samedi 14 juillet 2012

RDC : Une force internationale d'occupation à l'Est

13/07/2012 

Paul KAGAME et les Forces Rwandaises

A l’initiative de Museveni et Kagame, la réunion de CIRGL à Addis-Abeba vient de se clôturer ce jeudi 12 juillet. Comme on ne s’en doutait, les conclusions de cette réunion indiquent entre autre la création d’une force internationale (dont la composition et la feuille de route restent flou) avec pour mission de traquer les groupes armés et d’assurer la protection des frontières à l’Est de la RDC.

Aux yeux des congolais avertis, cette scenario qui du reste est du déjà vu (Opérations conjointes), est inacceptable et constitue une insulte à l’intelligence congolaise. Qu’après les faits tangibles, des preuves irréfragables, des rapports des Nations-Unies incriminant le gouvernement de Kigali et Kampala, et ces derniers continuent à jouer aux pompiers-pyromanes.

Cette force internationale qui comporterait en son sein le M23, les militaires Rwandais, ougandais, Burundais…n’est qu’une machination pour officialiser l’occupation du territoire congolais par la présence renforcée des ces troupes en vue de garantir la pérennité de l’exploitation illicite des minerais en RDC.

[Yves KONGOLO]

RDC-Rwanda : le vrai problème est ailleurs

Pour les Etats membres de la CIRGL, réunis le 11 juillet 2012 à Addis-Abeba, la stabilisation de la partie Est de la RDC passe par la mise en place d’une force neutre internationale qui inclut, outre les pays de la sous-région, des forces de l’ONU et de l’UA. Une solution simpliste, donc difficile d’exécution, au regard de la complexité de la crise des Grands lacs où des pays en conflit ne partagent pas les mêmes motivations.

«L’assassin revient toujours sur le lieu du crime», dit un principe très connu dans les milieux des criminologues. Dans l’Est de la RDC, de nouvelles tensions sont nées avec la création du mouvement rebelle, M23. Plusieurs rapports, dont ceux de la Mission des Nations unies pour la stabilisation du Congo (Monusco) et de Human Rights Watch, ont formellement reconnu la mainmise du Rwanda derrière cette énième rébellion déclenchée dans le Nord-Kivu.

Si un calme précaire règne encore dans l’Ituri, en Province Orientale, la situation n’est pas pourtant totalement stabilisée. En effet, dans cette partie fragile de la RDC, il s’est formé depuis un temps une Coalition des groupes armés de l’Ituri (COGAI). C’est dire que, là aussi, c’est une bombe à retardement. Qui pourrait exploser à tout moment.

Alors que la guerre fait rage dans le Nord-Kivu, c’est le moment choisi par le président Museveni de l’Ouganda d’initier, en marge du Corep (Comité des représentants permanents de l'Union africaine tenu le 11 juillet 2012 à Addis-Abeba (Ethiopie), une réunion de la Conférence internationale pour la région des Grands Lacs(CIRGL).

Selon le communiqué rendu public à l’issue de cette réunion, qui aura duré 16 heures –preuve de la complexité du sujet à l’ordre du jour– le but était de «discuter de la situation sécuritaire à l’Est de la RDC dans les instruments de la CIRGL, notamment le pacte sur la stabilité, la sécurité et le développement dans la région des Grands Lacs» afin, éventuellement, «d’entreprendre des actions concrètes». Vraisemblablement, renseignent certaines sources présentes à cette rencontre, la réunion d’Addis-Abeba a permis d’aplanir, dans une certaine mesure, les différends entre, notamment le Rwanda et la RDC.

Les échanges ont abouti à la mise en place d’une force neutre internationale dans laquelle seront incorporées, outre les éléments issus des pays de la CIRGL, les forces de l’Onu et de l’UA. De sorte à «éradiquer le M23, les FDLR ainsi que toutes les autres forces négatives opérant dans l’Est de la RDC et pour assurer le contrôle et la sécurisation des zones frontalières».

Dans la foulée, il faut souligner qu’aucune mention n’a été faite sur le soutien que le Rwanda apporte aux rebelles du M23. La réunion s’étant contentée de noter qu’«aucun appui ne devrait être accordé aux M23, FDLR et autres forces négatives».

DES ZONES D’OMBRE

La lecture du communiqué final ayant sanctionné la réunion de la CIRGL à Addis-Abeba laisse un arrière-goût qui ne rassure pas quant à la réelle volonté des participants à apporter une solution durable. Tenez. Lorsqu’il s’agit du M23, les Etats membres de la CIRGL se limitent à une simple condamnation. S’agissant des FLDR, la CIRGL appelle à «une action militaire immédiate pour éradiquer cette menace». 

C’est un engagement à deux vitesses. Et Kigali en profite. On aura fait de sa préoccupation une urgence, au détriment de celle de Kinshasa, car en attendant la mise en place de la force neutre internationale, le M23 bénéficie d’un sursis et peut encore se la couler douce sur les localités qu’il occupe.

Cela revient à dire que la CIRGL n’aurait pas clairement défini les vrais contours de la force internationale à déployer aux frontières des pays membres.

L’option a été levée, certes mais sans pourtant entrer en profondeur. Ce qui pourrait, à coup sûr, en retarder la mise en œuvre.

SONS DISCORDANTS

D’aucuns auraient souhaité que la rencontre d’Addis-Abeba cerne et pénètre les causes profondes et les motivations réelles de la situation d’instabilité permanente de la RDC.

Selon ceux-ci, l’énigme des tensions récurrentes dans l’Est de la RDC se trouverait dans les rapports non sincères entre Kigali et Kinshasa.

Leurs ministres des Affaires étrangères ont fait des déclarations discordantes. Lorsque le Congolais Raymond Tshibanda se félicite des conclusions de la CIRGL, la Rwandaise Louise Mishikiwabo du n’en fait aucunement mention.

Pour Raymond Tshibanda, «la présence d’une force neutre internationale avec pour mandat d’assurer la surveillance et la protection de la frontière est un pas en avant dans la bonne direction». Quant à Louise Mushikiwabo, c’est le rôle de la Monusco, ouvertement engagée derrière les FARDC pour combattre le M23, qui l’intrigue. Sa déclaration traduit toute la haine de Kigali vis-à-vis des forces onusiennes. 

«Les Nations unies au Congo aujourd’hui, c'est treize ans d’existence et aucun résultat en termes de stabilité. Une des plus grosses forces de maintien de la paix dans le monde et des milliards de dollars chaque année qui sont dépensés. Je chercherais bien une raison pour laquelle je n’arrive pas à donner des résultats». Une preuve de plus qu’ils sont loin d’émettre sur une même longueur d’ondes. Et que, par ailleurs, entre les motivations de deux voisins, c’est presque le jour et la nuit.

Il reste que Kigali, tout comme Kampala, n’ont pas clairement manifesté leur volonté de contribuer à une paix durable dans l’Est de la RDC et dans la région des Grands Lacs. Au contraire, ils exportent leurs problèmes internes sur le territoire congolais et se complaisent d’une insécurité permanente en RDC, laquelle consolide leurs régimes respectifs.

La solution, si solution il pourrait y avoir, passe par leur engagement à se départir de leur double jeu mais aussi de leur convoitise des ressources naturelles de la RDC.

SCEPTICISME DANS L’OPINION PUBLIQUE

C’est donc sans surprise que la mise en place d’une force neutre internationale aux frontières, respectivement de l’Est de la RDC, est mal accueillie dans l’opinion congolaise. Le flou qui entoure la composition et la feuille de route de cette force sont autant d’indices qui ravivent ces inquiétudes.

Aux yeux des Congolais avertis, ce scenario, c’est du déjà-vu.

L’allusion est faite aux multiples opérations conjointes menées avec le Rwanda contre les FDLR mais qui n’ont pas donné les résultats escomptés. Dans l’opinion, Kigali et Kampala continuent à jouer aux sapeurs-pompiers pyromanes. L’on soupçonne la composition de la force internationale à envoyer en RDC. 

Elle pourrait comporter en son sein des militaires rwandais, ougandais, burundais et des éléments du M23. Ce qui, à la fin, ne serait qu’une machination visant, estime-t-on dans certains milieux, à officialiser l’occupation du territoire congolais, et par ricochet, garantir la pérennité de l’exploitation illicite des minerais de la RDC.

Une fois encore, la RDC vient d’être embarquée dans un jeu qui, à tout point de vue, n’est pas en sa faveur. Une force internationale aux frontières n’est pas la solution idéale à l’énigme de l’Est du Congo dans la mesure où elle met dans un même panier la victime (RDC) et ses bourreaux (Rwanda, avec dans l’ombre plusieurs puissances étrangères qui le soutiennent).

Une force neutre internationale, ce n’est ni plus ni moins que déshabiller Saint Paul pour habiller Saint Pierre. La multiplicité des armées aux frontières Est de la RDC va davantage compliquer l’équation sur le terrain au point de rendre impossible, voire inopérante, toute tentative d’éradiquer les forces négatives, dont le M23 et les FDLR.

[Le Potentiel]

RDC – Rwanda, Une force neutre aux frontières ne suffit pas

Réunis à Addis-Abeba en marge du Comité des représentants permanents de l’Union Africaine (Corep), les ministres de la défense et des affaires étrangères de onze pays membres de la Conférence Internationale pour la Région des Grands Lacs (Cirgl) ont convenu du principe de déploiement d’une force internationale neutre à la frontière entre la RDC et le Rwanda. 

Cette force se chargerait d’en assurer la surveillance, mais aussi de traquer les groupes armés négatifs qui sévissent de part et d’autre dans cette frontière. La réunion d’Addis-Abeba faisait suite à la vive tension qui règne entre Kinshasa et Kigali à la suite de l’agression rwandaise contre la RDC aussi bien par le soutien aux rebelles du M-23 que des troupes de l’armée régulière du Rwanda qui combattent aux côtés de ceux-ci.

L’implication du Rwanda dans l’instabilité à l’Est est déjà démontrée par les Nations Unies à travers un rapport complété par un addendum très détaillé. L’Union Européenne et plusieurs capitales occidentales ont ouvertement condamné Kigali et lui ont demandé de mettre immédiatement fin à son soutien aux rebelles.
Pas de nouveauté pour les Grands Lacs

Pour autant qu’une surveillance des frontières permettrait de mettre fin – on l’espère – à la balade meurtrière des groupes armés, il faut rappeler que cette mesure n’est pas une nouveauté dans les Grands Lacs. En son temps, Nicolas Sarkozy avait proposé une idée dans ce sens, mais qui n’avait retenu l’attention de personne. 

De même, l’Ituri avait connu l’intervention similaire à travers l’Opération Artémis. Il s’agit d’une mission militaire qui fut menée du 6 juin au 6 septembre 2003 par l'Union européenne au titre de la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD), sous l'autorité du Conseil de sécurité de l'ONU, selon sa résolution 1484 du 30 mai 20031. 

Le cas également de l’ »Opération Turquoise » qui fut est une opération militaire organisée par la France au Rwanda pour mettre fin au génocide. Cette opération aussi avait été décidée par l'ONU dans la résolution n° 929 du Conseil de sécurité. On ne cite pas, dans une moindre mesure, la balade kinoise de l’Eufor (Force de l’Union européenne) déployée avec des drones défectueux pour la surveillance des élections de 2006.

Si l’on doit ajouter à toutes ces opérations, celle éléphantesque de la MONUC-MONUSCO, on aboutit à un constat amer : en dehors, peut-être du cas de l’Ituri dans une certaine mesure, toutes ces opérations se sont soldées par des échecs. Pour le cas de l’Opération Turquoise, elle intervint trop tard, quand il y avait déjà eu environ 800.000 morts. Entre-temps, les forces engagées se distinguèrent par des actes barbares de viols des femmes et de trafics des ressources minières.
Identifier clairement le problème

La vraie solution à la crise de l’Est passe par une identification claire et nette des motivations à la base du bellicisme chronique du pouvoir de Kigali depuis maintenant 18 ans. Ce bellicisme s’est accru avec la découverte et l’exploitation des minerais rares dans cette région, notamment le coltan, à tel enseigne que l’Est de la RDC est devenu une sorte de Far West de toutes les puissances étrangères et des multinationales. 

Ces dernières sont éprises de l’exploitation des minerais, au besoin en mettant en place des forces armées irrégulières pour protéger leurs intérêts. Dans ce but, ils en sont arrivés jusqu’à exacerber les querelles intercommunautaires afin d’y maintenir un équilibre de terreur. Cela n’a, alors, eu pour conséquence que de raviver les querelles. Et partant, ces querelles ont connu leur plus grande complication avec la guerre intercommunautaire au Rwanda, une guerre dont la RDC souffre énormément jusqu’à ce jour.

La grande question que l’on peut se poser dans ce décor est de savoir de quelle efficacité pourrait être une force internationale de surveillance des frontières. Toutes les dispositions prises à l’échelle internationale pour résorber l’exploitation meurtrière des ressources de la RDC s’avèrent, à ce jour, inopérantes. 

On cite, par exemple, les mesures de traçage des « minerais du sang » qui n’ont pas endigué ces exploitations. C’est le cas spécifique aussi des Etats-Unis dont le Congrès avait pris, en 2010, une résolution imposant aux multinationales américaines de mentionner clairement l’origine de leurs minerais.

Par ailleurs, depuis plus de douze ans, les Congolais côtoient quotidiennement les casques bleus onusiens venus en mission d’observation et de maintien de la paix. Une mission dotée de tous les instruments lui permettant de détecter toute activité de nature à troubler la paix. 

Depuis douze ans, cependant, l’exploitation meurtrière des ressources minières n’a fait que prospérer et, à plusieurs reprises, des casques bleus avaient été pris dans ces trafics avant d’être remballés dans leurs pays d’origine où les Congolais ignorent ce qu’ils sont devenus.

D’où la question de savoir qui peut attester de la vraie neutralité d’une éventuelle force internationale de surveillance des frontières à l’Est de la RDC ? Quels genres de mécanismes faudrait-il mettre en place pour en assurer l’efficacité sur terrain ; quand on sait que les précédents ont démontré leur inefficacité active, et que ces forces à venir pourraient être composées d’hommes fournis par des pays qui sont indirectement impliqués dans les conflits récurrents dans l’Est de la RDC ?

Sanctionner le Rwanda au-delà des condamnations verbales

Il semble, à ce stade, que le plus grand danger que court la RDC est d’assister, à nouveau, à un galvaudage de la vraie réalité de la guerre actuelle. L’appel de Ban Ki-Moon à un dialogue entre Kagame et Joseph Kabila semble s’inscrire dans cet esprit. 

Il a, en effet, tendance à éluder la réalité pour passer l’éponge sur une question où un pays de la région des Grands Lacs a délibérément violé les instruments internationaux sur l’intangibilité des frontières, la non ingérence dans les affaires internes d’un pays voisin ou encore le pacte de non agression.

Les condamnations ouvertes ou feutrées du Rwanda dans son implication dans les actes belliqueux du M-23 traduisent, on ne peut plus, la reconnaissance de ces entorses. Dans tous les cas, il ne devrait pas être question que l’on s’en tienne à ces condamnations et aux appels à la cessation, par le Rwanda, du soutien au M-23. 

La communauté internationale, à travers le Conseil de sécurité des Nations Unies et d’autres organisations à pouvoir de coercition, devrait prouver la sincérité de son engagement à rétablir la paix dans les Grands Lacs.

Cette preuve passe nécessairement par des sanctions exemplaires à l’encontre de Kigali, sanctions allant des embargos sur l’achat des armes à d’autres formes, notamment économiques et même de restriction de mouvement de certaines personnalités rwandaises et le gel de leurs avoirs. 

Ce serait donc l’imposition de la paix. Sans cela, on assistera à un procès qui aboutit à l’établissement de la culpabilité d’un prévenu sans en arriver à des peines correspondant à ses crimes.

Pour l’avenir, la communauté internationale devra démontrer aussi son engagement pour la paix en s’impliquant activement dans la recherche des solutions aux germes conflictogènes qui perpètrent l’instabilité de la région des Grands Lacs. 

C’est le cas du mauvais épilogue qui a été réservé à la crise interne au Rwanda où continue de prévaloir les conflits intercommunautaires. Des conflits qui ont largement eu le temps de se répandre jusqu’au sein des communautés congolaises avec les conséquences que l’on déplore aujourd’hui.

[Jonas Eugène KOTA]
Congovirtuel

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