samedi 21 mai 2011

Les nouveaux concepts associes à la question de la nationalité congolaise.

Comme chacun le sait, lors de leur rencontre à Kabale, les rebelles ont défini les points qui feront l’objet des débats lors du dialogue intercongolais. Parmi ces points, on peut relever la question de la nationalité congolaise qui est aussi parmi les enjeux de cette guerre ; confirmant ainsi mon analyse sur les questions qui me sont apparues incontournables  lors ce dialogue intercongolais. 

Dans son communique de presse, le MLC n’a donné aucune précision sur les modifications que les rebelles comptent apporter sur les lois actuelles relatives a la nationalité congolaise. De telles modifications seront contraires a l’esprit de la CNS. Celle-ci   a en effet purement et simplement reconduit les lois promulguées en 1981. Il faut rappeler aux rebelles que toute modification des lois sur la nationalité doit être soumise au référendum populaire.  Ce n’est pas en cachant leur stratégie qu’ils espèrent imposer leur volonté au peuple congolais. Ils se trompent. Le peuple congolais garde sa vigilance tout azimut.  Ils ont tout intérêt de dévoiler leurs propositions afin de susciter déjà le débat.            
Cette guerre qui nous est injustement imposée par les vautours aura comme conséquence de renforcer le sentiment  nationaliste des congolais. Ce sentiment  se traduit notamment par la recherche de notre identité. C’est dans cette quête d’identité que l’on assiste actuellement à l’apparition de nouveaux concepts associés à la nationalité congolaise comme congolais de souche, congolais de pur sang ou pure laine pour se distinguer des autres. 
    
1. Pour être membre de sa délégation au dialogue intercongolais, la société civile a exigé notamment d’être né d’un père et d’une mère congolais ; c’est-à-dire être un congolais pur sang.
2. Dans sa lutte pour le leadership contre les deux autres factions rebelles, le MLC a fait valoir que son mouvement est majoritairement composé des congolais de souche. De ce fait, en cas de fusion, la direction doit lui revenir de droit.
3. Selon certains quotidiens de Kin, les parrains occidentaux du RCD/Goma s’opposent catégoriquement à l’accession de BIZIMA Karaha à la tête de ce mouvement malgré le soutien de Kagame et de Musevegni . La raison avancée est la nationalité de Bizima qui n’est pas un congolais de souche.    

signifient être congolais de souche et congolais pur sang ? les deux conceptss sont-ils synonymes, c’est-à-dire un congolais pur sang est-il aussi un congolais de souche ou vice versa ?  
Pour répondre à toutes ces interrogations, analysons les deux procédures d’octroi de la nationalité congolaise. 
 
I. Procédure d’octroi de la nationalité congolaise.
   En matière de la nationalité, les lois congolaises prévoient deux types de procédure : 
- La procédure par attribution.  Cette procédure ne concerne que les personnes dont un des aïeux a obtenu la nationalité congolaise lorsque celle-ci a été définie pour la première fois par le décret de 1892. En d’autres termes, ce sont des personnes dont un des aïeux appartenait a l’une des tribus établies sur le territoire de l’Etat indépendant du Congo avant décembre 1908.  Les personnes concernées par cette procédure n’introduisent pas une demande de nationalité auprès de l’état congolais. Ils sont congolais dès leur naissance.
- La procédure par acquisition. Cette procédure concerne les personnes qui ne sont pas visées par la précédente procédure, c’est-à-dire, des personnes dont aucun des aïeux n’est membre d’aucune tribu établie sur le territoire de l’EIC avant décembre 1908. Ces personnes doivent introduire une demande de nationalité auprès de l’état congolais.       
        Notons que depuis l’EIC, la procédure d’octroi par attribution n’a jamais changé. Elle est toujours fondée sur l’appartenance à une des tribus établies sur le territoire de l’EIC avant 1908.  En revanche, la procédure d’octroi par acquisition a connu d’importantes modifications. La dernière est celle qui a eu lieu en 1981 où on a introduit deux nouveaux concepts : la petite et la grande nationalité. 
       L’existence de ces deux procédures entraîne une différence dans les droits.  Par exemple, un congolais qui a obtenu la nationalité par la procédure d’acquisition ne peut pas devenir président de la République du Congo. La constitution concoctée par Mzee Kabila a encore limité leurs droits.
       Avant de poursuivre notre analyse, ouvrons une parenthèse : le conflit de nationalité qui oppose présentement les rwandophones et l’Etat congolais se situe au niveau de la procédure. En effet, les rwandophones exigent que l’Etat congolais leur octroie la nationalité congolaise par la procédure d’attribution. L’argument juridique qu’ils avancent est le suivant : la nationalité congolaise leur avait été octroyée en 1960 en même temps que tous les autres congolais par la Loi Fondamentale. L’Etat congolais rejette cet argument car la nationalité congolaise remonte non en 1960 mais en 1892 à l’époque de l’EIC au moment où aucune tribu rwandophone n’était établie sur le territoire de l’EIC. Malgré la présence des rwandais (hutus, tutsi et twa) présents sur le territoire avant même l’arrivée des belges , ces rwandais n’étaient pas organisés en tribus, c’est-à-dire qu’ils ne disposaient pas d’un chef (Mwami) et d’un territoire qui avaient été reconnus par l’autorité belge et les autres tribus voisines. L’Etat congolais les invite donc à demander la nationalité congolaise par la procédure d’acquisition. Donc, contrairement à ce qui se raconte, l’Etat congolais ne refuse pas la nationalité congolaise aux rwandophones mais il leur demande se conformer à la loi y afférente, c’est-à-dire d’obtenir la nationalité par la procédure d’acquisition. Pourquoi l’Etat congolais refuse-t-il obstinément a leur donner la nationalité congolaise par la procédure d’attribution ? La reconnaissance de la nationalité congolaise par la procédure d’attribution entraîne d’autres conséquences juridiques :     
-         La procédure par attribution entraîne automatiquement l’accès à la propriété foncière  car comme chacun le sait chaque tribu au Congo a un territoire. Donc, si on octroie la nationalité congolaise aux rwandophones par la procédure d’attribution, on reconnaît par le fait même que ceux-ci  1) étaient organisées en tribus sur le territoire de l’EIC ; 2) disposent d’un territoire dont les limites étaient reconnues par l’autorité coloniale belge  et  les autres tribus voisines. Or, la possession d’un territoire leur donne le droit potentiel de faire sécession au nom du principe d’autodétermination qui est reconnu à tout peuple. C’est le cas par exemple du Timor oriental en Indonésie. Leur indépendance  a été acceptée par la communauté internationale parce que les Timorais ont leur propre territoire dont les frontières sont formellement reconnues par l’Etat central indonésien.
-         La procédure par attribution confère tous les droits prévus par la constitution. Parmi ces droits, citons l’accession à la magistrature suprême. En revanche, la procédure par acquisition ne confère pas ce privilège.
Pour revenir à notre sujet, en se référant aux deux procédures d’octroi de la nationalité congolaise, on peut donc définir les concepts de congolais de souche et de congolais pur sang.
-         Est congolais de souche toute personne ayant obtenu la nationalité congolaise par la procédure d’attribution.
-         Est congolais pur sang toute personne née d’un père et d’une mère congolais. Mais ces parents peuvent obtenir la nationalité congolaise par procédure d’attribution (on parle alors de congolais de souche pur sang) ou par acquisition (on parle alors de congolais pur sang seulement ). Donc, tout congolais pur sang n’est pas forcément un congolais de souche.
II. Cas des mariages mixtes.
    Quel est le statut d’un enfant dont l’un des parents est congolais ? Selon les lois  en matière de la nationalité, cet enfant est automatiquement congolais. Il est de souche si le parent  congolais est de souche. Cependant il y a des cas qui sont en contradiction avec notre constitution mais qui ne sont jamais prévus par nos lois. Ce qui crée un vide juridique qu’il convient impérativement de combler. 
Exemple 1 : Les enfants nés d’une mère congolaise et d’un père rwandophone. 
- Selon la loi congolaise, les enfants sont nés congolais. Ils sont congolais  de souche si le parent congolais appartient à une des tribus établies au Congo avant 1908. 
-         Selon la loi rwandaise , ces enfants sont nés rwandais car leur père est rwandais.
-         Donc, les enfants sont nés avec une double nationalité. Or, selon la constitution congolaise, la nationalité congolaise est unique et exclusive. Par conséquent, en vertu de ce principe, la nationalité congolaise ne peut leur être accordée. Ils ne sont pas donc des congolais de souche. Ils ne peuvent obtenir la nationalité congolaise que par la procédure d’acquisition. Par conséquent, ils ne peuvent jamais devenir président de la république démocratique du Congo.        
Cet exemple peut être généralisé pour les autres cas où le parent non congolais peut transmettre sa nationalité par filiation.

Exemple 2 : Les enfants nés d’une mère rwandophone et d’un père congolais

-     Selon la loi congolaise, ces enfants sont d’office congolais.
-     Selon la loi rwandaise promulguée en 1962, ces enfants n’ont pas la nationalité rwandaise.   En effet, au Rwanda, c’est le père qui transmet la nationalité à sa descendance.
-     Donc, les enfants de ce couple sont des congolais de souche à part entière. Ils peuvent          donc devenir président de la république démocratique du Congo. 

Cet exemple peut être généralisé pour les cas où le parent non congolais ne peut pas transmettre sa nationalité à sa descendance. 

J’ose espérer que ce texte contribuera à éclairer tous ceux qui veulent se proposent de modifier les lois de la nationalité congolaise. 
  
Mes salutations patriotiques. 
 
Dr Assani A.A.
Copyright Afriqu'Info asbl. 

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