : la question migratoire. Car l’Afrique reste le continent où menace en permanence « la bombe démographique ».
Cela dit, on ne peut vaincre ce phénomène migratoire qu’en dotant notre continent d’une nouvelle mentalité, d’une vision complètement nouvelle du monde.
Au-delà de la nécessité d’une prise de conscience populaire, il faut mener, à l’intérieur de chaque Etat, un travail sur les imaginaires africains.
Mais la responsabilité des gouvernants africains est capitale, puisqu’il leur incombe l’immense tâche de créer pour la jeunesse de leur pays, un véritable climat politique qui permette d’avoir confiance en l’avenir.
A ce titre, la restauration de la bonne gouvernance est et reste effectivement une condition indispensable, une étape décisive du développement des Etats du continent.
Cela dit, probablement, la solution est-elle dans la voie d’un néo-panafricanisme actif. Car sans unité, et sans solidarité entre sociétés et Etats du continent, rien n’arrêtera ce désir collectif d’émigration qui affecte la jeunesse africaine.
En attendant, les dirigeants africains , face à cette bombe migratoire, doivent cesser de développer des « sophismes organiques », tendant à confondre leur désir avec le réel de leurs peuples.
Et enfin, de Dakar à Bamako, des actes vertueux de gouvernance doivent être capables d’amener les jeunes à renoncer à cette formule terrifiante : « Barcelone ou la mort ».
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« Le Pays »
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