Par son ouvrage "Le néo-colonialisme au Congo : complots contre la souveraineté congolaise", Pierre Yambuya Lotika Kibesi, muleliste et ancien directeur général à la DGM (Direction générale des migrations) sous Laurent-Désiré Kabila, tente de re-écrire, l'histoire de la République Démocratique du Congo sous forme d'un réquisitoire contre ses ennemis ou advsersaires.
Avec son autorisation expresse, nous publions intégralement le Tome III. Les points de vue exprimés dans cet ouvrage n'engagent que leur auteur.
LE NEOCOLONIALISME AU CONGO. Complots Contre la Souveraineté Congolaise 1920 – 2007
Kimbangu, Lumumba, Mulele et Kabila
Tome III
Pierre Yambuya Lotika Kibesi
(mars 2007)
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DEDICACE
A tous les Congolais qui ont sillonné le monde, y compris moi-même pour avoir été dans plus de 70 pays, lesquels : 25 en Europe, 27 en Afrique, 9 en Amérique, 10 en Asie et 2 en Océanie. Est-ce que nous aimons voir notre pays devenir comme ceux que nous visitons? Je dirai NON.
Que nous n’ayons pas peur d’être cités nommément dans des ouvrages qui retracent la poursuite de la destruction très avancée de notre pays sur tous les plans à cause de la cupidité, le modèle préféré de notre gouvernance depuis la fin de la colonisation.
Beaucoup de compatriotes ont une haine mortelle envers ceux qui écrivent avec franchise notre histoire quotidienne, pleine de contradictions de la bonne gouvernance d’un Etat qui se veut moderne ou qui veut le devenir réellement. Parler de reconstruction du pays est une honte, car on ne peut reconstruire que ce qu’on a détruit.
Et détruire sans l’intelligence de reconstruire est la preuve de la mauvaise volonté de l’être humain dans la société. Les mobutistes et leur doctrine nous le prouvent depuis 47 ans. Personnellement, je n’ai pas peur d’être cité dans les ouvrages de la gestion de notre nation, car mon souci majeur est celui de voir notre pays retrouver ne fut-ce que son image du Congo-Belge.
Malheureusement, les décideurs congolais ne veulent pas m’intégrer dans cette gestion, malgré mon dévouement public car je ne suis pas manipulable en leur faveur contre les intérêts de notre pays et de notre peuple, le plus patient de ce monde.
Je garderai jusqu’à la mort le patriotisme de Simon Kimbangu, Patrice Lumumba, Pierre Mulele et Mzee Kabila contre le néocolonialisme, cette malveillante doctrine mobutiste qui est le fondement de notre misère nationale dans l’un des pays les plus riches du monde. Le peuple congolais retrouvera ses victoires du 30 juin 1960 et celle du 17 mai 1997.
L’auteur
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Du même auteur
Il sangue di un popolo senza parola (TREZAIRE, aprile 1986 – Bologna/Italia)
Les missions spéciales des Forces Armées Zaïroises (Revue Nouvelle, mai-juin 1986 – Bruxelles)
Zaïre, l’abattoir : un pilote de Mobutu parle (Edition EPO, janvier 1991 – Bruxelles)
Autopsie d’une armée sans coeur ni âme Mobutu, je suis témoin oculaire de vos crimes (1ère Edition, juin 1996 – Rome), (2ème Edition : Edition ZAZETA, avril 1998 – Kinshasa)
Quelque soit le prix à payer, la révolution doit se réaliser pour l’intérêt du peuple (décembre 1997 – Kinshasa)
Les fondements d’une coopération migratoire entre les deux Congo (juillet 2001 – Kinshasa)
Le Développement de la RDC par la DGM (1ère Edition : mai 2002 – Kinshasa), (2ème Edition : avril 2003 – Kinshasa)
Le néocolonialisme au Congo (Tome I)
La révolution, Le parcours, les hommes (février 2006 – Paris)
Le néocolonialisme au Congo (Tome II)
Ce que le monde doit savoir – Situation alarmante au sein de la DGM – Les vampires d’Etat.
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PRELUDE
Dédicacé à l’ensemble de notre peuple, ce Tome III a pour ambition de montrer l’immense confusion qui, depuis bien avant l’indépendance, immortaliser une relève politique sans espoir pour un avenir florissant de notre nation. Cette confusion est revêtue d’une élévation doctrinale et morale qui en a modifié les règles de la bonne gouvernance de l’Etat.
C’est pour cette logique que les Congolais ne connaissent pas les valeurs de l’existence humaine du monde moderne. C’est pour vouloir me soustraire à ça, que je tente chaque fois de restituer les faits jour après jour à la place de ceux qui devraient être naturellement la bibliothèque de notre histoire coloniale et néocoloniale, mais qui ne jouent pas ce rôle, car ils n’ont aucun souci pour notre peuple et son avenir.
Nos politiciens ne veulent jamais écrire leur culture politique, car ils sont responsables de cette convoitise et désir régressif qui endeuillent notre nation. Ils ont collaboré à l’implantation du néocolonialisme contre notre bien-être national, certains en se camouflant dans la peau d’un patriote, sans qu’ils soient des patriotes comme Kimbangu, Lumumba, Mulele et Mzee Kabila.
Un grand homme politique français m’a dit le 15 janvier 2007 : pourquoi aucune puissance étrangère n’arrive pas à dicter aux Libyens ce qu’il faut faire? C’est parce que les dirigeants libyens sont honnêtes et respectueux, ce qui est le contraire des dirigeants congolais, car vous êtes égoïstes, cupides, malhonnêtes et irresponsables dans un pays où les habitants auraient dû être plus heureux qu’au Portugal, qu’en Suisse, qu’en Italie, qu’en Belgique et même qu’ici en France avec toutes les richesses naturelles que regorge le Congo.
Monsieur Yambuya ne considérez pas mes propos comme des injures, mais je suis très choqué de la misère qui habite le peuple congolais. Vous avez sacrifié deux hommes honnêtes dans votre histoire : Patrice Lumumba et Laurent Kabila.
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NOTE D’AUTEUR
Après avoir vécu comme tous les enfants dans sa propre famille, l’homme devient grand de mentalité et cherche à s’arranger d’abord seul pour pouvoir surmonter les faits quotidiens que tout être humain (riche ou pauvre) rencontre dans ce dur parcours de la vie terrestre.
Ayant vécu à la fois dans ma nature africaine, et plus particulièrement dans notre immense Congo au centre de l’Afrique, un Congo beau de ses divers paysages que j’adore tant pour l’avoir connu du Sud au Nord et de l’Ouest à l’Est en découvrant la réalité de l’ensemble de son étendue géographique telle que conçue par les hommes, et non par la volonté de notre Dieu selon l’enseignement chrétien.
Ce beau pays comme tous les autres de l’Afrique, est issu de la création géographique artificielle des hommes sans aucune ressemblance culturelle avec l’Africain, c’était dans ce que nous gardons dans nos mémoires, la conférence internationale de 1885 à Berlin.
Sur la table de cette répartition, il n’y avait aucun fils de cette belle Afrique. Je me sens très déshonoré face à nos ancêtres africains, ceux qui ont vraiment vécus dans la dignité sans la technologie de pointe que nous envions aujourd’hui, mais très développés dans ce qui était leur propre civilisation.
Ils avaient leurs architectes, leurs chasseurs, leurs cultivateurs, leurs pêcheurs, leurs artisans…dont l’exemple est encore vivant et me rend malade chaque jour lorsque j’aperçois ces beaux instruments ancestraux des pêcheurs wagenia à Kisangani.
Il s’agit d’instruments placés au milieu des rapides du fleuve Congo par les moyens propres sans la moindre modification apportée par la technologie européenne. Je me sens déshonoré car je sais que mes ancêtres qui vivaient à la même époque que le Seigneur Jésus-Christ comme aussi aux époques de Mahomet ou de Bouda, n’ont pas survécus grâce aux aides alimentaires venus de là où il y avait l’abondance.
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Ce petit rappel doit nous en dire long sur la différence de la vie dont nous affrontons aujourd’hui, y compris une vie injuste à cause de l’arme de la supériorité technologique entre les hommes de cette planète terre.
Si l’injustice existe, d’où vientelle? De notre propre volonté ou de la volonté de Dieu le créateur? Si elle vient de la volonté de Dieu créateur, à quoi bon dire de Dieu qu’il est miséricordieux.
De même il serait injuste d’impliquer le Diable dans la misère et le bonheur des hommes, car qui l’a créée et lui a donné toutes les forces? Je parle comme nègre naturel, et je le resterai dans ma peau durant tout mon séjour terrestre, car ce n’est pas le fait de vivre dans les pays industrialisés et de haute technologie qui pourra transformer ma peau de noire en blanche.
Certes, je peux changer de mentalité pour adhérer à celle de la recherche universelle pour le bien-être moderne et le respect entre les hommes sans distinction raciale, c’est d’ailleurs ma religion d’appartenance.
Toutefois, nous avons aussi le devoir de retracer l’histoire de notre pays depuis la colonisation, en nous appuyant des recherches libres de tout un chacun sans considération raciale, car sans connaissance du passé, il est quasiment impossible de réaliser mieux pour l’avenir.
Les hommes ont le devoir de collaborer sincèrement en équilibrant le bon et le mal, c’est-à-dire que l’apport de chacun doit aller dans le sens positif du bien-être humain sans considération d’une quelconque supériorité.
A titre d’exemple : nous devons oublier la théorie du début de la colonisation, pendant laquelle le Roi Léopold II de Belgique conseillait publiquement les missionnaires catholiques qui venaient pour la première fois d’évangéliser les noirs au Congo, il leur disait : Vous partez au Congo non pour les apprendre le Bon Dieu, car les Congolais connaissaient depuis toujours leur Dieu (Nzambi ya Mpungu), mais leur faire croire notre Dieu de blanc au nom de l’évangile, certainement ils vous poseront des questions sur le comportement que vous aurez là-bas contrairement à la Bible, et vous les répondrez : faites ce que je dis et non ce que je fais.
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D’ailleurs, les premiers missionnaires se présentèrent à nos ancêtres comme des êtres descendus directement du ciel et non nés comme tous les êtres humains à partir de l’histoire d’Adam et Eve selon la même Bible.
Nos ancêtres impressionnés par les longues barbes de ces missionnaires, leurs chaussures, leurs pipes, leurs chapeaux etc.…se laissèrent entraînés dans la nouvelle croyance qui finira par porter ses fruits, la soumission.
L’histoire de la religion chrétienne nous a appris qu’adorer nos magnifiques statues, des statues réalisées par l’intelligence de nos ancêtres dans notre pays, voulait dire être au service du Diable. Nous les avons abandonné au bénéfice du chemin de la croix de Jésus-Christ, Joseph, Marie et des milliers des Saints blancs.
Ainsi, toutes nos oeuvres ancestrales acheminées en Belgique pendant la colonisation constituent le prestige international du Musée Royal de l’Afrique Centrale à Tervuren (Bruxelles), qui reçoit chaque année des milliers des visiteurs des pays développés.
Ce qui est triste, c’est de constater que les Congolais de la diaspora ne s’intéressent pas à découvrir ce magnifique Musée qui représente leur valeur millénaire, avant même la colonisation belge.
En 1920, un noir congolais avait compris les raisons des droits de l’homme sans découvrir l’Europe libre ni son histoire des libertés. Il se lança dans une intense activité pour défendre le bien-être pour tous les hommes sans distinction raciale, c’est-à-dire des blancs et des noirs qui auraient dû vivre dans l’égalité sociale bien que les premiers jouissaient de la supériorité technologique très développée dans la transformation des matières premières qui nous ont été léguées par le Bon Dieu.
Ce Congolais s’appelle Kimbangu baptisé Simon. Sa lutte est l’histoire vraie d’attachement entre les hommes à travers l’unique parole de Dieu sans considération religieuse « l’Amour du prochain ».
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Malheureusement, il a été maltraité exagérément pendant la période allant de 1921 à 1951, pendant laquelle il a subi une longue détention de 30 ans. Il mourut en détention à Elisabethville en 1951, sans que la déclaration des droits de l’homme du 10 décembre 1948 ait pu le défendre une seule fois.
Au début de sa lutte syndicale, il était ouvrier des Huileries du Congo-Belge (HCB) à Léopoldville.
Alors que Simon Kimbangu se trouvait en prison à plus de 3.000 Kms de sa base (N’Kamba village), et pour atteindre Elisabethville, l’administration coloniale l’enchaîna et l’escorta de manière inhumaine, comme cela se passe aujourd’hui encore en Europe pour expulser certains immigrés clandestins indésirables et les ramener en Afrique.
Les partisans de la lutte de Kimbangu furent relégués vers l’Est du pays avec interdiction de prononcer ce nom dans tout le Congo-Belge. Cette manière coloniale d’agir rendit Simon Kimbangu le noir le plus populaire de la colonie à partir de 1921.
En réalité Kimbangu, comme la plupart des enfants de cette époque-là, fût baptisé chrétien protestant, d’autres furent baptisés catholiques jusqu’à devenir catéchiste.
Devenu, lui aussi, catéchiste, il découvrit la Bible. Après l’avoir très bien compris, il se lança dans la lutte pour ramener les Européens à considérer les noirs comme des êtres chers, car il n’y avait aucune raison de la supériorité des uns envers des autres.
L’intelligence de ceux qui avaient créé le Congo géopolitique, des êtres venus de l’autre côté de la Méditerranée devrait servir tous les êtres humains sans distinction raciale ni considération technologique. Nous pouvons même définir la lutte de Kimbangu comme la première déclaration des droits de l’homme au Congo-Belge.
La parole magique de Kimbangu durant cette lutte était : Faites ce que je dis en suivant l’exemple de ce que je fais, c’est-à- dire lutter contre les conseils du Roi Léopold II aux missionnaires : faites ce que je dis et non ce que je fais.
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Ainsi, la réputation de Kimbangu syndicaliste déborda les attentes de la masse dans le district du Bas-Congo. Il fût alors considéré comme l’envoyé de Dieu pour sauver les noirs. Des malades quittèrent les hôpitaux, des aveugles, des sourds et des muets, ainsi que des handicapés allèrent se faire guérir auprès du nègre Kimbangu dans le village de N’Kamba.
On lui ramena même des morts car il était considéré le sauveur des Noirs, envoyé par Dieu pour leur cause. Toutes les difficultés des noirs dans la Province de Léopoldville auraient dû trouver des solutions auprès de Simon Kimbangu. Cette célébrité n’avait plus de barrière vis-à-vis des européens, dont la vraie raison d’arrestation de Kimbangu par l’administration coloniale était de le séparer de sa base.
Kimbangu isolé en prison au Katanga, les persécutions, les arrestations, les enlèvements et les relégations de tous ceux qui prononçaient son nom s’intensifièrent dans toute la province de Léopoldville car ils étaient considérés comme ses militants.
Partout où se trouvaient les relégués kimbanguistes, c’était en fait l’implantation de la première lutte clandestine du nationalisme au Congo-Belge sans qu’eux-mêmes le sachent.
Ensuite pour affaiblir calmement cette lutte Kimbanguiste, l’administration coloniale organisa une vaste propagande au profit du même Simon Kimbangu, en le faisant passer pour le chrétien le plus exemplaire, car en prison il consacrait tout son temps à la lecture de la Bible.
C’est ainsi que les colonialistes ont détourné la révolution congolaise à l’époque et qu’ils ont fait pénétrer dans l’esprit des kimbanguistes que leur leader est un chrétien modèle.
Voilà comment la renommée chrétienne de Simon Kimbangu comme serviteur exemplaire du Seigneur Jésus a écrasé sa renommée de syndicaliste, et comment tous ses militants ont été contraints de suivre l’exemple pour la pleine satisfaction de l’administration coloniale belge.
Ainsi les hôpitaux étaient de nouveaux remplis par des malades noirs, les ouvriers avaient repris leur travail, car plus de 60 % des activités de la production coloniale de l’époque dans la province de Léopoldville étaient paralysées.
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Mais, la question est de savoir, pourquoi un chrétien pacifique a-t-il donc été torturé, maltraité, enchaîné, déporté et isolé dans une prison à plus de 3.000 Kms de sa base? Pourquoi aurait-il provoqué la relégation de 37.000 familles de tribu Mukongo, constituées de plus de 150.000 personnes entre 1921 et décembre 1959, alors qu’un des articles de la déclaration universelle des droits de l’homme en 1948, autorise chaque être humain sur la terre à pratiquer sa croyance religieuse librement?
Pourquoi Kimbangu n’a-t-il pas bénéficié de cette liberté ne fut-ce que pour les 3 dernières années de sa vie? Huit (8) ans après la mort de Kimbangu, donc en décembre 1959 ou encore Six (6) mois avant l’indépendance du Congo, le kimbanguisme a été reconnu comme religion chrétienne noire du Congo-Belge, entre-temps les vieux militants syndicalistes et leurs nombreux petits-fils avaient complètement oubliés la vraie lutte syndicale de Simon Kimbangu.
En tout cas, si les colonialistes avaient reconnue en 1921 la raison de la lutte de Kimbangu, nous aurions alors assisté à la vraie naissance d’une grande société multiraciale dans le monde.
Le Congo-Belge serait devenu réellement le pays noir le plus développé de notre monde. Si je viens de brosser brièvement l’histoire de Simon Kimbangu dans ce troisième Tome du Néocolonialisme au Congo, c’est tout simplement pour prouver que notre lutte, la lutte des hommes justes et de paix pour le bien-être moderne dans notre pays ne date pas d’aujourd’hui.
Ainsi, nous devons notre reconnaissance à Patrice Lumumba, Pierre Mulele et Mzee Laurent Kabila pour avoir été les seuls patriotes jusqu’à présent de poursuivre fidèlement l’enseignement de Simon Kimbangu, la seule arme qui nous délivrera définitivement du néocolonialisme.
Ces trois patriotes ont réussi à faire la différence entre le kimbanguisme et le christianisme, ce sont donc les seuls vrais kimbanguistes, qui, à notre tour, nous devons suivre leur exemple, la seule voie pour notre libération. Bonne et attentive lecture.
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CHAPITRE I
REECRIVONS NOTRE HISTOIRE DANS SA VERITE QUI SAUVERA LE CONGO
Le mobutisme est la doctrine qui tue par l’inversion des valeurs (la faim, le manque de soin de santé, le manque d’éducation, la cupidité, l’immoralité, l’égoïsme, la destruction de toutes les infrastructures de base, la démagogie, le mensonge…).
Tandis que le colonialisme belge, bien qu’il ait été exploiteur de nos richesses naturelles et humaines, a donné aux Congolais 4 repas variés par jour, les soins de santé, la moralité, l’éducation, les infrastructures de base, encourageait le développement, mais aujourd’hui la souffrance continuera à exister dans notre monde pendant plusieurs siècles encore, à cause des calamités naturelles, mais surtout parce que voulue par les hommes égoïstes comme les néocolonialistes mobutistes et leurs protecteurs dans notre pays.
Le mobutiste est tout être humain sans distinction raciale qui est adepte du mobutisme comme le chrétien l’est pour le christianisme, le bouddhiste pour le bouddhisme, le musulman pour l’islam, etc.…
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Comme les hommes bâtissent toujours l’avenir sur leur propre passé, et que pendant notre existence le passé est toujours permanent car le monde ne se videra jamais des êtres humains, il faut que chacun de nous n’appartenant pas au mobutisme transmette la connaissance de son expérience à d’autres générations pour libérer réellement le peuple congolais de ce néocolonialisme.
La publication de ce troisième Tome signifie qu’il existe déjà les Tome I et II, que les lecteurs ont lus dans l’objectif consistant de lutter pour leur souveraineté nationale et le bien-être universel en général, et en RDC en particulier parce que notre espace géographique.
Les Africains doivent valoriser leur capacité intellectuelle moderne devant l’avancée technologique occidentale et asiatique, en s’acceptant sur leur sol sans considération des frontières.
Dans certains de mes écrits, comme les deux éditions du « Développement de la RDC par la DGM », je ne cesse de développer mes idées à ce sujet, car ce vaste territoire doit être un jour une « Terre d’Avenir pour Tous ».
C’est pourquoi, la première chose est de demander plus particulièrement aux Congolais de cesser leurs tentatives de vouloir titulariser la gestion de l’Etat par le clientélisme, le népotisme, le clanisme, le tribalisme, le régionalisme et bien d’autres formes de pratiques des pouvoirs néocoloniaux, contre lesquels Mzee Laurent Kabila s’était sacrifié pour les vaincre, en présence du risque permanent d’une remobutisation.
Aux Occidentaux, aux anciens du bloc soviétique, réunis aujourd’hui dans l’Union Européenne, et à certains Asiatiques, en l’occurrence les Chinois et les Nord-coréens, nous demandons de lutter sereinement ensemble avec les Congolais pour construire le destin d’une vie heureuse dans la paix, et nous leur demandons donc de refuser absolument de fournir les armes en RDC sans exclure une armée vraiment républicaine pour défendre son intégrité territoriale. Car dans le passé récent l’attitude de ces pays a permis des décors très douloureux de plusieurs millions des morts, de
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Congolais brûlés vifs, coupés en morceau alors qu’encore vivants, enterrés vivants, de femmes violées, de seins et de bras coupés, de Pygmées mangés par la seule volonté des agresseurs d’août 1998.
Dans nos écrits, nous ne pouvons pas cacher la vérité de notre situation quotidienne telle que nous la vivons sous nos yeux et qui est connue par tous les misérables congolais victimes de l’égoïsme mobutiste qui se perpétue comme le christianisme, l’islam, l’indouisme, le bouddhisme, car notre souhait est celui d’être présent d’une manière permanente jusqu’à ce que notre peuple connaisse le bien-être équitable pour tous.
Notre énergie kimbanguiste n’est pas de nature religieuse, mais elle prend sa force de cette lutte nationaliste inspirée par Kimbangu et poursuivie par Lumumba, Mulele jusqu’à l’avant dernière épreuve caractérisée positivement par Mzee Laurent Kabila en faveur des opprimés.
Dans cet ouvrage, je veux tout simplement définir la confusion néocoloniale congolaise, qui risque grandement d’enfermer notre peuple dans une résignation perpétuelle.
C’est pourquoi j’aimerai bien commencer par me poser la question : Quel mal avons-nous commis à Dieu depuis la création de ce monde pour qu’il puisse nous punir de cette façon? Nous ne devons pas cependant perdre l’espoir au plus profond de nous, car nos ancêtres, qui n’ont pas connu la race blanche dominante, étaient des hommes dignes sans modernisme par rapport à la vie désastreuse que nous endurons aujourd’hui au nom du tiers-monde.
De quoi proviendra la solution des Congolais pour se développer et jouir du modernisme actuel dans sa croissance mondiale? Entre Dieu créateur des matières premières et l’homme blanc transformateur moderne de ces matières premières : A qui de deux, devons-nous notre destin pour jouir de ce bien-être moderne?
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La visite du Pape Jean-Paul II au Sénégal et plus particulièrement à l’île de Gorée, interpelle toujours ma conscience de Noir au regard de ce monstrueux centre de transit des esclaves noirs et ses cruautés pendant des siècles?
Ce triste souvenir a poussé le Pape à solliciter le pardon pour l’acte commis par des chrétiens européens qui avaient la bible sous leurs épaules. Cette parole de Dieu qui leur enseignait l’amour dans ces 10 commandements depuis plus de 1600 ans avant l’institution de ce sinistre marché chrétien de l’esclavagisme transatlantique.
Comme l’homme possède cette capacité de tout transformer, l’abolition officielle de ce marché séculaire d’esclavage de l’Afrique vers l’Amérique, alors le nouveau monde, allait engendrer les colonisations chrétiennes sur tout le
continent africain. Ces colonisations étaient sans aucune contestation l’ouverture de l’Afrique au modernisme européen déjà très avancé en Europe et en Amérique. Notre génération aujourd’hui en 2007, nous qui sommes nés aux années 1950 et certains de nos parents, dont certains sont encore en vie, et nos grands frères qui ont vécu une bonne partie de la colonisation belge, peuvent affirmer que chaque jour de la vie est une expérience de plus qui permet à l’homme d’évoluer vers le changement au profit de l’intérêt de la communauté humaine.
Il n’est plus question d’évoquer ce que nos arrières grands-parents ont vécu à la naissance des colonisations européennes, car aucun d’eux n’est en vie aujourd’hui. Le plus prestigieux d’entre eux, est Simon Kimbangu, dont nous devons connaître la réalité de la lutte qu’il a menée pour la promotion de l’homme noir congolais en particulier et des noirs du monde en générale.
Il n’avait pas une formation scolaire que nos parents et grands-parents, nés à partir de 1908 quand l’Etat Indépendant du Congo devint colonie Belge, n’ont commencé qu’à obtenir en 1920. Malheureusement, nous ignorons encore la force qui a défini la vie nationaliste de Simon Kimbangu légèrement bien
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avant le début de ses oeuvres rédemptrices le 6 avril 1921 à N’Kamba pour dire que la lutte de Kimbangu avait bien commencé en 1920 à Léopoldville. Alors ouvrier des Huileries du Congo Belge (HCB), il guida pour la première fois dans la colonie une grève générale des ouvriers noirs pour réclamer les bonnes conditions du travail et de rémunération équitable par rapport aux blancs.
Cette grève paralysa les usines des HCB pendant plusieurs jours et lui valu l’expulsion de Léopoldville vers son village natal qui est N’Kamba.
Bref, le Congolais d’aujourd’hui, pour sortir de la naïveté qui le caractérise, doit chercher à connaître la réalité de la lutte de Simon Kimbangu. Patrice Lumumba né en 1925, est le premier Congolais à poursuivre cette oeuvre syndicale de Simon Kimbangu dans les Huileries du Congo Belge (HCB), non pour s’insurger contre les colonialistes, mais pour que les conditions sociales soient équitables sans distinction raciale dans l’ensemble de la colonie.
Cette lutte de Kimbangu, héritée par Lumumba, a même une finalité commune, car tous les deux sont morts dans la même ville (Elisabethville) qui gérait le plus grand poumon économique de notre pays colonisé, y compris peu après son indépendance.
Le premier est mort le 12 octobre 1951 pendant son emprisonnement et le second 6 mois/17 jours après l’indépendance en janvier 1961 par assassinat organisé par la CIA sur décision de la Maison Blanche.
Malgré certains méfaits de la colonisation, surtout celui d’avoir empêcher Simon Kimbangu de remplir sa tâche librement alors que la lutte syndicale était reconnue en Belgique, nous devons reconnaître que le travail de construction du Congo moderne par les Belges a été très épuisant dans un milieu contraire à leur civilisation et au développement.
En tout cas, nous devons avouer aujourd’hui le mérite du Roi Léopold II pour la transformation de la jungle en un pays moderne quelque soit les atrocités commises pour obliger les Congolais à s’impliquer dans le travail de la construction de leur pays.
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Je me souviens avoir été bénéficiaire de statut européen à l’âge de 7 ans, ce qui m’a permis d’étudier à l’Athénée Royal de Stanleyville en 1957, car mon père était parmi les premiers immatriculés noirs du Congo-Belge et jouissait donc du privilège d’évolué congolais.
Il y avait à cette époque trois catégories des habitants au Congo : les autochtones dans leur entière civilisation, les autochtones évolués à la civilisation européenne et les Européens développés.
La présence des enfants noirs dans les institutions scolaires européennes de la colonie belge, était sûrement la préparation d’une société multiraciale équitable dans la gestion du pays entre les noirs et les blancs pour un destin commun. Car ce n’était pas non plus facile de passer de la civilisation noire au modernisme européen et à son développement technologique.
C’est exactement la pensée de Simon Kimbangu alors ouvrier des Huileries du Congo Belge (HCB) à Léopoldville en 1920. Nous pouvons même qualifier l’actuel Président Brésilien, Lula, qu’il est inévitablement d’inspiration de Simon Kimbangu, car né des parents pauvres dans un petit village de la jungle brésilienne à plus de 2.000 kilomètres de Sao Paulo.
Il amorça la lutte syndicale dans une usine métallurgique comme simple ouvrier, aujourd’hui, les résultats se font sentir positivement en faveur de la classe misérable brésilienne. De même l’histoire de Valessa en Pologne, rentre dans l’inspiration de Simon Kimbangu en 1920.
Valessa est né des parents pauvres et reçu la formation technique d’apprentissage au niveau le plus bas, sans un diplôme des humanités ni d’université. Il s’engagea comme simple ouvrier électricien dans la métallurgie navale polonaise, et deviendra très vite militant syndicaliste jusqu’à être élu premier Président de Pologne post communiste.
En remontant légèrement l’histoire congolaise, Patrice Lumumba est de l’inspiration de Simon Kimbangu car né des parents pauvres de la forêt de Katakokombe dans le Kasaï en 1925, et sans diplôme des humanités de l’époque, car sa formation scolaire se limita au niveau de l’école primaire chez des missionnaires protestants bien que des parents catholiques.
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Le très jeune Lumumba quitta ses parents pour s’installer à Stanleyville et il s’engagea comme simple agent des services postaux. Il devint vite un self-made-man assidu de la lecture, plus particulièrement de l’histoire européenne, surtout la révolution française.
Ainsi, il poursuivit la lutte de Kimbangu pour la promotion de l’homme noir dans la colonie belge et en 1955 il fut l’unique noir à rencontrer à huit clos le Roi Baudouin 1er lors de sa première visite officielle au Congo-Belge. Le compte rendu de cette rencontre est resté le plus grand secret jusqu’à leur mort respective.
L’abolition du statut colonial fut le cheval de bataille de Patrice Lumumba dans sa foi entièrement kimbanguiste pour l’unité entre les hommes sans distinction raciale, et ce jusqu’à obtenir le 30 juin 1960 l’indépendance du Congo.
Par malheur, dans le climat de guerre froide entre les deux supers grandes puissances idéologiques de l’époque, le Président des Etats-Unis d’Amérique, Eisenhower, dans une réunion spéciale du Conseil National de Sécurité, tenue le 18 août 1960 à la Maison Blanche, contre Patrice Lumumba avec Allen Dulles, le patron de la CIA, et son frère Dulles Secrétaire d’Etat, ceux-ci décidèrent l’arrêt de mort de Patrice Lumumba.
Toutes les manoeuvres des 5 et 14 septembre 1960 contre Patrice Lumumba n’ont de sens que si elles sont rapportées à la décision prise le 18 août 1960 à la Maison Blanche en commun accord avec les anciennes puissances coloniales de l’Afrique.
Pourquoi toutes ces puissances auraient-elles eu peur de Lumumba qui ne disposait d’aucune arme atomique contre elles? Et pourquoi ne lui ont elles pas laissé le temps de gouverner durant les 65 jours de sa primature?
Mobutu tua personnellement Lumumba par une balle dans la tête le 17 janvier 1961 à Elisabethville. Antoine Gizenga, Vice-premier Ministre de Lumumba, se retrancha avec le pouvoir populaire à Stanleyville (bunker du patriotisme congolais) dans la Province Orientale, mais il fut traqué par la Maison Blanche, la CIA et les anciennes puissances coloniales, jusqu’à ce qu’elles obtiennent gain de cause de manière maléfique avec le conclave de Lovanium à Léopoldville.
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Antoine Gizenga, l’héritier du pouvoir populaire de Lumumba, se retrouva en prison meurtrière de Kasa-vubu, Mobutu et Adoula à Bulambemba sous la supervision musclée de Victor Nendaka. Tout ceci pour barrer la route à l’accomplissement de la lutte ouvrière amorcée par Simon Kimbangu en 1920 dans les Huileries du Congo Belge (HCB).
Pour sauver cette longue lutte nationaliste engagée en 1920, Pierre Mulele, Christophe Gbenye, Gaston Soumialot, Laurent Kabila et Nicolas Olenga face au néocolonialisme, n’ont eu d’autre choix que la lutte armée amorcée le 1er janvier 1964 dans le Kwilu et en avril 1964 à l’Est, qui libéra plus de 60 % de notre territoire national.
Avec le soutien de l’Occident, cette victoire de la masse paysanne congolaise fut écrasée par l’armée de l’OTAN et de mercenaires le 24 novembre 1964 par l’agression anglo-belgoaméricaine contre la ville de Stanleyville, capitale du patriotisme congolais.
Pierre Mulele sera sauvagement assassiné par Mobutu et ses sbires de Bomboko, Nendaka, Bobozo, etc.…au début du mois d’octobre 1968. Certains dirigeants lumumbistes avec à leur tête Christophe Gbenye rentreront à Léopoldville de Mobutu en 1970 pour effacer l’histoire de la victoire de 1964 sans aucune préparation de la relève ni écrire sa réalité, tellement ils avaient mordu profondément l’hameçon néocolonial mobutiste.
Les plus déterminés, malgré leur retour au pays, subirent les emprisonnements et humiliations jusqu’à aller mourir en exil à l’étranger comme, par exemple, le valeureux Lt-Général Nicolas Olenga.
Fort de cette détermination lumumbiste, le plus jeune de tous les dirigeants mulelistes de 1964 refusa de se rendre aux néocolonialistes de Léopoldville et résista dans les maquis des montagnes d’Ewa-Bora (Vent calme) aux abords du lac Tanganyika, frontalier avec la Tanzanie où il plaça sa base arrière.
Il s’agit bien de Laurent Kabila, devenu Mzee (Sage) en octobre 1996, dont la fermeté patriotique a eu raison au néocolonialisme en chassant spectaculairement leur chef de file, coiffé d’une toque de léopard, le 17 mai 1997 pour aller mourir dans l’humiliation de l’histoire au Maroc au mois de septembre de la même année.
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Il a été enterré comme un inconnu au cimetière chrétien de Rabat. Même ses nombreux protecteurs étrangers au nom de l’anti-lumumbisme ne lui ont pas rendu les derniers hommages ni lui dire adieu.
Comme dira Honoré Ngbanda dans son livre : Les derniers jours du Maréchal Mobutu : le Président Mobutu était arrivé à Lomé à bord de l’avion de Jonas Savimbi comme un sac d’haricots.
Toutefois l’indépendance du Congo le 30 juin 1960 avec très peu des patriotes convaincus et peu instruits au niveau supérieur mais ayant à leur tête Patrice Lumumba, se traduisait aussi par la reconquête de l’identité de l’homme noir dans le monde.
C’était grâce à l’africanisme prêché par le plus grand combattant de l’indépendance de toute l’Afrique, en l’occurrence N’Kwame Kruma qui a su sortir le Ghana du colonialisme britannique momentanément en 1954 et définitivement en 1957.
Il déclarait tout haut que l’indépendance du Ghana ne valait rien sans la libération de toute l’Afrique, pour que naissent les Etats-Unis d’Afrique qui permettraient le retour sur la terre de leurs ancêtres de tous les noirs vendus en Amérique par des chrétiens européens.
En septembre 1958, cet autre emblème de l’africanisme, Sékou Touré arracha l’indépendance de Guinée. Comme le voulait la nature coloniale, ceci a été considérée une humiliation par le Général De Gaule, Président du pays de la prise de Bastille le 14 juillet 1789, qui a fait de la France l’une des plus grandes démocraties dans le monde.
Sékou Touré connut alors un isolement total de la part de tous les colonisateurs en Afrique. Ainsi, Conakry et Accra deviendront les plaques tournantes de l’Afrique en lutte pour sa souveraineté commune avec le soutien de l’Egypte d’Abdel Gamal Nasser, cet autre unitariste africain ensemble au Mali de Modibo Keita et de l’Algérie, indépendante en 1962, gouvernée par le Président Ben Bella après des longues années de guerre contre la France.
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L’histoire de l’Afrique est très riche et elle fait peur à tout esprit d’exploitation déraisonnable et d’égoïsme international qui ne cesse de fabriquer des dirigeants clowns sur le continent africain.
Aujourd’hui, le plus résistant de l’école des Etats-Unis d’Afrique de N’Kwame Kruma, reste, sans contestation, Robert Mugabe, le Président Zimbabwéen. Par malheur, l’héritage africaniste des leaders africains d’avant les indépendances qu’il incarne continue à se heurter à toute évolution positive, car face à lui, il y a des Présidents Africains qui ignorent l’histoire de leur continent en lutte pour la création des Etats-Unis d’Afrique.
Le Colonel Mouammar Kadhafi, Président de la Libye, est cet exemple de l’émancipation africaine, bien qu’il ne soit pas à l’école d’Accra, certes, à cause de son âge à l’époque. Mais il a tenté à plusieurs reprises de promouvoir l’unité africaine de la pensée de Kruma.
Le dictat habituel n’a jamais voulu que cela se réalise. Entre-temps la Libye jouit d’un grand respect solitaire face aux puissances qui exploitent le monde. Thomas Sankara est le plus jeune leader africain des années 1980, qui a vite compris le sens de l’héritage des Etats- Unis d’Afrique de N’Kwame Kruma.
Il se lança dans cette lumineuse entreprise Africaine et il réalisa le Burkina-Faso en rassembleur des valeurs historiques de l’Afrique pour que triomphe la vraie identité continentale. Il a été assassiné impunément en 1987 par la même complicité qui a toujours endeuillé le nationalisme africain.
Nous voulons être les héritiers de Patrice Emery Lumumba, N’Kwame Kruma, Sékou Touré, Modibo Keita, Abdel Gamal Nasser, Tafwabalewa, etc.…ce fut le dernier cri africain de Thomas Sankara. Il est vrai que Nelson Mandela a passé 27 ans ½ en prison pour avoir oser de lutter contre la ségrégation raciale dénommée Apartheid en Afrique du Sud.
A sa libération grâce au soutien populaire sans frontière de tous les opprimés de la terre sans
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distinction raciale, il deviendra le Président de l’Afrique du Sud post-Apartheid. Sa réputation du plus long prisonnier africain lui a valu le mérite d’être l’exemple de la sagesse non violente africaine et devint l’instrument public de toutes les tentatives des réconciliations en Afrique.
Mais s’agit-il vraiment de l’Africain qui a connu le plus long emprisonnement politique sur notre sol? Pourquoi les puissances étrangères étouffent-elles l’histoire du vrai plus long prisonnier politique africain sur notre sol? De qui s’agit-il?
En effet, c’est Simon Kimbangu, dont le colonialisme a falsifié l’histoire, qui bat le record des années d’emprisonnement politique en Afrique avec 2 ans ½ de plus que Nelson Mandela. C’est l’incontestable numéro 1 de la non violence africaine qui a connu 30 ans (1921-1951) de prison jusqu’à sa mort dans la geôle coloniale belge.
La reconnaissance de ce leadership, d’abord par les Congolais eux-mêmes, est importante car elle va permettre de réécrire le vrai parcours de l’homme noir pour son unité sur la terre.
Cette reconnaissance permettra donc la réalisation du vrai Congo pour ensuite transformer en réalité les aspirations politiques et géographiques africaines initiées intellectuellement par N’Kwame Kruma en 1954 au Ghana, à savoir la mise en place des Etats-Unis d’Afrique.
Nous lançons l’honorable invitation Africaine à Nelson Mandela en l’invitant à se rendre à N’Kamba pour se recueillir sur le mausolée de Simon Kimbangu.
Ce geste sera la plus importante reconstitution de la longévité des prisonniers politiques qui ont lutté pour la liberté africaine. Les derniers événements en RDC, chantés avec pompe à travers le monde, nous démontrent à quel point la bienveillance occidentale sous le drapeau de l’ONU n’est rien d’autre que ce laboratoire de l’aliénation du peuple congolais pour ne pas se libérer de l’obscurantisme néocolonial et jouir confortablement de ses richesses naturelles.
C’est pourquoi avant d’entrer dans les grandes lignes de ce Tome III, nous devons revenir sur la déclaration de Simon
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Kimbangu devant ses partisans à Mbanza-Nsanda deux jours avant son arrestation à N’Kamba le 12 septembre 1921 et relire la plaidoirie de Patrice Lumumba devant le parlement réuni en session extraordinaire le 8 septembre 1960, ainsi que la préparation de son assassinat par la CIA.
La déclaration du nationaliste Kimbangu le samedi 10 septembre 1921 est même la preuve qu’il n’a jamais été chrétien, car il n’a cité nulle part le nom de Jésus-Christ ni ne s’est référé à lui tout au long de son dernier discours à ses partisans.
Il les a plutôt exhorté à la lutte contre le colonialisme, que nous avons à poursuivre encore aujourd’hui contre le néocolonialisme mobutiste. Nous devons être des fidèles patriotes kimbanguistes comme Patrice Lumumba, Pierre Mulele et Mzee Laurent Kabila.
Pour ceux qui ont lu les deux précédents Tomes du Néocolonialisme au Congo, ils apprendront avec troisième Tome beaucoup de choses sur l’obscurantisme de la jeunesse congolaise comme si le Congo en particulier et l’Afrique en générale n’ont pas une histoire.
Voilà pourquoi nous devons être des partisans patriotes kimbanguistes. Bien que n’étant pas encore né, je suis toujours présent devant Simon Kimbangu le matin du samedi 10 septembre 1921 à Mbanza-Nsanda aux environs de N’Kamba.
Kimbangu, Lumumba, Mulele et Kabila
L’AMOUR PATRIOTIQUE DU CONGO
L’histoire du grand Congo nous apprend avec certitude que beaucoup de nationalistes congolais sont morts assassinés à cause de leur amour pour notre patrie. Ils ont rejeté toutes sortes de corruption qui allait conduire notre nation et notre peuple à la tragédie où elle se trouve actuellement.
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Parmi tous ces nationalistes assassinés par la haute finance étrangère et ses complices intérieurs, il y en a quatre dont nous devrions suivre l’exemple, car jusqu’à leur dernier souffle ils n’ont jamais cédé une seule fois ni aux tortures, ni aux persécutions, ni aux oppressions colonialistes belges et néocolonialistes mobutistes.
Cet amour était caractérisé par la volonté de voir les richesses du grand Congo profiter aux Congolais et à tous ceux qui veulent les partager avec nous sans aucune forme d’exploitation. Ces quatre personnages ont combattu pour faire triompher la justice dans notre nation, mais les marionnettes congolaises et leurs manipulateurs étrangers continuent à tout faire pour effacer dans nos mémoires l’histoire glorieuse de nos quatre grands héros.
Voilà pourquoi nous devons construire dans tous les coins du grand Congo de gigantesques monuments en bronze pour Kimbangu, Lumumba, Mulele et Kabila, car ils ont beaucoup aimé notre patrie et ils ont versé leur sang pour la justice de notre peuple sans s’agenouiller une seule fois pour demander grâce devant leurs assassins colonialistes et néocolonialistes.
Kimbangu pour avoir mené une lutte contre le colonialisme au nom de Dieu de nos ancêtres, a été arrêté par les colonialistes chrétiens belges qui l’ont torturé et emprisonné sauvagement pendant 30 ans, puis l’ont assassiné le 12 octobre 1951 à Elisabethville.
Ensuite, ils ont construit une histoire contre la réalité de sa vie de révolutionnaire anti-colonialiste : Kimbangu était bon chrétien; Kimbangu était non violent, la bible était son unique passion en prison; il demanda d’être baptiser par un prêtre catholique avant de mourir; la bible est l’unique héritage laissée par Kimbangu au peuple congolais.
Et aujourd’hui, les Congolais ne se posent même pas la question pour savoir pourquoi un bon chrétien exemplaire comme Kimbangu fut persécuté pendant 30 ans et assassiné par des chrétiens évangélisateurs venus de l’Occident? Entre-temps cette église chrétienne kimbanguiste fabriquée de toute pièce par les colonialistes pour étouffer l’esprit
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révolutionnaire anti-colonial de Kimbangu, avec des millions de fidèles est devenue depuis de longues années une des armes morales des exploiteurs de notre pays, ainsi l’oeuvre libératrice de Kimbangu est-elle absorbée par la bourgeoisie galopante de certains membres influents de cette église qui a totalement dérapé sur ce qu’allait être le kimbanguisme de Kimbangu.
Le combattant Kimbangu proclamait devant la masse que nous étions sauvagement exploités par les colonialistes porteurs de l’évangile.
Il prêchait que l’église occidentale était l’oeuvre contradictoire de la parole de Dieu que nous connaissions déjà avant la colonisation. S’il a cru à Jésus-Christ, c’est parce que ce dernier était un homme de justice, qu’il est mort pour le bien-être de son peuple.
Sans oublier que quand le Rois Erode tuait les enfants de 0 à 2 ans, Joseph, Marie et le petit Jésus trouvèrent l’asile politique sur la terre africaine Ils ont été reçus à bras ouverts dans la tradition africaine, maison et nourriture à leur disposition.
Papa Joseph exerça son travail de menuisier avec tranquillité sous la protection africaine, ainsi le petit Jésus a-t-il grandi dans la civilisation africaine et intégré dans notre société qui allait lui donner une grande inspiration de la justice sur la terre. Jésus adulte retourna dans sa terre natale où régnaient l’injustice et l’égoïsme.
Du jamais vu à ses yeux durant l’exil, dans sa société d’assimilation, la terre africaine (l’Egypte). Il voulut faire régner la paix de Dieu entre les oppresseurs et les opprimés, il voulut chasser l’esprit de l’exploitation de l’homme par l’homme pour que les biens de la terre soient partagés avec égalité, mais les plus forts qui incarnaient l’égoïsme et l’injustice l’ont tué publiquement pour terroriser le monde.
Kimbangu découvrit dans la bible, la réalité de ce grand homme qui a versé son sang pour triompher la justice dans le monde. C’est ainsi qu’il se livra dans la bataille contre le colonialisme au nom de Jésus-Christ, pour notre liberté et la justice dans le monde sans pour autant qu’il soit chrétien dans le sens voulu par les colonialistes.
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Mais Kimbangu est mort chrétien pour sa fidélité à l’idéologie du parti politique du Christ; le parti de l’amour, de la vérité et de la justice pour tous les hommes de la terre. Si Kimbangu avait été réellement baptisé par les missionnaires protestants, il n’aurait jamais demandé le baptême catholique selon le plus grand mensonge des colonialistes belges.
Et s’il était un bon chrétien comme Mobutu, un chrétien servant les intérêts de l’injustice et du vol à main armée, jamais Kimbangu n’aurait été persécuté pendant 30 ans. Kimbangu a versé son sang pour la même lutte que nous menons aujourd’hui contre le mobutisme, qui est pire que la colonisation belge.
Il est vraiment Prophète, parce qu’il prêchait ce qui allait arriver contre notre nation et son peuple, il savait que le néocolonialisme se préparait contre notre patrie qu’il a tant aimé. Il fallait donc sortir rapidement de la colonisation. Il prêcha la bonne parole de la solidarité entre les hommes que les colonialistes détruisaient déjà avec outrance, le peuple était derrière lui.
Mais il était pratiquement impossible de mener une lutte pacifique contre les colonialistes. C’est la raison pour laquelle, il déclancha une lutte contre l’évangélisation occidentale dans le maquis de N’Kamba, son village natal dont il connaissait très bien le terrain. Lumumba est le continuateur de l’oeuvre libératrice de Kimbangu sur le plan intellectuel et le plus démocratique, car il savait dire « NON » là où il fallait dire « NON », mais les colonialistes et les néocolonialistes voulaient que les opprimés et exploités congolais disent « OUI » là où il fallait dire « NON ».
Lumumba savait placer le mot juste là où il fallait, revendiquer nos droits, et ceci dans un esprit le plus démocratique que celui des démocrates de l’Occident qui ne l’acceptèrent pas. Le geste le plus significatif de Lumumba, ce fut celui fait à l’âge de 30 ans, en 1955, lors de la première visite au Congo du Roi des Belges, Baudouin 1er.
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Lumumba et Baudouin eurent un entretien de deux heures à huis clos, auquel même le gouverneur général colonialiste Pétillon n’eut pas la possibilité de participer. Le 30 juin 1960, Lumumba prononça le discours de la glorieuse victoire de notre peuple contre le colonialisme.
Il est assassiné le 17 janvier 1961 par les néocolonialistes sur ordre du Président Eisenhower des Etats-Unis. Le Roi Baudouin meurt malade en 1993. L’entretien de 1955 entre les deux hommes ne sera jamais connu. Mulele fort de l’expérience de Kimbangu et Lumumba, déclancha dans le Kwilu, au début de 1964, une lutte armée contre les néocolonialistes congolais. 60 % du pays est libéré.
Le 24 novembre 1964, la Capitale de la République Populaire du Congo, Stanleyville (Kisangani) est agressée par les troupes belgo-angloaméricaines et des mercenaires venus de l’Europe occidentale et l’Afrique du Sud raciste pour secourir leurs marionnettes et anéantir notre peuple.
Le 24 novembre 1965, la CIA porte Mobutu au sommet de la criminalité politique néocoloniale au Congo en particulier et toute l’Afrique en générale. Mulele sera assassiné bestialement au camp Kokolo à Léopoldville le 3 octobre 1968 sur ordre de Mobutu sous la supervision de la CIA.
Mzee Kabila est le symbole de la victoire populaire contre le néocolonialisme mobutiste soutenu par la Maison Blanche et la CIA, car il est resté fidèle aux enseignements de Kimbangu, Lumumba et Mulele. Celui qui a renversé le 17 mai 1997 le chef de file des néocolonialistes en Afrique.
Avec Mzee Kabila, le peuple congolais voyait déjà le bout du tunnel. Il sera assassiné le 16 janvier 2001 par un complot néocolonial. Voilà nos quatre grands Héros que nous devons suivre l’exemple jusqu’à l’extirpation du néocolonialisme dans notre pays.
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CHAPITRE II
LA PUISSANCE DU PATRIOTISME CONGOLAIS PROVIENT DE KIMBANGU
UN ENSEIGNEMENT DE PAPA SIMON KIMBANGU
Samedi 10 septembre 1921 à Mbanza-Nsanda Chaque être humain a reçu un don spécifique pour témoigner de la grandeur de notre créateur. Dieu parle à travers les hommes qu’il choisit. Le samedi 10 septembre 1921 fut un jour spécifique pour l’homme noir.
Tout au début du culte matinal, vers 9h°°, Papa Kimbangu entre dans l’enclos en rameaux; son visage est grave, son regard vif et il s’adressa à la foule en ces termes : Mes frères (Zimpangi zami), l’esprit est venu me révéler que le temps de me livrer est arrivé.
Tenez bien ceci : avec mon arrestation commencera une période terrible d’indicibles persécutions pour moi-même et pour un grand nombre de personne. Il faudra tenir ferme, car l’Esprit de notre Dieu Tout-Puissant (Mpeve ya Batata Nzambi’a Mpungu Tulendo) ne nous abandonnera jamais. Il n’a jamais abandonné quiconque se confie en lui.
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Les autorités gouvernementales (Mfumu za luyalu) vont imposer à ma personne physique un très long silence, mais elles ne parviendront jamais à détruire l’oeuvre que j’ai accomplie, car elle vient de notre Dieu le Père.
Certes, ma personne physique (Kinsuni Kiame) sera soumise à l’humiliation et à la souffrance, mais ma personne spirituelle (Kimpeve kiame) se mettra au combat contre les injustices semées par les peuples du monde des ténèbres qui vont nous coloniser.
Car j’ai été envoyé pour libérer les peuples kongo (Kula minkangu mia Kongo) et la race noire du monde Zindombe zazo). L’homme noir deviendra blanc, et l’homme blanc deviendra noir. Car les fondements spirituels et moraux, tels que nous les connaissons aujourd’hui, seront profondément ébranlés.
Les guerres persisteront à travers le monde. Le Kongo sera libre et l’Afrique aussi. Mais les décennies qui suivront la libération de l’Afrique seront terribles et atroces. Car tous les premiers gouvernants de l’Afrique libre travailleront au bénéfice des Blancs. Un grand désordre spirituel et matériel s’installera.
Les gouvernants (Minyadi) de l’Afrique entraîneront, sur les conseils des Blancs, leurs populations respectives dans des guerres meurtrières et s’entretueront. La misère s’installera. Beaucoup de jeunes quitteront l’Afrique dans l’espoir d’aller chercher le bien-être dans les pays des Blancs.
Ils parleront toutes les langues des Blancs. Parmi eux, beaucoup seront séduits par la vie matérielle des blancs. Ainsi, ils deviendront la proie des Blancs (Nkuta Mindele). Il y aura beaucoup de mortalité parmi eux et certains ne reverront plus leurs parents.
Il faudra une longue période pour que l’homme noir acquière sa maturité spirituelle. Celle-ci permettra d’acquérir son indépendance matérielle. Alors s’accomplira la troisième étape.
Dans celle-ci naîtra un Roi Divin. Il viendra avec trois pouvoirs : Pouvoir Spirituel (Kinzambi), Pouvoir Scientifique (Kimazayu) et Pouvoir Politique (Kimayala).
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Je serai Moi-même le Représentant de ce Roi. Je liquiderai l’humiliation que, depuis les temps les plus reculés, l’on n’a cessé d’infliger aux Noirs. Car, de toutes les races de la terre, aucune n’a été autant maltraitée et humiliée que la race noire. Continuer à lire la Bible.
A travers ses écrits, vous arriverez à discerner les actes de ceux qui sont venus apporter ce livre et les écrits ou principes moraux contenus dans ce livre. Il faut qu’un voleur soit saisi avec l’objet qu’il a volé. Nous aurons notre propre Livre Sacré, dans lequel sont écrites des choses cachées pour la race noire et les peuples du Kongo.
Un Nlongi (Instructeur, Enseignant) viendra avant mon retour pour écrire ce Livre et préparer l’arrivée du Roi. Il sera combattu par la génération de son temps, mais petit à petit, beaucoup de gens comprendront et suivront son enseignement. Car, sans ce Nlongi, qui préparera les peuples Kongo?
Car l’arrivée du Roi sera très meurtrière et sans pardon. Alors, il faut que les peuples du Kongo soient instruits avant cet événement. Vous ne savez pas encore ce que c’est qu’une guerre spirituelle. Quand les peuples Kongo commenceront, un pays qui osera attaquer le Kongo, sera englouti sous les eaux.
Vous ne connaissez pas encore la puissance de ceux qui sont envoyés par le Père Tout-Puissant. A quoi sert à l’homme de s’attaquer à Dieu si, le jour de sa mort, même s’il avait beaucoup de biens matériels, il n’a même pas le temps d’arranger son doigt?
Vous ne savez pas de quoi est faite votre vie et pourquoi vous vivez. Car, exister physiquement c’est apparaître comme presque rien. Pourquoi tuer votre prochain et espérer rester en vie et pour combien de temps? Dieu n’est pas le temps, ni l’espace. Il est un Tout dans le Tout (Wena wa Kalunga).
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La génération du Kongo perdra tout. Elle sera embrouillée par des enseignements et des principes moraux pervers du monde européen (Mavanga ma bisi Mputu). Elle ne saura plus les principes maritaux de ses ancêtres. Elle ignorera sa langue maternelle.
Alors je vous exhorte à ne pas négliger ni mépriser vos langues maternelles. Il faut les enseigner à vos enfants et à vos petits enfants.
Car viendra un temps où les langues des Blancs seront oubliées. Dieu le Père a donné à chaque groupe humain (Nkangu wa Bantu) une langue qui sert comme d’une alliance de communication (Nsinga wa Mbila). Préparez-vous à la prière.
Alors prions : - Prière à vous tous les Anges du Trône Céleste, source de notre existence! - Prière à vous les Sept Anges qui siègent à la Cour de Dieu Tout Puissant!
- Prière là où se lève le Soleil et là où se couche le soleil! - Prière à l’Est et à l’Ouest! - Prière à Vous notre Dieu Créateur solaire (Mbumba Lowa)!
- Prière à notre Dieu Gouverneur de l’humanité (Mpina Nza)! - Prière à vous tous les Anges de la terre et de l’air! -
Prière à vous tous les Anges qui gouvernent les eaux et le feu! - Prière à vous le Grand Esprit Kongo! - Prière à vous les Anges de la guerre qui gouvernent le centre du Kongo!
- Prière à vous tous les Anges de la victoire (Mbasi za Lunungu) qui luttent dans les quatre coins des cieux et de la terre! Au nom de l’oeuvre que vous m’avez confiez devant les cieux et la terre, je le répète trois : faites à ce que votre sainte bénédiction puisse remplir les coeurs de ceux qui se lèveront pour aider les peuples du Kongo!
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Je vous le répète encore trois fois et je m’adresse à ceux qui mépriseront mon oeuvre par ignorance : J’implore notre Père Créateur afin qu’il leur pardonne et qu’il leur ouvre la voie de la compréhension!
Mais gare à ceux qui vont se servir de couteaux, des flèches, de fusils, de poisons et de la sorcellerie d’envoûtement ou de tout autre moyen de nuisance pour causer la mort et la désolation aux peuples du Kongo.
Ce genre de truands : Qu’ils soient des Blancs ou des Noirs, Qu’ils soient des Bakongo ou des Bangala, Qu’ils soient des Baluba ou des Swahili, ces esprits de des ténèbres (Mpeve za bunzimbu), Je le jure au nom de tous les envoyés qui ont été tués au Kongo, en Afrique, en Asie, en Amérique et en Europe : que leurs Esprits maudissent ces ignobles individus!
Qu’ils soient détruits et envoyés dans les prisons spirituelles des cieux! Je le demande et je le recommande à vous tous les Anges des cieux et de la terre, de mener un combat sans pitié contre ce genre d’individus qui sont contre le progrès humain et Divin (Mpeve za Ntemo wa Bantu)!
Je le répète encore trois fois devant les cieux et la terre : Gare à tous ceux qui continuent à chercher la désolation dans les quatre coins du monde! Venez! Oh! Dieu le Père Tout-Puissant! Je vous appelle, ainsi que tous les Anges de la guerre (Mbasi za Mvita), afin de conduire un combat contre ce monde des ténèbres (Nsi ya bubu)! Gare à ceux qui continuent à renforcer l’esclavagisme et la colonisation des peuples Noirs!
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Vous êtes un Dieu vivant. Je vous implore sans cesse (Ngieli ku fiongonena) au nom du sang versé par tous vos envoyés, et de leurs humiliations. Je vous le demande et je vous le recommande, oh! Dieu d’amour (Kalunga) : Venez avec vos Anges des cieux et de la terre pour détruire cette humanité des ténèbres (Mahanza ma kibubu) qui continue à se moquer de votre Majestueux!
Je demande à ce que la guerre éclate encore en Europe (Mvita yabua diaka ku Mputu), pour que la race noire se réveille et puisse revêtir une maturité qu’elle avait perdue depuis les temps les plus reculés!
Que votre alliance soit sanctifiée et bénissez les peuples du Kongo et la race noire de toute l’humanité! AMEN (Ingeta)!
Note :
Le 12 septembre 1921, Papa Kimbangu fut arrêté par l’autorité coloniale belge à N’Kamba. En septembre 1939 éclata en Europe la seconde guerre mondiale. A la fin de cette dernière, à partir des années 50, comme l’avait annoncé Papa Kimbangu, le vent des Indépendances se mit à souffler sur toute l’Afrique : l’une après l’autre, en effet, les colonies européennes d’Afrique se mirent à briser les chaînes de l’humiliation et de servitude.
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PATRICE LUMUMBA ET LE KIMBANGUISME
Lors de son séjour à Katako-Kombe, en août 1959, dans le cadre de la campagne de son Parti, le Mouvement National Congolais (MNC en sigle), Lumumba rencontra les Bakongo, relégués à Katako-Kombe, à Lomela et à Kole à cause de leur adhésion au kimbanguisme.
Lorsque Lumumba les a reçu, il demandait à chacun d’eux s’il avait son livret d’identité. Puis, il reprit chaque livret d’identité et y inscrivit ceci : « Retour immédiat chez nous au Bas-Congo ». Après, il apposa sa signature sur chaque livret d’identité. L’autorité coloniale de la place, informée de ce geste de Lumumba, n’a pas réagi.
Lumumba les invita à assister au meeting qu’il allait tenir ce jour-là dans l’après-midi au « bar Baudouin ». Là, évoquant leur situation, il déclara : « chers compatriotes, les Bakongo, voilà l’indépendance est sous l’horizon (en indiquant du doigt).
Nous allons fêter ensemble avec vous cette indépendance chez nous au Bas-Congo ». (Il eut des applaudissements frénétiques et des cris de joie). Puis, il ajouta : « dès mon arrivée à Léopoldville, j’écrirai au Gouverneur Général pour exiger votre retour immédiat chez nous au Bas-Congo ».
Et, effectivement, quelques temps après le retour de Lumumba à Léopoldville, le Gouverneur Général adressa une lettre au Gouverneur de la province du Kasaï. Il signifiait à ce dernier qu’il venait de prendre un décret qui mettait fin à la relégation des kimbanguistes Bakongo et que ces derniers étaient libres de retourner dans leur région d’origine.
Ainsi, aussitôt après l’accession du pays à l’indépendance, Lumumba fut le premier à élever le kimbanguisme au rang de religion officielle au même titre que les religions traditionnelles : catholique et protestante.
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Il semble que Lumumba voulait faire du kimbanguisme une religion d’Etat. Pour lui, c’est le prophète Kimbangu qui a commencé la libération de l’homme noir en général, et du Congolais en particulier. Libération des Noirs comme Jésus-Christ pour les Juifs.
Il plaçait donc les deux sur un même pied d’égalité. L’insistance sur cette expression « chez nous » par Lumumba (il y est revenu dans son meeting) souligne son nationalisme. Il se voyait avant tout citoyen du Congo et tous les Congolais étaient indistinctement des frères.
A ses yeux, la nation passait avant le clan, la tribu, le village. « Patrice Lumumba entre Dieu et le Diable. Un héros africain dans ses images ». Etudes et documents réunis par Pierre Halen et James Riesz. L’Harmattan, Paris 1997.
PLAIDOIRIE DE PATRICE LUMUMBA DEVANT LE PARLEMENT REUNI EN SESSION EXTRAORDINAIRE LE 8 SEPT 1960
Monsieur le Président et chers honorables Je suis content de me retrouver aujourd’hui dans cette salle pour répondre d’abord aux accusations des ministres Delvaux et Bomboko contre le Gouvernement.
Après cela, je vais vous expliquer le fond de l’affaire. Mr Delvaux a déclaré que les armes sont arrivées au Congo dans le seul but de combattre les Congolais. Il est impensable qu’un Gouvernement du peuple puisse commander des armes dans le seul but de combattre ses propres citoyens.
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Cette accusation grave faite de mauvaise foi ne peut trouver sa justification que dans les activités antinationalistes de Mr Delvaux. Celui-ci s’est rendu à Genève, faisant partie de la délégation qui devait étudier ensemble avec les représentants des Nations Unies et le Gouvernement belge le problème de notre Banque Nationale.
La Banque Centrale s’est accaparée non seulement de notre argent, mais également de nos réserves d’or. Je considère cet acte comme un vol, une spoliation. Qu’est ce qu’on a constaté au 30 juin, jour de la proclamation de notre indépendance?
Nos réserves d’or s’élevaient à 3.764.000.000 de francs au 15 août, elles sont tombées à 1.764.000.000 de francs soit une disparition miraculeuse de 2 milliards de francs. Ensuite le gouvernement belge a volé dans notre Banque Centrale 400.000.000 de francs qu’il a versé dans la Banque Centrale de Belgique sous prétexte d’aider le Rwanda-Urundi pour l’ouverture d’une banque.
Cette escroquerie a été constatée et le gouvernement belge a finalement promis de restituer l’argent. Qu’est ce qui a été fait? On prépare des projets, Mr Delvaux me téléphone de Genève et me signale que la convention est prête. Je demande votre autorisation pour signer (parapher) au nom du gouvernement cette convention.
Je lui avais répondu qu’il ne fallait pas signer. J’ai fait venir un expert qui a fait partie de la délégation de Genève spécialement pour me mettre au courant de la situation. Et il m’a expliqué que le travail était excellent mais qu’on voulait rouler le gouvernement et même les membres de la délégation semblaient être corrompus.
Qu’est ce qui se trouvait dans la convention? Une stipulation par laquelle le gérant de la Banque Centrale devait être nommé sur proposition des Nations Unies. Je leur ai dit qu’il était inconcevable qu’étant indépendants. Le Secrétaire Général de l’ONU nous impose un gérant pour notre Banque Nationale. C’est à nous-mêmes à choisir des hommes de confiance.
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Quelqu’un fait allusion sur 100 camions que l’URSS avait offerts au Congo. Je vais encore revenir là-dessus. Le fils de Mr Wigny, ministre belge des Affaires étrangères étudie à l’Université de Moscou. Le Président Eisenhower va à Moscou, il mange avec Kroutchev, est-ce qu’on l’a traité de communiste?
Le Général De Gaule va à Moscou, il mange avec Kroutchev et vice versa. Mais aujourd’hui si Lumumba essayait d’aller à Moscou, Lumumba commettra un sacrilège contre l’impérialisme. Si un sénateur ou un député parmi vous, parce qu’il est nègre, allait à Moscou, demain c’est toute une campagne de haine, de dénigrement, d’injure contre lui.
Les Américains seuls peuvent faire des conventions avec les Russes. Les Français peuvent les faire et ils les font tous les jours. Des échanges culturels même entre les Belges et les Russes, entre les Russes et les Français sont permis parce que ce sont des hommes blancs.
Mais nous, pays indépendant sous la tutelle impérialiste, nous n’avons pas le droit de traiter avec qui nous voulons. Pour quelle raison notre gouvernement, notre parlement, vont traiter avec les Anglais, les Américains, les Français et pas avec les Russes? C’est une escroquerie, une campagne pour effrayer. Lisez toute la presse française, américaine, belge et allemande.
Pour la presse de tous ces pays, Lumumba est un homme à abattre, c’est un communiste. Pourquoi? Parce que je ne suis pas malhonnête et n’accepterai jamais un franc des Américain ou des autres pour vendre mon pays. Mr Bomboko a parlé de la situation des chômeurs, de l’Etat d’anarchie à travers le Congo et rejette la responsabilité entière et totale sur nos militaires, sur nos dirigeants et sur le peuple congolais tout entier.
Dans tout son discours, depuis le début jusqu’à la fin, ce ne fut qu’un réquisitoire contre l’action des dirigeants et des militaires, et si vous comprenez très bien, c’est une plaidoirie que Mr Bomboko a faite en faveur des Belges et de leur agression au Congo.
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Mr Bomboko a accusé le gouvernement d’avoir instauré l’anarchie alors que c’est absolument faux.
Je déclare ouvertement qu’il n’y a pas d’anarchie au Congo, c’est l’agression belge qui a provoqué des troubles à travers le Congo. Quand le gouvernement avait pris les mesures d’expulser ceux qui empêchaient aux nationaux d’assumer les postes de commande, les Belges ont organisé ce que vous appelez aujourd’hui l’anarchie et le désordre.
Dans les premiers traités que nous avions signés avec les Belges il était stipulé que les bases de Kamina et de Kitona resteraient propriété du gouvernement belge même après l’indépendance du Congo. Les ministres belges sont venus essayer de faire accepter par le gouvernement ces propositions.
Je leur ai dit qu’il n’était pas possible d’accepter une telle proposition. Ou bien vous retirez vos bases ou bien nous devons les reprendre, ai-je précisé. Et dans la convention que nous avons faite, nous avons modifié ce traité. Comment pourrait s’expliquer l’entrée des troupes belges au Congo?
Nous n’avons jamais formulé cette demande. Et c’est Mr Bomboko qui est allé en tant que ministre des Affaires étrangères au nom du gouvernement, demandé à l’ambassadeur de faire venir les troupes belges. Et c’est ça la misère que le Congo connaît.
Dans leur campagne contre l’action du gouvernement, nos ennemis font du chantage en disant que les impérialistes retireront tout l’argent qu’ils ont investi au Congo, et alors notre République aura des difficultés insurmontables notamment la misère et le chômage. Ils vont de nouveau faire appel à leurs pères, les Belges.
Ces derniers ne donneront pas l’argent sans poser des conditions. Donc on nous a donné l’indépendance politique par la main gauche, mais l’on veut nous la retirer par la main droite sous couvert de la domination économique. Voilà la tactique. Extraits de compte analytique du Sénat, République du Congo 1960
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QUI ONT ASSASSINE LUMUMBA?
L’été congolais
Depuis l’affair..e de Watergate, l’Amérique n’a cessé de remettre en cause ses institutions. Une campagne sans précédente a notamment été lancée contre la naguère sacro-sainte CIA (Central Intelligence Agency), campagne qui a conduit à une extraordinaire série d’investigations.
Des commissions parlementaires ont siégé sans désemparer des mois durant. Elles ont entendu plusieurs centaines de témoins et empilé des masses énormes de dossiers et de documents. De ce travail de Titan sont sortis deux rapports connus sous le nom de leurs auteurs : le « rapport Church » et le « rapport Rockefeller ».
Les éléments les plus importants de ces deux documents ont été réunis par trois journalistes, David Antonel, Alain Jaubert et Lucien Kovalson, dans un livre intitulé les Complots de CIA publié à par les éditions Stock et qui sortira en librairie le 20 avril. Jeune Afrique présente cette semaine en exclusivité et avec l’accord spécial de l’éditeur de larges extraits du chapitre intitulé : « L’été congolais ».
Ce document inédit est incontestablement une pièce à verser au dossier de la mort de l’ancien leader congolais Patrice Lumumba. Si le rôle joué par la CIA dans cette affaire a souvent été évoqué, on le limitait au soutien qu’aurait apporté cette organisation aux adversaires congolais de Lumumba.
Les révélations contenues dans les Complots de la CIA apportent un éclairage nouveau au contexte dans lequel a été perpétré l’assassinat de l’ancien Premier Ministre congolais. En effet, la CIA avait elle-même son propre plan et ses exécutants. Patrice Lumumba a-t-il été victime d’une machination ourdie conjointement par ses adversaires congolais et la CIA ou la seule organisation?
Existe-t-il plusieurs complots simultanés visant à faire disparaître Lumumba, l’un conçu de l’intérieur, l’autre de l’extérieur? La lecture du document ci-après permet en tout cas de mieux percevoir le rôle de la CIA dans cette période
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confuse et troublée que traversait l’ex-Congo-Kinshasa et justifie le titre interrogatif que nous lui avons donné. Conception Le 25 août 1960, Allen Dulles, directeur général de la CIA, assiste à une réunion du groupe spécial – le sous-comité du Conseil National de Sécurité responsable du programme des opérations secrètes.
La CIA avait préparé divers plans contre Lumumba – prévoyant, par exemple, de provoquer une motion de censure au Parlement congolais. Commentant ces plans, Gordon Gray, l’assistant spécial du président pour la sécurité nationale, déclara que le président « avait exprimé la conviction profonde qu’il était nécessaire de mener une action très précise afin de prendre en main la situation.
Il se demandait si les plans actuels étaient suffisant pour arriver au but ». Le groupe spécial « se mit finalement d’accord : un plan d’action au Congo ne devait pas automatiquement exclure toute action permettant l’élimination de Lumumba ».
Le 26 août, le lendemain de la réunion, Allen Dulles signait une dépêche pour le chef de station de Léopoldville. Pour les dirigeants de l’organisation, la décision définitive est que si Lumumba continue à tenir le premier rang, le résultat inévitable sera au mieux le chaos et au pire la voie ouverte à une prise de pouvoir des communistes au Congo, avec des conséquences désastreuses pour le prestige des Nations Unies et les intérêts du monde libre en général.
En conséquence, nous décidons que son élimination doit être un objectif urgent et principal. Dans la conjoncture actuelle, ce but doit être hautement prioritaire dans notre plan d’action secrète. (Câble CIA, Dulles au chef de station, 28 août 1960).
Toujours selon cette dépêche, il fallait donner au chef de station « une plus grande marge de décision » dans l’opération précédemment autorisée. Ce plan consistait à remplacer Lumumba par un groupe pro-occidental et à ne plus reculer devant des actions, même agressives, si elles pouvaient rester secrètes.
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Le câble ajoutait : « Nous nous rendons bien compte que des occasions imprévisibles peuvent se présenter à vous ». Dulles autorisait aussi des dépenses allant jusqu’à 100.000$ « pour mener à terme toute opération ponctuelle qui ne permettait pas de consulter auparavant le quartier général.
Elle donnait au chef de station l’impression qu’elle avait été lue et approuvée par les milieux compétents du département d’Etat ».
Le câble précisait : Dans la mesure où un ambassadeur désire être consulté, prière vous adjoindre son concours. Si pour action particulière il ne souhaite pas être consulté, vous pouvez agir seul, lorsque temps ne permet pas nous consulter.
L’ambassadeur américain est théoriquement le chef de tous les représentants des agences américaines, y compris de la CIA, en poste dans le pays. Cette conception des rapports de l’ambassadeur avec les agents en poste date de l’administration Eisenhower. Malgré tout, une directive secrète plaçait les représentants de la CIA en marge du contrôle de l’ambassadeur.
Au cours d’une séance confidentielle tenue le 8 janvier 1968, Richard Bissel exposa sa doctrine sur les rapports des ambassadeurs en poste à l’étranger avec les services de la CIA : l’Ambassadeur doit en général être informé de toute opération camouflée intervenant dans le domaine de sa compétence territoriale.
Toutefois, dans certains cas spéciaux – à la suite de la demeure du chef de gouvernement local ou du secrétaire d’Etat – le chef de station reçoit pour instruction d’avoir à s’abstenir d’informer l’ambassadeur. (Rapport de W. Harris, sur la « séance Bissel », cité dans la CIA et le culte du renseignement de V. Marchetti et J.D Marks).
Apparemment, le câble pouvait être interprété comme une simple autorisation d’écarter Lumumba de sa fonction. Richard Bissel est « presque certain » qu’il a été mis au courant du contenu de la dépêche peu de temps après sa transmission.
Dans son témoignage, il affirme « qu’à son avis » le câble voulait dire, d’une manière détournée, que le président tenait à l’assassinat de Lumumba.
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Une stratégie échelonnée
Le lendemain de la destitution de Lumumba par Kasavubu, le 06 septembre, deux agents de la CIA rencontraient un politicien congolais très haut placé qui entretenait des rapports étroits avec la station de Léopoldville.
La station transmit au quartier général de la CIA : suite avis chef de station : Lumumba dans l’opposition est presque aussi dangereux qu’au pouvoir. Le politicien congolais a fait savoir qu’il comprenait la station et a insinué pourrait éliminer Lumumba physiquement. (CIA Léopoldville au directeur, 07 septembre 1960).
Le câble précisait également que le chef de station avait proposé d’aider le politicien « à préparer le programme du nouveau gouvernement » et lui avait affirmé que les Etats-Unis fourniraient des techniciens.
Le complot
Au cours de l’été 1960, Richard Bissel demanda à Bronson Tweedy, chef de la division Afrique, d’examiner les possibilités d’assassiner Lumumba. Bissel pria également son assistant spécial pour les questions scientifiques, Joseph Scheider, diplômé en biochimie, de préparer des moyens d’assassiner « ou de mettre hors d’état d’agir – un leader africain, sans le nommer.
Selon Scheider, Bissel lui affirma que cette demande venait de « la plus haute autorité ». Pour répondre à Bissel, Scheider fournit des substances au chef de station de Léopoldville. Selon Scheider, la station n’avait pas reçu l’ordre de vérifier auprès du quartier général qu’une décision d’assassiner Lumumba avait été effectivement prise.
Tweedy, a cependant déclaré que, de toute façon, qu’il ait ou non soulevé cette question, le chef de station n’était pas autorisé à passer de la recherche des méthodes d’assassinat à l’exécution effective de Lumumba sans en référer au quartier général, seul habilité à prendre une décision politique.
En septembre, Scheider remit les substances mortelles au chef de station de Léopoldville et lui donna l’ordre d’assassiner Patrice Lumumba.
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Le chef de station demanda alors la confirmation des ordres de Scheider au quartier général de la CIA et, après avoir reçu l’autorisation, il entama des « démarches exploratoires » pour faire avancer le complot d’assassinat. Scheider lui aurait dit que c’était le président Eisenhower qui avait donné l’ordre d’assassiner Lumumba.
Le témoignage de Scheider corrobora dans son ensemble cette version des faits. Mais ce n’est qu’à travers ses discussions avec Bissel et Tweedy que Scheider a pu croire à un accord présidentiel. La mission de Scheider au Congo fut précédée et suivie de dépêches en provenance du quartier général.
Ces dépêches, transmises par une voie extrêmement restreinte (et commençant par la formule « Pour vos yeux seulement »), poussaient à l’élimination de Lumumba. Deux d’entre elles portaient la signature personnelle d’Allen Dulles. Les substances toxiques ne furent jamais utilisées. Mais rien ne prouve que l’opération ait été interrompue avant la mort de Lumumba.
En revanche, rien ne permet de penser qu’il y ait un lien entre le projet d’assassinat et les événements qui aboutirent réellement à la mort de Lumumba. D’après Bronson Tweedy, c’est au cours d’été 1960 que Richard Bissel commença à discuter des moyens pouvant être mis en oeuvre pour assassiner Lumumba.
Ils en discutèrent « plus d’une fois » l’automne suivant. Tweedy dit que la première conversation de ce genre se déroula peu après l’envoi du câble du 26 août signé Dulles, informant le chef de station que l’élimination devait être hautement prioritaire dans notre plan d’action secrète.
Tweedy ne se souvient pas des termes exacts de la conversation, mais, selon lui, elle tournait autour des points suivants : « Ce que me disait Bissel, c’est qu’il y avait à Washington un accord politique. Lumumba devait être éliminé de tout pouvoir ou influence au Congo.
Le but de notre conversation était de provoquer un échange d’information entre la station et le quartier général afin d’étudier les différentes possibilités d’assassinat – ou en vérité, tout autre moyen de chasser Lumumba du pouvoir.
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La station devait commencer à dresser la liste de nos moyens, de nos agents et en discuter les détails avec le quartier général comme on le faisait d’habitude pour toute opération. Tweedy est « certain » qu’au cours de ses discussions avec Bissel le poison a été cité comme « un moyen éliminatoire à envisager que le chef de station devait explorer ».
Tweedy affirme que Bissel lui avait confié la tâche de mettre au point les « détails opérationnels, désignations agents disponibles, sécurité de l’opération, découverte d’une solution sensée qui ait des chances de réussir ».
Mais Bissel ne lui jamais dit : « Allez et faites comme bon vous semblera sans plus vous en référer à moi ». Au contraire, Tweedy travailla avec l’impression que, si un moyen efficace de tuer Lumumba était au point, la décision de procéder à une tentative d’assassinat ne devait venir que de Bissel.
Tweedy ne sait pas si Bissel a consulté « la plus haute autorité » avant de commencer d’étudier les moyens d’exécuter Lumumba. Tweedy a déclaré à propos des consignes qu’il recevait de Bissel : « Généralement, je les suivais. Je partais du principe que Bissel était habilité à me donner ces consignes et que c’était à lui de bien savoir quels ordres il pouvait me donner ou ne pas me donner ».
Lorsqu’on lui a demandé s’il avait songé à refuser l’ordre d’assassiner Lumumba, Tweedy répondit : « Certainement pas. Etant donné le point de vue du gouvernement sur cette affaire, je pensais qu’au moins l’étude d’un assassinat ou de toute autre possibilité d’éloigner Lumumba du pouvoir au Congo était un objectif valable ».
A la question : « Y compris le meurtre ? ». Il répondit : Oui, je crois que j’étais professionnellement apte à jouer ce rôle, oui, si c’était à refaire, je recommanderais vivement de ne pas s’en mêler ». Le scientifique entre en scène Joseph Scheider, le biochimiste, a affirmé qu’il avait eu « deux ou trois conversations » avec Richard Bissel, en 1960, à
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propos des moyens techniques dont disposait l’agence pour assassiner des leaders étrangers. Scheider a raconté qu’à la fin de l’été ou au début de l’automne Bissel lui demanda de mettre tout en oeuvre afin de pouvoir disposer à brève échéance de substances biologiques en vue de tuer un leader africain non désigné « au cas où la décision d’agir serait prise ».
Bissel avait confié à Scheider qu’il avait l’ordre de la plus haute autorité d’exécuter ce genre d’opération. Selon Scheider, « les allusions de Bissel » aux plus hautes instances « signifiaient pour moi qu’il parlait du président ». Après la réunion, Scheider établit une liste de substances biologiques disponibles au laboratoire de la division chimie de l’armée installée à Fort Detrick, dans le Maryland.
Ces substances pouvaient « soit tuer quelqu’un, soit le mettre hors d’état d’agir ». Il y avait «sept ou huit substances sur la liste, parmi lesquelles la tularémie (fièvre du lapin), la brucellose (fièvre ondulante), la tuberculose, l’anthrax, la variole et la maladie du sommeil ».
Scheider sélectionna dans la liste une substance « supposée provoquer une maladie propre à cette région d’Afrique et dont l’issue pouvait être fatale ». Scheider dit qu’il obtint la substance en question et se prépara à l’utiliser.
« Nous avons dû la mettre en bouteille et conditionner le flacon de telle sorte qu’elle puisse passer pour autre chose, mais j’avais besoin d’une autre substance pouvant annuler les effets de la première au cas où cela me serait nécessaire ».
Il prépara également un lot d’accessoires comme des aiguilles hypodermiques, des gants de caoutchouc et des masques de protection « indispensables » pour manipuler ces matériaux drôlement dangereux ». En septembre 1960, Scheider reçut de Tweedy et du directeur adjoint de la division Afrique la consigne d’apporter une solution technique au chef de station pour mettre en oeuvre les moyens pratiques du plan d’assassinat : « Ils insistèrent pour que je prenne bien conscience, au cas où ces matériaux seraient utilisés, que j’étais le seul juge technique, et que si les choses ne marchaient pas, j’en serais le seul responsable ».
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Lorsqu’on lui demanda s’il avait envisagé d’assurer la responsabilité technique d’une opération d’assassinat, Scheider répondit : « Je pense que l’image que je me faisais de mon travail à l’époque et des responsabilités que j’avais se plaçaient dans le contexte d’une guerre silencieuse, je me rends compte, cependant, que l’une de mes positions aurait pu être celle d’un objecteur de conscience à cette guerre.
Ce n’était pas mon point de vue. Je sentait qu’une décision avait été prise au plus haut niveau et que, aussi désagréable que fut mon rôle, mon devoir était d’y participer ». Selon Scheider, le chef de station devait être responsable « des modalités de l’opération, du choix de nos agents et des autres aspects non techniques ».
Après avoir été informé du témoignage de Scheider rendant compte de leurs conversations et après avoir pris connaissance des échanges de dépêches de cette époque, Tweedy a déclaré qu’il était « parfaitement clair » qu’il avait rencontré
Scheider. Il admit avoir donné ordre à Scheider de remettre les produits mortels au chef de station de Léopoldville et de lui servir de conseiller technique pour mettre au point les moyens efficaces permettant d’assassiner Lumumba.
D’après Tweedy, son directeur adjoint était la seule autre personne de la division Afrique qui aurait pu savoir qu’on envisageait cette exécution. Scheider partit pour le Congo moins d’une semaine après son entrevue avec Tweedy et le directeur adjoint.
Joe de Paris Le 19 septembre 1960, quelques jours après que Lumumba se fut placé sous la protection des casques bleus de l’Organisation des Nations Unies stationnés à Léopoldville, Richard Bissel et Bronson Tweedy envoyèrent un message codé à destination de Léopoldville en vue de mettre au point une rencontre secrète entre le chef de station et Joseph Braum qui se rendait au Congo pour une mission non précisée.
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Joseph Scheider a certifié que « Joseph Braum » était son pseudonyme et qu’il l’utilisait parce qu’il s’agissait « d’une opération particulièrement délicate ».
La dépêche relatait : (« Joe ») devrait arriver approximativement le 27 septembre. Il se présentera comme « Joe » aussitôt que possible après contact téléphonique. Il déclinera son identité et vous expliquera sa mission. (câble CIA de Bissel et Tweedy pour le chef de station, septembre 1960).
La dépêche portait le mot de code PROP qui signale un sujet extraordinairement délicat et indique que, au quartier général, cette dépêche touchait seulement Dulles, Bissel, Tweedy et l’adjoint de ce dernier. Le PROP signifiait aussi que la dépêche n’était transmise au Congo qu’au chef de station.
Tweedy certifia que le canal PROP fut établi et utilisé exclusivement pour l’opération d’assassinat. La dépêche signée Bisse-Tweedy informait le chef de station que le code PROP devait être utilisé pour : Toutes transmissions (dépêches) concernant cette opération que nous vous donnons ordre, ne communiquer strictement à personne (dépêche CIA, 19 octobre 1960).
Tweedy confirma le fait que Bissel et lui avaient signé tous les deux la dépêche. L’autorisation de partir pour le Congo donnée à Scheider venait donc de Bissel. Tweedy dit que celui-ci « contresignait » les câbles envoyés par un chef de division et traitant de « sujets particulièrement délicats » ou « d’une importance telle que le directeur des opérations souhaitait en être constamment informé ».
Tweedy fit remarquer que Bissel lut la plupart des câbles concernant cette opération et qu’il « se faisait en général mettre au courant des progrès de l’opération ». Dans ses déclarations, Victor Hedgman, chef de station de Léopoldville, fait état de souvenirs clairs et précis sur le câble Tweedy-Bissel qu’il avait reçu.
Il dit qu’en septembre 1960 lui parvint une dépêche « des plus inhabituelles » provenant du quartier général de la CIA qui le prévenait que « quelqu’un que je pourrais reconnaître débarquerait
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avec des consignes pour moi…je crois que le message portait la mention « Pour vos yeux seulement » et contenait des instructions selon lesquelles je ne devais en aucun cas en discuter le contenu avec qui que ce soit. Le câble ne précisait pas quel genre de consignes il allait recevoir et « ne faisait aucune référence à Lumumba ».
Trois jours après ce câble, Tweedy en envoya un autre par le canal de PROP qui disait que s’il était décidé qu’un soutien aux objectifs de PROP se révélait essentiel, alors une personne originaire d’un pays tiers serait utilisée comme agent pour l’opération d’assassinat afin de cacher complètement la participation américaine. (câble CIA, 22 septembre 1960).
Tweedy exprima également des réserves concernant deux agents que le chef de station voulait engager et déclara : Envisageons d’utiliser un contact indépendant originaire d’un pays tiers disponible ici et qui pourrait jouer le rôle. (câble CIA, 22 septembre 1960).
Il s’agit probablement ici de l’agent Qj /Win qui fut, par la suite, détaché au Congo. Tweedy indiqua également au chef de station et à son collègue Scheider : Votre agent et vous devez comprendre que nous ne pouvons être constamment sur votre dos pendant que vous dressez vos plans et testez vos possibilités.
Notre principale préoccupation doit être de cacher la participation américaine, à moins qu’il ne se présente une occasion unique qui nous permette de prendre un risque calculé de première classe : nous sommes prêts à accepter toute proposition sérieuse venant de vous tant que nous avons grande confiance en vos jugements professionnels. (dépêche CIA, 22 septembre 1960).
Le 24 septembre, le directeur général du renseignement envoya lui-même une dépêche à Léopoldville : Désirons vous fournir tout soutien possible dans le dessein d’éliminer Lumumba de toute fonction gouvernementale ou, s’il échoue à Léopoldville, de l’empêcher de s’installer à Stanleyville ou ailleurs. (dépêche CIA provenant de Dulles à destination de Léopoldville, 24 septembre 1960).
Dulles, trois jours avant, avait exprimé le même point de vue devant le président Eisenhower au cours d’une réunion du Conseil National de Sécurité.
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Les gants de caoutchouc et une seringue
Déposant devant la commission d’enquête, Hedgman déclara : « Je crois me rappeler que Scheider me conseilla – ou me donna des consignes dans ce sens – d’éliminer Lumumba ».
Question : « lorsque vous dites éliminer, vous voulez dire assassiner? » Hedgman : Oui, je peux dire que c’est le sens premier que je donnai à ce terme. Je ne crois pas que ce fut la seule interprétation dans la mesure où il y avait d’autres moyens de l’empêcher d’occuper une fonction qui soit une menace politique.
De son côté, Scheider déclara : J’ai expliqué au chef de station ce que Tweedy et son directeur m’avaient dit : le quartier général voulait qu’il voit (Hegman) s’il pouvait se servir de ces substances biologiques que j’avais apportées pour éliminer Lumumba et le prévenait que tout cela devait se faire sans que les Etats-Unis y soient mêlés.
Le chef de station reçut des gants de caoutchouc, un masque de protection et une seringue ainsi que des substances biologiques mortelles des mains de Scheider qui lui apprit également comment les utiliser. Scheider avait envoyé cet attirail médical par la valise diplomatique. Scheider a expliqué que la substance toxique devait être injectée dans un produit que Lumumba pouvait ingérer.
Il pouvait s’agir de tout produit destiné à entrer dans sa bouche, que ce soit de la nourriture ou une brosse à dent…de telle sorte qu’un peu de substance passe dans sa bouche. D’après Hedgman, les moyens mis en oeuvre pour l’assassinat n’étaient pas limités à l’utilisation des substances toxiques fournies par Scheider.
Il avait peut-être suggéré à Scheider qu’on pouvait abattre Lumumba d’un coup de revolver au lieu de l’empoisonner. Scheider avait assuré à Hedgman que ces poisons étaient fabriqués de telle sorte qu’ils ne laissaient que des traces normales sur les gens, comme s’ils mouraient des suites d’une maladie. Hedgman raconte qu’il avait été extrêmement surpris en apprenant que Scheider était venu pour mettre sur pied un plan d’assassinat.
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Il dit à Scheider qu’il approfondirait cette possibilité et lui donna l’impression qu’il allait étudier le problème et voir si on pouvait mener le plan jusqu’à son terme. Il souligna la difficulté de mener à bien un tel projet. De son côté, Scheider dit que Hedgman était calme et soucieux, mais qu’il acceptait de mettre l’opération en route.
Le compte rendu du chef de station sur son premier contact avec Scheider était une réponse nettement positive à la mission qu’on lui avait assignée. Hedgman y rapportait que Scheider et lui étaient sur la même longueur d’onde.
Il craignait même que le gouvernement central ne faiblisse sous la pression étrangère qui poussait à une réconciliation avec Lumumba : Pense donc action la plus rapide compatible avec la sécurité indiqué. (câble CIA Léopoldville à Tweedy, 27 septembre 1960).
Un plan complètement dingue
Pendant les deux mois qui suivirent l’arrivée de Scheider au Congo, un flot régulier de câbles passa par la voie PROP entre Léopoldville et le quartier général. S’appuyant sur ses conversations avec Scheider, le chef de station Hegman fit une liste des possibilités d’actions secrètes contre Lumumba.
En premier, il suggéra qu’un agent particulier soit utilisé de la manière suivante : Qu’il se réfugie chez le grand frère. Ainsi il pourrait agir de l’intérieur et mettre au point tous les détails menant à l’acte final. (câble CIA, 27 septembre 1960).
D’après son témoignage, Tweedy déclara que l’expression « grand frère » désignait Lumumba. Pour Tweedy et Scheider, ce câble évoquait le plan numéro un de Hegman qui consistait à donner l’ordre à son agent de s’infiltrer dans l’entourage de Lumumba afin de chercher des moyens de l’empoisonner.
Le 30 septembre, le chef de station demandait avec insistance au quartier général l’autorisation d’entreprendre des « conversations préparatoires » avant de mettre en oeuvre le plan d’urgence. Aucune opération sûre ou disponible avec les moyens actuellement disponibles.
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Nous devons choisir entre annuler l’opération ou prendre des risques calculés variant d’un degré à l’autre. Au cas où l’action serait décidée de façon immédiate, je demande instamment au quartier général d’autoriser des conversations préparatoires afin de déterminer si l’agent est volontaire pour jouer un rôle actif ou bien si nous supprimons l’opération. (Dans ce cas, nous agirons sur des bases hypothétiques et ne révélerions pas les plans).
S’il semble prêt à accepter le rôle, nous pensons qu’il serait nécessaire de lui révéler l’objectif à poursuivre. Je demande au quartier général de répondre immédiatement. (câble CIA Léopoldville à Tweedy, 30 septembre 1960). Nous vous autorisons de prendre des conversations préparatoires avec l’agent pour estimer son attitude envers un éventuel rôle actif. Il nous semble que la meilleure des utilisations possibles de cet agent est (…).
Nous étudierons avec beaucoup d’attention votre évaluation initiale de son attitude ainsi que toute nouvelle approche qui pourrait apparaître. Nous apprécions la manière dont vous envisager le problème.
Espérons une hâte modérée. (câble CIA, directeur adjoint de la division Afrique à Léopoldville, 30 septembre 1960). Tweedy et son adjoint faisaient comprendre que l’agent était considéré comme un assassin potentiel. Tweedy a déclaré qu’il était certain que son adjoint ait envoyé le câble autorisant l’officier en poste à avancer d’un pas l’opération d’assassinat.
Il ajouta qu’il était « très possible » que Richard Bissel ait été informé de ces directives. Le 07 octobre, le chef de station envoya au quartier général le compte rendu de sa rencontre avec l’agent qu’il estimait être le meilleur candidat, celui qui aurait la possibilité d’approcher le mieux Lumumba : J’ai eu des conversations préparatoires avec l’agent.
Après avoir fait le tour de toutes les possibilités, l’agent a préconisé la solution recommandée par le quartier général. Bien qu’il n’ait pas saisi la balle au bond, je pense qu’il est prêt à jouer tout rôle nécessaire pour réaliser l’opération dans les limites possibles de sécurité. (câble CIA, chef station à Tweedy, 07 octobre 1960).
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Au-delà de cette date le poison n’est plus valable
Malgré le témoignage de Hedgman exposant ses doutes quant à l’aspect pratique de l’assassinat, les dépêches montrent qu’il avait décidé de mettre en oeuvre l’opération et qu’il fit ce qu’il fallait pour réussir. Il poussa, par exemple, le quartier général à lui envoyer un agent de rechange.
Si le quartier général pense que les difficultés de l’agent l’empêchent de participer à l’action, je tiens à souligner qu’il est nécessaire de fournir à la station un agent venant d’un pays tiers. (câble CIA Léopoldville à Tweedy, 07 octobre 1960).
Tweedy continua à soutenir l’opération d’assassinat et conseilla : Soyez sûr que je ne m’attendais pas à ce que les objectifs propres soient atteints rapidement. J’envisage vous envoyer un agent originaire d’un pays tiers. Lorsqu’il arrivera, ce sera à vous, après un temps de stage, de voir s’il peut jouer un rôle actif ou de court-circuit à plein temps.
Si vous jugez qu’il est valable, et tenant compte des soucis supplémentaires que cela vous causera, je pense vous envoyer, à titre temporaire, officier supérieur pour mener cette opération sous votre direction. (câble CIA, Tweedy au chef de station, 07 octobre 1960).
Selon le rapport du chef de station, Joseph Scheider quitta le Congo le 05 octobre pour retourner au quartier général à cause de la date d’expiration des substances toxiques. Au-delà de cette date, en effet, les substances n’étaient plus mortelles.
Le câble du chef de station ajoutait : (Joe) a laissé certains éléments qui peuvent être utiles. Le chef de station a l’intention de continuer à mettre en oeuvre l’opération. (câble CIA Léopoldville à Tweedy, 07 octobre 1960).
Sans nier l’influence du câble du 07 octobre venant du chef de station et déclarant que des substances toxiques restaient entre les mains de Hegman, Scheider se rappelle avec précision qu’il avait détruit la viabilité des substances biologiques et qu’il avait tout jeté dans le fleuve Congo avant de partir le 05 octobre 1960 pour les Etats-Unis.
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En contradiction avec Scheider, Hegman a déclaré que les substances toxiques n’avaient été détruites qu’après l’emprisonnement de Lumumba par les Congolais au début de décembre.
On retiendra de tout cela le seul élément important : le chef de station avait l’intention de continuer ses recherches pour réussir l’assassinat, même après le départ de Scheider. Scheider a l’impression que Hedgman était toujours autorisé à chercher un moyen d’assassiner Lumumba, avec l’obligation de soumettre ses plans au quartier général.
Le chef de station débordé Malgré ses autres activités opérationnelles, le chef de station explorait, évaluait et rendait activement compte des moyens et agents qui pourraient être utilisés dans une tentative d’assassinat de Lumumba.
Quand sa mise au point de l’opération d’assassinat fut déjouée par l’échec de son premier candidat, qui ne put avoir accès à Lumumba, Hedgman réclama davantage de personnel opérationnel et de supervision pour l’aider à mener à bien sa mission.
Il semble l’avoir poursuivie jusqu’à l’emprisonnement de Lumumba par les autorités congolaises. Le 15 octobre 1960, peu après que Tweedy est offert de la main-d’oeuvre supplémentaire pour l’opération assassinat, deux câbles significatifs furent envoyés par le quartier général de la CIA à la station de Léopoldville. L’un des câbles fut transmis par un agent du secrétariat de la division Afrique.
Il portait la signature de Bronson Tweedy, il fut acheminé par les voies habituelles de la CIA, ce qui permit la distribution du message au personnel approprié de la station et de l’ambassade des Etats-Unis à Léopoldville.
Ce câble traitait de la possibilité de fournir secrètement à certains leaders congolais des fonds et une assistance militaire. Il préconisait : Seule action que nous puissions soutenir est d’appuyer immobilisation ou arrestation (Lumumba), même si l’action plus définitive est désirable. Toute action entreprise devrait être entièrement congolaise. (câble CIA, directeur à Léopoldville, le 15 octobre 1960).
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Le même jour, Tweedy envoya un second câble par la voie PROP pour les « seuls yeux » de Hedgman, ce qui empêcha le message d’être distribué à qui que ce soit d’autre, ambassadeur y compris. Le directeur de Tweedy déclara que le « câble portait la mention PROP était le seul qui faisait autorité ».
A ce propos, Hedgman dit n’avoir jamais discuté de la possibilité d’assassiner Lumumba avec Claire H.T Timberlake l’ambassadeur en poste au Congo. Le second câble disait : Vous remarquerez dans câble en cours de transmission par voie normale un paragraphe concernant suggestions de catégorie PROP.
Vous en recevrez probablement plus à ce propos, car pierre d’achoppement (Lumumba) de plus en plus manifeste. Etudions tous de près la situation Congo et prise en main Lumumba devient spontanément considération première. Se référer supra, de façon à éviter confusion avec duplication apparente…
Cette voie réservée pour objet spécifique que vous avez discuté avec collègue et reste plus haute priorité. (câble CIA, Tweedy à chef de station, 15 octobre 1960). Tweedy affirme que « l’objet spécifique discuté avec collègue » faisait allusion à la discussion que le chef de station avait eue avec Scheider « à propos de l’assassinat ».
Selon lui, les prémisses de son message étaient « qu’il n’y avait pas de solution possible au Congo tant que Lumumba y garderait une position puissante ou influente ». Tweedy demandait ensuite l’avis du chef de station sur la possibilité d’envoyer un officier de la CIA au Congo « avec pour mission directe…de se consacrer entièrement à cet aspect » (câble CIA, Tweedy à chef de station, 15 octobre 1960).
Le câble permet de comprendre aussi le chef de station n’avait pas progressé plus rapidement dans l’opération d’assassinat : Il nous semble vos autres responsabilités trop lourdes pour avoir concentration nécessaire sur PROP. En contradiction avec la limitation des activités anti-
Lumumba préconisée dans le câble envoyé par la voie normale, le câble de Tweedy suggérait : Possibilité utilisation groupe type commando pour enlèvement (Lumumba) par assaut maison en
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remontant câble depuis rivière ou, plus probablement, si (Lumumba) tente une autre sortie en ville…Demande votre avis. (câble CIA, Tweedy au chef de station, 15 octobre 1960).
L’ouverture de la chasse Deux jours plus tard, le chef de station avança un certain nombre d’arguments pour répondre à Tweedy.
En premier lieu, l’agent qu’il avait choisi pour l’opération d’assassinat avait des difficultés à s’infiltrer dans le cercle des intimes de Lumumba : N’a pu pénétrer entourage. N’a donc pas pu fournir renseignements opérationnels nécessaires pour ce travail. Maintiens intérêt prioritaire sur cette action, mais ne peut y consacrer qu’un temps limité, en raison multiples engagements opérationnels.
Pense nomination rapide, officier traitant pour s’occuper affaire excellente idée. Si officier traitant disponible, le chef de station pourra consacrer plus possible son temps à l’assister et le diriger dans ses efforts. (câble CIA, 17 octobre 1960).
Le chef de station conclut ce message avec cette recommandation chiffrée qui rappelle son témoignage selon lequel il avait pu « suggérer à Scheider de tirer sur Lumumba plutôt que
de l’empoisonner » : Si un officier traitant envoyé, recommande quartier général expédie au plus tôt par valise fusil longue portée marque étrangère avec visée télescopique et silencieux. Bonne
chasse. Ici, quand feu vert. Cependant, en raison interdiction fusil de chasse, garderai fusil au bureau en attendant ouverture saison chasse. (câble CIA, 17 octobre 1960. Jeune Afrique N°798 23 avril 1976. Quelle bombe avait-il (Lumumba) pour qu’il soit craint par les puissances occidentales?
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Revenons un peu au parcours de Patrice Lumumba, pour que la jeunesse congolaise soit éclairée de la provenance de sa puissance. Patrice Emery Lumumba écrit à son ami Emile Luhahi qui vivait, lui, à Wembo Nyama Stanleyville, mercredi 28 avril 1954 Mon cher Emile, Vous m’avez demandé au sujet de mon avenir, de mes projets. J’ai trop de projet qui sont certainement concentrés et
dirigés vers un seul idéal : avoir une formation poussée, toujours poussée, car pour moi, la richesse n’a aucune valeur. Je préfère avoir une instruction suffisante que d’être un riche, ignorant. Que
je parte à l’Université ou non, je dois me découper en quatre pour devenir un homme relativement instruit afin de servir ma patrie. A l’école on ne me donne que les instruments – il m’appartient de bien utiliser ces instruments pour qu’ils me soient des auxiliaires précieux. Quels sont ces instruments? Ce sont les rudiments du savoir qu’on nous a enseignés sur les bancs de l’école.
Ces rudiments, nous devons maintenant les manier, les subtiliser, les raffiner pour obtenir un résultat supérieur à celui primitivement acquis. Je vous affirme, mon cher Emile, qu’on peut devenir un vrai universitaire, c’est-à-dire acquérir une instruction quasiuniversitaire – tout en restant chez-soi, tout en apprenant avec persévérance, avec méthode.
Je vous dis cela par expérience que j’ai acquise depuis une longue date. Pour vous faire toucher la chose du doigt, je dois prendre mon propre exemple : quels sont mes antécédents scolaires? Vous les connaissez certes. Mais comment puis-je atteindre mon degré d’instruction actuel? C’est surtout grâce à mon effort personnel, à mon perfectionnement personnel, à ma persévérance.
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Aujourd’hui même les Européens me qualifient d’un redoutable. Un ami européen m’a dit un jour ceci : « Tous les milieux européens disent que Lumumba veut imposer sa supériorité intellectuelle tant aux Congolais que des Blancs ». Cette idée et ce jugement proviennent par suite de brûlantes polémiques pour lesquelles je sors toujours victorieux.
Ici à Stan, tous les Congolais me prennent pour un magicien (ce qui est faux), les Européens me prennent pour un homme qui a fait des études supérieures. Beaucoup d’Européens, entre autres mes chefs de service, affirment que je suis plus instruit que beaucoup d’Européens.
Je vous dis tout cela sans l’ombre de prétention ou de vantardise (sic), mais il est nécessaire à ce que je vous le dise parce que je vous prends pour un de mes amis intimes, afin que vous puissiez vous faire une idée exacte et apprécier le perfectionnement personnel et continu est nécessaire à tout être qui veut arriver à quelque chose ici-bas.
Comme vous le savez depuis l’année passée, il est toujours question pour moi de poursuivre un enseignement universitaire. J’ai été admis à l’Université de Kimwenza suite à l’arrangement de Monsieur Clément, mais cela n’a pas pu encore se réaliser par suite de ma situation matrimoniale parce qu’il n’y a pas encore de logement pour étudiants mariés – à moins que je divorce pour devenir célibataire !!!
Ce qui ne sied pas bien (sic). C’est problématique ! De toute façon je ne perds pas confiance. Ou bien j’irai à l’Université, ou bien je ferai des cours par correspondance pour le même genre d’études, c’est ce que j’ai déjà commencé (depuis le début de ce mois) au Centre d’Etudes Supérieures de Bruxelles.
Merci beaucoup pour les journaux, je les ai reçus. Je vous enverai ma souscription pour un abonnement d’un an. Envoyezmoi toujours les journaux par avion. Texte repris dans : Patrice Emery Lumumba Une jeunesse non-conformiste
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Patrice Emery Lumumba s’explique
J’ai 35 ans. Je suis né dans le territoire de KataKokombe. C’est ainsi par exemple que mes parents sont des catholiques, ils se sont mariés religieusement à l’église. Nous sommes quatre enfants, tous de garçons. Nous avons été élevés dans la doctrine catholique, mais toutes mes études primaires je les ai fait chez les protestants.
J’ai souvent lutté contre l’injustice. J’ai été profondément éduqué dans la doctrine chrétienne, j’avais ce sentiment et mon père, ma mère m’ont toujours dit : « il ne faut pas être méchant, il faut toujours être bon envers les gens même quand on vous a frappé, il ne faut pas répondre », et alors je n’ai jamais compris dans ma vie pourquoi à l’école on nous enseignait toujours d’être bon, il faut la charité chrétienne, il faut l’amitié entre les hommes.
Comment on peut concilier l’instruction que l’Européen nous donnait à l’école, les principes de civilisation et de morale avec les actes que ces Européens commettaient vis-à-vis de la population noire. Et c’est en faisant cette observation au jour le jour, en comparant les principes qu’on nous enseignait, les actes que ceux qui nous enseignaient commettaient, je voyais chaque fois la contradiction.
C’est ainsi que j’ai commencé n’est ce pas à prendre de plus en plus conscience, alors j’ai commencé à étudier les révolutions à travers l’humanité, très souvent la révolution française, les causes qui ont été à la base de cette révolution, pourquoi ces gens se sont révoltés, pourquoi ils ont lutté pour la liberté, et j’ai compris que vraiment à travers toutes les révolutions, il y a un élément profond, c’est la lutte contre l’injustice, contre l’oppression.
à suivre...
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