
La nouvelle faisant état de l’entrée imminente, au sein des Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) d’environ mille miliciens opérant sous le label d’une de nombreuses nébuleuses Mai-Mai basée au Nord-Kivu, donne la chair de poule à plus d’un Congolais.
Il y a vraiment de quoi se montrer anxieux au regard du profil de ces futurs combattants décrits pour la plupart comme des déserteurs de l’armée régulière.
L’inquiétude s’accroît davantage lorsqu’on pense qu’une partie de la province du Nord-Kivu est à feu et à sang à cause des maladresses commises en 2009 en décidant l’intégration automatique, dans les rangs des FARDC, d’anciens officiers et soldats déserteurs, regroupés au sein du CNDP (Conseil National pour la Défense du Peuple).
Pour la petite histoire, ces éléments égarés avaient refusé, en 2004, sous le régime 1+4 issu du Dialogue Intercongolais, de se faire « brasser » ou « mixer », à l’instigation de leur commandant en chef, le général Laurent Nkundabatware, agissant lui-même sous la dictée du Rwanda.
Au lieu de sanctionner sévèrement cet officier supérieur de l’armée nationale et sa bande de hors-la-loi qui s’étaient délibérément mis en marge de la discipline militaire de 2004 à 2009, le gouvernement congolais n’avait pas trouvé mieux que de leur accorder une « prime spéciale » concrétisée par une « amnistie générale » de leurs faits et actes ainsi que leur enrôlement sans conditions comme membres à part entière des troupes loyalistes.
Même leur exigence de ne pas être déplacés du Nord-Kivu avait été agréée sans restriction.
Toutes les concessions et faveurs consenties à l’ex-rébellion du CNDP l’étaient, insistait-on dans les cercles des officiels civils et militaires congolais, pour donner le maximum de chances à la paix dans la partie Est de la République.
Le général Bosco. Ntaganda, successeur de Laurent Nkunda à la tête de ce mouvement rebelle, après un coup d’Etat de Palais, n’avait pu être livré à là CPI (Cour Pénale Internationale), qui le réclamait à cor et à cri depuis 2006, pour la bonne et simple raison que les autorités congolaises considéraient l’exonération de ses crimes comme un des prix à payer à la paix.
La suite est connue. Mécontent du non respect, par e gouvernement congolais, de Accord du 23 mars 2009 au terme duquel le CNDP était supposé avoir renoncé à son statut de mouvement rebelle pour se muer en parti politique, le protégé de Kinshasa avait retrouvé son naturel de seigneur de guerre en avril 2012.
Mais, à l’image du scénario de Nkunda en janvier-février 2009, Bosco Ntaganda passait à son tour le flambeau de la rébellion à l’ex-colonel Sultani Makenga, promu aujourd’hui général de brigade, sous un nouvel label, celui du M23, qui vient de changer récemment de dénomination pour devenir «Armée Révolutionnaire du Congo».
Bref, depuis le mois d’avril 2012, des millions de Congolais meurent sous les balles d’un mouvement rebelle dont les officiers et soldats, bien qu’appuyés par des Rwandais et Ougandais, avaient feint pendant un moment d’avoir reconnu la légalité des institutions de la République et la légitimité de leurs animateurs.
Depuis 5 mois, les minerais et autres ressources naturelles de cette partie du pays sont l’objet d’un pillage systématique, du fait de la situation de non-Etat. Voici 5 mois que plusieurs territoires de l’Est échappent au contrôle du pouvoir central, ce qui accroît chaque jour la crainte de la balkanisation de l’Etat-Nation.
Des déserteurs pour quel résultat?
L’expérience du passé récent montre que le mariage FARDC-CNDP a plongé le pays dans une situation difficile. Au lieu d’amener la paix, l’Accord du 23 mars 2009 s’est transformé en un casus belli. Forts de la main tendue leur offerte en janvier-février 2009, les insurgés en sont aujourd’hui à revendiquer des grades militaires, postes politiques et administratifs qui mettent à mal l’architecture institutionnelle issue de la Constitution du 18 février 2006, telle que révisée en janvier 2011.
Au jour d’aujourd’hui, les responsables tant politiques que militaires de l’ex-M23, transformé en « ARC » (Armée Révolutionnaire du Congo), affirment haut et fort être les interlocuteurs incontournables du pouvoir en place à Kinshasa dans toute initiative visant le retour de la paix au Nord-Kivu.
Quel est le résultat recherché actuellement par l’état-major général des FARDC en voulant retomber dans l’erreur du passé, à savoir l’octroi d’un statut d’officiers et soldats réguliers à des miliciens traînant un sombre passé, celui de déserteurs ?
Dans une armée qui se respecte, il n’y a pas de pitié pour les indisciplinés, les mutins, les déserteurs, les criminels de guerre. Le Code militaire ne prévoit pas de régime de faveur pour les hors-la-loi. D‘où est venue l’idée d’intégrer des déserteurs, alors que le pays est encore en guerre.
A cause paradoxalement de la complaisance manifestée à l’endroit de Nkunda, Ntaganda, Makenga et leurs hommes, dont la place auraient dû être dans une prison et non pas dans la chaîne de commandement de l’armée nationale l’avenir de tous est hypothéqué.
Le Congo serait-il en panne de jeunes-gens et jeunes-filles capables d’exercer le métier des armes, pour que les FARDC se remettent en ménage avec des déserteurs, avec les conséquences que chacun peut imaginer ?
Quand va-t-on tirer les leçons de malheureuses expériences de « brassage » et « mixage » des membres des forces négatives avec les troupes loyalistes ?
C’est peut-être le lieu de faire le point sur la campagne de recrutement des jeunes à travers les 11 provinces de la République, annoncée dernièrement par l’état-major des FARDC.
Que s’est-il passé pour que l’on reparle d’intégration de miliciens de tous les dangers alors que la bonne option serait de maintenir le cap dans le voie de la réforme de l’armée nationale?
Kimp

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