03/07/2014
Joseph KABILA - Président sortant de la RDC.
Soixante-douze heures après l’allocution de «Joseph Kabila» du 29 juin et vingt-quatre heures après la parade militaire - unanimement qualifiée de «démonstration de force» - organisée à l’occasion de la célébration du 54ème anniversaire de la proclamation de l’indépendance, les évêques du Congo ont décidé de larguer leur «bombe à fragmentation».
Dans un communiqué publié mardi 1er juillet à l’issue d’une assemblée plénière, les prélats catholiques ont enfoncé le clou déjà planté en demandant au locataire du Palais de la nation de respecter la Constitution en s’effaçant à l’expiration de son second et dernier mandat en cours.
Au nom de l’alternance démocratique. Stupeur et tremblement !
Lors de son allocution du dimanche 29 juin, «Joseph Kabila» a laissé l’impression d’un homme déconnecté des réalités. Un homme aveuglé par ses fausses certitudes.
Analyse
L’année 2014 est décidément une année horrible - annus horribilis - pour «Joseph Kabila». C’est un secret de Polichinelle : l’homme est prêt à tout pour briguer un troisième mandat.
Au mépris des dispositions constitutionnelles limitant le nombre de mandat présidentiel à deux et la durée à cinq ans. Constitutionnellement, «Joseph» doit céder la place à son successeur le 19 décembre 2016.
Depuis le mois de juin 2013 à ce jour, le «président sortant» et ses affidés multiplient des manœuvres sordides (Livre d’Evariste Boshab, concertations nationales, gouvernement de cohésion nationale, déclarations bruyantes de certains cadres du parti présidentiel, lancement de l’idée d’élire les députés provinciaux au suffrage universel indirect...) pour arracher la révision constitutionnelle.
Des sources bien informées prêtent à «Kabila» - à tort ? - l’intention d’instaurer le suffrage universel indirect pour le scrutin présidentiel. Au grand dam de la grande majorité de la population désireuse d’un autre avenir.
"Le Congo est une République et non une monarchie"
Dans le communiqué diffusé mardi, les évêques du Congo jouent à fond la carte de la légalité. Se fondant sur l’esprit et la lettre du premier alinéa de l’article 64 de la Constitution, ils encouragent les citoyens congolais à «faire preuve de vigilance pour s’opposer par tous les moyens légaux et pacifiques à toute tentative de modification des articles verrouillés».
«Tout Congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution».
Dans son communiqué, l’Eglise dit, par ailleurs, désapprouver «toute sorte d’initiative qui, sans modifier directement l’article 220, viserait à le vider de son contenu essentiel», alors que ce «verrou» été conçu par le législateur pour
«assurer la stabilité du pays» et garantir «la nature de l’Etat congolais, qui est une république et non une monarchie ».
Au cours d’une conférence de presse, abbé Léonard Santedi, porte-parole de la Cenco (Conférence des évêques du Congo), a indiqué que la charte fondamentale qui régit le Congo-Kinshasa est «claire».
A savoir que le mandat présidentiel est de cinq ans renouvelable une fois, «c’est tout !». «Abbé Léonard» de préciser que les évêques tiennent au strict respect de la Constitution. Coup de chapeau à l’Eglise pour le carton rouge montré à « Joseph Kabila» !
Un chef d’Etat déconnecté des réalités
Lors de l’allocution qu’il a prononcé, dimanche 29 juin, à l’occasion de la célébration du 54ème anniversaire de la proclamation de l’indépendance, «Joseph Kabila» a laissé l’impression d’un homme aveuglé par ses fausses certitudes au point d’être déconnecté des réalités. Le locuteur espérait «intimider» les auditeurs. C’est l’effet contraire qui s’est produit.
Il a osé déclarer que les «forces armées et de sécurité» congolaises ont mis fin à l’instabilité qui régnait dans la partie orientale du pays.
A quoi servent, dès lors, les forces onusiennes présentes dans le pays depuis 1999?
Quid de la Brigade internationale mise sur pied aux termes de la résolution 2098 du Conseil de sécurité du 28 mars 2013?
«Joseph Kabila» d’ajouter sans rire : «J’annonce solennellement à la nation congolaise que nos forces armées ont le contrôle absolu de l’ensemble du territoire national». Et pourtant.
Dans le district de l’Ituri, dans la Province Orientale, les «éleveurs» Mbororo continuent à terroriser la population; les rebelles ougandais de l’ADF-Nalu font de même.
Au Nord Kivu, toutes les bandes armées sont loin d’avoir été défaites. C’est le cas particulièrement des miliciens Hutu des FDLR et autres Maï Maï machin et truc.
Que dire du Nord Katanga où les miliciens Ba Kata Katanga, avec à leur tête Kyungu Mutanga alias « Gédéon »?
Dans son discours, « Joseph » a adopté la posture du maître d’école en débitant des principes pseudo-nationalistes : «La souveraineté de notre pays et la dignité congolaise ne se marchandent pas ! Il en est de notre indépendance et de notre liberté. Elles méritent plutôt tous les sacrifices. Les préserver à tout prix est donc, pour chacun de nous, un devoir citoyen.»
« Ayons confiance en nous-même et en notre capacité à gérer notre destin; faisons, en toutes circonstances, preuve de solidarité et de cohésion nationale; et le succès que nous escomptons pour l’avenir de notre pays sera certainement au rendez-vous».
Des mots. Rien que des mots, en lieu et place d’exemplarité.
Feignant d’ignorer non seulement le fossé séparant les citoyens et la classe dirigeante mais aussi le piètre estime que l’opinion congolaise porte à la Ceni ainsi qu’à son sulfureux président Apollinaire Malumalu, le numéro un Congolais a fait preuve d’une légèreté inqualifiable en prononçant ces mots : «Je demande donc à notre peuple de ne pas céder au chantage et d’appuyer toutes les institutions de la République, notamment la Commission Nationale Indépendante qui a reçu la mission d’organiser les élections dans un climat apaisé ».
Climat apaisé?
Après tous les signaux négatifs lui envoyés tant par les représentants des forces politiques et sociales que par la «communauté internationale», « Joseph Kabila » refuse de comprendre que «le jeu est terminé!». The game is over! L’homme n’a pas compris qu’il y a belle lurette qu’il ne fait plus «rêver».
Il faut espérer que la bruyante sortie médiatique des évêques aura pour effet d’extraire la jeunesse congolaise de son profond sommeil. Une manière de démentir les propos tenus par l’ancienne secrétaire d’Etat américaine Hillary R. Clinton dans ses mémoires intitulés « Le temps des décisions », publiés chez Fayard : «J’ai décelé de la résignation chez les jeunes de Kinshasa».
___________________
[Baudouin Amba Wetshi]
© KongoTimes
Joseph KABILA - Président sortant de la RDC.
Soixante-douze heures après l’allocution de «Joseph Kabila» du 29 juin et vingt-quatre heures après la parade militaire - unanimement qualifiée de «démonstration de force» - organisée à l’occasion de la célébration du 54ème anniversaire de la proclamation de l’indépendance, les évêques du Congo ont décidé de larguer leur «bombe à fragmentation».
Dans un communiqué publié mardi 1er juillet à l’issue d’une assemblée plénière, les prélats catholiques ont enfoncé le clou déjà planté en demandant au locataire du Palais de la nation de respecter la Constitution en s’effaçant à l’expiration de son second et dernier mandat en cours.
Au nom de l’alternance démocratique. Stupeur et tremblement !
Lors de son allocution du dimanche 29 juin, «Joseph Kabila» a laissé l’impression d’un homme déconnecté des réalités. Un homme aveuglé par ses fausses certitudes.
Analyse
L’année 2014 est décidément une année horrible - annus horribilis - pour «Joseph Kabila». C’est un secret de Polichinelle : l’homme est prêt à tout pour briguer un troisième mandat.
Au mépris des dispositions constitutionnelles limitant le nombre de mandat présidentiel à deux et la durée à cinq ans. Constitutionnellement, «Joseph» doit céder la place à son successeur le 19 décembre 2016.
Depuis le mois de juin 2013 à ce jour, le «président sortant» et ses affidés multiplient des manœuvres sordides (Livre d’Evariste Boshab, concertations nationales, gouvernement de cohésion nationale, déclarations bruyantes de certains cadres du parti présidentiel, lancement de l’idée d’élire les députés provinciaux au suffrage universel indirect...) pour arracher la révision constitutionnelle.
Des sources bien informées prêtent à «Kabila» - à tort ? - l’intention d’instaurer le suffrage universel indirect pour le scrutin présidentiel. Au grand dam de la grande majorité de la population désireuse d’un autre avenir.
"Le Congo est une République et non une monarchie"
Dans le communiqué diffusé mardi, les évêques du Congo jouent à fond la carte de la légalité. Se fondant sur l’esprit et la lettre du premier alinéa de l’article 64 de la Constitution, ils encouragent les citoyens congolais à «faire preuve de vigilance pour s’opposer par tous les moyens légaux et pacifiques à toute tentative de modification des articles verrouillés».
«Tout Congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution».
Dans son communiqué, l’Eglise dit, par ailleurs, désapprouver «toute sorte d’initiative qui, sans modifier directement l’article 220, viserait à le vider de son contenu essentiel», alors que ce «verrou» été conçu par le législateur pour
«assurer la stabilité du pays» et garantir «la nature de l’Etat congolais, qui est une république et non une monarchie ».
Au cours d’une conférence de presse, abbé Léonard Santedi, porte-parole de la Cenco (Conférence des évêques du Congo), a indiqué que la charte fondamentale qui régit le Congo-Kinshasa est «claire».
A savoir que le mandat présidentiel est de cinq ans renouvelable une fois, «c’est tout !». «Abbé Léonard» de préciser que les évêques tiennent au strict respect de la Constitution. Coup de chapeau à l’Eglise pour le carton rouge montré à « Joseph Kabila» !
Un chef d’Etat déconnecté des réalités
Lors de l’allocution qu’il a prononcé, dimanche 29 juin, à l’occasion de la célébration du 54ème anniversaire de la proclamation de l’indépendance, «Joseph Kabila» a laissé l’impression d’un homme aveuglé par ses fausses certitudes au point d’être déconnecté des réalités. Le locuteur espérait «intimider» les auditeurs. C’est l’effet contraire qui s’est produit.
Il a osé déclarer que les «forces armées et de sécurité» congolaises ont mis fin à l’instabilité qui régnait dans la partie orientale du pays.
A quoi servent, dès lors, les forces onusiennes présentes dans le pays depuis 1999?
Quid de la Brigade internationale mise sur pied aux termes de la résolution 2098 du Conseil de sécurité du 28 mars 2013?
«Joseph Kabila» d’ajouter sans rire : «J’annonce solennellement à la nation congolaise que nos forces armées ont le contrôle absolu de l’ensemble du territoire national». Et pourtant.
Dans le district de l’Ituri, dans la Province Orientale, les «éleveurs» Mbororo continuent à terroriser la population; les rebelles ougandais de l’ADF-Nalu font de même.
Au Nord Kivu, toutes les bandes armées sont loin d’avoir été défaites. C’est le cas particulièrement des miliciens Hutu des FDLR et autres Maï Maï machin et truc.
Que dire du Nord Katanga où les miliciens Ba Kata Katanga, avec à leur tête Kyungu Mutanga alias « Gédéon »?
Dans son discours, « Joseph » a adopté la posture du maître d’école en débitant des principes pseudo-nationalistes : «La souveraineté de notre pays et la dignité congolaise ne se marchandent pas ! Il en est de notre indépendance et de notre liberté. Elles méritent plutôt tous les sacrifices. Les préserver à tout prix est donc, pour chacun de nous, un devoir citoyen.»
« Ayons confiance en nous-même et en notre capacité à gérer notre destin; faisons, en toutes circonstances, preuve de solidarité et de cohésion nationale; et le succès que nous escomptons pour l’avenir de notre pays sera certainement au rendez-vous».
Des mots. Rien que des mots, en lieu et place d’exemplarité.
Feignant d’ignorer non seulement le fossé séparant les citoyens et la classe dirigeante mais aussi le piètre estime que l’opinion congolaise porte à la Ceni ainsi qu’à son sulfureux président Apollinaire Malumalu, le numéro un Congolais a fait preuve d’une légèreté inqualifiable en prononçant ces mots : «Je demande donc à notre peuple de ne pas céder au chantage et d’appuyer toutes les institutions de la République, notamment la Commission Nationale Indépendante qui a reçu la mission d’organiser les élections dans un climat apaisé ».
Climat apaisé?
Après tous les signaux négatifs lui envoyés tant par les représentants des forces politiques et sociales que par la «communauté internationale», « Joseph Kabila » refuse de comprendre que «le jeu est terminé!». The game is over! L’homme n’a pas compris qu’il y a belle lurette qu’il ne fait plus «rêver».
Il faut espérer que la bruyante sortie médiatique des évêques aura pour effet d’extraire la jeunesse congolaise de son profond sommeil. Une manière de démentir les propos tenus par l’ancienne secrétaire d’Etat américaine Hillary R. Clinton dans ses mémoires intitulés « Le temps des décisions », publiés chez Fayard : «J’ai décelé de la résignation chez les jeunes de Kinshasa».
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[Baudouin Amba Wetshi]
© KongoTimes
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