lundi 27 décembre 2010

Côte d’Ivoire : Actualisation de la guerre froide en cours ?

 
(AfriSCOOP Analyse) — Les positions des uns et des autres restent figées dans le cadre du bras de fer opposant MM. Gbagbo et Ado. Et ce n’est pas pour rien. 21 ans après la chute du « Mur de Berlin », les principaux hommes forts de la Terre semblent être en train de tester leurs capacités respectives à rogner sur le ou les précarrés des uns et des autres. Une situation qui n’est pas pour déplaire à un fin tacticien comme l’actuel chef de l’exécutif ivoirien.

Les camps Gbagbo et Ado se livrent en ce moment à une partie déguisée d’échec politique. L’une des parties en jeu a le soutien d’une large majorité de la communauté internationale. Dans le même contexte, l’autre partie bénéficie du soutien voilé de quelques Etats clés des grandes puissances du monde. Un rapport de forces qui a retardé le vote de la résolution au Conseil de sécurité de l’Onu reconnaissant « les résultats certifiés » par l’équipe de M. Choi (haut représentant des Nations Unies en Côte d’Ivoire).

La même donne retarde le recours à une résolution préconisant l’usage de la force « pour déloger le Fpi » du pouvoir à Abidjan. Bien sûr, certains objecteront qu’il n’y a pas péril en la demeure pour tabler sur le choix de cette arme de dernier recours. Officiellement et diplomatiquement, oui ; mais matériellement, ce n’est pas ce que donnent à voir les puissances occidentales dont d’énormes intérêts sont en jeu au pays de Didier Drogba.
Fpi-Houphouëtistes : simples adversaires de façade

La Côte d’Ivoire est un gros poisson dans le précarré de la France en Afrique francophone ; et l’Hexagone n’entend pas de si tôt lâcher prise. En dépit des multiples dénégations dites ici et là par diverses hautes autorités de la France. Habituellement, dans le cercle des amis de la France en Afrique, il suffit que l’Elysée félicite un candidat à l’issue d’un scrutin présidentiel pour que ce dernier soit intronisé dans l’esprit des populations. Cette règle non écrite qui a été appliquée cette année au Togo et au Burkina Faso n’a pas pu être répétée en Côte d’Ivoire ; à cause de l’obstacle Gbagbo. Ce qui reste donc une arête dans la gorge de l’ancienne puissance coloniale.

A ce sujet de préoccupation pour Paris, se greffe le dilemme d’affronter ses habituels “alliés” du Conseil de sécurité comme la Russie et la Chine dans une de ses ex-colonies qui demeure non seulement un important débouché pour ses produits manufacturés, mais aussi une importante base d’approvisionnement en matières premières. La même équation devient compliquée pour l’Hexagone quand l’on se souvient que depuis quelques années, le régime d’Abidjan a également sympathisé avec des cercles du pouvoir de Washington !! Or, qui parle de « l’Uncle Sam » doit évoquer l’Etat hébreu dont des élites n’hésitent pas à vendre à l’étranger leur expertise en matière de techniques de guerre.

La boulimie de Pékin dans le domaine de matières premières, la recherche de richesses minières stratégiques de Moscou (comme l’uranium) en Afrique de l’ouest et la volonté des Yankees d’étendre le lot de leurs pays amis sur le sol africain font donc du duel Fpi-Rdr une occasion de (re)tester leurs puissances de conquête dans une Afrique toujours instable. Une somme d’enjeux qui incite les uns et les autres à envisager les différentes perspectives de sortie de crise en Côte d’Ivoire avec une grande délicatesse. Une configuration qui ne devrait être pas pour déplaire au camp Gbagbo. 50 ans après les indépendances africaines et 21 ans après la mort du Mur de Berlin, le partage sanglant et sans pitié des intérêts des Etats africains se poursuit de plus belle devant l’inaction totale des principales victimes de ce drame. Les Etats du Nord n’en demandent pas mieux…

Alassane Ouattara et Laurent Koudou Gbagbo (Ph : DR)

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