lundi 4 avril 2011

La nuit ou Laurent Gbagbo ne mourût point !


Il y a des jours et des nuits, comme ça, où des évènements ont été immortalisés dans la conscience humaine en raison de leur charge d’espoir, de désespoir, de peur, de douleurs vécues. Ainsi, l’on parle de la « Triste Noche » (qui est cette nuit où Cortès et ses hommes ont été tellement décimés par les Aztèques qu’il s’en est fallu de peu qu’ils en perdent la foi mais finalement, ils vainquirent le 30 juin 1520) ; du D. Day (le 06 juin 1944, le jour le plus long, jour du débarquement en Normandie ) ; de la « Nuit du 04 Aout 1789» (la nuit où les Nobles en France abandonnèrent leurs privilèges) ; de la « Nuit des longs couteaux » (la nuit du 30 juin 1934 où eut lieu une purge sanglante au sein de l’appareil nazi ordonnée par Hitler)… On pourrait, à l’échelle de la Côte d’Ivoire, parler de la nuit du 31 mars au 01 avril 2011 comme de ce jour où Laurent Gbagbo ne mourut point !

Cette nuit était celle où le complot international en marche depuis 2002 devait en finir avec l’homme haï. Décidés à écraser le régime qu’un peuple s’est choisi, les forces coalisées et les rebelles en appui, ne doutaient pas qu’ils viendraient à bout de leur dessein tant ils avaient mis toutes les « chances » de leur côté : la ligne de confiance brisée par la Licorne chargée pourtant de maintenir le statut quo entre les deux camps (et ce, sans Résolution du Conseil de sécurité de l’ONU), le déferlement au Sud des rebelles armés à mort et appuyés par les avions et hélicoptères des forces onusiennes, l’envoi depuis des semaines de rebelles et mercenaires par les chars et autres moyens matériels de l’ONUCI et Licorne dans les secteurs d’Abidjan, la RTI bombardée pour empêcher la diffusion des messages du camp Gbagbo, de nouvelles sanctions du Conseil de sécurité prises à la demande de la France et du Nigeria, la réussite dans le débauchage de haut gradés ivoiriens le refus de lever le blocus sur l’importation des médicaments et l’exportation du café/cacao demandé à cor et à cri par plus de la moitié de la population ivoirienne… Et aussi, on notera la décision d’attaquer au plus tard le 31 mars puisqu’à partir du 1er avril, la Russie devait occuper la présidence du Conseil de sécurité à la place de la France et sait-on jamais : elle pourrait mettre un peu d’eau dans le vin terrible donné à boire aux Ivoiriens ayant voté pour le camp Gbagbo…

Avec tout ça, la nuit du 31 mars apparaissait comme une promenade de santé. Le coup de grâce allait s’opérer, facile, comme «dans du beurre ». Et effectivement, comment les forces loyales pouvaient-elles, dans une confrontation si inégale, résister à tant de coups, surtout quand des superpuissances comme les Usa, la France, sont partie prenante au conflit pour renverser le président élu de Côte d’Ivoire ? Difficile, on le reconnaît !

A Abidjan, ailleurs en Afrique et dans le monde, alors que les uns sabraient par avance le champagne, se délectant de leur inéluctable victoire, dans les mêmes endroits, les autres vivaient un supplice de Tantale de voir tant d’injustice damer le pion au Droit, à la morale, dans le silence des gens de bien !

Mais ce qui devait arriver n’arriva pas ! Non seulement les forces liguées de ces superpuissances n’ont pas réussi à rompre la volonté de liberté de Laurent Gbagbo, mais même les trahisons les plus perfides, celles qui vous touchent au cœur parce qu’elles viennent des êtres qui vous sont les plus chers, n’ont pas constitué le coup de dague pour le président légal et légitime. Comme il fallait s’y attendre aussi, les Patriotes ne se sont pas déshonorés en faisant compromission avec la lâcheté : ils ont, dans ce combat à la David et Goliath qui dure depuis près de 10 ans, encore une fois fait rempart de leurs corps pour la protection de leur leader, des institutions de la République, et l’ennemi a perdu du terrain. Les rebelles ont été repoussés, la RTI a été même cahin-caha rétablie, les messages ont pu passer et la mobilisation se renforcer.

Ceux qui baignaient dans l’angoisse, la fatale fin de Laurent Gbagbo, et qui en étaient rendus à prier pour qu’il ait une mort égale à celle de Lumumba ou d’Allende, ont émergé du désespoir. En cette nuit du 31 mars au 01 avril 2011, le Palais présidentiel n’a pas été pris comme la Moneda à Santiago de Chili en 1973, obligeant Gbagbo comme Allende à mourir les armes à la main. Est-on pour autant sorti de l’auberge ? Pas sûr tant la haine s’est donnée les moyens de son assouvissement !

Mais le courage dont les forces loyales, les patriotes font montre (en la circonstance et depuis longtemps) mérite respect et solidarité. Et cette victoire d’étape a déjà quelque chose d’un Jugement de Dieu, comme on y recourait dans le temps, où la dignité valait son pesant d’or. Il aurait dû suffire à convaincre les agresseurs que les oracles avaient parlé contre eux et prendre acte.

Mais si l’impiété rend sourd, misons sur l’appropriation de cette crise ivoirienne par les opinions occidentales, notamment française et américaine, pour faire de l’affaire ivoirienne, une question de politique intérieure à ces deux pays ! A la veille des consultations électorales, en France comme aux USA, ça peut aider à retrouver les chemins de la vérité et de l’humanité dans ce conflit africain.

Le Front National français a ouvert une brèche en ce sens en déclarant que pour la Côte d’Ivoire, il serait plus juste de chercher à comprendre, de commander des évaluations dans le respect de l’ordre constitutionnel de ce pays avant de décider, urbi et orbi, qui en était le président : « Il semble que le processus électoral ivoirien n’ait pas été respecté et par la CEI et par la communauté internationale ». Et la nouvelle patronne du FN d’ajouter : « Le Conseil constitutionnel ivoirien a proclamé monsieur Gbagbo vainqueur après avoir invalidé une partie des votes dans certaines régions du pays. Il appartient à son adversaire qui conteste cette décision, d’engager un recours devant les instances juridiques compétentes et d’apporter les preuves qu’il n’y a eu ni fraudes massives ni violences dans les régions du Nord contrôlées par la rébellion des Forces nouvelles qui, en 2002, avaient tenté de renverser Laurent Gbagbo ». Le Parti communiste français, jusqu’alors hésitant, a fini par regretter que la France ait privilégié l’option de la guerre dans un domaine où l’on pouvait utilement prospecter des voies électorales et politiques de règlement du contentieux postélectoral. Il a clairement déploré « le choix d’une solution militaire » qui, dit-il, est « encouragé » par Paris alors qu’on peut trouver un « accord électoral et politique ».

Voilà qui nous ramène à la France généreuse, brillante, défenderesse de la liberté qui a bercé nos rêves d’enfant. Il faut aussi souhaiter qu’avec le passage du témoin de la France à la Russie à la présidence du Conseil de sécurité, une plus grande retenue soit imposée à l’interventionnisme franco-américain pour permettre de promouvoir le dialogue en lieu et place de la guerre pour résoudre ce conflit postélectoral qui a déjà fait tant de morts.

C’est le vœu le plus cher qu’on peut émettre alors qu’ayant héroïquement gagné une bataille, Laurent Gbagbo et les siens sont loin d’avoir gagné ce qui restera, dans l’Histoire, comme la guerre de la communauté internationale contre la Côte d’Ivoire !

VT

source : sanfinna.com

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