On l’a appris en milieu de semaine passée : la tombe du président Thomas Sankara a été vandalisée au cimetière de Dagnoën, la partie supérieure sur laquelle est inscrite l’épitaphe ayant été démolie.
Mariam Sankara se dit choquée quand bien même elle doute toujours que ce soit le corps de son défunt mari qui y repose et réclame un test d’ADN pour en avoir le cœur net. Le gouvernement, lui, par la voix du ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Alain Edouard Traoré, s’est dit indigné et scandalisé entre autres parce que ces pratiques ne sont pas en tout cas conformes à nos valeurs culturelles.
Pour la galaxie sankariste, qui va régulièrement en pèlerinage au cimetière de Dagnoën, comme les fidèles vont à Lourdes ou à Jérusalem, l’identité des vandales ne semble pas faire de doute : ça ne peut être que ceux qui ne veulent pas voir Thom Sank même mort en peinture ; autrement dit, ceux qui ont été à la base de son assassinat le 15 octobre 1987.
C’est en effet l’hypothèse à laquelle l’opinion pense tout de suite et pour diverses raisons, notamment politiques ou sentimentales, on peut opter pour ces enquêtes à la Colombo où le coupable est connu d’avance.
Comme on peut aussi s’interroger en n’occultant, à priori, aucune piste, même si, dans un dossier aussi passionnel que l’a toujours été l’affaire Sankara, la réflexion n’a pas toujours eu droit de cité.
Mais si Blaise et son petit monde peuvent apparaître comme les suspects sérieux tout désignés, rien n’interdit de penser, n’en déplaise aux sankaristes, que ça peut tout aussi bien être quelqu’un ou des gens qui ne veulent pas du bien au Président du Faso et qui n’ont jamais ménagé leur peine pour ternir son image.
Et leur dépit est d’autant plus grand que, jusque-là, les différentes démarches judiciaires engagées aussi bien au Burkina Faso qu’à l’extérieur n’ont jamais véritablement donné les résultats escomptés.
Si quelque chose avait été dérobé sur la sépulture, on pourrait même pensé que c’est l’œuvre de sankarolâtre désireux de garder un souvenir « personnel » de son héros ; au cimetière du Père Lachaise ou dans d’autres champ des morts célèbres à travers le monde, des gens ne s’adonnent-ils pas à des effusions avec les macchabées ?
Pour tout dire, si on ne peut que regretter humainement l’acte et le condamner le plus fermement possible, il faut se garder de porter des œillères pour appréhender le problème de façon froide et sereine.
Mais quel que soit le mobile retenu, cette profanation repose le problème de la sécurité de nos nécropoles et de la quiétude de ceux qui y habitent, autrement dit nos chers disparus, qu’ils soient illustres comme le défunt président du CNR, ou de parfaits anonymes.
On a souvent d’ailleurs posé le problème spécifique de Dagnoën, où les catacombes, même s’ils ont été récemment été clôturés, sont à proximité d’une décharge à ciel ouvert. Que c’est scandaleux de voir un tel désordre aux alentours d’un endroit où quelqu’un qui est considéré comme un héros national est enseveli ! même qu’il n’y a pas longtemps, des cimetières étaient devenus des repaires de bandits : au cimetière municipal, par exemple, les caveaux étaient squattés par des voleurs et autres fumeurs de drogue.
A la vérité, on doit reconnaître que, depuis quelques années, des efforts sont faits par la municipalité avec l’appui de certaines bonnes volontés pour mettre de l’ordre sur ces sites sépulcraux et y apporter un peu de sécurité ; ce qui s’est notamment traduit à Gounghin, Kourittenga, etc., par l’érection d’un mur d’enceinte et une meilleure propreté.
Mais il y a encore d’énormes efforts à faire, et le récent acte de vandalisme nous rappelle l’urgence de l’affaire. Puisque c’est la dernière demeure de ceux que nous avons aimés, on rêve de cimetières comme on en voit ailleurs, sécurisés, administrés, où ceux qui y finiront un jour ou l’autre auraient tout le loisir, en attendant d’y « emménager » un jour, de se recueillir et même de pique-niquer parce qu’il y fera … bon vivre.
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